Étude comparée des rôles et des figures des héros de chansons de geste et des super-héros dans le cinéma

Étude  comparée des rôles et des figures des héros de chansons de geste et des super-héros dans le cinéma

Des héros à l’image de leur société

« Ce qui devrait nous inspirer – ou nous terrifier – n’est pas les pouvoirs ou le genre du héros, mais ce que les héros représentent de nos besoins, de nos peur, et de nos attitudes » , dit Danny Fingeroth pour légitimer sa démarche de sociologie des super-héros. L’image qu’elle renvoie de nous-même apparaît au centre de la représentation héroïque. Cette image ne semble pas cependant aussi monolithique qu’on pourrait le penser. Pour se représenter, une collectivité ne se contente pas de créer une figure idéale, solaire, immaculée, porteuse de valeurs irréprochables. Les héros épiques se voient rarement jouer le rôle de donneurs de leçons conforme en tous points au système axiologique de la société dont ils sont issus, car ils s’inscrivent dans un système global où l’on discute du bien-fondé de leurs valeurs. Tout comme l’obscurité est nécessaire pour révéler la vertu de la lumière, les ténèbres mettent en lumière la vertu des héros et les valeurs qu’ils défendent. C’est cette complexité des représentations héroïques qu’il va falloir analyser dans cette première partie. Il s’agit d’étudier par quels procédés ces dites représentations se forment, se rencontrent, se contrastent. En somme, comment la multiplicité des représentations qui composent une épopée – qui ne se réduit pas à la seule figure du héros, mais qui englobe avec lui ses alliés, ses ennemis et les figures anonymes – définit pour une société donnée, traversée elle aussi par les tensions propres à la pluralité, un système de valeurs qu’elle estime le meilleur pour elle. Je procèderai en me penchant sur deux modes de manifestation que l’on peut estimer caractéristiques des épopées. D’abord, j’observerai les structures des récits épiques. Centrés autour de l’irruption d’une menace dans une communauté en paix, voire paradisiaque, les récits de ce corpus présentent les moyens de refonder une collectivité après la crise, et peut-être grâce à la crise. Ceci m’amènera à me concentrer sur les représentations littéraires et cinématographiques des personnages, en me demandant de quelle manière ils s’inscrivent dans les codes sociaux. L’enjeu de ce chapitre sera de voir en quoi protagonistes et antagonistes canalisent les désirs collectifs, aussi bien fantasmes positifs que peurs et cauchemars, en les incarnant dans un réseau de figures singulières et exemplaires dans le cadre de la refondation collective.  « What should inspire – or terrify – us are not the hero’s powers or gender, but what the heroes represent about our needs, our fears and our attitudes. », Danny Fingeroth, Superman on the Couch. What Superheroes Really Tell Us about Ourselves and Our Society ?, New York/London, Continuum, 2004, p. 95. 16

Récits épiques et mise en crise des structures collectives ordinaires

« Le héros positif doit incarner au-delà du concevable les exigences de puissance que le citoyen commun nourrit sans pouvoir les satisfaire. » . Umberto Eco explicite les devoirs psychologiques et moraux du héros envers la société dont il est le produit : image idéale par laquelle celle-ci se rêve, il doit à la fois dépasser les limites de la condition humaine pour accomplir les désirs des hommes qui l’admirent et avoir des traits communs avec ceux-ci pour permettre leur projection en lui. Étudier les figures du héros, du héros négatif ou de l’ennemi revient à voir en quoi elles sont pétries de désirs, de fantasmes, de hantises. Dans les visages de ses emblèmes se révèlent les structures sociologiques et psychologiques d’une communauté. À la suite de Danny Fingeroth, il faut installer les héros « sur le divan » 25, et voir quelles constructions sociales du désir régissent ces figures fantasmées. Fingeroth pose de manière très claire une question primordiale lorsque l’on désire étudier les interactions entre les figures héroïques et les individus réels : « Pourquoi les super-héros sont-ils importants pour nous ? » 26 En déclinant les thèmes récurrents à l’œuvre dans les comics de super-héros (orphelins, familles recomposées, adolescents, colériques entre autres), Fingeroth montre qu’il existe un processus dynamique entre le public et les personnages : les personnages forment des allégories morales dans lesquelles s’investissent les lecteurs, bien souvent adolescents, et en retour, les lecteurs se perfectionnent en découvrant des manières d’être positives à travers ces figures identificatoires. Tout l’ouvrage de Fingeroth répond à cette interrogation introductive : « Ces êtres surhumains, à la moralité absolue (d’une certaine manière ce que nous faisons rarement), nous procurent-ils par l’entremise d’une fantaisie curatrice un exutoire à nos parties les plus sombres ? » 27, question qu’il faudra étendre à l’ensemble de notre corpus dans le présent chapitre. Toutefois, n’entrevoir les héros épiques que par un prisme sociologique et psychologique peut être réducteur, car cette lecture par les cultural studies tend à ne les considérer que comme des productions culturelles indépendamment de toute valeur artistique. « Aujourd’hui, quand ces films [d’action hollywoodiens] sont analysés, c’est souvent essentiellement d’un point de vue idéologique, sociologique, comme reflet d’un moment de la société américaine » 28, écrit Hélène Valmary en guise de contre-manifeste et de précaution dans l’étude de ces films. Or, les figures et les récits héroïques  ne sont pas une simple mise en images des valeurs et des fantasmes sociaux. En outre, le public des films de super-héros n’est pas exclusivement américain, et pourtant il vient assister en masse à chaque nouvelle sortie, signe que le genre ne se réduit pas à une lecture exclusivement sociologique. Au contraire, ces productions héroïques incarnent ces valeurs et ces fantasmes, et, par le phénomène magique et artistique de cette apparition à l’écran, dans le texte ou lors de la récitation, les changent, les font passer de l’abstraction des idées à la concrétude des mots et des images, les rendent présentes et désirables au public. En somme, loin d’incarner les images pures et idéales dont rêverait une société, les figures héroïques se complexifient dès lors qu’elles sont mises en scène, dès lors qu’elles entrent dans une forme et un médium particuliers, complexité elle-même source de nouvelles valeurs. Il importe de voir comment s’opère cette complexification, en termes de dispositif ; autrement dit, il faut analyser les procédés techniques à l’œuvre dans les médias littéraire et cinématographique pour comprendre comment se met en place l’imaginaire épique, imaginaire dynamique censé accoucher d’un nouveau modèle de société. Dans le même temps, ces figures sont les produits d’une époque, comme tout art. Établir une distinction épistémologique entre des œuvres qui ne mériteraient qu’une analyse sociale ou politique et celles qui auraient droit à une lecture purement artistique serait légitimer la vieille hiérarchie entre les œuvres populaires, basses, vulgaires et le grand art. Pour échapper à cette opposition, il me paraît nécessaire d’imbriquer une analyse exogène – qui étudie les structures du monde social et du monde politique à l’œuvre dans les épopées – et une analyse endogène – qui, comme pour tout autre art, observe les modes d’expression et de représentation – au sein de cette étude. Si le présent chapitre se consacrera à l’étude des récits épiques, la question des aspects des héros et de leur inscription dans l’espace social sera traitée dans le suivant. L’étude des récits épiques s’articulera sur la structure invariante de la crise. Celle-ci, étymologiquement, oblige à faire un choix, à redéfinir des critères pour la collectivité. Il faut donc lier irruption de la menace et élaboration d’un nouveau modèle politique. De ce débat émergent les héros et les récits épiques : leurs origines, différentes pour chaque genre, constituent un des fondements de la société en devenir. Menace sur la société « L’épopée peut être considérée comme une “fictionnalisation” de l’histoire servant, comme Hegel l’a bien montré, à mettre en exergue les valeurs fondamentales d’une société ou d’un groupe social particulier, surtout si ce dernier est en phase d’identification ou, pour le moins, en crise. » 29 À partir 29 Bernard Ribémont, « La chanson de geste, une “machine judiciaire” ? », in Crimes et châtiments dans la chanson de 18 des mots de Bernard Ribémont, on peut se pencher sur l’étude de la menace au cœur du récit, car en mettant à nu les valeurs fondamentales de la collectivité, cette menace fait apparaître des types de héros chargés de porter et de redéfinir ces valeurs. C’est en effet à eux qu’il appartient de mettre un terme à la peur et de restaurer la joie collective. Tant dans les chansons de geste que les films de super-héros, le héros agit toujours en réaction à une menace. « En règle générale, le résultat est que les villains se préoccupent du changement et les héros du maintien du statut quo. […] Les superhéros ne sont pas appelés à agir comme les protagonistes d’intrigues individuelles. Ils fonctionnent essentiellement comme les antagonistes contrecarrant la vraie star de chaque histoire, le villain. » 30 Le parallèle entre Aliscans et The Avengers éclaire une logique commune d’essentialisation négative de la menace étrangère: dans ces deux œuvres, la menace consiste toujours en une agression brutale d’une communauté en paix, présentée comme celle du public. La guerre y est cosmique, manichéenne, parce qu’elle n’a pas d’autres fins que l’extermination de l’ennemi et son éradication des terres qu’il désire envahir. D’autre part, on trouve dans ces œuvres un traitement figuratif des ennemis similaire; ceux-ci sont présentés comme monstrueux, inhumains, infernaux. « Tuit sont cornu et noir com aversier. » Les Chitauris dans The Avengers. On peut ainsi mettre en relation la mesnie Gorant, dont « Tuit sont cornu et derriere et devant » , les anthropophages Grishart, dont le jongleur précise que « Ja por mengier la char d’un home crue/ A l’ordre vieille ne covenra aüe » et Guinehart la bocue33, sa fille, et Flohart dont il est dit que « De geste, Bernard Ribémont (dir.), Paris, Klincksieck, 2008, pp. VII-VIII.« The common outcome, as far as the structure of the plot is concerned, is that the villains are concerned with change and the heroes with the maintenance of the status quo. […] Superheroes are not called upon to act as the protagonists of individual plots. They function essentially as antagonists, foils for the true star of each story, the villain », Richard Reynolds, Super heroes :  sa bouche ist une si grant fumee/ Trestote l’ost en fu empullentee » 34, et les Chitauris qui viennent envahir New York à la fin de The Avengers. Aux cornes, aux appétits anthropophages et aux haleines fétides de païens décrits comme des créatures de l’Enfer répondent les peaux grisâtres et violacées, les dents acérées, les figures squelettiques, les corps torturés et les cris stridents des Chitauris. Les corps des païens et des Chitauris se conçoivent en tant que déformations des standards de beauté occidentaux.35 La chair l’emporte sur la haute sophistication des corps humains. « La laideur, la noirceur, la grosseur, les disgrâces physiques projettent sur les Sarrasins l’envers des critères traditionnels de la beauté, de la lumière, de l’image athlétique du chevalier et de l’harmonieuse disposition de ses membres et de ses traits. » 36 Ces mots de Paul Bancourt désignent les Sarrasins, mais on est frappé de voir à quel point ils s’appliquent également aux Chitauris. La logique figurative de ces deux peuples est la même : l’altérité n’étant pas comprise, elle se voit rejetée aux antipodes de l’être humain, dont elle forme le penchant négatif, celui de la chair animale et corrompue. Qu’il vienne de l’espace ou de l’autre côté de la Méditerranée, l’Autre est essentiellement une intrusion menaçante dans l’espace communautaire, qu’il s’acharne à saccager. L’Autre « personnifie l’Ennemi et confirme la tendance des êtres humains à se représenter ce qu’ils doivent haïr comme étant dépourvu de toute forme, en en faisant toujours l’ultime incarnation du Diable. » 37 Les Sarrasins de Desramé désirant prendre possession du Sud-Ouest et les Chitauris de Loki venant détruire New York dans une relecture mythique du 11 septembre jouent un rôle identique : ils mettent à l’épreuve les valeurs de cohésion structurelle de la communauté visée, et légitiment ainsi l’existence de héros gardiens. Ceci explique la grande parenté narrative entre Aliscans et The Avengers : il s’agit toujours de réunir une équipe de héros (la famille de Guillaume à Laon, les Avengers divisés par Loki) capables, ensemble, de terrasser les hordes ennemies et de venger une défaite passée (le désastre de la mort de Vivien, le traumatisme du 11 septembre exorcisé dans la bataille finale). Les deux œuvres se rapprochent en cela de ce que David Quint appelle la « téléologie linéaire » des vainqueurs, qui « font l’expérience de l’Histoire en tant qu’histoire cohérente et dirigée vers sa fin racontée par leur propre puissance. » 38 Comme le fait à sa manière l’Énéïde dans sa première partie face à la guerre civile récente à Rome, Aliscans et The Avengers se confrontent à un passé traumatique que les œuvres conjurent par un récit parfaitement maîtrisé dont le but est de renverser 34 « Sa bouche exhale une fumée si épaisse que l’armée tout entière en est empestée », Ibid, v. 6825-6826, p. 438. 35 Sur le traitement des visages dans la tradition épique occidentale, voir chapitre 2, pp. 40-43.  Umberto Eco (dir.), Histoire de la laideur, Paris, Flammarion, 2007, p. 201. 38 « [The victors] experience history as a coherent, end-directed story told by their own pover », David Quint, Epic and Empire. Politics and Generic Form from Virgil to Milton, Princeton, Princeton University Press, 1993, p. 9 20 la défaite en victoire. Les mots de Quint valent aussi bien pour la Rome en quête de repères qu’incarne Énée dans la première partie que pour Guillaume, ses compagnons et les Avengers : « Revisiter leur passé dans la première partie du poème peut se lire comme un exorcisme graduel de ce passé. » 39 On peut appliquer l’analyse de Quint au regard de Captain America sur les tours détruites, dans un plan en très forte contre-plongée qui fait visuellement peser la menace du portail intergalactique sur New York en contrebas, « image-réparation » 40 , image traumatique qui appelle d’autres images enfouies dans la mémoire collective. Reprenant la posture du témoin du 11 septembre tout en la dépassant par sa pose et son costume patriotique, Captain America se présente comme une métonymie de l’homme américain qui se confronte aux spectres d’un passé encore récent pour mieux en triompher. Image d’un 11 septembre intergalactique (The Avengers). On peut suivre l’analyse de Jean-Pierre Martin pour comprendre le rôle de l’invasion étrangère dans le dispositif épique : « Menaces d’un passé mal refoulé, de croyances mal éradiquées, hantise du double bestial qu’une humanité peu sûre d’elle-même s’efforce de rejeter dans un outre-mer qui est aussi un outre-monde, les Sarrasins épiques parlent d’abord du monde chrétien qui les met en scène. » 41 Ceci explique pourquoi Florence Goyet, analysant la bataille de Roncevaux dans La Chanson de Roland, parle d’« affaire franco-française ». Il n’y a pas lieu de séparer l’extérieur et l’intérieur. Versants complémentaires d’une même identité, les figures guerrières traduisent la crise structurelle qui affecte une collectivité, dont le modèle de société se trouve remis en cause. L’arrivée d’une force extérieure, bestiale, métaphorise une société en perte de repères stables. 39 « Their revisiting of their past in the first half of the poem may be read as a gradual exorcism of that past », Idem, p. 64. 40 Sébastien Boatto, “Du surhomme à Superman: évolution de la figure héroïque dans le cinéma d’action hollywoodien post-moderne », in Du héros aux super-héros. Mutations cinématographiques, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2009, p. 130.  Deux œuvres dans mon corpus font de la corruption interne au modèle politique l’élément déclencheur du récit. Raoul de Cambrai et Batman Begins fonctionnent de manière semblable, mais connaissent une évolution en chiasme au sein de l’histoire de leur genre. Si Batman Begins est l’un des premiers films de super-héros à traiter aussi explicitement l’entrée du monde dans les ténèbres au lendemain des attentats42 , Raoul de Cambrai arrive bien après La Chanson de Roland et le cycle de Guillaume d’Orange. La dégradation de la figure héroïque au sein de ces genres se fait de manière inversée. Le film de super-héros, qui prend son essor au début des années 2000, se voit rapidement obligé d’abandonner le caractère adolescent des comics, et propose dès lors des figures de plus en plus sombres, miroirs de la psychose mondiale et américaine qui suit les attentats récurrents dans cette décennie. On peut ici suivre le numéro des Cahiers du cinéma consacré aux films situés « dans l’ombre du 11 septembre » ; par sa noirceur, Batman Begins se rapproche d’un film comme La Guerre des Mondes (Steven Spielberg, 2004), et se distingue des problématiques plus individualistes, dont Hulk est emblématique, qui parcourent les films de super-héros d’alors.43 Les super-héros redeviendront solaires, à travers le projet du Marvel Cinematic Universe et des Avengers, en projetant leur pôle bestial, on pourrait dire avec Danny Fingeroth « nos parties les plus sombres » 44 , sur les figures repoussoirs des Chitauris, des Géants des glaces (dans Thor, Kenneth Branagh, 2011), ou des Elfes Noirs (dans Thor : Le Monde des Ténèbres/Thor : The Dark World, Alan Taylor, 2013). À l’inverse, l’héroïsme monolithique de Roland ou celui à la fois preux et bon enfant de Guillaume se voient effacés par la sauvagerie et l’orgueil de Raoul, qui, pourtant, est la victime des manigances politiques et des trahisons de l’empereur Louis. « Les premiers héros de geste, tel Roland ou Guillaume d’Orange, étaient tout d’une pièce. Forts de leur supériorité physique et morale, ils agissaient toujours sans hésiter, sans se poser de questions. Mais dans Raoul de Cambrai pour la première fois nous rencontrons des personnages tiraillés entre des devoirs en conflit », dit William Kibler dans son introduction à ladite chanson45 . La dégradation du système politique, avec l’émergence d’un pouvoir royal centralisé qui conteste les prérogatives des puissants féodaux – cette « nouvelle donne » de la royauté revivifiée que Florence Goyet voit à l’œuvre dans La Chanson de Roland46 – entraîne celle du héros, obligé de plonger dans les ténèbres pour restaurer un semblant d’ordre plus juste. Face à la déliquescence des valeurs qui régissaient le monde (celles de la féodalité ou de la justice), un héros se dresse contre la  loi pour les maintenir. Ce type de héros, dont l’un des modèles se trouve dans la geste des barons révoltés, est, par excellence, conservateur. On voit donc que le récit épique a un rôle cathartique très fort. « Thématiquement, il convoque et met en scène les craintes paranoïaques et les grandes peurs sociétales. » 47, dit Dick Tomasovic à propos du film de super-héros de l’après 11 septembre. En représentant des menaces qui mettent en crise l’ordre social et l’ordre politique, les épopées font émerger les peurs les plus profondes du sein de l’inconscient collectif. « Le temps du conflit ouvert a servi de jeu social pendant lequel la communauté a vécu une catharsis dont elle sort meilleure » 48, écrit Patrick Geary, qui apparente ainsi les menaces fictives à des thérapies sociétales imaginaires qui opèreraient par le grossissement, presque grotesque, des peurs inconscientes. En canalisant de telles peurs, elles se chargeraient de leur expurgation et de leur neutralisation, de manière inconsciente, lorsqu’elles passent de terreurs muettes aux imageries monstrueuses et grotesques que le héros se charge de repousser. L’imaginaire héroïque assure ainsi protection et confort à chaque collectivité ; mais toutefois, à la manière des excès de violence mal maîtrisés qui pouvaient finir en émeutes populaires lors des exécutions publiques49, une telle surcharge de menaces et de réactions violentes, aussi nobles soient-elles, traduit un mal-être social. Le besoin et la production de héros différents du reste des hommes signifient une défiance fondamentale à l’égard du commun des mortels, dont font partie les régimes politiques continument mis en crise dans les récits épiques. 

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Table des matières

Introduction
Partie 1 : Des héros à l’image de la société
Chapitre 1 : Récits épiques et mise en crise des structures collectives ordinaires
Menace sur la société
Héros, politiques, et temps de crise
De l’origine du héros
De l’origine du récit
Conclusion : que faire des héros ?
Chapitre 2 : Représentations sociales héroïques
Y a-t-il une classe héroïque ?
Les corps épiques : modèles et altérités
Des genres de héros
Conclusion : les héros, images sociales
Partie 2 : Au cœur du héros
Chapitre 3 : Le héros est-il le héraut de Dieu ?
Le héros, une hérésie de l’idole
La foi du héros
L’imitatio christi, étape nécessaire à la vertu du héros
La religion héroïque
Des valeurs chrétiennes à l’humilité
Conclusion : des héros face aux crises spirituelles
Chapitre 4 : L’éthique héroïque
Petit traité du caractère héroïque
La structure morale du monde
Le héros au miroir de l’autre
Le héros face à ses responsabilités
Conclusion : « ce sont nos choix qui font ce que nous sommes, et nous avons toujours la liberté d’opter pour le bien »
Partie 3 : Le héros et les autres
Chapitre 5 : Égoïsme salutaire, altruisme nécessaire
Le héros, objet de regard
L’apprentissage du rôle
De l’introspection du héro
Vers le romanesque
Conclusion : de l’inflexion du mode épique
Chapitre 6 : Le héros et le peuple
Représentations du peuple
Le statut du héros.
Que fait le peuple ?
Le régime politique héroïque
Conclusion : le peuple épique, arbitre du pouvoir
Conclusion
Bibliographie
Corpus secondaire de la chanson de geste
Comics de super-héros
Bibliographie générale
Bibliographie de la chanson de geste
Bibliographie du film de super-héros
Filmographie
Corpus principal
Corpus secondaire
Index

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