Facteurs pronostiques influençant la survie globale :
Sur la cohorte des 40 patients, le suivi médian a été de 48 mois.
La survie globale des ADPpCCE à 2 ans est de 80% et à 5 ans de 63%.
La survie sans récidive à 2 ans est de 68% et à 5 ans de 54,3%.
Les courbes de survies significatives sont dans l’annexe 1
Parmi les critères significatifs :
Sur le critère de la survie globale et sans récidive :
-L’ECE était un facteur de mauvais pronostic pour la survie globale p= 0,153*10-4 et la survie sans récidive p= 6,78*10-6
-Un statut OMS= 0 contre ceux >0 était un facteur de bon pronostic pour la survie globale p= 0,007 et la survie sans récidive p= 0,027
-Un curage ganglionnaire était un facteur de bon pronostic pour la survie globale p= 0,03 et la survie sans récidive p= 0,034
-L’exérèse complète des adénopathies lors du curage était un facteur de bon pronostic pour la survie globale p= 9,78*10-6, et la survie sans récidive p= 0,002
Sur le critère de la survie globale uniquement : deux autres critères ressortaient comme des significatifs:
L’envahissement de plus de 2 ganglions dans le curage étaient de mauvais pronostic p= 0,047 L’aire V envahie, constituait à un facteur de mauvais pronostic p= 0,005
Parmi les critères non significatifs :
Les autres critères avaient tendance à être des facteurs de mauvais pronostic en survie globale et sans récidive :
-le tabagisme actif ou sevré comparé à ceux qui n’avaient jamais fumé (p=0,165 et p=0,089) -une consommation alcoolique active ou sevrée comparée aux buveurs à ceux qui ne consommaient pas d’alcool (p=0,571 et p=0,427) -le sexe masculin (p=0,706 et p=0,66)
-une ADP nécrotique (p=0,432 et p= 0,218)
-les embols vasculaires (p=0,36 et p= 0,453)
-les engainement périnerveux, (p=0,623 et p= 0,371)
-une rupture capsulaire (p=0,322 et p= 0,256)
-un traitement interrompu ou incomplet. (p=0,31 et p= 0,691)
De façon non significative : un meilleur pronostic était constaté pour le groupe d’âge moyen (55-60ans), puis les patients très jeunes (<55ans), puis les patients âgés (>60ans) (p=0,16 et p=0,656).
Nous ne pouvons tirer aucune conclusion sur certains critères non significatifs, et avec des effets contradictoires sur la survie globale et sans récidive :
-le caractère uni ou bilatéral de l’amygdalectomie : (p=0,44 et p=0,329).
-le BMI du patient (p=0,436 et p=0,715).
– la différentiation anatomopathologique de la tumeur (bien, moyennement ou peu différentiée)
Comparaison de la 7ieme et 8ieme classification TNM :
Répartition du stade ganglionnaire selon la 7ieme TNM : 26 patients N2 (65%) >10 patients N1 (25%)> 4 patients N3 (10%)
La distribution du statut « N » des patients était modifiée : Cette 8ieme TNM a augmentée la discrimination des patients classés initialement N2 : vers le groupe N3 et N1.
Comparaison de la survie des groupes N1 N2 N3 en fonction de la 7ieme et 8ieme TNM :
Pour la 8ieme TNM la survie globale et sans récidive des patients classés N1> patients classés
N2 > patients classés N3.
Pour la 7ieme TNM cela est également vrai pour la survie sans récidive, mais pas pour la surgie globale où il existait une mauvaise correspondance entre le stade ganglionnaire et la survie des patients : la survie des malades classés N1> patients classés N3> patients classés N2.
D’après l’étude des courbes de la survie globale :
La 7ieme classification était corrélée à la survie de façon significative p=0,037. La 8ieme TNM était légèrement plus significative p=0,035.
D’après l’étude des courbes de la survie sans récidive :
La 7ieme classification était corrélée à la survie sans récidive de façon significative p=0,005, pour la 8ieme TNM la différence de survie devient encore plus significative p=0,001.
Ainsi la 8ieme TNM est plus discriminante pour la survie globale et sans récidive que la 7ieme TNM.
Figure 8: survie globale en fonction du stade N pour la 7ieme TNM.
Les patients classés N3 ont une meilleure survie globale que les patients classés N2.
Les 40 patients avec une ADPpCCE ont eu les traitements suivants :
-2 patients (5%) ont eu seulement un curage ganglionnaire. Ils étaient classés selon la 7ieme et 8ieme TNM : N2 et ont refusé le traitement adjuvant.
-10 patients (25%) ont eu un curage sur suivi d’une radiothérapie.
-24 patients (60%) ont bénéficié d’un curage puis d’une radiochimiothérapie adjuvante. -3 patients (8%) ont eu une radiochimiothérapie sans curage préalable. Il s’agissait majoritairement de patient dont le stade ganglionnaire ou l’état général contre indiquait la réalisation d’un curage.
-1 patient (3%) n’a eu aucun traitement, suite à un refus de soin.
-Aucun patient n’a eu de la chimiothérapie seule.
Dans le sous groupe des 12 patients avec une ECE :
Les 12 patients ont tous eu une chimiothérapie adjuvante. Il s’agissait principalement de Cisplatine.
Sur les 40 patients inclus, à la fin de l’étude :
-11 patients (28%) étaient décédés,
– 5 patients (13%) était vivant mais en progression ganglionnaire, -24 patients (60%) patients étaient vivants contrôlés vivant en progresssion 13% décédé 27% vivant controlé 60%
Figure 12: représentation de la distribution du statut des 40 patients avec une adénopathie prévalente cervicale d’un carcinome épidermoide à la fin de l’étude.
Parmi les 5 ADPpcCE considérées en progression:
4 patients (80%) ont récidivé sur N, 1 patient a présenté une métastase (10%).
Parmi les 36 curages réalisés lors de la prise en charge :
-9 patients ont eu un curage radical
-1 patient un curage radical modifié type I
-3 patients un curage radical modifié type II
-23 patients un curage radical modifié type III
Discussion
Notre étude retrouve une population d’ADPpCCE dont les caractéristiques sont proches de celles décrites dans la littérature. Nous n’avons pas montré de différence significative entre les patients avec une ADPpCCE p16+ et p16-. La 8ieme TNM est plus discriminative que la 7ieme TNM sur la survie globale (respectivement p=0,035 contre p=0,037) et sans récidive (respectivement p=0,001 contre p=0,005).
Les facteurs pronostiques individualisés étaient principalement : l’ECE, le statut OMS, la réalisation d’un curage ganglionnaire, l’exérèse complète des adénopathies lors du curage.
La cohorte de 40 patients de notre étude semblait représentative des ADPpCCE, en effet historiquement cette population est de sexe masculin dans 80% des cas (2), 83% au CHU. L’âge moyen varie de 55 à 65 ans (2) il est de 59,7 ans pour notre étude. Ces patients ont fréquemment des antécédents de consommation éthylo-tabagique ayant un effet carcinogène synergique (2) c’était également le cas dans notre étude, respectivement 45% et 83% .
La médiane de taille des ADPpC dans la littérature est de 3,5 à 5 cm (3), elle était de 4cm dans notre cohorte.
Conformément à la littérature le secteur le plus envahi était le secteur II (2)
Le stade de la 7ieme TNM le plus fréquent était N2 conformément à la littérature (4).
Dans notre étude l’incidence des patients avec une ADPpCCE p16+ est de 32% chez les 25 patients testés, dans la littérature elle serait de 53% (1). Toutefois, contrairement à notre étude, la meta analyse de Troussier et al se fonde sur 2 études dont le statut HPV a été évalué avant les résultats des amygdalectomies ou biopsies, il existe donc dans ces cohortes des carcinomes de l’oropharynx HPV+, que nous avons éliminé de notre étude.
La différence entre ces deux chiffres également pourrait être liée à la perte d’information (15 patients de statut inconnu).
Les HPV sont des petits virus à ADN double brins. Il existe actuellement 130 types d’HPV. Les stéréotypes impliqués dans la cancérogénèse ORL qui sont majoritairement le 16 puis le 18, le 31 et le 33 (5).
L’incidence des carcinomes épidermoïdes HPV positifs, est en nette augmentation ces dix dernières années dans les pays développés (6) et varie en fonction des différentes régions étudiées selon un gradient géographique croissant du Sud au Nord où ils peuvent représenter plus de 80 % des cas (1).
Parmi le sous groupe des 25 patients dont le statut p16 est connu, le seul critère statistiquement différent entre les deux groupes p16+ et p16- est un stade ganglionnaire plus faible chez les p16+. Avec la 8ieme TNM les ADPpCCE p16+ étaient statistiquement plus classées N1 : 100% des p16+ contre 12% des p16- (p= 5,9*10-5). Cela est en lien avec la nouvelle 8ieme TNM qui classe les ADPpCCE p16+ selon la TNM de l’oropharynx. Le groupe cN1 de la 8ieme TNM regroupe désormais des ganglions multiples et de plus grande taille (8iemeTNM cN1 : adénopathie(s) unilatérale(s) de moins de 6cm / 7ieme TNM cN1: adénopathie unique ipsilatérale ≤ 3cm).
L’assimilation des ADPpCCE p16+ aux carcinomes de l’oropharynx p16+, est probablement secondaire à la découverte du rôle de l’HPV comme un marqueur orientant vers un primitif oropharyngé, les carcinomes épidermoïde de l’oropharynx p16+ constituant une unité épidémiologique à part ayant un bon pronostic (7).
Avec la 7ieme TNM le stade ganglionnaire des ADPpCCE p16 + était également plus faible comparé aux p16-, mais de façon non significative.
Conformément à la littérature les ADPpCCE p16 + avaient tendance à avoir moins d’ECE (4).
Les p16+ étaient plus souvent des hommes, conformément à la littérature (4).
Yasui et al étudiant une population de 109 patients retrouve qu’une adénopathie avec l’HPV étaient plus souvent kystique que solide ou nécrotique (33 versus 75%; OR, 6.2; 95% CI, 1.2– 45.7; p =0.03)(8) . Dans notre étude les ADPpCCE p16+ avaient plus d’ADP kystiques, mais ce résultat n’était pas significatif. En plus du faible effectif de notre cohorte cela peut être lié à un biais de description radiologique en fonction des opérateurs, et à la difficulté de différencier une petite adénopathie kystique de nécrotique.
Dans notre étude les p16+ avaient tendance à être plus âgés. Les résultats de la littérature sont variables à ce sujet .Selon l’étude rétrospective mono centrique de Kevin Motz et al étudiant 84 patients avec une ADPpCCE dont 79 patients avaient bénéficié de la recherche de HPV (par immunohistochimie (p16) ou hybridation in situ (ADN HPV)) : 90% étaient HPV+, il s’agissait majoritairement d’hommes 91% (p=0,005), jeunes avec une moyenne d’âge de 56,1 ans (p=0,002), comparé aux HPV-.
Le biais principal de cette étude concerne l’analyse des caractéristiques démographiques des patients : elle est réalisée avant que les patients bénéficient d’une amygdalectomie, biopsies ou résection des amygdales basilinguales. Hors 59,3% des primitifs ont été retrouvés, majoritairement dans l’oropharynx (56,3%) donc nous ne savons pas si les caractéristiques cliniques décrites correspondent à des ADPpCCE sans primitif ou à des carcinomes oropharyngés révélés par une ADPpC.
L’article de C.Fakhry et al rapporte que dans la population générale des Etats Unis la prévalence de l’infection à l’HPV dans la muqueuse orale est de 10% pour les hommes et de 4% pour les femmes. Les pics de d’âges où la prévalence est la plus forte seraient de 30–34 ans et (7.3%) et 60–64 ans (11.4%), sans que la cause soit connue.
Dans notre étude les p16 + consommaient moins d’alcool et étaient moins fumeurs. Cette tendance est également retrouvée chez les patients avec un cancer de l’oropharynx p16+ (9). Il existe peu de données épidémiologiques concernant strictement les patients avec une ADPpCCE, la majorité des articles dressent le profil de patients avec une ADPpCCE révélant une tumeur ultérieurement grâce aux biopsies ou amygdalectomies réalisées.
Dans notre étude, seuls 25% des patients avec une ADPpCCE p16+ n’avaient jamais fumé dans leur vie ce qui pourrait constituer un biais éventuel pour leur pronostic spécifique lié à l’HPV.