ETUDE DE L’ASPECT EPIDEMIOCLINIQUE DE LA PREECLAMPSIE
RAPPEL SUR LA CIRCULATION UTERO-PLACENTAIRE
Le sang maternel arrive des branches des artères utérines dans la chambre intervilleuse du placenta par les artères spiralées. Au cours de la grossesse normale, pendant le premier trimestre, ces artères spiralées perdent leur caractère musculaire après la colonisation trophoblastique des vaisseaux myométriaux survenant en deux vagues vers 13 et 18 semaines d’aménorrhée (SA). Par contre, dans les grossesses pathologiques (en particulier HTA), la persistance de la couche musculaire ou l’altération des artères spiralées fait persister une vasoconstriction utérine limitant le flux diastolique. (Figure 1) Figure 1 Schéma de la vascularisation utéro-placentaire
ADAPTATION CARDIOVASCULAIRE ET RENALE AU COURS DE LA GROSSESSE
Système cardiovasculaire
La principale modification hémodynamique induite par la grossesse est une augmentation du débit cardiaque. Le débit cardiaque augmente de 30 à 50 % au cours d’une grossesse normale. Le degré de modification est influencé par la position, l’augmentation de débit étant plus importante en décubitus latéral gauche. Inversement, la position debout peut diminuer le débit cardiaque de 25 à 30 % en raison de la compression de la veine cave inférieure par l’utérus gravide, ce qui entraîne une diminution substantielle du retour veineux jusqu’au cœur.
Adaptation rénale physiologique
La grossesse normale s’accompagne de modifications de l’hémodynamique générale et de la fonction rénale : on observe une augmentation du flux plasmatique rénal effectif en milieu de grossesse ; celui-ci chute en fin de grossesse. D’autre part, la concentration plasmatique d’acide urique diminue au cours de la grossesse par augmentation de l’excrétion fractionnelle. L’hyperuricémie est un signe prédictif de prééclampsie (seuil pathologique : > 280 µmol/j) La glycosurie est physiologique par augmentation de la charge filtrée de glucose. L’augmentation de la filtration glomérulaire touche aussi le calcium et malgré l’élévation de la réabsorption tubulaire, il existe une hypercalciurie. L’eau totale augmente de 7 à 8 litres sur l’ensemble de la grossesse et à moindre degré du volume interstitiel par hypoalbuminémie et diminution de la pression oncotique plasmatique.
MODIFICATIONS AU COURS DE LA PREECLAMPSIE
Dès 1939, Page avait mis en relation la prééclampsie et l’ischémie placentaire (figure 2). Dans tous les cas, la prééclampsie est la conséquence de l’ischémie placentaire. III.1. Les lésions placentaires de la prééclampsie Les lésions vasculaires du placenta se constituent beaucoup plus tôt, vers 12-18 SA et évoluent à bas bruit. Il en résulte un débit insuffisant et une ischémie du placenta. Les lésions placentaires ischémiques se présentent sous forme d’infarctus plus ou moins volumineux, de nécrose villositaire focale avec dépôts périvillositaires de fibrine. Toutefois, une nécrose excédant 30 à 50% du volume placentaire entraîne une ischémie significative. Les artères spiralées se transforment en effet en présence des cellules trophoblastiques en artères non contractiles, largement distendues et de large calibre. Les transformations physiologiques des artères utérines s’observent en deux vagues d’invasion vasculaire. La première commence au premier trimestre de la gestation, tandis que la seconde se poursuit au début du deuxième trimestre. C’est cette deuxième invasion vasculaire qui est absente chez les patientes présentant une prééclampsie. Figure 2 : Ischémie placentaire 4 III.2. Mécanismes fonctionnels : – augmentation de taille du placenta en cas de grossesse multiple, – placenta hydropique, – môle hydatiforme, – hydramnios par compression mécanique de l’aorte et de la veine cave inférieure, – bassin généralement rétréci. III.3. Les causes immunologiques L’histocompatibilité relative mère/père entraîne aussi l’ischémie placentaire : on voit surtout chez les multipares avec un nouveau père. L’antigène paternels et les antigènes maternels s’immunisent entre eux et l’anticorps produit comporte comme un anticorps bloquant et ce facteur bloquant est fortement diminué dans certain cas de prééclampsie.
FACTEURS DE RISQUES
I Tableau 1 : Facteurs de risques • Primiparité • Grossesses multiples • Hypertension artérielle • Môle hydatiforme • 1ère grossesse avec un nouveau partenaire • Bas niveau de vie socio-économique • Antécédent de trouble du fonctionnement des plaquettes • Affections auto-immunes • vies en altitude • Anomalie congénitale ou chromosomique du fœtus • Manque de consultation prénatale • Antécédent de prééclampsie chez la mère ou sœur • Insémination avec un donneur • Obésité • Anomalie des marqueurs sériques avec caryotype normal • Stress physique et psychologique et dépression • Intervalle long entre deux grossesses • Infection urinaire • Lupus érythémateux disséminés • Race noire • Collagénose • Thrombophilie et maladie thrombo-embolique antérieure 5 Remarques: Les femmes qui avaient des antécédents d’avortement ou de fausse couche risquaient moins la prééclampsie : plus le nombre de grossesses antérieures était élevé, moins élevé était le risque. Les femmes qui fumaient au cours de la grossesse ou qui avait cessé immédiatement avant de devenir enceintes avaient des taux d’incidence de prééclampsie beaucoup plus bas que celles qui n’avaient jamais fumé ou qui avaient cessé de fumer un an ou plus avant le début de la grossesse (19). V. MANIFESTATIONS CLINIQUES V.1. Hypertension artérielle (8) (11) (20) L’hypertension est généralement la manifestation clinique la plus précoce de la prééclampsie. La pression artérielle augmente au cours du second trimestre mais habituellement n’atteint les valeurs d’hypertension artérielle (140/90 mm Hg) que lors du 3ème trimestre souvent après la 37ème semaine de gestation. La précocité et l’importance de cette HTA sont des facteurs de mauvais pronostic. La mesure doit se faire au repos, la patiente est demi-assise ou assise, bien calée, bras dénudé, détend autrement dit à distance de l’examen gynécologique et après 5 minutes de repos. La mesure doit être contrôlée quelques heures plus tard. V.2. Œdème (8) (6) (9) La présence d’oedèmes est habituelle au cours d’une grossesse normale mais une prise de poids rapide et brutale survient plus généralement chez les femmes qui vont développer une prééclampsie (> 1kg / semaine). Les œdèmes touchent généralement les membres inférieurs et aussi la face ainsi que les mains donnant le signe de la bague. Ils sont mous, indolores prenant le godet. V.3. Protéinurie (20) (21) La présence d’une protéinurie ajoutée à l’hypertension permet de diagnostiquer non plus une hypertension gestationnelle mais une prééclampsie. La protéinurie doit être > 300 mg/j ou > ++ aux bandelettes urinaires. Dans certains cas, la protéinurie peut manquer initialement.
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