Etude de l’activité biologique de produits bruts et d’extraits de boscia senegalensis

L’ARACHIDE (Arachis hypogaea L.)

ORIGINE ET DESCRIPTION

L’arachide est originaire du continent américain. Elle déborde son aire d’origine et se retrouve dans tous les continents lorsque les étés chauds permettent à la plante de boucler son cycle malgré la latitude élevée (Schilling, 2003). Elle est introduite en Afrique par les Portugais et plus précisément au Sénégal vers la fin du 16 éme siècle (Sembène, 2000).
Arachis hypogaea appartient à la famille des Papilionacées (Fabaceae). Elle a été décrite par Linné en 1753. On la rencontre dans toute la zone intertropicale. C’est une légumineuse annuelle de 30 à 70 centimètres de haut avec une tige érigée ou rampante (figure1). Elle est rustique et résistante à la sécheresse avec un besoin en eau de 400 mm pour un cycle de 90 jours. Les feuilles sont alternes et quadrifoliées. Les fleurs papilionacées, jaunes ou orangées prennent naissance à l’aisselle des feuilles. Elles flétrissent rapidement. La base de l’ovaire fécondé s’allonge pour former un pédoncule appelé gynophore qui s’enfonce dans le sol où se forme le fruit (gousse) (Schilling, 2003). La gousse est composée d’une coque indéhiscente contenant 1 à 4 graines mais généralement 2. Ses fruits sont appelés cacahouètes ou pistaches de terre dans les pays francophones, peanuts aux Etats Unis et au Royaume Unis, mani en Espagne et amendoim au Portugal.

PLANTES HOTES ET REPARTITION

C. serratus serait originaire de l’Afrique et se développe au Sénégal dans les gousses et graines de plusieurs légumineuses sauvages appartenant de la famille des Caesalpinaceae et aux genres Piliostigma, Bauhinia, Cassia, (Prevett, 1967). Avec une phénologie non identique, ce sont des légumineuses arborescentes relativement communes dans le bassin arachidier. Selon Sembène (2000), elles fleurissent d’août en octobre et les gousses mûrissent au début de la saison sèche entre novembre-décembre. Ces Caesalpiniaceae sauvages restent infestées d’une année sur l’autre, malgré l’absence parfois de 3 à 5 mois de toute gousse sur les arbres durant la saison des pluies excepté Bauhinia rufescens qui fructifie toute l’année (Ndiaye, 1991). La présence de plante hôte stimule l’ovogenèse et la ponte des femelles (Delobel, 1989). Les mâles et les femelles sont sensibles aux odeurs des gousses et des feuilles de ces plantes hôtes auxquels ils réagissent par un comportement locomoteur orienté contrairement à une plante non-hôte utilisée empiriquement pour protéger les stocks, Boscia senegalensis (Chaibou, 1993).
C’est au Sénégal, en 1916, puis à Java en 1917 que la bruche a été signalée pour la première fois sur l’arachide (Delobel et al.,1995). Mais cette bruche n’attaque pas l’arachide dans toutes les zones où elles coexistent (Delobel & Matokot, 1991). D’ailleurs, Gueye décrit en 2000 une zone au Nord du Sénégal (Kas-kas) où l’arachide n’est pas infestée par la bruche malgré l’abondance de plantes hôtes.
Actuellement, C. serratus se rencontre dans presque toute l’Afrique, en particulier en zone de savane arborée (Mauritanie, Sénégal, Mali, Guinée Bissau, Cote d’ Ivoire, Ghana, Burkina Fasso, Nigeria, Niger, Tchad, Cameroun, Soudan, Ethiopie, Kenya, Zaïre, Tanzanie, Zimbabwe). Il se retrouve aussi dans la plupart des régions chaudes du globe où les conditions climatiques favorisent sa multiplication. Son expansion paraît liée au commerce du tamarin (Credland, 1990) et à l’exportation de l’arachide. Il est, par exemple, apparu au Congo vers 1970, après l’importation de semences provenant du Sénégal (Sembène & Delobel, 1998).

MORPHOLOGIE ET BIOLOGIE

L’adulte mesure environ 6 à 8 mm de long sur 3 à 5 mm de large avec une couleur brune à mordoré et moucheté de noir. La cuticule est de couleur marron, plus ou moins densément marquée de noir. Certains individus sont entièrement noirs. Le corps est ovale allongé et il possède des fémurs postérieurs très fortement dilatés avec des dents au bord ventral. La tête est petite et les yeux gros et proéminents (Delobel & Tran, 1993). Le pygidium est incurvé chez le mâle et visible chez la femelle en vue dorsale (figure 2). C. serratus est un insecte à activité nocturne : prise de nourriture, accouplement, ponte. Le jour, il se cache dans les interstices ou crevasses d’écorce ou même regagne le cocon. Il se nourrit de pollen, de liquides sucrés et d’eau. La longévité des adultes est variable mais l’apport d’eau accroît la survie des adultes. La longévité moyenne des femelles est de 3 mois en présence de nourriture (Delobel et al., 2000).

METHODES DE LUTTE

Pour lutter contre la bruche de l’arachide, différentes méthodes sont utilisées: des méthodes physiques, chimiques et biologiques.

LA LUTTE PHYSIQUE

Deux principales méthodes de lutte physique sont distinguées : les méthodes passives et les méthodes actives.
Les méthodes passives concernent les modifications de l’environnement et elles ont un caractère plus durable. Traditionnellement, les paysans utilisaient des matières minérales pour la protection de leur culture. Ce procédé ancien et universel, toujours en usage en Afrique semble prometteur au niveau de petits stocks. Des essais réalisés avec l’atttapulgite à raison de 5g/kg, montrent une excellente efficacité (Ndiaye, 1991). Ces substances abrasives (sable, cendres, chaux) ont pour effet de rayer la cuticule et de blesser les articulations (Appert, 1985). En effet, le sable et la cendre ont respectivement des effets dissuasifs et létaux sur C. serratus (Luca, 1979) et entraînent la déshydratation des insectes (Cruz et al., 1988). La conservation par le froid, parfois utilisée, ne peut être envisagée que dans certains cas exceptionnels (arachides de bouches, stocks de semences de sécurité) du fait de son coût très élevé. Le stockage hermétique est très efficace mais peu pratique et entraîne une diminution de la faculté germinative des semences dans une forte proportion (Ndiaye, 1991).
Les méthodes actives utilisent de l’énergie au moment de l’application pour détruire, blesser, stresser ou éliminer les ravageurs des cultures. Elles peuvent avoir recours aux chocs thermiques (chaleur) ou mécaniques. L’exposition au soleil assure une mortalité des adultes et des larves de C. serratus fortement liée à la température (Sall, 1997). En plus, les insectes ne supportent pas la lumière raison pour laquelle dans les stocks, ils se cantonnent dans les zones sombres. Dans les pays développés, nous trouvons en plus, la lutte électromagnétique et la lutte pneumatique. La lutte électromagnétique nécessite l’utilisation de radiations électromagnétiques (micro-ondes, radiofréquences, infrarouge) et celle pneumatique crée des courants d’air qui délogent les insectes, lesquels meurent dans le transit des tuyaux par chocs mécaniques (Vincent & Panneton, 2001).

LA LUTTE BIOLOGIQUE

Cette méthode souvent hors de la portée des paysans, consiste à introduire dans le milieu de vie de la bruche un parasitoïde ou un microorganisme pathogène pour nuire son développement. Peu de choses sont connues sur les parasitoïdes aux différents stades de la bruche de l’arachide. A cause des difficultés d’identification de ceux-ci, on distingue deux types de parasitoïdes : ceux qui parasitent les œufs de C. serratus durant leur développement tel que Uscana caryedoni et ceux qui parasitent les larves et les nymphes comme Bracon sp. (Ophtalmobracon). Uscana caryedoni a de faibles potentialités comme agent de limitation des populations de C. serratus dans les stocks d’arachide (Delobel, 1989). Bracon (Ophtalmobracon) sp attaque fréquemment la bruche C. serratus. Cinq à neufs larves se développent aux dépends de larves ou de nymphes de C. serratus et construisent leur cocon à l’intérieur du cocon de C. serratus. Le taux de parasitisme affectant C. serratus n’a pas été déterminé précisément, mais se situe probablement entre 20 à 40% (Gagnepain & Raplus, 1989).
Cette lutte utilise aussi des biopesticides qui peuvent être à base de molécules de plantes (Vincent & Panneton, 2001).
Beaucoup d’études ont été menées pour démontrer l’activité biocide de divers végétaux contre les ravageurs des récoltes mais peu de travaux font référence à la bruche de l’arachide. Les insecticides d’origine végétale écartent souvent les problèmes associés aux produits chimiques de synthèse (Jackai, 1993). La flore africaine est riche en plantes possédant des propriétés ovicides, larvicides et adulticides qui sont exploitées sous diverses formes par les paysans. A partir de publications et de communications à des colloques des membres du Réseau Africain de Recherche sur les Bruches (RE. A. R. B), quarante quatre espèces appartenant à trente trois genres regroupés en quinze familles ont été recensées pour leurs effets insecticides sur les formes externes (œufs et adultes) et les formes internes (larves et nymphes) de différentes espèces de Bruchidae. Nous pouvons citer Ocimum bacilicum L. et Hyptis spicigera Lam. (Lamiaceae); Citrus lemon (L.) Burm. F. (Rutaceae); Eucalytus citriodora Hook. (Myrtaceae); Lantana camara L. (Verbenaceae); Pipper guineense Shum. & Thonn. (Piperaceae); Azadiracta indica A. Juss (Meliaceae), Boscia senegalensis (Pers.) Lam ex Poirs (Capparaceae), Allium sativum L. (Liliaceae).

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UTILISATIONS ET IMPORTANCES

Des études faites au Sénégal et dans la zone sahélienne révèlent des qualités de Boscia senegalensis sur les plans alimentaires, pharmacologiques et fourragères.
Les fruits sont consommés comme nourriture de subsistance dans beaucoup de régions (Salih, et al.,1991 in Seck 1994). Ils peuvent être conservés 2 à 3 ans après séchage. Au Sénégal, les graines cuites sont consommées comme haricots. A Thiès, les vendeuses de fruits sont membres de projets financés par l’état. Elles achètent le sac de 50 kg de fruits séchés à 12500 FCFA pour les revendre après préparation à 25 FCFA les 3 cuillerées à soupe. En Mauritanie, le fruit est bouilli comme un légume de même qu’au Niger où les fruits sont consommés sous forme de bouillies (purgatif) ou crus.
Au Sénégal, les racines, les écorces et les fruits de B. senegalensis employés seuls ou en association avec d’autres plantes ont une réputation d’anti-entéralgie (Kerharo & Adam, 1974). Les racines, les écorces et les feuilles traitent des douleurs d’estomac et intestinaux (Burkill 1985 ; Booth & Wickens 1988), des maladies oculaires, la bilharziose et certaines maladies mentales (Coulibaly, 1993). Les fruits cuits sont utilisés comme parasiticide. Les feuilles récoltées le matin, séchées au soleil puis trempées dans du lait avec une pincée de sel soulagent rapidement les maux de ventre sans purger. L’infusion des feuilles est utilisée au Nord du Nigeria de même que les fruits pour le traitement médicinal de la syphilis. Les feuilles séchées sont aussi employées comme encens pour le traitement de l’hémorroïde (Burkill, 1985 ; Booth & Wickens, 1988).
Les fruits sont consommés par les animaux à la fin de la saison sèche et au début de la saison des pluies (Baumer, 1981 ; Booth & Wickens, 1988). Les feuilles ne sont généralement pas agréables au goût (Burkill, 1985 ; Booth & Wickens, 1988) mais le bout des jeunes pousses est spécialement dévoré par les moutons et les chèvres (Maydell, 1983 ; Booth & Wickens, 1988). Dans certaines régions très sèches du nord du Sénégal où B. senegalensis est devenue l’espèce dominante de la strate arbustive, les feuilles sont paradoxalement appétées par le bétail (Seck, 2001). Des essais alimentaires menés à l’ISRA sur des ovins nous révèlent une consommation de 272 ±18.6 g pour une ration de 300g de feuilles de B. senegalensis par animal et par jour. Ces résultats ont permis d’apprécier le potentiel alimentaire de feuilles de B. senegalensis et leur aptitude à rehausser la valeur nutritive du régime des ovins ((Fall (non publié) in Samba et al., 2003). Au Niger, les feuilles servent à déparasiter les chameaux (Coulibaly, 1993).

ACTIVITE BIOLOGIQUE

Les Capparaceae sont caractérisées par la coexistence d’alcaloïdes et d’hétérosides soufrés (glucosides, qualifiés de glucosinolates). Les alcaloïdes ont des effets irritants sur la structure et le fonctionnement de la cellule. Les composés soufrés sont très toxiques pour de nombreuses espèces d’insectes (Thibout & Auger, 1997) et ils agissent au niveau du système nerveux.
Ainsi, plusieurs auteurs ont démontré l’activité biologique de B. senegalensis sur différents insectes Alzouma & Boubacar (1985); Seck et al (1993); Mboop & Diop (1994); Seck et al (1996);. Les résultats de ces travaux montrent que, après une phase d’agitation, les bruches entrent en léthargie et meurent dans les 24 heures qui suivent le traitement.
En effet, l’effet fumigant de Boscia senegalensis sur Callosobruchus maculatus (bruche du niébé) a été démontré par Seck (1994). Les feuilles fraîches broyées mélangées avec des graines de niébé à la concentration de 4% entraînent une mortalité de 100% des bruches, dans un délai de 24 h. Les fruits frais broyés à 2 % diminuent l’émergence de 95% et réduisent les dégâts de 93% par rapport au témoin non traité. La toxicité de B. senegalensis se traduit par un état de choc préalable à une mort certaine des adultes de C. maculatus. Le stockage en milieu hermétique des graines de niébé en combinaison de fruits frais de B. senegalensis à 1,2 g/l réduit aussi l’émergence de la bruche. Par ailleurs, l’application d’une dose de 2,4 g/l inhibe toute production d’une nouvelle génération de C. maculatus et assure une conservation parfaite de graines de niébé articiellement infestées (Seck et al., 1996).
L’extrait acétonique de fruits a montré aussi un puissant effet fumigant sur certains insectes des stocks (Seck et al., 1993) dont Prostephanus truncatus, Sitophilus zeamais (charançon de maïs) et C. maculatus. Cet extrait acétonique provoque une diminution significative des adultes de ces ravageurs (Seck et al.,1993)
L’étude de la fraction volatile extraite des feuilles de B. senegalensis par entraînement à la vapeur permet de mettre en évidence le méthyle isothiocyanate qui est en fait la substance bioactive de la plante (Seck et al.,1993; Lognay et al., 1994). Cette molécule soufrée est issue de la dégradation enzymatique du glucosinolate. Le glucosinolate, précurseur de cette molécule est le méthyle glucosinolate communément appelée glucocaparine (Baulard, 1999)

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