Fonctionnement hydraulique et propriétés épuratoires de techniques alternatives de gestion des eaux pluviales – cas des noues
Choix des évènements de ruissellement simulés
Le choix des caractéristiques hydrauliques et physico-chimiques des évènements de ruissellement simulés en entrée de noues s’est appuyé sur les caractéristiques de la pluviométrie nantaise et sur la caractérisation chimique des eaux de ruissellement disponibles sur site pour réaliser les essais.
Contexte de la pluviométrie nantaise
Une analyse statistique de la pluviométrie Nantaise a été réalisée à partir d’une série de plus de 10 ans de données de pluie (2006 – 2016). Ces observations ont été acquises au pas de temps de 5 min par un pluviomètre à augets basculeurs (1 basculement = 0,02 L) implanté sur le bassin versant du Pin Sec (nord-est de Nantes). La première étape de l’analyse a consisté à découper l’ensemble des données en une série d’évènements pluvieux. Un évènement est potentiellement détecté dès qu’une intensité pluvieuse sur 5 min non nulle est enregistré. Deux évènements pluvieux successifs sont considérés comme indépendants lorsque l’intervalle de temps sec les séparant, c’est-à-dire dépourvu d’un basculement d’auget, est d’au moins une heure (Dunkerley, 2008). Flori (2016) a notamment validé le choix d’un tel intervalle de temps en conclusion d’une analyse statistique d’une série de données de pluie acquise au CSTB Nantes. Sur la série de données utilisée dans notre étude, l’évolution du coefficient d’autocorrélation en fonction de la durée inter-évènement (MIT) montre une stabilisation des faibles corrélations, synonymes d’indépendance, à partir de 30 min – 1 h (Figure 3.16). Cette tendance valide notre choix d’une heure pour la durée inter-évènements (Joo et al., 2013; Yang and Chui, 2018). Figure 3.16. Evolution du coefficient d’autocorrélation en fonction du décalage temporel entre deux évènements pluvieux successifs (Nantes, 2006-2016)
Choix des évènements de ruissellement simulés
La seconde partie de l’analyse statistique a consité à calculer les distributions des différents paramètres caractérisant un évènement pluvieux : temps sec antécédent, intensité moyenne, intensité maximale et cumul de hauteur de pluie. Nous avons choisi d’exclure de ces distributions les évènements générant moins de 2,5 mm de hauteur de pluie, en considérant que ces derniers produisent très peu de ruissellement (Driscoll et al., 1989). Les histogrammes ainsi obtenus font ressortir de nettes tendances pour la pluviométrie nantaise : – les « petits » évènements pluvieux (cumul ≤ 10 mm) sont très largement majoritaires (environ 75 %). Près de la moitié des évènements ne génèrent pas plus de 5 mm de pluie (Figure 3.17). – les durées de temps sec entre deux évènements ≥ 2,5 mm sont à plus de 90% inférieures à un jour (Figure 3.18). La fréquence d’occurrence journalière de telles pluies est donc très élevée. Figure 3.17. Distribution statistique des hauteurs de pluie pour les évènements pluvieux ≥ 2,5 mm Figure 3.18. Distribution statistique des durées de temps sec observées entre deux évènements pluvieux générant au moins 2,5 mm d’eau (Nantes, 2006-2016)
Caractéristiques des évènements simulés sur le pilote
Choix des caractéristiques hydrauliques
Pour des besoins de simplification et de façon similaire aux études pilotes ou de terrain antérieures (Deletic and Fletcher, 2006; García-Serrana et al., 2017a; Hood et al., 2013; Monrabal-Martinez et al., Chapitre 3. Matériels et méthodes 118 2018; Osouli et al., 2017; Rujner et al., 2018a), les évènements de ruissellement simulés sur le pilote présentent des débits d’injection constants au cours des essais. Ces débits ont été obtenus par calcul en utilisant la méthode rationnelle, sur la base des types d’évènements qui ont été ciblés pour étudier les performances des noues pilotes. La mise en place de la méthode rationnelle requiert (i) de définir une zone contributive fictive qui génèrerait le ruissellement en entrée de noue et (ii) de choisir les hauteurs d’eau qui seraient précipitées sur cette surface fictive. La surface et le coefficient d’imperméabilisation de la zone contributive ont été respectivement fixés à 200 m² et à 90%, donnant une surface active, produisant le ruisellement, de 180 m². Le ratio {surface active/surface au miroir d’une noue pilote} obtenu, égal à 10, suit les préconisations de dimensionnement délivrées dans la littérature technique (entre 5 et 20%) (Beenen and Boogaard, 2007). Dans la réalité, cette zone fictive pourrait être assimilée à une portion de parking dont la gestion des eaux serait assurée à la source par une des deux noues pilotes. Plusieurs débits et temps d’alimentation ont été retenus pour caractériser les performances hydrologiques et épuratoires des noues par rapport à trois types d’évènement pluvieux : – Les évènements « fréquents » (type n°1), représentent les évènements dont la hauteur de pluie est comprise entre 5 et 10 mm. Les débits correspondants estimés avec la méthode rationnelle sont de 0,14 L/s et de 0,27 L/s pour simuler respectivement un évènement fréquent générant un faible cumul de pluie (5,6 mm) et un évènement fréquent produisant un cumul de pluie modéré (10,8 mm) (Tableau 3.4). Le débit d’alimentation est considéré constant pendant 2 h. Tableau 3.4. Représentativité des évènements simulés sur le pilote pour étudier leurs performances (contexte de la pluviométrie nantaise) Type d’évènement pluvieux Débit en entrée Hauteur de pluie correspondante sur une zone contributive de 200 m² (ICa = 90%) Noue(s) alimentée(s) Evènements pluvieux fréquents 0,14 L/s 5,6 mm Noue standard, noue de filtration 0,27 L/s 10,8 mm Noue standard, noue de filtration Evènements pluvieux modérés à sévères 0,8 L/s 32 mm Noue standard Evènement pluvieux modéré spécifique de la pluviométrie Nantaise 0,225 L/s 15,5 mm Noue standard, noue de filtration aTaux d’imperméabilisation de la zone contributive – Les évènements modérés à sévères (type n°2), génèrent des hauteurs de pluie plus conséquentes que les évènements fréquents (p.ex. > 20 mm, voire > 30 mm). Un seul débit a été retenu, 0,8 L/s. Le débit d’alimentation est considéré constant pendant 2 h. Cet évènement, estimé avec la méthode rationnelle, sert à évaluer les performances de traitement de la noue standard dans des conditions moins favorables à l’infiltration de l’eau dans son sol (noue a priori en configuration 2. Choix des évènements de ruissellement simulés 119 « transport »). Il correspond à un cumul de pluie de 32 mm sur la zone contributive fictive choisie (Tableau 3.4). – Les évènements représentatifs de caractéristiques particulières de la pluviométrie locale (type n°3), par exemple un évènement dont le cumul de pluie est équivalent au 9ème décile de la distribution des hauteurs de pluie (Osouli et al., 2017). Pour la période 2006 – 2016 à Nantes, le cumul de pluie équivalent est de 15,5 mm (Figure 3.19). Le débit correspondant estimé avec la méthode rationnelle est de 0,225 L/s (Tableau 3.4). En termes de temps d’alimentation, la durée de cet évènement (3h28min) correspondait à la moyenne géométrique (moins sensible aux valeurs extrêmes) des temps de pluie de tous les évènements caractérisés par une hauteur de pluie comprise entre 2,5 mm et 15,5 mm (9 ème décile) sur la période 2006-2016 à Nantes. Figure 3.19. Distribution statistique des évènements pluvieux classés par hauteur de pluie ≥ 2,5 mm Pour mieux mettre en perspective le choix des évènements simulés de type n°1 et n°2 avec les volumes de ruissellement qui auraient été générés sur 10 ans sur la zone de 200 m², leurs contributions respectives au volume total de pluie produit sont présentées sur la Figure 3.20. Sur cette période, 40% et 65% du volume total de ruissellement auraient été respectivement produits par des pluies de cumuls ≤ 5,6 mm et ≤ 10,8 mm. Ces résultats valident l’intérêt de simuler des évènements de type n°1, ces derniers étant, notamment pour l’évènement à 0,27 L/s (équivalent à une hauteur de pluie de 10,8 mm), les principaux contributeurs en eau de la noue dans la réalité. Ces évènements fréquents sont aussi ceux contribuant à la plus grande partie de la charge polluante annuelle (Tedoldi et al., 2017), d’où l’intérêt d’étudier les performances épuratoires des noues pilotes dans de telles conditions. Par ailleurs, la Figure 3.20 confirme la rareté d’évènements comme l’essai à 0,8 L/s, qui contribuent très peu au volume total de pluie sur 10 ans, en dépit des hauteurs de pluie générées très élevées.
Choix de la modalité d’alimentation
Deux modalités d’alimentation ont été retenues pour les essais : une alimentation en tête de noue ou une alimentation latérale. L’objectif est d’étudier les performances des noues pilotes dans les deux configurations d’alimentation qui sont rencontrées sur le terrain : (i) une alimentation en eau localisée en tête d’ouvrage, par exemple provenant d’une buse, et (ii) une alimentation diffuse générée le long d’un talus, typique d’un ruissellement de bord de route (Tedoldi et al., 2017).
Evènements simulés pour étudier les performances hydrologiques des noues
Les caractéristiques des évènements simulés pour étudier les performances hydrologiques des noues sont présentées dans le Tableau 3.5. Une même condition est simulée à trois reprises en entrée de noue pour estimer la répétabilité des résultats engendrés. Les essais sont tous effectués en injectant de l’eau de toiture. Stockée dans un bassin de rétention situé sur la plateforme Aquasim (Figure 3.21), cette eau provient d’une portion de 2500 m² de toiture de la soufflerie climatique du CSTB (toiture en acier galvanisé). Il est à noter que les noues pilotes n’ayant pas été couvertes, des apports d’eau de pluie étaient susceptibles de se cumuler au volume d’eau injecté artificiellement. Néanmoins, ces apports étaient minimisés grâce à une programmation des essais sur le pilote basée sur des consultations régulières des prévisions météorologiques (conditions sèches privilégiées).
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