Étude clinico-biologique des intoxications accidentelles au cannabis chez l’enfant
Toxicologie
Effets aigus
Les effets de la prise aiguë ont une grande variabilité intra-individuelle en fonction de la quantité et de la qualité du produit consommé, de l’ancienneté de la consommation et de la consommation d’autres produits parallèlement ; ainsi qu’une variabilité interindividuelle en fonction de la tolérance et de la personnalité de l’individu1 . Quand le cannabis est fumé, les effets atteignent leur maximum entre 10 et 30 minutes après le début de la consommation, sont nettement diminués de 3 à 5 h après et peuvent perdurer chez certains individus jusqu’à 24 h après le début de la consommation. Dans le cas d’une ingestion de cannabis, le maximum de l’effet est retardé à plus d’une heure et les effets durent environ 5 h 4 . On distingue les effets aigus du cannabis d’une part sur le psychisme et d’autres part les effets somatiques. Les effets cognitifs dose-dépendants sont nombreux. Ainsi on retrouve des troubles de la mémoire (mémoire immédiate), des troubles de l’attention (diminution de la vigilance, allongement du temps de réaction, sédation, somnolence, endormissement), des troubles thymiques et dissociatifs (euphorie, agressivité, anxiété, désinhibition), de l’anxiété (attaque de panique, crise d’angoisse), de la perception sensorielle (exacerbation de la perception des sons, modification de la vision, modification de la perception des distances, mydriase, diplopie, nystagmus), des psychoses cannabinoïdes (hallucination) et une modification des fonctions exécutives et motrices (équilibre postural diminué, balancement postural, tremblements)1,4,8 . La prise aigüe de cannabis a des effets dose-dépendants somatiques et notamment sur le système cardiovasculaire, tels que la tachycardie, l’augmentation de la fréquence cardiaque, une vasodilatation systémique, et une augmentation de la pression sanguine. Des effets plus 7 sévères peuvent apparaître chez des individus présentant un terrain cardiovasculaire préexistant tel que l’angor, l’infarctus du myocarde, l’arrêt cardiaque et les cardiomyopathies. La prise par inhalation entraîne évidemment des effets respiratoires (inflammation des voies respiratoires, destruction des tissus pulmonaires)8 . Les signes digestifs sont aussi fréquents, notamment lors de la prise orale, avec des vomissements, des diarrhées et des douleurs abdominales1 .
Effets chroniques
Les effets à long terme du cannabis sur les fonctions cognitives dépendent de l’âge du début de consommation, de la fréquence et de la durée de consommation. Les principaux effets sont un syndrome amotivationnel (isolement social, perte de motivation pour les activités quotidiennes), et des syndromes de désorganisation de la pensée. Même si l’augmentation du risque de schizophrénie est aujourd’hui controversée, l’usage chronique de cannabis entraine cependant l’apparition de symptômes psychotiques (hallucinations, délires, troubles de la pensée, troubles psychotiques). Le cannabis a également une toxicité à long terme au niveau somatique. Au niveau cardiovasculaire, la consommation chronique du cannabis entraîne une bradycardie et une hypotension, contrairement aux effets aigus, probablement en lien avec la tolérance au produit. Le cannabis a aussi une toxicité respiratoire, entraînant une augmentation du risque de bronchite chronique, d’emphysème pulmonaire, d’inflammation respiratoire chronique et une détérioration des fonctions respiratoires. D’autre part le cannabis pourrait, à long terme, induire des cancers, mais cette notion est encore aujourd’hui controversée.1,4,8
Toxicité chez l’enfant
Dans la majorité des cas, l’intoxication involontaire chez l’enfant se fait par voie orale par ingestion de cannabis sous forme de résine. L’intoxication accidentelle concerne en France des enfants de moins de 3 ans dans 86% des cas4,9. Le tableau clinique de l’intoxication chez l’enfant présente des symptômes généraux à type de nausées, vomissements et vertiges, un appétit augmenté et une bouche sèche avec sensation de soif, des symptômes cardiovasculaires (augmentation dose-dépendante de la fréquence cardiaque avec élévation du débit cardiaque de plus de 30%, hypotension orthostatique et syncope), des symptômes cognitifs (modification sensorielle et de perception du temps, modification des 8 performances cognitives et motrices dose-dépendante, trouble de la mémoire à court terme), des symptômes neurologiques (coma, diminution des fonctions respiratoires) . Les symptômes les plus fréquemment observés sont la somnolence, l’hypotonie, la mydriase, et l’agitation9 . Dans les cas les plus graves l’intoxication peut engendrer des dépressions respiratoires, des convulsions et des comas9 .
1. Introduction |