L’actionnement électrostatique
Ce type d’actionnement est utilisé dans les dispositifs MEMS tels qu’interrupteurs, résonateurs, miroirs,…
Ce paragraphe a pour but de donner les phénomènes mis en jeu dans cet actionnement ainsi que quelques exemples de structures réalisées et mettant en œuvre cet actionnement.
Phénomènes physiques
Une structure mettant en œuvre un actionnement électrostatique est composée de deux électrodes, une fixe et une mobile. En appliquant un champ électrique entre ces deux électrodes (par le biais d’une différence de potentiel), l’électrode mobile est attirée vers l’électrode fixe. La zone de déplacement stable est limitée car il existe un seuil appelé « tension de seuil » à partir duquel l’électrode mobile vient se coller brutalement sur l’électrode fixe. Cette limite peut être une cause de défaillance, comme dans les miroirs électrostatiques, mais aussi un phénomène désiré, comme dans les interrupteurs. Enfin, lorsque l’on n’a pas dépassé la tension de seuil et lorsque la tension d’actionnement est coupée, l’électrode mobile retourne à sa position initiale par la seule force de sa rigidité mécanique.
Pour illustrer l’existence de la « tension de seuil », prenons l’exemple d’un miroir électrostatique.
Conclusion
A travers la description de ces structures à base d’actionnement électrostatique, nous avons pu mettre en évidence qu’il est difficile d’envisager des études de fiabilité sur de telles structures. En effet, elles mettent en jeu des mécanismes de défaillance très complexes et nombreux. De plus, les tests de fonctionnement de ces structures qui sont nécessaires pour pouvoir observer les défaillances, sont très contraignants soit par les difficultés à observer le mouvement (car perpendiculaire au substrat ou bien de trop faible amplitude) soit par la dépendance vis-à-vis des conditions de test (cas des moteurs).
Nous allons donc présenter un autre type d’actionnement dans la prochaine partie.
L’actionnement électrothermique
L’actionnement électrothermique a attiré tous les concepteurs de microsystèmes au fur et à mesure que les limitations des actionneurs électrostatiques ont été rencontrées. En effet, les actionneurs électrothermiques présentent l’intérêt de développer un déplacement et une force plus importants que les actionneurs électrostatiques tout enprenant moins de place sur les wafers. De plus, les actionneurs électrothermiques en polysilicium peuvent fonctionner grâce à des régimes de courant ou tension compatibles avec les circuits électroniques CMOS intégrés classiques. Tous ces avantages permettent une utilisation des actionneurs électrothermiques dans des micro-pinces ou des moteurs pas à pas [Comtois1995] .
Les actionneurs en forme de U
Ces actionneurs, comme leur nom l’indique, sont en forme de U et c’est en se basant sur une différence de géométrie que l’on crée un déséquilibre dans les dilatations thermiques entraînant un mouvement de l’ensemble de la structure.
Le premier exemple d’actionneur de ce genre a été utilisé pour développer les phénomènes physiques liés à l’actionnement électrothermique. Il est donc représenté dans la Figure 15 et est constitué d’un bras froid large et d’un bras chaud plus fin. La circulation d’un courant dans cette structure entraîne un échauffement par effet Joule. Mais comme les bras n’ont pas la même géométrie, on crée une différence de densité de courant et par là-même une différence d’expansion thermique. Ce déséquilibre entraîne le mouvement représenté par la flèche.
Il existe également des actionneurs du même type mais comprenant deux bras chauds [Yan2002].
Modélisation des actionneurs électrothermiques
Après avoir présenté quelques généralités sur les microsystèmes et leur fabrication, nous allons aborder dans ce chapitre la modélisation des actionneurs électrothermiques. Cette étude pourra être utilisée au niveau de la conception de ces structures.
Deux types d’actionneurs seront abordés plus particulièrement. Dans un premier temps, il s’agira de modéliser le comportement de l’actionneur électrothermique en forme de U qui est l’actionneur le plus couramment rencontré. Nous pourrons ensuite profiter de cette étude pour l’adapter au cas de l’actionneur en chevron qui a été intégré dans les véhicules de test car il offre des caractéristiques de fonctionnement différentes.
Pour chacune de ces structures, nous traiterons dans l’ordre chronologique le principe de fonctionnement de la structure, les modélisations aux éléments finis, la modélisation analytique sous Matlab , un modèle réalisé avec le langage VHDL-AMS et enfin une conclusion contenant des courbes de corrélation entre ces différentes simulations et les tests.
Les techniques de modélisation des microsystèmes
La modélisation des microsystèmes est un problème important dans leur conception et tout particulièrement dans la méthodologie que nous cherchons à mettre en place à travers ces travaux. En effet, étant donné que le but de notre méthodologie est la mise en place d’un prototype virtuel, tout est basé sur la modélisation [Muratet2003] [Muratet2004].
Cependant, il n’existe pas encore à l’heure actuelle d’outil de modélisation prenant en compte le caractère physique et multidisciplinaire des microsystèmes. La modélisation de base se fait donc avec des outils de type analyse en éléments finis issus de la mécanique. Cela permet de modéliser les microsystèmes au niveau dispositif. La modélisation peut aussi se faire avec les outils de CAO de la microélectronique en utilisant les langages de description du matériel (VHDL-AMS) pour s’adapter au caractère multidisciplinaire des microsystèmes. A ceniveau de modélisation, on atteint un grand degré d’abstraction dans les phénomènes physiques mis en jeu.
Ces différentes façons d’aborder la modélisation des microsystèmes vont être décrites dans ce paragraphe avant de passer à leur application au cas des actionneurs électrothermiques.
La modélisation aux éléments finis
Dans le cadre de ces travaux de thèse, l’outil utilisé pour faire de la modélisation aux éléments finis est CoventorWare [Coventor2005] . Il s’agit d’un outil adaptant la méthode de modélisation aux éléments finis aux microsystèmes. En effet, les différentes étapes proposées par cet outil sont :
– Définition des masques de fabrication: cet outil présente l’intérêt de pouvoir récupérer les masques dans les fichiers gdsII. Ainsi, lorsque l’on souhaite modéliser des structures déjà fabriquées, les masques utilisés pour la fabrication peuvent être directement intégrés dans cet outil. Le logiciel fournit également un éditeur de layout pour dessiner les masques.
– Paramétrage de la technologie: il s’agit dans cette étape de décrire les étapes du procédé technologique qui peut contenir des dépôts, des gravures et des libérations. Les matériaux utilisés dans les procédés décrits peuvent être issus d’une base de données fournie par le logiciel, ou bien configurés par l’utilisateur en fournissant les paramètres technologiques tels que le module de Young, le coefficient d’expansion thermique,…
– Génération du modèle 3D: cette étape est entièrement gérée par le logiciel. Elle permet à partir des descriptions des masques en 2D et de la description du procédé qui fournit la troisième dimension, d’obtenir une représentation en trois dimensions du système. Il faut remarquer que dans les outils classiques de modélisation aux éléments finis tels que ANSYS ou Abaqus, la description du système doit être faite par l’utilisateur et directement en 3 dimensions.
– Maillage du domaine : Le logiciel propose différentes formes paramétrables pour le domaine élémentaire souvent liées au solveur choisi ultérieurement. Il est également possible d’intégrer un maillage réalisé avec un autre outil.
– Définition des conditions aux limites : Le logiciel permet de visualiser en 3D le domaine maillé et d’affecter des conditions aux limites à certaines zones choisies par l’utilisateur.
Cette étape est nécessaire avant de passer à l’étape de modélisation proprement dite.
– Choix du solveur et modélisation : une fois que le domaine est maillé et que les conditions aux limites sont définies, il s’agit de choisir le solveur adéquat en fonction du type de fonctionnement de la structure, de le paramétrer et de lancer la simulation. – Visualisation des résultats : elle se fait en 3D tout comme la visualisation du modèle 3D. Il est possible alors d’extraire des cartographies, des courbes ou des films.
La modélisation aux éléments finis permet donc d’obtenir une visualisation en 3D du comportement de la structure. Mais le problème principal de cette méthode de modélisation est le temps de calcul. En effet, pour certaines structures complexes, plusieurs heures de simulation sont nécessaires. Il n’est donc pas possible d’envisager des études paramétriques avec ce type de modélisation.
Pour donner une idée de l’influence du nombre de nœuds considérés pour faire une modélisation aux éléments finis, nous avons tracé la variation du déplacement et de la durée de la simulation en fonction du nombre de nœuds (cf. Figure 20).
La modélisation analytique
Pour résoudre ce problème de temps de calcul très long, des modélisations dites « analytiques » ont été aussi menées. Il s’agit ici, moyennant quelques simplifications, d’utiliser les équations mathématiques représentant le comportement des systèmes dans les domaines énergies physiques. On peut par exemple citer l’équation dela chaleur pour le comportement électrothermique,ou encore la loi de Hookepour le côté mécanique.
Pour résoudre ces équations (qui sont également utilisées dans les modélisations aux éléments finis), des outils de résolution mathématique, tels que Matlab ® , sont utilisés. Par rapport aux modélisations aux éléments finis, ce nouveau type de modélisation permet l’obtention beaucoup plus rapide des résultats.
Les deux types de modélisation qui viennent d’être présentés posent deux problèmes. Le premier vient du fait que les modèles créés ne sont pas portables, i.e. ils sont liés à un outil commercialisé. Le second problème est qu’il n’est pas possible de prendre en compte l’influence de l’électronique de commande dans le fonctionnement du système. Ordans le domaine de l’étude de la fiabilité des systèmes, l’électronique peut représenter une des origines importantes des défaillances d’un système.
La modélisation par équivalent électrique
Pour résoudre ces deux problèmes, on a eu tendance à utiliser des logiciels de simulation des circuits électriques. Dans un premier temps, il s’agissait de trouver un circuit électrique représentant le comportement physique désiré. Par exemple, on pouvait utiliser une résistance pour modéliser uneconduction thermique, ou encore utiliserune capacité pour l’effet d’amortissement. Dans ce cas, tous les logiciels de simulation des circuits électriques, comme Spice ® ou Saber ® , permettaient ce type de modélisation. Mais les modèles restaient liés à un outil commercialisé. C’est pour pallier à ce problème que le langage VHDL-AMS a été ensuite utilisé. En effet, c’est un langage portable qui permet non seulement de simuler des circuits électriques mais aussi de prendre en compte les phénomènes physiques, par exemple l’influence de la température sur le comportement d’une résistance.
Conclusion
Les moyens de modéliser les microsystèmes sont donc variés mais répondent chacun à un but précis. Toutes ces techniques ont été utilisées avant de trouver celle qui correspondait au mieux à notre besoin, à savoir rapidité (pour envisager des études paramétriques), compatibilité avec l’électronique (pour prendre en compte le côté électronique du système et nécessaire à son actionnement), possibilité de prendre en compte la fiabilité et d’intégrer le modèle dans un autre modèle plus complexe. C’est le langage VHDL-AMS qui répond à toutes ces exigences.
Dans la prochaine partie, nous aborderons l’application de ces différentes techniques de modélisation à deux types d’actionneur électrothermique : les actionneurs électrothermiques en forme de U et en chevron.
Table des matières
Introduction générale
1 La fiabilité des microsystèmes
1. Les microsystèmes
2. La fiabilité des microsystèmes
2 Problématique
1 Description
2 Problèmes
3 Solution proposée et démarche adoptée
Chapitre 1 État de l’art
1 Fiabilité des microsystèmes
1 Les différentes approches
1.1 Fiabilité d’un procédé technologique
1.2 Fiabilité d’un système complet
2 Les mécanismes de défaillance des microsystèmes
2.1. Les mécanismes de défaillance issus de la fabrication
2.2. Les mécanismes de défaillance induits par le fonctionnement
3. Conclusion
2 Notre méthodologie d’étude de la fiabilité
2 Les actionneurs microsystèmes
1. Les différents types d’actionnement dans les microsystèmes
2. L’actionnement électrostatique
2.1. Phénomènes physiques
2.2. Exemples de structures
2.2.1. Les miroirs électrostatiques
2.2.2. Les actionneurs électrostatiques
2.2.3. Les moteurs électrostatiques
2.3. Conclusion
3. L’actionnement électrothermique
3.1. Phénomènes physiques
3.2. Exemples de structures
3.2.1. Les actionneurs verticaux
3.2.2. Les actionneurs en forme de U
3.2.3. Les actionneurs en chevron
4. Conclusion
Chapitre 2 Modélisation des actionneurs électrothermiques
1 Les techniques de modélisation des microsystèmes
1. La modélisation aux éléments finis
2. La modélisation analytique
3. La modélisation par équivalent électrique
4. Conclusion
2 L’actionneur électrothermique en forme de U
1 Principe de fonctionnement de l’actionneur
2 Modélisation aux éléments finis
2.1 Construction du modèle
2.2 Les résultats de la modélisation
2.3 Exploitation du modèle
3 Modélisation analytique de l’actionneur
3.1. La modélisation électrothermique
3.1.1. Les équations mathématiques
3.1.2. Les résultats des simulations
3.2. La modélisation thermomécanique
3.2.1. La modélisation basée sur une méthode énergétique
3.2.2. Application à l’actionneur électrothermique en forme de U
3.2.3. Les résultats des simulations
4 Modélisation analytique de l’actionneur avec le langage VHDL-AMS
4.1. La modélisation électrothermique
4.1.1. Le circuit électrique équivalent
4.1.2. Les résultats des simulations
4.2. La modélisation thermomécanique
5 Etude de la sensibilité du modèle vis-à-vis des paramètres d’entrée du modèle
5.1 Définition
5.2 Phénomènes physiques liés à la variation des paramètres d’entrée du modèle
5.3 Sensibilités des différents paramètres d’entrée du modèle analytique de l’actionneur électrothermique en forme de U
5.3.1. Remarque sur le rapport h c l l = η
5.3.2. La longueur de l’actionneur,hl
5.3.3. La largeur du bras chaud,h w
5.3.4. La largeur du bras froid,c w
5.3.5. La largeur du bras flexion, f w
5.3.6. La largeur du bras de jonction, j w
5.3.7. L’espacement entre les deux bras, g
5.3.8. L’épaisseur de la couche structurelle, h
5.3.9. La distance entre l’actionneur et le substrat,vt
5.3.10. La résistivité du niveau structurel à température ambiante,0 ρ
5.3.11. Le coefficient d’expansion thermique, TCE
5.3.12. La conductivité thermique du niveau structurel,pk
5.3.13. La conductivité thermique du milieu ambiant,vk
5.4 Classement des paramètres en fonction de la sensibilité du modèle
5.5 Conclusion
Chapitre 3 Conception et caractérisation des véhicules de test
1 Introduction
2 Les technologies utilisées
1 La technologie polyMUMPS de Memscap
2 La technologie Epi-SOI deTRONIC’S Microsystems
3 Les véhicules de test
1 Le véhicule de test « Memscap2003 »
2 Le véhicule de test « Memscap2004 »
3 Le véhicule de test « MPW2004 »
4 Nomination des actionneurs électrothermiques
5 Conclusion
4 Les tests de caractérisation
1 Présentation du banc de test
2 Le déroulement des tests de caractérisation
3 Logiciel de traitement des images prises pendantles tests
3.1 Calcul de la taille du pixel
3.2 Extraction de la pointe de l’actionneur
3.3 Traitement sur les valeurs de l’intensité lumineuse de la pointe de l’actionneur
3.4 Calcul dudéplacement
3.5 Tracé du déplacement en fonction de l’indice des photos
5 Validation du modèle analytique de l’actionneur électrothermique en forme de U
1 Modélisation avec les valeurs classiques des paramètres géométriques ettechnologiques
2 Détermination des dimensions réelles des actionneurs et caractérisation de la surgravure
3 Détermination de la résistivité à température ambiante et du coefficient de variation de la résistivité avec la température
4 Evaluation du TCEet prise en compte de la variation du TCEavec la température
6 Etude sur l’influence de la pression sur le fonctionnement des actionneurs électrothermiques en
forme de U
7 Conclusion
Chapitre 5 Etude de la fiabilité des actionneurs électrothermiques en forme de U
1 Introduction
2 Particularités observéespendant les tests
1 Le « back bending »
2 Adhésion de l’actionneur avec le substrat
3 Flambement du bras chaud
3 Les tests de vieillissement
1 Le protocole de test et définition du critère de vieillissement
2 Les influences du vieillissement sur la structure et son comportement
3 Présentation des résultats
3.1 Le vieillissement est-il dépendant de la forme du signalappliqué ?
3.2 Le vieillissement dépend-il de l’épaisseur duniveau structurel choisi pour fabriquer la structure ?
4 Conseils de conception pour allongerla durée de vie de l’actionneur
4.1 Influence de la présence d’une couche de poly0 sous l’actionneur
4.2 Influence de la résistance à vide de l’actionneur
4 Modèle empirique du vieillissement
5 Signature électrique du vieillissement de l’actionneur électrothermique en forme de U ?
6 Conclusion
Conclusion générale et Perspectives
1 Conclusion
2 Principales perspectives
Bibliographie de l’auteur
Annexes
1. Code des modèles VHDL-AMS mis en place
1.1 Modèle du comportement électrothermique d’un élément discret
1.2 Modèle du comportement électrothermique d’un pont suspendu contenant 10 éléments discrets
1.3 Modèle complet de l’actionneur électrothermique en forme de U
2. Calcul de la flèche d’un actionneur électrothermique en forme de U soumis à l’accélération gravitationnelle
2. Calcul de la déflexion d’une poutre sous l’action d’une force extérieure