ETUDE ANATOMIQUE ECHOGRAPHIQUE DU
CANAL CARPIEN
INTRODUCTION
Le syndrome du canal carpien (SCC) est dû à la compression du nerf médian dans un canal ostéofibreux de la partie proximale de la région palmaire de la main. Le SCC est le plus fréquent des syndromes canalaires (prévalence 1%) [1]. Son incidence dans la population générale est estimée à environ 300/100 000 [1]. Cette pathologie constitue un des principaux motifs de consultation dans les services de chirurgie de la main. Il est à l’origine de 120000 interventions chirurgicales par an en France. Le diagnostic de cette affection est essentiellement clinique et électromyographique. Cependant, avec l’Electromyogramme (EMG), l’existence de faux positifs est en effet estimée de 10 à 20% [2, 3]. Par ailleurs ni l’examen clinique ni l’EMG ne donnent des renseignements directs sur l’aspect morphologique du nerf et de son environnement direct. Depuis quelques années l’imagerie directe du nerf médian, notamment l’échographie ostéo articulaire et l’imagerie par résonance magnétique [4, 5, 6,7, 8] apporte des renseignements morphologiques complémentaires. Le regain d’intérêt s’en est trouvé accru surtout pour l’échographie ostéo articulaire qui a connu un essor considérable avec le développement de sondes de haute résolution. L’échographie du poignet est devenue un examen clé dans plusieurs services de chirurgie de la main car elle permet de façon non invasive de faire une étude anatomique de la région et des mesures objectives sur le nerf médian. La connaissance d’une anatomie échographique normale est capitale pour déceler les 3 anomalies échographiques morphométriques observés au cours des différentes situations pathologiques. En dehors des travaux occidentaux retrouvés dans la littérature, et essentiellement consacrés à une description anatomique du nerf médian à l’échographie et aux signes échographiques de la compression du nerf médian, aucun travail scientifique n’y a été consacré en Afrique. Nous avons ainsi voulu dans ce travail : – Etudier l’anatomie échographique du canal carpien et décrire les bases anatomiques d’une technique mini invasive d’ouverture du RDF. – Evaluer les modifications morphologiques pré et post opératoires subies par le nerf médian au cours du syndrome du canal carpien.
RAPPELS ANATOMIQUES
Le canal carpien est une zone de transition entre l’avant-bras et la main. C’est un conduit inextensible situé dans la région antérieure du poignet et qui présente à décrire un contenant (parois antérieure, postérieure, latérale et médiale) et un contenu.
Les parois du Canal carpien
La paroi antérieure est constituée par le rétinaculum des fléchisseurs (RDF) et le ligament carpi volare. Le ligament carpi volare correspond à la partie distale du fascia antébrachiale [ 9 ]. Il se situe tout autour du poignet et se continue par le rétinaculum des extenseurs en arrière et le rétinaculum des fléchisseurs en avant. Le RDF est une lame fibreuse, épaisse et transversale tendue entre le scaphoide et le trapèze en dehors et le pisiforme et l’hamatum en dedans. Elle émet par sa face profonde une cloison fibreuse sagittale qui s’attache sur le scaphoide et le trapèze séparant ainsi le canal carpien en deux loges. La paroi postérieure est formée par la face antérieure des os du carpe formant ainsi la gouttière du carpe. La paroi médiale constitue la berge médiale de la gouttière carpienne. Cette berge est formée par le pisiforme et l’hamalus de l’hamatum réunis par le ligament pisi-unciformien. 6 La paroi latérale constitue la berge latérale de la gouttière carpienne ; elle est formée par le tubercule du scaphoide et la crête du trapèze. Figure 1 : Vue antérieure du poignet montrant le rétinaculum des fléchisseurs Figure 2 : Vue antérieure du poignet montrant le rétinaculum des fléchisseurs ouvert et les parois du canal carpien
Le contenu
Le canal est subdivisé en deux loges : – Une loge latérale dans laquelle glisse le tendon du muscle long palmaire entouré d’une gaine séreuse. – Une loge médiale plus large ; dans cette loge cheminent les huit tendons de fléchisseurs superficiel et profond des quatre doigts longs, entouré de la gaine ulnaire et le tendon du long fléchisseur du pouce entouré de la gaine radiale. Dans cette loge chemine le nerf médian. C’est un nerf qui nait dans le creux axillaire par deux racines médiale et latérale en formant en avant de l’artère axillaire un V ouvert en avant. Il descend de façon oblique et latéral, traverse la partie inférieure du creux axillaire, la région antéro-médiale du bras, le sillon bicipital médial, l’axe médian de l’avant bras et finit au niveau du canal carpien. Dans ce dernier, le nerf est situé entre en avant le RDF, latéralement le tendon du muscle fléchisseur du pouce et en arrière et médialement les tendons du muscle fléchisseur superficiel des doigts. Il se divise en branches terminales au bord inférieur du rétinaculum. En dehors de la partie médiale du RDF se trouve la loge de Guyon situé en dehors du canal carpien. Cette loge est traversée par l’artère et le nerf ulnaires en dedans 8 Figure 3 : Coupe transversale du poignet passant par la partie proximale du canal carpien 9 Figure 4 : Coupe transversale du poignet passant par la partie distale du canal carpien
Diagnostic et Traitement du syndrome du canal carpien
Diagnostic de la forme habituelle sensitive subjective pure La forme habituelle sensitive subjective pure affecte particulièrement la femme en période post ménopausique.
Signes cliniques
Le syndrome du canal carpien se manifeste par des acroparesthésies dans le nerf médian (picotements, engourdissement), respectant donc le petit doigt mais ne touchant pas nécessairement l’ensemble du territoire du nerf en question. Il existe une triple périodicité caractéristique : – Nocturne (la malade agite les mains pour calmer les acroparesthésies) – Le matin (sensation de gonflement et maladresse) – Dans la journée, à l’occasion de certains mouvements fins comme le tricotage. Des troubles vasomoteurs peuvent être associés : Acrocyanose, syndrome de Raynaud complet plus rarement. Les manifestations sont habituellement bilatérales, mais plus accentuées sur la main dominante.
Signes objectifs
Les signes carpiens consistent en la mise en évidence de la souffrance du nerf médian dans le canal carpien : – signe de Tinel : la percussion de la face antérieure du carpe par le doigt ou le marteau à réflexe déclenche des dysesthésies dans le territoire du nerf médian ; – flexion ou extension maintenue du poignet (signe de Phalen) ; – la mise en place d’un garrot réveille des dysesthésies dans le territoire du nerf médian au bout de 1 minute environ, alors que normalement les dysesthésies apparaissent plus tardivement et dans le territoire cubital. – Les signes neurologiques déficitaires sont par définition absents dans la forme sensitive décrite
Examens complémentaires
Infiltration de corticoïdes L’infiltration de corticoïdes peut être considérée comme un test diagnostique. Electromyographie L’électromyographie n’est pas systématique. Elle est réalisée : – en cas de diagnostique douteux ; 12 – ou après l’échec d’une infiltration de corticoïdes ; – ou encore pour apprécier la gravité de l’atteinte du nerf médian (recherche de signes déficitaires, non apparents à l’examen clinique) ; – ou enfin pour confirmer formellement le diagnostic avant une intervention chirurgicale. Le diagnostic électromyographique du syndrome du canal carpien est retenu sur les éléments suivants : – latence motrice distale supérieure à 4 millisecondes (ms), mesurée au court abducteur du pouce ; – vitesse de conduction sensitive inférieure à 50 ms (en veillant à ce que les mains soient suffisamment réchauffées).
– Aspects étiologiques de la forme sensitive L’épaississement des gaines synoviales par une fibrose non inflammatoire, la stase veineuse sont à considérer comme un facteur aggravant la recrudescence nocturne.
Les formes cliniques
Le syndrome du canal carpien évolué Le syndrome du canal carpien évolué est caractérisé par l’apparition de signes neurologiques déficitaires. L’atteinte motrice se traduit par : – Une atrophie musculaire du versant externe de l’éminence thénar, – Un déficit du court abducteur du pouce (écartement du pouce vers le haut, perpendiculaire à la paume) ; – Un déficit de l’opposition du pouce. L’hypoesthésie est mise en évidence d’une façon plus fine par le test de Weber (sensibilité discriminative permettant de percevoir deux points distants de 4 mm), l’hypoesthésie au tact, en particulier à l’extrémité distale pulpaire des doigts. L’électromyographie peut être atypique : – Par la topographie : acroparesthésies touchant toute la main ou débordant la main, remontant le long du membre supérieur ; – Douleurs prédominantes avec note dysesthésique discrète ;
1. Définition |