La foule
Par définition, une foule est une multitude de personnes regroupées dans un même lieu. Face à la complexité du comportement de l’homme, de nombreux modèles de simulations ont été proposés ces dernières années afin de reproduire un comportement ou une situation précise. Les premières études menées pour décrire le comportement des piétons durant la marche étaient des observations des piétons an de recueillir des informations qualitatives (e.g. la détermination des préférences des piétons) et quantitatives (e.g. la vitesse de marche des piétons) sur la foule. Ces observations ont permis de lister certaines caractéristiques dans le comportement des piétons et de visualiser des phénomènes d’auto-organisation de la foule. Elles ont inspiré par la suite les chercheurs qui ont proposé des modèles de foule an de les simuler efficacement. Les premiers modèles caractérisant le comportement des piétons ont été des modèles statistiques [24, 27]. Ils ont permis de définir les valeurs de densités et de débits observables, et ainsi de trouver les vitesses moyennes de déplacement des piétons. Les premiers modèles informatiques simulant les mouvements de foule sont les modèles de simulation macroscopique. Les comportements simulés restent simples car les piétons sont représentés dans leur ensemble. Pour prendre en compte des comportements de piétons plus complexes, les modèles de mouvement de foule microscopiques La foule ont été développés . Chaque piéton a son propre comportement, prend ses propres décisions et réagit individuellement aux modifications de son environnement. Cette section est formée de deux parties. La première partie 1.2.1 présente les observations faites sur la foule. Elles ont permis de lister les différents comportements des piétons dans des situations définies, et de noter les phénomènes d’auto-organisation de la foule, qui se mettent en place dans certaines situations précises. Dans la deuxième 1.2.2, les différentes catégories de modèles de mouvement de foule existants seront présentées.
Observations de la foule
Une liste des différentes observations faites sur la foule est donnée. Ces observations ont été utilisées par la suite pour proposer un modèle de mouvement de foule. Comportement des piétons Les caractéristiques du comportement des piétons, données dans de nombreux documents [4, 36, 37], sont : D’après [38], la vitesse moyenne des piétons en régime libre suit une loi gaussienne de moyenne 1.34 m.s−1 et d’écart type 0.26 m.s−1 . Ces paramètres ont été recalculés à partir de données provenant de plusieurs pays sur des observations faites dans un couloir non encombré [39]. D’après [40], un piéton se déplace à une allure souhaitée qui dépend de ses caractéristiques personnelles (son âge, son genre, sa taille, son état de santé, etc.), des caractéristiques de son voyage (sa destination nale, sa familiarité avec le chemin utilisé, la longueur du chemin, la prise en compte ou non de bagages, etc.), des propriétés de l’infrastructure traversée (son type, son état, son attractivité, sa capacité à servir d’abri, etc.), et nalement les caractéristiques de l’environnement (conditions climatiques, etc.). Les piétons sont adeptes du principe du moindre effort : ils n’aiment pas faire des détours ou se déplacer en sens inverse de la majorité des gens, même s’ils doivent aller dans une direction surpeuplée. En fonction de ses motivations, le piéton choisira de se déplacer selon le chemin le plus court, le plus rapide, ou le moins contraignant. Les piétons changent de direction le moins possible : ils préfèrent marcher sur une route droite plutôt que sinueuse. Chaque piéton préfère se déplacer avec sa propre allure souhaitée, celle où il est le plus à l’aise et donc dépense le moins d’énergie. Les piétons aiment s’approprier un territoire : ils gardent une certaine distance entre eux et entre eux et les obstacles. Cette distance minimale dépend entre autres de la densité de la foule et de chaque individu. 1.2 La foule 27 pour avancer plus vite parmi une foule, un piéton peut se fouler entre les autres piétons en pivotant son corps pour passer dans des espaces peu larges . Les piétons ne se déplacent pas tel un guide continu, mais en petits groupes espacés. La majorité des personnes constituant une foule sont des groupes (e.g. amis ou famille) composés de deux à quatre membres [42] marchant comme un seul homme. un groupe séparé pour une certaine raison cherche à se réformer. un groupe organisé hiérarchiquement (e.t. une famille) a un comportement différent d’un groupe n’ayant pas de hiérarchie (e.t. un groupe d’amis). En cas d’embouteillage, les individus suivent la personne devant eux et créent une sorte de eux. Dans le cas d’une foule voulant sortir d’une pièce en urgence, les interactions entre individus eux-mêmes et entre individus et obstacles peuvent créer de grandes pressions, ce qui a pour conséquence de blesser des individus ou encore détruire des obstacles (comme des barrières ou des grillages). En situation de panique, un individu devient nerveux, ce qui induit un manque de lucidité et un comportement autiste. Ce type de comportement est visible généralement dans des lieux clos (e.g. un avion). En situation d’urgence, un individu se déplace considérablement plus vite que la normale. En situation d’urgence, les individus tendent à développer un phénomène de mimétisme : ils agissent de la même façon que leurs voisins.
Phénomènes d’auto-organisation observé
De nombreux travaux présentent les phénomènes d’auto-organisation observés dans le trac piétonnier. Quelques-uns de ces phénomènes sont retrouvés par certains modèles de foules. Ces phénomènes d’auto-organisation sont : L’eet Faster is slower : quand la voie se rétrécit et qu’il y a un phénomène d’entonnoir, les individus sont plus nerveux et veulent avancer plus vite. Ils poussent les autres individus et donc le mouvement devient moins fluide, la foule est plus dense et le temps nécessaire à la traversée de l’entonnoir augmente. l’embouteillage : quand une foule très dense essaie de se déplacer. le blocage et le phénomène d’arche (Figure 1.1) : quand une foule dense veut traverser un espace étroit tel qu’une porte, un blocage s’installe et une arche se forme autour de l’espace peu large. la formation de ligne (Figure 1.2) : quand une foule se déplace dans deux directions 28 Chapitre 1 : Etude bibliographique Figure 1.1 Phénomène d’arche d’après [2]. opposés, il se crée naturellement des lignes de piétons qui se suivent, ce qui permet de réduire les collisions entre piétons et d’augmenter leur vitesse de déplacement. Figure 1.2 Formation de ligne à contre-courant d’après . le phénomène d’oscillation (Figure 1.3) : lorsqu’une porte est traversée par deux foules se déplaçant en sens contraire, les piétons composant chaque foulée la traversent en alternance et un phénomène d’oscillation se crée. Figure 1.3 Phénomène d’oscillation d’après . le hugging(Figure 1.4) : lorsque des piétons tournent dans un angle, ils ralentissent et la densité de piéton augmente près de l’angle. 1.2 La foule 29 Figure 1.4 Corner hugging d’après . le comportement de compétition : lorsque des piétons sont en compétition pour évacuer un espace donné, l’évacuation est inefficace ou les comportements des individus sont inadaptés. la le (Figure 1.5) : lors d’une évacuation, les piétons se mettent en l’ indienne. Figure 1.5 Formation de le indienne lors de l’évacuation d’après [5]. Pendant une évacuation, les piétons ont tendance à aller vers la sortie qu’ils ont l’habitude d’utiliser.
État de l’art des modèles de mouvement de foule
Les modèles de mouvement de foule ont été développés idéalement pour reproduire tous les comportements des piétons ainsi que les phénomènes de foule observés. Évidemment, la complexité des comportements et phénomènes observés font que chaque modèle cible une ou des applications spécifiques. Les divers comportements peuvent être classés en trois catégories : (i) le niveau stratégique qui regroupe les décisions que prend l’individu sur l’organisation générale de ses activités, comme le fait d’aller acheter un billet de train puis d’aller acheter un journal ; (ii) le niveau tactique qui relève de l’intégration de la topologie des lieux et de la planification de route pour réaliser chacune des tâches ; (iii) et en le niveau opérationnel qui relève du déplacement à court terme du piéton et de ses interactions avec les individus qu’il croise sur son chemin . La modélisation de l’intégralité de ces comportements nécessite la mise en place d’une formalisation très lourde, intégrant un grand nombre de processus cognitifs comme la perception, le contrôle moteur, les motivations du piéton, sa mémoire, ses capacités de raisonnement, etc. Ce type de modélisation trouve son intérêt dans certains domaines de recherche comme l’intelligence artificielle, la psychologie expérimentale ou les neurosciences cognitives, dont les finalités sont différentes de notre problématique de travail. Nous nous intéresserons aux comportements des piétons qui relèvent du niveau opérationnel, comme l’évitement ou la bousculade. Parmi les modèles qui se focalisent sur ce niveau opérationnel, les différentes approches existantes peuvent être classées selon différents critères (Figure 1.6) : le mode de représentation de la foule, la représentation de l’espace de déplacement des piétons, la représentation du piéton, la représentation du contact, la représentation du mouvement des piétons, le phénomène de foule ciblé à analyser, le type de foule, etc. Nous avons choisi de classer et présenter les modèles de niveau opérationnel selon le mode de représentation de la foule. Nous dénombrons deux grandes catégories : les modèles dits macroscopiques et les modèles dits microscopiques. Les modèles dits macroscopiques Dans les modèles macroscopiques, les piétons ont un comportement collectif, la foule est considérée dans son ensemble. On peut les classer en deux sous-catégories : les modèles de régression et les modèles de dynamique des aides ou gaz. Modèles de régression : Dans les modèles de régression, le mouvement global des piétons est établi à partir de relations statistiques entre les variables de mot et dépend de l’infrastructure étudiée et des circonstances spécifiques au mouvement [24,27]. Pour bien comprendre le fonctionnement de ce type de modèles, nous présentons l’approche historique des niveaux de service introduite par Fruin [24]. Les différents modèles de régression sont expliqués dans [37]. Pour caractériser chaque lieu d’échange, Fruin met au point une graduation en niveaux de services. Chaque niveau correspond à un intervalle de densités de personnes, et à un débit moyen observé, allant de A pour le meilleur à F pour le moins bon (Tableau 1.1).