Etude des Propriétés Stochastiques des Variables
Le survol des principales réformes qu’a connues le système financier Algérien depuis l’indépendance a démontré qu’un changement radical s’est opéré en matière de structure et de fonctions accomplies. Même si on juge que les réformes générales des années 1990 ont posé les fondations pour un système financier diversifié, concurrentiel et performant, on ne peut tout de même pas négliger ni les réformes antérieures telles que la Loi Bancaire de 1986, ni l’insuffisance de ces réformes et celles qui ont suivi (Nouvelle Loi Bancaire de 2003). Pendant ce temps là, on se demande du rôle joué par le système financier Algérien dans la promotion de l’activité économique, principalement les activités hors secteur pétrolier vu que ce dernier est immunisé par l’état contre toutes les conjonctures. Pour cela, nous allons procéder à une étude économétrique d’un ensemble de variables spécifiques dans le but de déceler les relations à court et à long terme entre la sphère financière et l’économie réelle. La première étape dans cette étude est de présenter les différents indicateurs à utiliser et la raison derrière ce choix, sachant qu’il faut prendre en considération le caractère rentier de l’économie Algérienne. Après une brève étude des corrélations entre les différentes variables, nous passerons à l’étude de leurs propriétés stochastiques, principalement leur stationnarité.
Présentation des Indicateurs Utilisés
Notre objectif à travers ce travail est d’étudier la relation entre le développement financier et la croissance économique en Algérie ; pour cela, nous avons choisi un nombre d’indicateurs qui sont les plus répandus dans la littérature théorique sur le sujet, qui correspondent au cas Algérien et dont les données sont disponibles pour la période de l’étude. Comme nous l’avons mentionné à maintes reprises dans la section précédente, le marché financier Algérien n’a pratiquement aucune importance dans le financement de l’économie, la valeur de la capitalisation boursière et le ratio du turnover en sont des preuves irréfutables. Dans ce cas, nos indicateurs du développement financier mesurent principalement l’importance du système bancaire, on y trouve : Le ratio de la monnaie et quasi-monnaie (M2) au PIB (LFINANCE)1 est incontestablement l’indicateur le plus utilisé dans ce domaine (Jung 1986 ; Berthélemy et Varoudakis 1996a, 1996b ; Arestis et Demetriades 1997 ; Bakhouche 2007). Ce ratio reflète la taille du système financier vis-à-vis de la taille globale de l’économie, autrement dit l’approfondissement financier. Suivant le raisonnement de Berthélemy et Varoudakis (1998), cet indicateur sera associé à une variable indicatrice REF qui essaye de capter le changement structurel lié aux grandes réformes des années 1990. Donc, la variable FINANCE sera remplacée par deux variables composées : i) FINANCE*(1-REF) qui reflète la taille du système financier en période de finance contrôlée, ii) FINANCE*REF qui reflète la taille du système financier en période de finance libéralisée.
Etude des Corrélations entre les Variables
Dans cette première étape de notre étude économétrique, nous allons procéder à une description de la relation entre les variables utilisées. Nous calculons les coefficients de corrélation simple entre les différentes variables du développement financier et les variables représentant la croissance économique, ainsi que leurs intervalles de confiance affirmant la fiabilité et la robustesse des coefficients obtenus.2 Un coefficient de corrélation simple entre deux variables, et , est calculé à partir de la formule suivante : Avec n : le nombre d’observations. 1 Même si le point de repère des réformes du système financier est la Loi sur la Monnaie et le Crédit de 1990, nous avons pris deux années de décalage dans la variable indicatrice pour permettre un certain délai pour l’application des réformes. 2 Bourbonnais R “Econométrie” Dunod, Paris, 9ème éd., 2015, p 9. Chapitre III. Le Développement Financier et la Croissance Economique en Algérie 136 La significativité de ce coefficient est vérifiée à travers un test de nullité du coefficient estimé . Soit : On calcule la statistique empirique : Si valeur lue dans la table de Student au seuil α à n − 2 degrés de liberté1 , nous rejetons l’hypothèse H0, le coefficient de corrélation est donc significativement différent de 0 ; dans le cas contraire, l’hypothèse d’un coefficient de corrélation nul est acceptée. Tableau 3.1 : Coefficients de corrélation simple entre indicateurs de la croissance économique et du développement financier Variables LPIB LPIBHP LFINANCE 0.202 0.315** (1.337) (2.151) LBANQUE -0.782*** -0.751*** (8.131) (7.371) LPRIVE 0.865*** 0.814*** (11.172) (9.082) Les valeurs entre parenthèses représentent les statistiques ***/**/* : coefficient de corrélation significatif à 1%, 5% et 10%. Le test des coefficients de corrélation simple ne peut pas être considéré comme concluant pour l’étude de la relation finance-croissance, mais il permet d’avoir une vue globale sur les différentes relations qu’on peut détailler par la suite. Les coefficients de corrélation simple détaillés dans le tableau 3.1 démontrent que : La croissance économique hors-hydrocarbure est positivement et significativement corrélée à la taille du système financier ; La croissance économique totale n’a pas de lien significatif avec la taille du système financier ; La croissance économique totale et hors-hydrocarbure sont négativement et significativement corrélées à la taille proportionnelle du système bancaire ; 1 Si le nombre d’observations n est supérieur à 30, on peut approximer la loi de Student par une loi normale, soit Chapitre III. Le Développement Financier et la Croissance Economique en Algérie 137 La croissance économique totale est hors-hydrocarbure sont positivement et significativement corrélée à la part des crédits bancaires octroyés au secteur privé.
Etude de la Stationnarité des Variables
La littérature théorique nous propose une diversité d’études sur la relation entre le développement financier et la croissance économique ; les méthodes utilisées diffèrent principalement selon l’échantillon utilisé et la disponibilité des données. Ce travail, comme nous l’avons déjà mentionné, vise à vérifier cette relation dans un seul pays, qui est l’Algérie durant la période entre 1970 et 2013. Les données utilisées sont donc en séries temporelles annuelles. Granger et Newbold (1974) attirent l’attention sur le risque d’autocorrélation des erreurs auxquels les modèles de régression conventionnels font face. Selon les auteurs, dans certains cas les tests traditionnels de significativité (Fisher par exemple) peuvent rejeter à tort l’hypothèse nulle alors qu’elle devrait être retenue. Pour remédier à ce risque, les propriétés stochastiques des séries chronologiques doivent être étudiées avant toute régression ; l’une des plus importantes propriétés est celle de la stationnarité des séries.1 On dit qu’une variable est stationnaire si elle satisfait aux caractéristiques suivantes : 2 * : la moyenne est constante et indépendante du temps ; * : la variance est finie et indépendante du temps ; * : la covariance est une fonction de et non pas de ou de . Pour vérifier la stationnarité des séries chronologiques, deux types de tests sont disponibles : la fonction d’autocorrélation simple et les tests de la racine unitair