ETUDE DU CHAMP LEXICAL DE LA DECENTRALISATION EN Français
Clarification conceptuelle conceptuel
Lexicologie Deux des disciples de Ferdinand de Saussure ont rassemblé leurs notes de cours, prises entre 1906 et 1911 et en ont fait, en son nom, une œuvre posthume intitulée Cours de linguistique générale parue en 1916. Le linguiste suisse a prôné dans son enseignement, l’autonomie de la « lexicologie ou science des mots » en l’excluant de la grammaire qui réunit « la morphologie et la syntaxe » en se plaçant dans une optique scientifique qu’il a inaugurée dans son ouvrage. Mais le mot est une notion complexe qui embarrasse toutes les disciplines linguistiques. Faire donc du mot un objet d’étude de la lexicologie que l’on désigne comme une science du lexique, mérite qu’on s’y attarde avec la clarification de certains concepts qui fondent sa nature même. 12 Ainsi, Igor A. Mel’cuk, Clas A. et Polguère, A., dans Introduction à la lexicologie explicative et combinatoire, définissent la lexicologie comme « une discipline théorique qui a pour objet l’étude générale du lexique » et soulignent que celle-ci comme les autres disciplines linguistiques ont « chacune pour objet une composante particulière de la langue ». Mais Alain Polguère soutient qu’ « il est même difficile de s’enfermer à l’intérieur d’une branche linguistique donnée, […], en particulier, la lexicologie qui n’est pas un domaine qu’on peut véritablement circonscrire ». L’ouverture de cette discipline favorise son incursion dans les autres domaines ou inversement. C’est ce qui fait que la lexicologie, contrairement aux autres domaines, est une discipline à la croisée des chemins. C’est cette dimension que tentent de prendre en charge les auteurs du dictionnaire linguistique qui considèrent que la « lexicologie est l’étude du lexique, du vocabulaire d’une langue dans ses relations avec les autres composantes de la linguistique, phonologique et surtout syntaxique, et avec les facteurs sociaux, culturels et psychologiques. La lexicologie, conçue comme étude scientifique d’une structure du lexique, est une discipline récente ». Paraissant au début indissociable au point d’être perçu comme des synonymes, lexicologie et lexicographie apparaissent pour la première fois dans l’encyclopédie en 1765. C’est dans l’enseignement de Ferdinand de Saussure que la lexicologie acquiert son autonomie en se désolidarisant de la grammaire pour prendre en charge l’étude des mots. Mais, en dépit de son statut de l’être primordial de la langue, le mot est une notion complexe, ambiguë et difficile à cerner pour ne pas dire impossible à délimiter avec concision. C’est ce qui fait dire à Alain Polguere que le terme mot est donc d’un usage dangereux en lexicologie et définit cette dernière en ces termes : « la lexicologie est une branche de la linguistique qui étudie les propriétés des unités lexicales de la langue, appelées lexies ». Cette définition qui propose « lexie » à la place du « mot »jugé problématique fait appel à la clarification d’autres notions qui fondent la nature de cette discipline. Champ lexical Dans l’étude générale du lexique, la notion de champ est destinée à un domaine spécifique dont on cherche à destiner ou à dégager la structure. Les deux notions de champ sémantique et de champ lexical, parfois utilisées indifféremment, sont un couple qui correspond généralement à un thème d’un texte. Lorsqu’on veut lever toute confusion en les distinguant, on réserve souvent le terme « champ sémantique » pour caractériser le fonctionnement propre à unité lexicale et celui de « champ lexical » pour décrire des relations entre plusieurs unités 13 lexicales. Si le champ lexical est largement perçu comme une réalisation lexicale d’un champ sémantique, ou comme un ensemble de mots qui se rattache à une même réalité, à un même domaine ou à une notion générique, il est, cependant, noté un dépassement dans la compréhension habituelle de cette notion. Ainsi donc, dans les définitions proposées par Mel’cuk et Al, le champ sémantique renvoie à « un ensemble de lexies qui ont une même composante sémantique identificatrice de champ ». Reprenant en d’autres termes cette définition, le Pr Modou Ndiaye, dans le cours de sémantique grammaticale, parle de « l’ensemble des mots qui, par leur sens propre, renvoient à un même domaine de la réalité ». Toujours, dans le même cours, Pr Ndiaye illustrera son propos en donnant l’exemple du champ sémantique des parties du corps, l’exemple qui a déboucher sur la définition du champ lexical d’in champ sémantique que Mel’cuk et Al appellent « l’ensemble des vocables dont les lexies de base appartiennent à ce champ sémantique. Bref, le champ lexical est constitué de tous les mots, quelle qu’en soit la catégorie grammaticale, qui renvoie à une même réalité, à une même idée. Dresser d’abord la liste des mots qui le constituent est l’une de deux étapes que comprend son étude. Ensuite, sa deuxième et dernière étape est l’interprétation des termes qui le composent en tenant compte de leurs relations les uns avec les autres comme le souligne Catherine FUCHS. En somme, Yves Reuter nous enseigne que l’étude des champs sémantiques comme celle des champs lexicaux est un moyen de prendre en compte le lexique et de saisir la production des sens. Champ sémantique Même si parfois la notion de « champ lexical » est abusivement assimilée à celle de « champ sémantique » et que Mel’Cuk et al (1995:32) parlent de « frontières mal démarquées » pour le champ sémantique, mais aussi d’ « appartenance multiple de lexèmes » et de « chevauchement des champs sémantiques », rien ne s’oppose cependant à envisager une ou des définitions du concept. Si Yves REUTER le désigne comme « l’ensemble des sens qu’un terme prend dans un texte », Alain Polguere lui, voit « un regroupement de lexies dont les sens ont en commun une composante particulier ». Selon Catherine FUCHS on peut appeler « champ sémantique l’aire couverte par la ou les significations d’un mot de la langue a un moment donné de son histoire, c’est à dire appréhendée en synchronie. Lorsque le mot est polysémique (c’est à dire possède plusieurs significations différentes mais apparentées), poursuit-elle, la description de 14 son champ sémantique doit rendre compte tout à la fois de la parenté de sens et des différences entre les significations du mot ». « L’étude des champs sémantiques comme celle des champs lexicaux est un moyen de prendre en compte le lexique et de saisir la production des sens » enseigne Yves REUTER. Lexème Dans le dictionnaire de linguistique, Le lexème est défini comme « l’unité de base du lexique, dans une opposition lexique/vocabulaire, où le lexique est mis en rapport avec la langue et le vocabulaire avec la parole. Selon les théories, cependant, le lexème sera assimilé au morphème (morphème lexical) ou à l’unité de signification (souvent supérieure au mot). Plus souvent, on cherchera à distinguer le morphème grammatical et le morphème lexical par des dénominations différentes. André Martinet propose le terme de monème pour designer l’unité significative de première articulation. Il suggère de distinguer lexème et morphème, le lexème trouvant sa place dans le lexique et morphème apparaissant dans la grammaire ». On peut ajouter la définition de Mel’Cuk et al qui disent que « le lexème est un mot pris dans une seule acception bien déterminée et munie de tous les renseignements qui spécifient totalement son comportement dans un texte ». Lexie « Elle est soit un lexème, soit un phrasème ». Cette assertion concise ci-contre de Mel’Cuk et al dans laquelle ils donnent deux variantes à « lexie » comme Alain Polguere d’ailleurs avec « locution » à la place de « phrasème », permet de supplanter donc le terme mot comme objet d’étude de la lexicologie. Locution ou phrasème Alain Poulguere nous apprend qu’une locution est une entité de la langue apparentée au lexème. C’est ce que Mel’Cuk et al dénomment une locution prise dans une seule acception bien déterminée et munie de tous les renseignements qui spécifient totalement son comportement dans un texte. Vocable Un vocable est un regroupement de lexies qui ont les deux caractéristiques suivantes : 1. Elles sont associées aux mêmes signifiants. 2. Elles présentent un lien sémantique évident. La sémantique A en croire Christian TOURATIER dans son livre, la sémantique et Catherine Kerbrat Orecchioni dans son article d’encyclopédie du même nom, la sémantique qui est « la science des significations » est inventé par Michel Bréal à la fin du XIX ièm siècle. « Il s’agit du féminin de l’adjectif grec sémantikos (qui signifie, qui indique)…. dérivé du verbe semano (« 1) marquer d’un signe, 2) signifier »), lui-même dérivé du nom sema « signe ». Ce féminin en quelque sorte substantivé par Bréal est mis, comme il le précise luimême, pour « semantike techne, la science des significations, du verbe semano « signifier », par opposition à la phonétique, la « science des sons ». Le mérite de Bréal d’avoir inventé et dressé la filiation de ce mot, n’a pu endiguer des oppositions à sa conception qui « se voudra synchronique [….] et immanente […] » lorsque se développera la sémantique structurale moderne théorisée dans le cours de linguiste générale parue en 1916. Toutefois ces oppositions et les formes qu’elles prendront ne viendront pas à bout de la sémantique qui se s’occupe du sens dans la linguistique générale. Ainsi Catherine K. Orecchioni rassure en ces termes : « pas de linguistique sans sémantique, si l’on définit celleci comme la discipline ayant pour objet la description du sens des mots, des phrases et des discours produits, en langue naturelle ». Sème Quant au dictionnaire de linguistique, « le sème est l’unité minimale de signification, non susceptible de réalisation indépendante, et donc toujours réalisée à l’intérieur d’une configuration sémantique. Sème est en fait synonyme des termes trait sémantique et composant sémantique. Il se rencontre, quoique non systématiquement, chez les linguistes qui pratiquent l’analyse componentielle ». Bernard Pottier, un des théoriciens de l’analyse de la signification des morphèmes en France cité par Christian TOURATIER dans la Sémantique désigne le sème comme « le trait distinctif d’un sémème, relativement à un petit ensemble de termes réellement disponibles et vraisemblablement utilisables chez le locuteur dans une circonstance donnée de communication ». 16 Sémème Dans l’analyse sémique, le sémème est l’unité qui a pour correspondance formel le lexème ; il est composé d’un faisceau de traits sémantique appelées sèmes (unité minimale de signification non susceptible de réalisation indépendante). Cette définition extraite du Dictionnaire de linguistique, est plus ou moins comparable à celle de Bernard Pottier (1963,8) cité par Christian Touratier dans La sémantique dont voici le libellé : Sémème est « l’ensemble des traits sémantiques pertinents (ou sèmes) entrant dans la définition de la substance d’un lexème ». Vocabulaire et lexique: Si Alain Polguère trouve que vocabulaire seul est ambigu et qu’il doit être mis en contraste avec lexique, Igor Melcuk lui, s’étonne du fait qu’ « on ne trouve pas de définition formelle rigoureuse de ces termes dans les manuels et les livres de référence dans le domaine de lexicologie et de la lexicographie (Igor Melcuk et AL, 18)». Pour éviter toute confusion pouvant parfois causer l’emploi de ces deux notions (lexique, vocabulaire) avec beaucoup de sens différents « sans aucune distinction nette entre les diverses acceptions » et l’utilisation des termes différents pour la même notion, force est de « proposer des DEFINITIONS PRESCRPITIVES qui stabilisent les usages les plus courants et les plus cohérents, en rejetant tous les autres ». C’est dans cette optique qu’Alain Polguère propose la définition suivante à la notion de lexique : « Le lexique d’une langue est l’entité théorique d’une langue qui correspond à l’ensemble des lexies de cette langue,90 ». Dans les définitions de lexique proposée par Josette Rey-Debove qui parle de « l’ensemble de morphèmes liés et des mots », par Melc’uk et al qui parlent de « l’ensemble de toutes les lexies de la langue L », comme d’ailleurs dans celle Polguère, l’idée de totalité, d’exhaustivité reste toujours constante. Quant à la notion de vocabulaire qu’on définit en l’opposant parfois à celle de lexique, elle renvoie à l’ensemble des mots effectivement employés par une personne, un auteur ou un groupe de personnes. Polguère qui utilise méthodiquement le terme de Vocabulaire d’un texte pour gommer toute ambiguïté au terme vocabulaire seul, y va lui aussi de sa propre définition : Le vocabulaire d’un individu est le sous ensemble du lexique d’une langue donnée contenant les lexies de cette langue que maitrise l’individu en question . Igor A. Mel’cuk/ André Clas / Alain Polguère, dans un livre qu’ils ont co publié reconnaissent deux sous ensemble du terme vocabulaire, « selon qu’il s’agit d’un individu / d’un (ensemble de) texte (s)/X ou d’un domaine X qui détermine le vocabulaire en question.( Igor A. Mel’cuk, 19) »
. Revue de littérature
En liant la lexicologie à la sémantique par la formule suivante : « c’est une partie de la sémantique », Christian Touratier (2000:17) dévoile en même temps l’objet de cette branche de la linguistique, à savoir « l’étude des sens des unités lexicales […] simples ou complexes qui appartiennent au lexique ou au vocabulaire d’une langue donnée ». Dans l’ouvrage ou sont extraits les propos ci-dessus, Touratier reprend graduellement trois définitions du mot sémantique en terminant par la plus complète qu’il tient de Tamba-Mecz (1988 :7) qui a cité P. Lerat (1983 : 3). Selon ce dernier donc « la sémantique est l’étude du sens des mots, des phrases et des énoncées ». Cette identité de vue de Touratier et de Lerat, apparemment de posture et d’époque différentes, semble associer deux disciplines distinctes de la linguistique et démontre une fois de plus les limites mal démarquées des domaines de ce vaste champ qui laisse des places souvent à l’équivoque en se consacrant tour à tour ou à la fois aux formes du langage et de leur contenu. C’est peut- être dans le but de discerner cette équivoque que Christian Touratier aborde doublement la sémantique comme l’intitulé de son ouvrage et comme discipline linguistique. Réparti en six chapitres au menu attrayant, qui vont des définitions liminaires au dernier chapitre en passant par la filiation exhaustive du terme sémantique, ce livre de chevet « s’adresse avant tout aux étudiants de premier cycle en lettres modernes et en sciences du langage [….], à tout étudiant qui n’a jamais fait de sémantique ou de lexicologie [….] et aussi aux linguistes et à ceux qui aiment la langue française ». A ce beau monde, Touratier proclame que l’étude du sens des unités lexicales ne se limite pas seulement aux lexèmes mais elle peut partir de ce que la rhétorique appelle figure de style ou tropes. La description du sens ne s’arrêtant pas seulement aux unités du lexique, il vise dans le chapitre 6 ; Sémantique du nom et du SN les « particularités sémantiques » des trois grandes catégories grammaticales en l’occurrence le nom, le verbe et l’adjectif tout en ayant à l’esprit que leur arrangement syntaxique crée du sens. Si selon Touratier la lexicologie est une partie de la sémantique, une partie de la lexicologie ne semble pas paraitre dans cet ouvrage, Olivier Soutet 8 souligne que : La sémantique en général et la sémantique lexicales en particulier sont des domaines au statut instable, à l’objet difficile à cerner et à la formalisation difficile ». Il fonde son constat sur le fait que « les unités lexicales présentent deux caractéristiques conjointes :a) elles sont en nombre théoriquement illimité du fait de la création permanente de mots (néologisme) ; b) il n’est pas rare que chacune d’elles offre plusieurs significations (phénomène de polysémie). La double caractérisation des unités lexicales soulevées par Olivier Soutet et la difficulté majeure qui en découle sont abondamment débattues dans Initiation à la lexicologie française : de la néologie aux dictionnaires de François GAUDIN et de Louis GUESPIN. Tous les chapitres traités dans cet ouvrage sont au même pied du point de vue importance et teneur en tant que support théorique d’un sujet qui aborde l’étude des champs lexicaux. Sur la quatrième page de couverture, les justifications pour ne pas dire des éloges, ne manquent pas. Excellente initiation à l’étude du vocabulaire du français, cet ouvrage propose une synthèse des principaux aspects théoriques de la lexicologie contemporaine, des dictionnaires de la langue française. L’approche linguistique du lexique s’ouvre sur la sémantique, la terminologie, la traduction, l’édition, l’évolution des pratiques lexicographiques. Les vocabulaires étant en prise directe sur des réalités sociales, la sociolinguistique tient également une large place. La lexicologie est, reconnaissons-le, une discipline carrefour dont le mot « l’unité centrale » du langage en est l’objet d’étude. Dans les chapitres 3 et 4 qui parlent de la lexicologie sous le point de vue de Saussure, des relations lexicales puis ceux des néologismes formels et sémantique, le mot est cerné de toute part. Parmi les champs lexicaux que l’on peut étudier, celui de décentralisation dans le contexte sénégalais, renvoie à des textes de nature différente. En tant que forme d’organisation administrative, la décentralisation se pratique et évolue à l’aide des décrets et des reformes. L’Etat, dans la même foulée, aménage des passerelles entre lui et les administrés de base pour une existence pacifique à travers des textes juridiques et législatifs largement expliqués par une vaste campagne de médiatisation au profit des acteurs de la décentralisation et des populations. D’un livre volumineux à un article de journal, la décentralisation n’échappe à aucun type d’écrit. Dans ce sens, des documents divers et variés ont été écrits et qui parlent de la décentralisation dans tous ses compartiments. C’est dans cet esprit que des textes ont été élaborés pour aider à la mise en œuvre de la décentralisation mais surtout à la formation des acteurs devant la conduire
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