Étude de l’extrusion monovis de mélanges d’élastomères
RHEOLOGIE DES MELANGES D’ELASTOMERES
Avant d’être transformé en objet fini (pneumatique, courroie, tuyau, joint,…), on doit incorporer à l’élastomère (naturel ou synthétique), dans des mélangeurs, une ou plusieurs charges minérales (noir de carbone, silice), des plastifiants, des agents de mise en œuvre et d’autres ingrédients encore. Il faut savoir que chacun de ces ingrédients joue un rôle bien spécifique et représente souvent une masse supérieure ou égale à celle de l’élastomère de base. Cette opération conduit à un mélange hétérogène, complexe, avec des problèmes rhéologiques spécifiques. Le comportement de ces compositions est souvent difficile à établir à cause de la coexistence de différents phénomènes, tels que par exemple, le glissement à la paroi, les instabilités d’écoulement … Après une revue rapide de ce que peut être la rhéologie des élastomères dans la littérature, nous effectuerons le compte rendu de différentes campagnes d’essais rhéologiques aussi bien en rhéométrie plan-plan qu’en capillaire, effectuées au Cemef, mais aussi au Centre de Recherche d’Hutchinson. II. Synthèse Bibliographique : Comportement rhéologique des mélanges d’élastomères
Etude rhéologique des mélanges d’élastomères
Pour mesurer la viscosité, on se place le plus souvent dans des géométries simples où l’on peut connaître facilement le taux et la contrainte de cisaillement à la paroi. On distingue plusieurs types de viscosimètres que nous allons détailler par la suite.
Viscosimètres rotationnels
Le premier rhéomètre utilisé pour la caractérisation de mélanges d’élastomères fut développé par Mooney, [63] [64]. L’échantillon est introduit dans une chambre cylindrique, chauffée, dans laquelle un rotor tourne de façon continue à 2 tr/min (Figure I.1). Le couple résistant exercé par l’échantillon sur le rotor est mesuré. Les parois de la chambre et du rotor sont striées de façon à limiter un éventuel glissement à la paroi. Ce rhéomètre demeure très utilisé dans l’industrie du caoutchouc, comme instrument de contrôle. Figure I.1:Viscosimètre à disque de Mooney [63] Afin de pouvoir réaliser des essais à différentes vitesses de rotation, Mooney modifia son viscosimètre à disque [65], [66]. Chapitre I Page 26 Ce dispositif fut également amélioré par Wolstenholme [97], qui apporta un aménagement au niveau de l’asservissement en vitesse. Piper et Scott [71] substituèrent au rotor plat de Mooney un rotor bi-conique. L’avantage réside dans le fait que cette géométrie permet de rendre le taux de cisaillement uniforme dans l’échantillon, entre les plateaux supérieur et inférieur, contrairement à l’autre géométrie. Il est ainsi possible de calculer la viscosité réelle, et non moyenne pour un taux de cisaillement donné. Gleiβle [28], puis Ertong et Schümmer [22] ont utilisé un rhéomètre Weissenberg modifié. L’amélioration apportée à la géométrie plan-plan traditionnelle consiste en une bague fixée autour du plateau supérieur. Son but est d’éliminer toutes surfaces libres où des instabilités pourraient apparaître. La bague et le plateau supérieur n’étant pas reliés, seul le couple s’exerçant sur le plateau est mesuré. Turner et Moore [84] développent un viscosimètre à rotor, avec une géométrie bicônique, et une zone de Couette. Le matériau est préchauffé dans une chambre de transfert, puis injecté dans la cavité de mesure. Il est ainsi possible de contrôler la pression dans la chambre où s’effectue les mesures. De plus, l’obtention de courbes d’écoulement est rendue possible en faisant varier la vitesse de rotation du rotor, entre 1 et 40 tr/mn, ce qui correspond à des cisaillements de l’ordre de 40 s-1. Bennani [5] utilise un rhéomètre cône-plan en mode oscillatoire, pour caractériser des caoutchoucs. Cependant, ce procédé ne lui donne accès qu’ à de faibles cisaillements, de l’ordre de 0,1 à 10 s-1. De plus, cela nécessite l’utilisation d’un échantillon préformé. Enfin, la mesure est rendue délicate à faible température, le fluage de l’échantillon étant plus difficile.
Rhéomètre capillaire
Les instruments rotationnels donnent des taux de cisaillement nettement plus faibles que ceux rencontrés en mise en forme. C’est pourquoi, depuis Marzetti [55] et Dillon [17], les instruments d’extrusion, et notamment les rhéomètres capillaires, sont de plus en plus souvent utilisés pour la caractérisation des caoutchoucs. Figure I.2 : Schéma de principe du rhéomètre capillaire Rhéologie des mélanges d’élastomères Page 27 Un rhéomètre capillaire est constitué d’une chambre cylindrique thermorégulée où l’on introduit le matériaux, on le préchauffe, puis on le pousse à l’aide d’un piston à travers un capillaire comme le montre la Figure I.2. La pression est mesurée à l’aide d’un capteur situé en amont du capillaire, dans le fourreau. Il est ainsi possible de déterminer la viscosité en fonction du taux de cisaillement. Dans l’écoulement capillaire, la vitesse de cisaillement, tout comme la contrainte, varie entre 0 sur l’axe du capillaire jusqu’à une valeur maximale à la paroi. Pour calculer la viscosité, il faut nécessairement utiliser des contraintes et des vitesses de cisaillement au même point. On emploie donc couramment la vitesse de cisaillement p γ&
Mise en évidence du glissement à la paroi
Instruments d’extrusion
Une des hypothèses majeures dans le dépouillement des essais rhéologiques par instrument d’extrusion (capillaire ou filière plate) est que le produit adhère à la paroi de l’écoulement. Or, dans certaines conditions d’écoulement ou pour certains produits, notamment le caoutchouc, cette hypothèse peut être prise en défaut, ce qui conduit à des erreurs importantes dans l’interprétation des données. Pour mettre en évidence le glissement à la paroi, il existe deux grandes catégories de méthodes : – Celles qui jouent sur l’état de surface de l’outillage – Celles qui jouent sur la géométrie
Filières rainurées
La première méthode consiste à utiliser des filières de géométries identiques mais d’états de surface différents : une filière rainurée donnera des conditions de non glissement, alors qu’une filière lisse pourra permettre celui-ci. La comparaison des courbes d’écoulement permet alors de conclure : -Si les courbes contraintes de cisaillement en fonction du taux de cisaillement apparent sont confondues, il n’y a pas glissement. -Si les courbes sont distinctes, il y a glissement et la vitesse de glissement correspondante Vg peut être déduite de la différence entre les deux courbes à contraintes données : Chapitre I Page 30 () ( ) ( ) g a l a r R V , , 4 = γ& −γ& Equation I.16 τp a,r γ& a,l γ& a γ& rainurée lisse Figure I.5 : Détermination de la vitesse de glissement à la paroi par changement d’état de surface de l’outillage Cette technique a par exemple été utilisée par Chauffoureaux et al. [14], Knappe et Krumböck [41], ou Funatsu et Sato [27] sur des PVC, ou encore par Mourniac et al. [68] sur des mélanges SBR et Mezry [58] sur des mélanges d’EPDM. La difficulté majeure de cette technique concerne l’importance des rainures nécessaires pour assurer le non-glissement, et l’effet de ces rainures sur les paramètres géométriques utilisés dans l’interprétation des résultats. De plus, nous ne sommes pas certains d’avoir un non glissement mais simplement un glissement partiel sur la géométrie rainurée. Ce cas de figure nous donnerait effectivement des courbes de contraintes distinctes, mais ne permettrait pas d’aboutir à la vitesse de glissement réelle. De plus, si les rainures sont trop importantes, nous ne conservons pas la même géometrie…
Méthode de Mooney
La seconde méthode a été développée par Mooney [62] et est de loin la plus largement employée dans ce domaine. Elle repose sur le fait que les relations entre contrainte et taux de cisaillement en paroi sont indépendantes de la géométrie. Elle consiste à utiliser des capillaires de diamètres différents. Ici aussi, l’obtention de courbes contrainte en fonction du taux de cisaillement apparent superposées est le gage de conditions de non-glissement, alors que des courbes distinctes permettent de conclure à un glissement à la paroi (à la condition supplémentaire d’être rangées dans l’ordre de diamètres croissants, Figure I.6).
I. INTRODUCTION |