ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE DES 1, 2, 3-
TRIAZOLES
Les hétérocycles constituent le squelette de base pour une grande variété de composés d’intérêt chimique, biologique, pharmacologique et industriel [1]. Approximativement deux tiers des publications en chimie concernent de près ou de loin les hétérocycles [2] de par leurs structures particulières et leurs stabilités en milieux physiologique. Les hétérocycles sont les éléments structuraux essentiels dans la recherche de molécules bioactives [3]. Les 1,2,3- triazoles sont des hétérocycles à cinq chainons comprenant trois atomes d’azotes. Dans les deux dernières décennies la chimie des 1, 2,3-triazoles a connu un regain considérable et un intérêt plus prononcé à cause de ses diverses propriétés biologiques enregistrées. Les propriétés biologiques des dérivés 1,2,3-triazoliques comprennent un large spectre. En effet elles sont antibactériennes, antivirales, antiépileptiques, antiallergiques, antiprolifératives, anticancéreuses, antipaludiques [4]. Les dérivés 1,2,3-triazoliques sont également appliquées comme insecticides[5], fongicides [6], régulateurs de croissance des plantes [7], inhibiteurs de corrosion [8]. Cela a attiré les chercheurs à s’orienter vers la synthèse des 1,2,3-triazoles face à la recrudescence du paludisme qui est un véritable problème majeur de santé publique . Le paludisme est l’infection parasitaire la plus répandue dans le monde. Cette maladie est dévastatrice. En 2013, il a été recensé 198 millions de cas et 584 000 décès. Les femmes enceintes et les enfants sont les plus vulnérables. Il est donc urgent de trouver de nouvelles molécules possédant de nouveaux mécanismes d’action pour répondre à ces besoins. Le manuscrit de ce mémoire est présenté en deux chapitres : Le premier chapitre donne des rappels bibliographiques sur la synthèse des 1,2,3- triazoles Dans le deuxième chapitre, nous avons présenté l’évaluation des 1,2,3-triazoles contre le paludisme. 2 Chapitre1 : Généralités sur les 1, 2,3-triazoles 1. Introduction Les triazoles sont des hétérocycles à cinq membres, comportant deux doubles liaisons et trois atomes d’azotes. Elles sont aromatiques et font partie des cycles excédentaires en électron. Selon la position des atomes d’azotes, on distingue deux régioisoméres, le 1,2,3-triazole et le 1,2,4-triazole. N N N H HN N N 1,2,3-triazole 1,2,4-triazole Schéma 1 : Structure des deux régioisoméres triazoles Parmi ces isomères, les 1,2,3-triazoles sont les composés les plus communs, les plus versatiles et les plus faciles à synthétiser. D’ailleurs, il existe plusieurs méthodes de synthèse des hétérocycles et on peut en citer quelques-unes: la réaction d’hétéro-Diels-Alder, les procédés employant des métaux de transition [9], ceux utilisant des composés carbonylés [10]. Par exemple la cycloaddition dipolaire-1,3 de Huisgen permet la formation d’unités 1,2,3-triazoles aux propriétés desquelles nous nous intéresserons [11]. Le noyau triazole possède de nombreux avantages pour la chimie médicinale [12]. Démontrant une grande stabilité aromatique, il est résistant aux hydrolyses acides et basiques, aux conditions réductrices et oxydatives et aux dégradations métaboliques. De plus, il peut participer activement à la formation de liaison hydrogène et à des interactions de type dipole-dipole et de pi-stacking
Propriétés physico-chimiques des triazoles
Au cours de la dernière décennie, on a note une forte augmentation de la synthèse des unités 1, 2,3-triazoles [14]. Ces dernières font partis de la famille chimique des azoles. Les triazoles existent sous la forme de deux tautomères : NH N N N HN N Schéma2 : Structure des triazoles et leurs formes tautomères Les triazoles possèdent une structure pseudo-aromatique qui se traduit notamment par une interaction entre les liaisons π ( π-stacking) ainsi qu’un grand moment dipolaire et une grande capacité à former de liaison hydrogène [15]. Ce sont des composés très stables vis-à-vis d’autre réactifs chimique, de l’oxydation et de la réduction. Elguero et al ont étudié l’équilibre acido-basique et la tautomérisation des 1,2,3-triazoles, qui sont à l’origine de la plupart de leurs propriétés biologiques et physico-chimiques. De ce fait, les 1,2,3-triazoles existent 1a en phase gazeuse et sous les deux formes 1a et 2b en Phase solide et liquide [16]. 3 N H N H N N N N 1a 2b Molécule densité T de fusion °C Td’ébullition °C ΔHf (kJ/kg) PKa Moment dipolaire ( 10-30cm) 1,2,3- triazole 1,192 23 203 2690 9,4 3,23 Le tableau 1 : résumé de quelques propriétés physico-chimiques des molécules triazoles Les composés azoliques sont généralement stables à température élevée. Cependant certains dérivés triazoles présentent une certaine instabilité thermique allant jusqu’à l’explosition. Les triazoles, ainsi que certains de ses complexes métalliques, explosent au-dessus de leur température de fusion : par exemple les dérivés nitrés de 1, 2,3-triazole , les dérivés du 5- nitro-1, 2,3-2H-triazole, le 4,5-dinitro-1, 2,3-2H-triazole en particulier
Stratégies de synthèses des 1, 2,3-triazoles
Les cycloadditions 1,3-dipolaires de Huisgen sont vues comme des processus de fusion exergonique unissant deux réactifs insaturés. Elles fournissent un accès rapide à une grande variété d’hétérocycle à cinq chainons. La cycloaddition des azotures sur les alcynes terminaux catalysées ou non conduit à la formation des triazoles [18]. Bien que les triazoles aient été découverts dans les années 1860, plusieurs méthodes de synthèse ont été explorées. Cependant parmi ces méthodes les plus connues sont : la cyclo-addition thermique des azotures sur les alcynes terminaux et la cycloaddition catalysée par le cuivre ou ruthénium. Le schéma ci- dessous illustre les types de la cyclo-addition des azotures sur les alcynes terminaux. N N+ NR2 R1 N N N N N N R1 R1 R2 R2 N N N R1 N N N R1 R2 R2 Triazole 1,5-disubstitués Triazole 1,4-disubstitués Triazole 1,5-disubstitués Triazole 1,4-disubstitués + Cu Ru Thermique 4 Schéma 3: Regiosélectivité de la cycloaddition 1,3-dipolaire entre azoture et alcyne
.Synthèse des 1, 2,3-triazoles non catalysée par un métal
Les cycloadditions 1,3-dipolaires regroupent les réactions d’un dipolarophile (alcène, alcyne carbonyle… ) avec un composé dipolaire-1,3 ( azoture, oxyde de nitrile ) qui conduissent à la formation d’hétérocycle à cinq chaînons. Ces réactions ont été découvertes par Michael à la fin du 19eme siècle, puis développées par Huisgen à partir de 1963. La réaction de cycloaddition dipolaire-1,3 de Huisgen entre un azoture et un alcyne sous la chaleur est sans aucun doute la méthode la plus efficace pour la préparation des 1,2,3-triazoles[19]. Cependant, du fait de son énergie d’activation élevée( 24-26 Kcal/mol) cette réaction est souvent très lente, même à température élevée (80-120°c ) et conduit à un mélange de deux régioisomères 1,4 et 1,5 à cause de la faible différence de valeurs d’énergies de la HOMO( orbitale moléculaire la plus haute occupée )et de la LUMO (orbitale moléculaire la plus base vacante ) du dipôle ( l’azoture) et du dipolarophile( l’alcyne) N N+ NR2 R1 [ Thermique] N N N R1 R2 N N N R1 Régioisomére1,5 Régioisomére1,4 R2 N N+ NR2 H R1 N N+ NR2 R1 H ou Schema 4: cycloadditon dipolaire-1,3 de Huigen thermique Pour éviter l’obtention des deux régioisomères ( 1,4 et 1,5) des efforts ont été entrepris pour trouver de nouvelles méthodes permettant de former sélectivement un régioisomère par rapport à un autre. Ces nouvelles méthodes entrent parfaitement dans le concept de la chimie « clic » proposé par Sharpless[20]. La chimie clic est définie comme une approche efficace à la synthèse de divers composés basés sur une poignée de réactions quasiparfaite formant des liaisons carbone-hétéroatome. Par conséquent, Kolb et al ont mené des recherches et afin proposé le cuivre comme catalyseur de la cycloaddition entre un azoture et un alcyne vrai. L’utilisation de ce catalyseur permet d’obtenir uniquement 1,4- disubtitué. Cependant nous allons étudier les méthodes de synthèses catalysées [21].
Synthèse des 1, 2,3-des triazoles catalysée par des métaux
La recherche de réactions chimiques à la fois générales, modulables, efficaces et sélectives, est l’une des plus grandes priorités de la communauté des chimistes organiciens. Afin de contrôler la régiosélectivité plusieurs méthodes de synthèses impliquant les métaux de transition ont été développées. De ce fait Sharpless et Meldal ont parvenu à découvrir la formation d’un seul régioisomère du triazole 1,4-disubstitué par le biais de la cycloaddition 1,3-dipolaire azoture-alcyne catalysée par le cuivre(1). De même, la cycloaddition 1,3- dipolaire azoture-alcyne catalysée par le ruthénium conduit à la formation du triazole 1,5- 5 disubstitué [22]. De ce fait, nous allons étudier en détail ces deux types de synthèses catalysées. N N+ NR2 R1 N N N R1 R2 N N N R1 R2 Cu Ru régioisoméré 1,4 régioisomére 1,5 Schema 5:Cycloaddition dipolaire-1,3 de Huisgen catalysée
La formation du Triazoles 1,4-disubstitués
Depuis 2002, la chimie clic a conquis le monde de la synthèse. Ce concept original, s’appliquant à des réactions, rapides, efficaces, sélectives et polyvalentes, a permis de nouvelles opportunités, en particulier, dans la découverte de nouveaux agents thérapeutiques. La cycloaddition 1,3-dipolaire entre un alcyne terminal et un azoture, catalysée par le cuivre(I), est la réaction la plus populaire de la chimie clic. Pour ce type de réaction, les azides et les alcynes se sont révélés être des groupes fonctionnels stables pour une large gamme de conditions réactionnelles ainsi que dans les conditions biologiques. En 2002, les groupes de Sharpless [23] et de Meldel [24] ont, de façon indépendante, mis au point une méthode de synthèse régiosélective de 1,2,3-triazole 1,4-disubstitués en utilisant le cuivre(I) comme catalyseur de la réaction. La force catalytique unique du cuivre(I) peut être expliquée par la combinaison fortuite de sa capacité à engager l’alcyne terminal dans des interactions sigma et pi et l’échange rapide avec d’autres ligands dans la sphère de coordination [25].Or, le cuivre(I) est l’espèce la moins stable thermodynamiquement et peut être facilement oxydé en cuivre(II), espèce catalytique inactive. C’est pourquoi, quand un catalyseur au cuivre(II) est utilisé directement, la réaction doit s’effectuer sous atmosphère inerte. Comme alternative à ces conditions sous oxygène, un agent réducteur peut être utilisé, par exemple, l’ascorbate. La combinaison d’ascorbate de sodium avec un sel de cuivre(II) pentahydrate ou l’acétate de cuivre(II), est une solution économique et efficace et en fait la méthode de choix pour synthétiser des triazoles 1,4-disubstitués. Par ailleurs, l’eau apparait comme un solvant ideal avec ces catalyseurs. Ainsi, la procédure « aqueuse à l’ascorbate » fournit des triazoles avec des rendements quasi-quantitatifs et des puretés supérieures à 90% [26] . Le mécanisme réactionnel de la cycloaddition 1,3-dipolaire catalysée par le cuivre(I) est proposé par Sharpless et Coll, il est composé de cinq étapes (schéma 6) [27] . -Étape 1 : L’alcyne forme un complexe avec le cuivre puis l’acétylure de cuivre par déprotonation de l’alcyne selon le schéma suivant : LnCu + R1 R1 CuLn_1 R1 CuLn_1 Cette étape nécessite des ligands labil auteur du cuivre, afin de permettre une compétition avec la fixation de l’azoture. Etape 2 : La cycloaddition 1,3-dipolaire concertée de l’azoture sur l’acétylure de cuivre possède une haute barrière d’énergie potentielle. Le métal joue donc un autre rôle. Dans le mécanisme proposé l’azoture est activé par coordination au cuivre. 6 Etape 3 : L’intermédiaire est converti en metallacycle de cuivre à six chaînons. La réaction catalysée au cuivre n’est donc pas vraiment une réaction concertée et sa régiospécificité est expliquée par la formation des liaisons de l’azoture et de l’alcyne au cuivre avant la formation de liaison C-N. Etape 4 : La concentration du metallacycle conduit au dérivé cuivre-triazole. Etape 5 : Enfin, la protonation du dérivé cuprate de triazole permet d’isoler le composé triazole 1,4-disubstitué et de régénérer le catalyseur de cuivre.
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