Etude ACV des chantiers de démolition en vue de la préservation des ressources

La constante augmentation de la population mondiale (les prévisions tablent sur un chiffre de dix à onze milliards à l’horizon 2050) induit des besoins grandissants en ressources : plus d’eau, plus de nourriture, plus de ressources. Loger l’ensemble des habitants de cette planète dans un contexte durable viable représente un challenge important auquel il va falloir faire face.

En France, les bâtiments représentent près de la moitié de la consommation totale d’énergie [SOeS, 2015] et le quart des émissions des gaz à effet de serre [ADEME, 2011]. Les efforts fournis pour diminuer les impacts environnementaux du cadre bâti sont indéniables : bâtiments à basse consommation (BBC) voire à énergie positive, rénovation en vue de l’amélioration des performances énergétiques, démarche Haute Qualité Environnementale (HQE)… Ces changements se situent, en termes de cycle de vie, dans les phases de conception et d’usage. Cependant, dans une vision à moyen et long terme, ces modifications ne seront réalisables que conjointement à une préservation des matières premières et des matériaux. Une optimisation de la gestion de la fin de vie des bâtiments semble nécessaire et motive donc ce travail de thèse. En effet, le bâti existant possède cette nature ambivalente de pouvoir être considéré comme une future source de déchets une fois l’utilisation des bâtiments achevée mais également comme une mine de matériaux à ciel ouvert. Cette présente étude a va s’intéresser à cette phase charnière qu’est la fin de vie d’un bâtiment. Elle a pour objectif, dans un premier temps, d’estimer les impacts environnementaux selon le type de démolition réalisée. Dans un deuxième temps, on souhaite pouvoir comparer différents scénarios de fin de vie pour une poutre en béton armé. Ces pratiques influencent la quantité de déchets à traiter mais également la quantité de ressources nouvellement disponibles. Même si cette thèse se situe dans un contexte de développement durable où les aspects économiques, sociaux et environnementaux sont liés seule la partie environnementale sera ici abordée.

L’analyse de cycle de vie (ACV) a été utilisée pour répondre à cette problématique. Cet outil multicritère permet de prendre en compte les impacts potentiels liés à la production des matériaux et de l’énergie, aux transports ou à la gestion des déchets. Associée à la base de données Ecoinvent, l’ACV a permis de calculer les impacts environnementaux présentés tout au long de cette thèse.

Les activités agricoles et le BTP ont les contributions les plus importantes représentant à eux seuls 83% de la production de déchets en France. En 2010, 355 millions de tonnes de déchets ont été générées par les industries, les collectivités et les ménages. Une crise économique ou une évolution technologique dans le recyclage n’expliquent pas cette brusque diminution. D’ailleurs, en 2009, le tonnage des déchets était estimé à 770 millions de tonnes [ADEME, 2012]. En 2010, la sortie de statut de déchets a été légalement définie par la directive 2008/98/CE [UE, 2008]: les déchets qui étaient réutilisés sur site n’étaient plus considérés comme des déchets. Ainsi, le secteur agricole qui produisait 400 millions de tonnes de déchets en 2004 en produisait moins de 2 millions en 2012 [ADEME, 2014].

Le secteur du BTP quelle que soit la réglementation adoptée et la méthodologie choisie reste l’un des principaux contributeurs en termes de production de déchets. La démolition des bâtiments est particulièrement connectée à cette problématique de production et de gestion des déchets.

Le 26 mai 2015 le projet de loi à la transition énergétique pour la croissance verte a été voté par l’Assemblée Nationale. Elle a pour objectif de lutter contre le dérèglement climatique et réduire la facture énergétique de la France tout en permettant de lutter contre le chômage et créer des emplois liés au développement des énergies renouvelables et des nouvelles technologies. Cette transition se décompose en 8 titres :

➤ Titre 1 : il fixe les grandes lignes de ce plan qui doit voir se dessiner un modèle économique respectueux de l’environnement. Il se traduit par un développement sobre et efficace en énergie, respectueux de l’environnement et de la santé humaine. Dans le texte de loi, des objectifs chiffrés sont précisés : diviser par 4 les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050, réduire la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 (avec 2012 comme année de référence), réduire la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 30 % en 2030 (avec 2012 comme année de référence), porter la part d’énergies renouvelables à 32 % dans la consommation finale brute d’énergie en 2030, réduire la part du nucléaire dans le mix électrique à 50 % à l’horizon 2025 ;

➤ Titre 2 : il se concentre sur l’aspect énergétique des bâtiments. Avant 2025, tous les bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kWh par m2 et par an doivent avoir fait l’objet d’une rénovation énergétique. De plus, toutes les nouvelles constructions de l’État et des différentes institutions publiques seront à énergie positive et à haute performance environnementale. Enfin, on peut constater la mise en place d’un carnet numérique permettant le suivi de l’entretien et des modifications progressives du bâtiment qui peut être utile en vue d’une déconstruction en fin de vie ;

➤ Titre 3 : il détaille le développement des transports propres. Le déploiement de véhicules peu polluants (objectif national de 2 litres aux 100 kilomètres), une utilisation accrue des transports en commun et des investissements pour soutenir le développement d’infrastructures de fret fluvial et ferroviaire en lieu et place du routier. L’État souhaite une augmentation du nombre de véhicules électriques ou utilisant des carburants alternatifs. Par exemple, les parcs de plus de 20 véhicules automobiles appartenant à l’État devront être constitués de 50 % de véhicules à faibles émissions. Il est également évoqué de réserver une voie sur les autoroutes et les routes nationales pour les véhicules propres, les transports en commun ou le covoiturage ;

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➤ Titre 4 : il promeut la transition vers une économie circulaire avec la mise en avant de la prévention de la production de déchets par l’intermédiaire du réemploi, d’un allongement de la durée de vie et d’une consommation plus responsable. Cette priorité à la prévention est demandée pour les déchets ménagers (réduction de 10%) ou dans le BTP (valorisation à hauteur de 70 % des déchets du secteur d’ici 2020). D’autres objectifs chiffrés sont donnés : réduire de 50 % les quantités de déchets non dangereux et non inertes admis en installations de stockage en 2025 par rapport à 2010, réduire de 50 % les quantités de produits manufacturés non recyclables mis sur le marché avant 2020. La loi évoque la possibilité de procéder à une réversibilité du stockage, c’est-à-dire valoriser les déchets qui ont été stockés ces dernières années. Enfin, ce titre met à l’amende l’obsolescence programmée et le gaspillage alimentaire ;

➤ Titre 5 : il favorise le développement des énergies renouvelables afin de diversifier la production et d’aller vers une indépendance énergétique de notre territoire ;

➤ Titre 6 : il évoque le renforcement de la sûreté nucléaire et de l’information des citoyens ;

➤ Titre 7 : il simplifie et clarifie les procédures pour gagner en efficacité et en compétitivité notamment sur les modes d’effacement au moment des grandes pointes de consommation énergétique ;

➤ Titre 8 : il établit le cadre pour donner aux citoyens, aux entreprises, aux territoires et à l’état le pouvoir d’agir ensemble. Ainsi, un plafond national pour les émissions de gaz à effet de serre appelé « Budget Carbone » est établi et fixé par décret tous les 5 ans. Il est réparti par secteur et par catégorie de gaz à effet de serre.

Table des matières

INTRODUCTION
1.1 LES DECHETS DU BTP EN FRANCE
1.1.1 LA NATURE DES DECHETS
1.1.2 LES DECHETS DU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION
1.1.3 LES DECHETS DES CHANTIERS DE DEMOLITION
1.2 LA GESTION DES DECHETS EN FRANCE
1.2.1 CADRE REGLEMENTAIRE
1.2.2 LE DIAGNOSTIC DECHET
1.3.3 LE PROJET ASURET
1.3.4 LES FILIERES DE GESTION DES DECHETS
1.3 LES TECHNIQUES DE DEMOLITION
1.3.1 LES PROCEDES MECANIQUES
1.3.2 LES PROCEDES UTILISANT L’ONDE DE CHOC OU LES EXPLOSIFS
1.3.3 LES PROCEDES THERMIQUES
1.3.4 LA DECOUPE AU JET D’EAU A HAUTE PRESSION
1.3.5 LA DEMOLITION MANUELLE
1.4 LIENS AVEC L’ETUDE DE L’ADEME
1.4.1 COMPARAISON DES TECHNIQUES DE DEMOLITION UTILISEES
1.4.2 COMPARAISON DES EXUTOIRES UTILISES
1.5 UN APERÇU DE LA SITUATION MONDIALE
1.5.2 LES TECHNIQUES DE DEMOLITION
1.5.3 LA GESTION DES DECHETS
1.6 DEFINITIONS
1.6.1 DEMOLITION OU DECONSTRUCTION ?
1.6.3 LA SITUATION EN FRANCE
2.1 L’ANALYSE DE CYCLE DE VIE (ACV)
2.1.1 LA DEFINITION DES OBJECTIFS ET DU CHAMP DE L’ETUDE
2.1.1.1 Fonctions du système étudié
2.1.1.2 Unité fonctionnelle (UF)
2.1.1.3 Les frontières du système
2.1.1.4 Les règles d’allocation
2.1.1.5 Les catégories d’impacts et les méthodes d’évaluation
2.1.1.6 Les données
2.1.1.7 Les hypothèses de travail
2.1.1.8 Les limites de l’étude
2.1.1.9 La revue critique
2.1.2 INVENTAIRE DU CYCLE DE VIE (ICV)
2.1.2.1 Les bases de données
2.1.2.2 La fiabilité des données
2.1.3 ANALYSE DE L’IMPACT DU CYCLE DE VIE (AICV)
2.1.3.1 Les principales méthodes de caractérisation
2.1.4 INTERPRETATION DES RESULTATS
2.2 LES CHANTIERS DE DEMOLITION
2.2.1 LA NORME 15 804
2.2.2 DESCRIPTION DU SYSTEME
2.2.2.1 La fin de vie des bâtiments d’un point de vue ACV dans la littérature
2.3 APPLICATION DANS UN CAS PRATIQUE DE CHANTIERS
2.3.1 DEFINITION DES OBJECTIFS ET DU CHAMP DE L’ETUDE
2.3.1.1 Objectif et champ de l’étude
2.3.1.2 Unité fonctionnelle
2.3.1.3 Frontières du système
2.3.1.4 Les règles d’allocation
2.3.1.5 Logiciel de calcul et base de données
2.3.1.6 Choix des catégories d’impact et des méthodes d’évaluation
2.3.2 INVENTAIRE DU CYCLE DE VIE
2.3.2.1 Démolition traditionnelle
2.3.2.1.1 Démolition de la structure
2.3.2.1.2 Évacuation des déchets
2.3.2.1.3 Mise en décharge
2.3.2.2 Démolition sélective
2.3.2.2.1 Nettoyage préalable
2.3.2.2.2 Dépose des parquets et de la feutrine
2.3.2.2.3 Abattage de la structure
2.3.2.2.4 Concassage
2.3.2.2.5 Transport et gestion des déchets
2.3.3 ANALYSE DES RESULTATS
2.3.3.1 Démolition traditionnelle
2.3.3.2 Démolition sélective
2.3.3.3 Comparaison des deux systèmes
2.3.4 LE RECYCLAGE
2.3.4.1 Modélisation du recyclage dans une ACV
2.3.4.2 Module D
2.3.4.3 Module D dans le cas de la démolition sélective
2.4 ANALYSES DE SENSIBILITE
2.4.1 FONCTIONNEMENT ET CONSOMMATION DES MACHINES
2.4.1.1 Sensibilité sur la durée journalière de fonctionnement des engins de chantier
2.4.1.2 Sensibilité sur la consommation des engins de chantiers
2.4.2 SENSIBILITE LIEE A LA PHASE DE TRANSPORT
2.4.2.1 Sensibilité sur la consommation en trajet urbain
2.4.2.2 Sensibilité selon les normes d’émissions respectées par les camions
2.4.2.3 Sensibilité selon la distance parcourue
2.4.3 LES INCERTITUDES DANS L’ACV
2.4.3.1 Les incertitudes de nos scénarios
CONCLUSION

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