Décomposition des Chloroéthylnitrosourées
Les Chloroéthylnitrosourées (CENU) présentent une grande analogie structuro fonctionnelle avec les CENS. On peut escompter une analogie entre leurs mécanismes de décomposition et entre leurs modes d’action. Les études de décomposition des CENU nous servirons de balises pour le comportement des CENS.
Depuis les travaux de Montgomery et coll. 1967, sur la synthèse et la décomposition des CENU , Brundett et Colvin ont complété et exploré d’autres modes de décomposition probables. Par la suite l’équipe dirigée par Lown s’est largement intéressée à la décomposition des CENU par l’emploi des techniques instrumentales modernes notamment la RMN de l’azote 15, le carbone 13 et l’oxygène 18.
Le marquage isotopique spécifique s’est avéré un outil puissant pour suivre et comprendre les phénomènes souvent complexes en solution.
Par ailleurs, l’utilisation de la chromatographie en phase gazeuse couplée à la masse pour les produits volatiles, a permis de proposer un autre mécanisme plausible. Les auteurs ont discuté les possibilités de chacun des mécanismes compétitifs .
Les études entreprises, dans leur majorité, ont montré d’une manière générale que la décomposition dépend de la nature du milieu, de la température et aussi du pH des solutions aqueuses. En effet, il a été établi que la stabilité des CENU en milieu aqueux est fortement dépendante du pH. Ainsi, par exemple la Bis-Chloroéthylnitrosourées (BCENU) est relativement stable à pH=4.5 avec un temps de demie vie supérieure à 500 min, par contre à pH=7.4 et 8 les temps de demie vie sont respectivement de 50 et 5 min.. A des pH fortement acides (pH < 2) la BCENU se décompose en quelques secondes. Pour mieux cerner et expliquer leur mode d’action in-vivo une attention particulière a été accordée aux mécanismes de décomposition dans des conditions physiologiques de température et de pH (T=37°C, pH=7.4).
Modifications de la décomposition des CENU
Une attention particulière a été accordée à la décomposition des CENU via le passage par l’intermédiaire alkanediazohydroxyde selon la voie A, sans exclure pour autant les voies B et C. D’après les mécanismes proposés , seule la voie A donne naissance à l’alcane diazohydroxyde qui contient la chaîne 2-haloéthyl , l’ultime responsable du pontage de l’ADN , expliquant ainsi l’origine de l’activité anticancéreuse de cette classe de composés . En revanche, les intermédiaires 1, 2, 3, oxazodiazoline et 2-imino-nitrosooxazolidinone provenant des voies B et C ne génèrent pas l’entité alkylante.
Le pontage de l’ADN in-vivo engendré principalement par l’éthyle N-(2chloroethyl)-N-nitrosocarbamate donne seulement 12% de pontage , par contre 28% en présence des thiols. En effet, d’après le mécanisme , la présence des thiols augmente l’attaque nucléophile sur le groupement carbonyle du carbamate, et donne ainsi une fragmentation plus importante qui produit l’entité diazohydroxyde ce qui implique une augmentation du pourcentage de pontage. En introduisant un radical R en position N3, la décomposition sera affectée de telle sorte que les intermédiaires diazohydroxyde et l’isocyanate ne sont pas observés. De tels composés, exigent une dealkylation enzymatique avant l’action anticancéreuse .
Decomposition des nitrososulfonamides
La méthode de synthèse des agents alkylant très réactifs (carbonium, nitrilium et oxonium), utilise les produits de la déamination qui donnent des ions carbonium via la décomposition des N-nitrososulfonamides.
Il a été trouvé que la N-benzyl N-nitrosotrifluorométhane sulfonamide (2) se décompose à 30°C dans CDCl 3 avec un temps de demie vie ~10-20 minutes , en raison de cette instabilité ce composé devrait être préparé fraîchement avant toute étude .
Pour la N-benzyl N-nitroso dinitrobenzenesulfonamide (2’B) le temps de demie vie dans CDCl 3 à 25 °C est de 6 heures .La nitrosoamide , obtenue suite à cette décomposition a été isolée sous sa forme cristalline avec un rendement de 90% .
D’autre part, les composés 2A-C présentent presque les mêmes vitesses de décomposition (temps de demi-vie 13, 11 et 10 min, respectivement à 30°C dans CDCl3). Ce qui est en faveur du mécanisme suivant: Et non le mécanisme qui met en évidence l’influence de la nature des substituants sur le noyau phénylique
Décomposition des 1,2-Bis (sulfonyl)-1-alkylhydrazines
Les 1,2-Bis (sulfonyl)-1-alkylhydrazines sont des agents anticancéreux très actifs, qui se décomposent en milieu aqueux neutre selon des cinétiques de pseudo premier ordre. Ces agents génèrent approximativement 2 moles de sulfinate, 1 mole de d’azote et 1 mole d’alcool approprié, issus de l’alkylation de l’eau.
La présence du motif sulfonyl sur la position N-1 confère à la molécule une certaine instabilité et par conséquent des temps de demi-vie très courts ; contrairement à la position N-2 où il a été remarqué des temps de demie vie plus longs. Les 1,2-Bis (sulfonyl)-1-alkylhydrazines se décomposent pour donner des espèces actives.
L’hydrolyse de la liaison S-N favorise la formation de l’acide sulfonique alors que la présence l’acide sulfinique est peu probable.
Les composés de la classe sulfonylhydrazine manifestent une bonne efficacité vis-à-vis d’une variété de tumeurs solides humaines transplantées, y compris celles résistantes à d’autres agents d’alkylants tels que le cyclophosphamide, 1,3-bis(2 chloroethyl)-1-nitrosourea, et melphalan. Les composés subissent une hydrolyse catalytique basique à des pH spécifiques et donnent ainsi de l’isocyanate méthylique responsable de l’activité carbamoylante .
L’isocyanate méthylique formé réagit à son tour avec de l’eau et se décompose ultérieurement pour former l’azote gazeux, l’acide sulfinique, le chloroéthanol, la méthylamine, et l’anhydride carbonique. Le chloroethyldiazomethylsulfonyl formé également au cours de cette dégradation agit principalement comme produit d’alkylation de l’ADN et par conséquent il est considéré comme étant l’ultime espèce responsable de l’activité anticancéreuse.
Analyse par HPLC de la décomposition des CENS en milieu biologique
L’analyse par chromatographie liquide des substances actives et leurs métabolites en milieu biologique exige un traitement préalable de l’échantillon avant toute séparation chromatographique. En effet, les constituants du milieu (en particulier les protéines) sont en nombre et en quantités considérables par rapport aux solutés à doser (de 104à106 de fois en poids). Il est indispensable de les éliminer en quasi-totalité, à défaut les protéines dénaturées colmatent la colonne d’analyse et la rendent très rapidement inutilisable.
De plus, si le nettoyage est insuffisant des signaux de composés endogènes interférent avec ceux des solutés dans le chromatogramme. Il est courant que des solutés soient liés de façon non covalente à des protéines «protein-binding» et soient éliminés avec celles-ci pendant le nettoyage. Une variante de la chromatographie liquide haute performance (HPLC) connue sous le nom de on-line cleaning ou bien on-line solid phase extraction a été introduite récemment pour analyser les métabolites dans les liquides biologiques .
Table des matières
Introduction
Chapitre (1) : Rappels bibliographiques sur la décomposition des composés apparentés aux CENS
1.1.Décompositions des Chloroéthylnitrosourées
1.1.1. Mécanisme A
1.1.2. Mécanisme B
1.1.3. Mécanisme C
1.1.4. Compétition des trois mécanismes
1.1.5. Modifications de la décomposition des CENU
1.2. Décomposition des Alkylnitrosourées
1.3. Décomposition des nitroimidazoles chloroéthylnitrosourées
1.4. Décomposition des nitrososulfonamides
1.5. Décomposition des nitrososulfamates
1.6. Décomposition des Nitrophenylsulfonyl éthyl ether
1.7. Décomposition oxydative des sulfamides
1.8. Décomposition des N-(phénoxycarbonyl) sulfamates
1.9. Décomposition des 1,2-Bis (sulfonyl)-1-Alkylhydrazine
1.10.Décomposition des MNTS et MNNG
1.11.Décomposition des N-substitués sulfamides Cycliques
Chapitre (2) : Synthèse des CENS
2.1.Synthése selon la voix A
2.1.1.Carbamoylation sulfamoylation
2.1.2.Chloroethylation selon Mitsunobu
2.1.3.Déprotection
2.1.4.Nitrosation
2.2.Synthése selon la voix B
2.2.1.C arbamoylation-sulfamoylation-cyclisation
2.2.2.Réouverture des oxazolidinones
2.2.3.Halogénation
2.2.4.Nitrosation
2.3.Synthése selon la voie C
Chapitre (3) : Les outils d’analyses
3.1. Analyse par spectrophotométrie UV-visible
3.2. Analyse par LC-MS des CENS
3.2.1. Mise au point de la méthode
3.2.1.1. Choix de la colonne
3.2.1.2. Choix de la phase mobile
3.2.1.3. Gradient d’élution
3.2.1.4. Choix du débit
3.2.1.5. Choix de la température
3.3. Analyse par HPLC de la décomposition des CENS en milieu biologique
3.3.1. Le couplage on-line Cleaning LC/UV/ESI-MS
3.3.2. Mise au point de la méthode d’analyse
3.3.3. Choix de la précolonne
3.3.4. Choix de la phase stationnaire
3.3.5. Choix de la phase mobile
3.3.6. Gradient d’élution
3.3.7. Choix de la température
3.3.8. Choix du débit
3.3.9. Le système de vanne automatique
3.4. Analyse de la décomposition par RMN
3.4.1. La RMN du proton
3.4.2. La RMN de l’azote marqué
Chapitre (4) : Décomposition des CENS dans le milieu aqueux
4.1. Suivi cinétique par spectrophotométrie UV-visible
4.1.2. Traitement des données cinétiques
4.2. Suivi par LC-MS
4.3. Identifications des produits issus de la décomposition des CENS
4.4. Mécanisme de décomposition proposé
Chapitre (5) : Décomposition des CENS en milieu organique
5.1. Décomposition en présence du KOtbu
5.2. Décomposition en milieu acide organique
5.2.1. Marquage régiosélectif des CENS
5.2.2. Suivi par RMN de 15N
5.3. Décomposition en milieu organique neutre
5.3.1. Suivi par RMN du proton
5.3.2. Suivi par HPLC-ESI-MS
Chapitre (6) : Décomposition des CENS dans le milieu biologique
6.1. Suivi par SPE-LC-MS
6.2. Cinétique et lipophilie
Conclusion Générale