ETUDE DES HYPERTHYROIDIES
Les indications
La maladie de Basedow Le traitement médical est toujours préféré en première intention. En effet, l’option médicale est largement majoritaire en Europe, contrairement aux États-Unis où cependant, elle se développe nettement ces dernières années. Toutefois, sa mise en place fait appel à un certain nombre de critères : 59 Le désir du patient ; L’âge du patient : sujet jeune et désire de procréation ; Le tableau clinique doit correspondre à la première poussée d’hyperthyroïdie ; le volume du goitre : le goitre doit être peu ou moyennement volumineux (stade I ou II de la classification de l’OMS 1992). L’intensité des signes d’hyperthyroïdie : le traitement médical est proposé lorsque l’hyperthyroïdie n’est pas sévère et non compliquée. Devant des complications, en particulier la cardiothyréose, le traitement radical s’impose après stabilisation médicale de l’hyperthyroïdie. L’observance : une mauvaise observance thérapeutique incite à la cure radicale. Les récidives et la prépondérance de facteurs psychoaffectifs.
Le traitement symptomatique
Le traitement symptomatique de la thyrotoxicose repose sur : Le repos, Les sédatifs, Les bêtabloqueurs. Ce traitement est maintenu jusqu’à régulation de la concentration des hormones thyroïdiennes libres par le traitement étiologique de l’hyperthyroïdie. 60 Une contraception efficace devra être proposée à la femme jeune en âge de reproduction afin de simplifier les modalités de traitement.
Les antithyroïdiens de synthèse
Le traitement de la maladie de Basedow par les ATS, comporte deux phases : Une phase d’attaque : elle vise à restaurer l’euthyroïdie. o Le Carbimazole est prescrit en première intention, à raison de 40mg/jour pendant 3 à 6 semaines. o Basedène, en cas d’intolérance au Carbimazole, à raison de 225mg à 300mg par jour [80]. o PTU, en cas de surcharge iodée, à raison de 400 à 600 mg/ jour pendant 3 à 6 semaines La posologie doit être adaptée à la clinique et aux dosages hormonaux réalisés, tous les 15 jours pendant cette période : Il faut une normalisation des taux de T3 et T4 et si possible de la TSH [78]. Cette phase d’attaque dure environ deux mois. A cette phase, le dosage de la T4 Libre ou de la T3 Libre (en cas d’hyperthyroïdie à T3) est à réaliser à partir de la quatrième semaine et pas avant. Une phase d’entretien : deux possibilités existent durant cette phase : o Maintien de fortes doses d’ATS (40mg) en association à un traitement de stabilisation avec de la L-thyroxine (L-T4) (par exemple 50µg à 100µg de L-T4) [56]. A débuter quand l’hyperthyroïdie est contrôlée (sur la T4L, la TSH servant uniquement à vérifier l’absence d’hypothyroïdie. Passage à 20 mg/j au bout de 4 à 6 semaines en association au Lévothyrox 50µg à 75µg/j. Contrôle T4L, TSH 4 à 6 semaines plus tard. o ATS seuls avec décroissance progressive : ATS (Néomercazole): 60mg/j Contrôle T4, TSH 4 à 6 semaines : diminution de 50% si T4L normale ou basse, même dose si T4L augmentée. Bilan hormonal tous les 2 mois avec adaptation des ATS (décroissance progressive). Aucun des deux traitements n’a montré une efficacité supérieure sur l’autre. [3] La durée optimale du traitement varie entre 18 et 24 mois pour la plus part des auteurs avec un arrêt progressif sur 2 mois [16]. Il n’existe cependant pas de durée exacte, car fonction de la maladie elle-même et de la réponse au traitement du malade. Toutefois, au terme du traitement, les ATS sont arrêtés et une surveillance clinique et hormonale est proposée au patient. La surveillance du traitement reposera sur les éléments : Cliniques: Poids, pouls, signes de thyrotoxicose, exophtalmie, goitre 62 Paracliniques: o Dosage T4 (TSH et T3 accessoirement car TSH reste longtemps abaissée) ; o NFS avant le début du traitement et 1 fois par semaine pendant les 2 premiers mois (l’arrêt du traitement est indiqué si agranulocytose et un changement d’ATS est possible si PNN < 1200) puis 1 fois par mois. Il existe un risque d’agranulocytose durant les 2 premiers mois. o Dosage des transaminases si le traitement se fait par le PTU. o Remettre au patient une ordonnance pour faire une NFS si fièvre ou angine.
L’iode radioactif
Il permet volontiers de prendre en charge un goitre modéré. Néanmoins, le traitement de la maladie de Basedow par l’iode radioactif est destiné selon certains auteurs aux sujets de plus de 40 ans. Aux USA, pour des raisons économiques, l’iode radioactif est souvent utilisé en première intention, quel que soit l’âge du patient.
Le traitement chirurgical
C’est le traitement des formes récidivantes chez des personnes de moins de 40 ans, hostiles à une reprise des ATS, désirant une guérison rapide ou ayant un désir de grossesse. Elle peut être indiquée d’emblée si le goitre est volumineux ou chez la femme enceinte. 63 Les patients doivent impérativement être opérés en euthyroïdie d’où la nécessité d’une préparation médicale soigneuse par les ATS [80] et la solution au Lugol (10 à 20 gouttes 3 fois par jour pendant 2 à 3 semaines ce qui permettrait de réduire le caractère vasculaire du goitre) [16]. L’intervention consiste en une thyroïdectomie totale [56] ou subtotale laissant en place un mur de parenchyme postérieur (3 à 4g). La guérison est rapide et les récidives sont rares (inférieures à 5%), mais dans 10 à 15% survient une hypothyroïdie nécessitant alors un traitement substitutif. Les risques sont l’hypocalcémie transitoire (20%), une Hypoparathyroïdie (10%), une paralysie récurrentielle (1 à 5%) ou un hématome cervical. [78] III-3.2 Les hyperthyroïdies par goitre nodulaire Leur traitement doit être radical. Il est soit chirurgical où par de l’iode radioactif. – Devant un adénome toxique, la prise en charge se fera après restauration de l’euthyroïdie par les ATS. Il s’agira soit d’une hémithyroïdectomie ou soit par l’iode radioactif. Lorsque les signes de thyrotoxicose sont modérés, le traitement par l’iode radioactif peut être utilisé en première intention. Il existe cependant un risque d’hypothyroïdie secondaire, du fait de l’irradiation métabolique de l’ensemble du parenchyme thyroïdien [16]. – Le traitement du goitre hétéromultinodulaire toxique se fait soit par thyroïdectomie subtotal ou total, ou soit par l’iode radioactif après préparation 64 systématique par les ATS. Le patient est exposé à un risque d’hypothyroïdie dans l’immédiat après la chirurgie, ou à distance après le traitement radio-isotopique
Les hyperthyroïdies iatrogènes
Les hyperthyroïdies par surcharges iodés
La thyrotoxicose fonctionnelle Le traitement consiste en : Arrêt de la source d’iode Certains préfèrent le PTU ou le Carbimazole (1) pendant 6 à 9 mois avec baisse de leur efficacité du fait du contenu intrathyroïdien en iode élevé. Perchlorate de potassium (800 mg/j) associé aux ATS permet une restauration de l’euthyroïdie en 1 ou 2 mois avec surveillance hématologique et néphrologique rigoureuse. Perchlorate de potassium et ATS si le contexte cardiologique ne permet pas l’arrêt de l’amiodarone. La thyrotoxicose lésionnelle : le traitement consiste en une corticothérapie à raison de 0,5 à 1 mg /kg/j L’essentiel est de pouvoir attendre l’élimination spontanée de l’iode, ce qui nécessite quelques semaines à plusieurs mois .
La thyrotoxicose factice
Le traitement repose sur : 65 Arrêt de l’apport exogène des hormones thyroïdiennes Bêtabloquants : ils sont parfois nécessaires pour limiter les signes cliniques de la thyrotoxicose Prise en charge psychiatrique : elle est de rigueur mais est difficile à faire accepter par le patient. La thyrotoxicose secondaire à l’interféron alpha Le traitement repose sur : L’arrêt de la substance en cause Les bêtabloquants si nécessaire Rarement, les ATS ou l’iode radioactif.
Les formes particulières
La femme enceinte
L’hyperthyroïdie chez la femme enceinte doit être prise en charge dans un milieu adapté et par un personnel spécialisé. Compte tenu des effets de l’hyperthyroïdie sur la grossesse, la contraception est recommandée chez toute femme en âge de procréer présentant cette symptomatologie. En raison des contre-indications multiples et des quelques précautions permettant de limiter les effets néfastes sur le fœtus, le choix thérapeutique est très limité. Ainsi, le PTU, parait être le traitement de choix chez la femme enceinte surtout pendant le premier trimestre en raison de son faible passage transplacentaire. 66 Exceptionnellement, un traitement chirurgical peut être envisagé au cours du second trimestre de grossesse devant une inefficacité des ATS (rare), une mauvaise adhérence au traitement par ATS ou une intolérance hématologique (agranulocytose) [56]. Une surveillance rapprochée de la mère (par 3 semaines) et de l’enfant est recommandée afin de limiter les risques de survenue d’hypothyroïdie fœtale ou de goitre fœtal par passage transplacentaire des ATS. A l’accouchement, une surveillance clinique et hormonale s’impose toujours contribuant ainsi à la détection d’une reprise évolutive. Une surveillance de l’enfant est nécessaire à la recherche d’une hypothyroïdie iatrogène ou d’une hyperthyroïdie néonatale.
La cardiothyréose
Son traitement repose essentiellement sur un retour le plus rapide à l’euthyroïdie. Il n’y a actuellement aucun traitement de l’hyperthyroïdie dont le délai d’efficacité soit inférieur à 2 semaines. Il faut donc préalablement traiter efficacement la cardiothyréose. Pour les troubles du rythme sans insuffisance cardiaque, les bétabloquants constituent le traitement de choix. S’ils ne permettent pas le retour en rythme sinusal après l’établissement de l’euthyroïdie, le recours à d’autres antiarythmiques au long cours ou à la cardioversion sera nécessaire. Le délai pour la cardioversion après le retour à l’euthyroïdie semble être d’au moins dix-sept 67 semaines. Les inhibiteurs calciques peuvent être indiqués et utilisés avec prudence en cas de contre-indication des bétabloquants. Le traitement de l’insuffisance cardiaque comprend les mesures habituelles de repos, de régime sans sel strict et l’utilisation de diurétiques et de vasodilatateurs. L’efficacité des digitaliques est diminuée car leur métabolisme est accéléré. Ils sont néanmoins utiles et devront être utilisés sous une surveillance stricte. L’association avec les bétabloquants est controversée, ces derniers étant contre indiqués en cas d’insuffisance cardiaque non compensée. L’incidence des complications thromboemboliques parfois faible dans d’autres études justifie un traitement anticoagulant, en particulier chez les patients ayant une valvulopathie mitrale ou une dilatation auriculaire. L’hyperthyroïdie est associée à une accélération du métabolisme des facteurs vitamine K dépendants. Les doses d’anticoagulants seront donc inférieures à celles utilisées chez le sujet euthyroïdien.
PREMIERE PARTIE : LA REVUE DE LA LITTERATURE |