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Types d’optimisation de structures
On distingue trois types d’optimisations de structures : l’optimisation dimensionnelle, l’op-timisation de forme et l’optimisation topologique.
Optimisation dimensionnelle
L’optimisation dimensionnelle, appelée aussi optimisation paramétrique, consiste à résoudre des problèmes d’optimisation continue où les variables de conception représentent, par exemple, les dimensions des sections transversales de poutres (diamètre ou épaisseur d’un cylindre creux – Figure 1.5) ou les épaisseurs d’une plaque. Dans ce type d’optimisation, la forme et la topo-logie de la structure ne peuvent être modifiées. Par exemple, dans le cadre d’une optimisation paramétrique d’un treillis, le nombre d’éléments et la forme de chaque section transversale sont fixés.
Optimisation de forme
Dans l’optimisation de forme, appelée aussi optimisation géométrique, les variables de concep-tion paramétrisent les frontières de la structure. Le domaine de conception est représenté à l’aide de fonctions dites homéomorphiques, afin de suivre l’évolution des frontières au cours de l’op-timisation et de garder une topologie équivalente à la structure de départ (Figure 1.6). Bien que ce type d’optimisation permette de modifier la géométrie de la structure, le résultat est extrêmement dépendant de la topologie initiale, puisque le nombre de frontières n’évolue pas au cours de l’optimisation.
Optimisation topologique
L’optimisation topologique consiste à rechercher, dans un espace de conception, la distribu-tion optimale de matière représentant la structure. Cette optimisation est beaucoup plus flexible que les deux précédentes, puisque seules les dimensions du domaine de conception, ainsi que les fixations et les zones de chargement de la structure à concevoir, sont connues. Aucun a priori n’est donc envisagé sur les frontières de la structure ainsi que sur la forme et les dimensions des sections transversales. C’est pourquoi le nom d’optimisation de forme généralisée lui est aussi attribué (Rozvany et al. (1992)).
Pour des structures treillis, l’optimisation topologique consiste à extraire d’un domaine ini-tial (Figure 1.7a) un sous-ensemble optimal d’éléments ainsi que les dimensions des sections transversales de chaque élément (Figure 1.7b). Pour ce type de structures, un problème d’opti-misation en variables mixtes peut être défini, où les variables entières représentent la présence des éléments et les variables continues décrivent leurs sections transversales. Dans le cas de struc-tures continues, l’objectif est de déterminer quels éléments du domaine de conception doivent être constitués de matière ou non (Figure 1.8), ce qui peut être formulé comme un problème d’optimisation discret.
On estime que, pour des problèmes de conception courants, l’optimisation d’un critère de performance peut mener à des gains variant de 40 à 100 % avec l’optimisation topologique. Tandis que, dans le cas de l’optimisation dimensionnelle, les gains oscillent entre 5 et 10 % et entre 10 et 30 % pour de l’optimisation géométrique (Duysinx (1996)). Ainsi, l’optimisation topologique prend une place prépondérante lors de la conception de structures, notamment par sa capacité à proposer des designs optimaux innovants.
Contraintes d’intégrité du matériau et de flambage
Au sein des problèmes de conception de structures considérés dans ces travaux, nous considé-rons les contraintes mécaniques suivantes : la garantie de l’intégrité du matériau sous les efforts appliqués, et la résistance aux phénomènes de flambage. Ces deux contraintes jouent un rôle prépondérant dans la bonne tenue de la structure. Nous illustrons ces deux notions mécaniques
à travers une structure (Figure 1.9) issue du plancher de l’Airbus A350, étudiée au sein de la société AVANTIS Project.
A chaque matériau est associé une valeur, notée σ¯, constituant la limite en termes d’efforts mécaniques à ne pas dépasser pour garantir l’intégrité du matériau. Les déformations engendrées par l’application des efforts peuvent être évaluées par une fonction notée σi en chaque élément issu de la discrétisation de la structure. Nous verrons comment évaluer cette valeur dans la Section 4 du Chapitre 2. Dans la Figure 1.10, nous représentons les valeurs des σi au sein de la structure de la Figure 1.9 : plus σi est grand, plus le matériau est soumis à des efforts et des phénomènes de cassure peuvent être observés. Garantir l’intégrité du matériau revient à s’assurer que les valeurs des σi au sein de la structure ne dépassent pas la limite σ¯. Dans un problème d’optimisation, les contraintes d’optimisation liées à l’intégrité du matériau sont donc données par l’expression suivante : σi − σ¯ ≤ 0, ∀i = 1, . . . , N où N représente le nombre d’éléments de la structure issus de la discrétisation. Pour des questions de simplification d’écriture, les contraintes d’optimisation liées à l’intégrité du matériau sont notées par la suite contraintes de Rm (pour contraintes de résistance du matériau).
La conception des structures les plus légères mène généralement à des formes élancées (telles que des poutres) avec de fines épaisseurs. Sous des efforts de compression, on peut observer au sein de ce type de structure des phénomènes de flambage, se caractérisant par une amplification des déformations de la structure qui peuvent être de nature globale ou locale (Figure 1.11). La capacité de la structure à supporter les efforts appliqués peut être ainsi totalement annihilée. Ainsi, il est fondamental de prendre en compte ce type de contrainte lors de la phase de concep-tion. Cependant, deux challenges numériques sont à considérer. Le premier concerne l’évaluation de la résistance au flambage d’une structure ; elle nécessite la résolution d’un problème aux valeurs propres généralisé (défini dans la Section 5 du Chapitre 2). Pour une discrétisation engendrant un grand nombre d’éléments, ce problème peut alors être de grande dimension et nécessite un coût en mémoire et des temps de calcul importants. Le second challenge est carac-térisé par le fort caractère non-linéaire des contraintes d’optimisation liées au flambage. Dans les Chapitres 4 et 5, nous présenterons différentes modélisations de ce type de contraintes.
Contributions
Dans ce mémoire, l’objectif est développer des méthodologies d’optimisation topologique permettant de minimiser la masse des structures sous des contraintes d’intégrité du matériau et de flambage. Pour chaque type de discrétisation d’une structure, les contributions portent à la fois sur la modélisation mathématique du problème d’optimisation considéré et sur les méthodes permettant de le résoudre.
Pour des structures treillis, l’objectif est à la fois de déterminer la disposition optimale des éléments uni-dimensionnels, et aussi les dimensions des sections transversales associées à ces éléments. L’approche développée consiste à définir un problème d’optimisation en variables mixtes. En associant une variable binaire à un élément, nous sommes en mesure d’indiquer si cet élément est présent ou non. Pour modéliser les sections transversales, nous considérons plusieurs variables continues afin d’obtenir une description précise de chaque section.
Pour tout problème d’optimisation, le choix de la fonction objectif à minimiser est crucial. Rappelons qu’ici, l’objectif est de minimiser la masse de la structure. Cependant, afin de prendre en compte des critères de manufacturabilité, nous proposons une fonction coût définie par une somme pondérée de la masse de la structure et des moments d’inertie de chaque élément.
Selon le niveau de discrétisation du domaine de conception et du nombre potentiels d’élé-ments au sein de la structure, le problème en variables mixtes peut être de grande dimension. La modélisation d’un tel problème introduit un nombre important de variables binaires, aug-mentant par conséquent la complexité du problème. Nous avons été amené à développer un algorithme de résolution adapté au problème d’optimisation considéré, proposant notamment de traiter les variables continues et binaires séparément. Concernant la gestion de ces dernières, l’élément d’originalité de notre approche est basé sur une analyse de sensibilité de la contrainte de flambage.
Dans le cadre de structures continues, l’optimisation consiste à déterminer quels éléments du domaine initial de conception doivent être présents, menant ainsi à une formulation du problème d’optimisation en variables discrètes. Ce type de représentation introduisant un grand nombre d’éléments, les problèmes traités sont typiquement de très grandes dimensions et difficiles à résoudre. De plus, les contraintes liées à l’intégrité du matériau étant définie pour chaque élément, un grand nombre de contraintes d’optimisation est ainsi introduit. En ce qui concerne les contraintes de flambage, nous présentons une contrainte permettant de prendre en compte plusieurs déformations liées aux phénomènes de flambage dans le problème d’optimisation. Afin de réduire la complexité du problème, nous présentons une formulation du problème réduisant le nombre de contraintes d’optimisation, puis nous proposons un algorithme de résolution adapté au problème considéré.
Dans le but d’estimer la résistance au flambage d’une structure, il est nécessaire de résoudre un problème aux valeurs propres généralisé de grande dimension. La résolution d’un tel problème peut nécessiter un important coût en mémoire, notamment dans le stockage des matrices asso-ciées à ce problème. Nous proposons un algorithme résolvant le problème aux valeurs propres généralisé permettant de réduire ces coûts en mémoire.
Elasticité linéaire et éléments finis
Dans ce chapitre, après avoir défini le problème d’élasticité linéaire qui caractérise le compor-tement des structures, nous mettons en exergue la formulation variationnelle associée ainsi que la méthode des éléments finis. Ensuite, nous définissons les notions mécaniques utilisées au cours de ces travaux. Enfin, nous présentons différentes méthodes de résolution du système linéaire lié aux déplacements de la structure, et du problème aux valeurs propres généralisé associé aux phénomènes de flambage.
Notation et Définitions
Dans le cadre de ces travaux, nous considérons le matériau composant les structures étudiées comme élastique, isotrope et homogène. On dit qu’un matériau est élastique lorsque celui-ci peut se déformer sans observer de phénomène de cassure et que la structure revient à sa forme initiale quand on relâche les efforts appliqués. L’isotropie et l’homogénéité d’un matériau se caractérisent par des propriétés physiques qui sont respectivement les mêmes dans toutes les directions et en tout point de l’espace. Un matériau de ce type est défini par son module de Young ζ et son coefficient de Poisson ν. Le module de Young définit la rigidité du matériau (i.e. plus il est élevé, plus celui-ci est rigide). Le coefficient de Poisson exprime la capacité de contraction du matériau par rapport à son étirement.
Considérons une structure Ω dans R3 avec x, y et z les directions de l’espace. Pour des questions de clarté, nous noterons •,x, •,y et •,z les dérivées partielles respectives selon x, y et z tout au long de ce chapitre. On note :
— ∂Ω la frontière du domaine Ω et η la normale unitaire sortante définie sur ∂Ω. La frontière ∂Ω est constituée de deux zones d et f qui correspondent respectivement aux zones où des déplacements et des forces sont imposés (Figure 2.1).
— fs et fv représentent les forces appliquées respectivement sur la frontière f et dans la structure Ω (Figure 2.1).
— v ∈ R3 est le champ des déplacements en un point de Ω.
En chaque point de Ω, le tenseur des déformations E ∈ R3×3 est défini par le tenseur de Green-Lagrange (Cook et al. (1974)) : E(v) = 1 (rv + rv> + rv>rv) avec rv = (v,x, v,y, v,z) (2.1)
On remarque que le tenseur E est symétrique et non linéaire par rapport à v. En notant la partie linéaire de E, on a : E(v) = (v) + o(|rv|) (2.2) où (v) = 12 (rv + rv>) est défini comme le tenseur des déformations linéarisées. Dans cette thèse, nous nous plaçons sous l’hypothèse de petites perturbations correspondant à de petites déformations (|rv| << 1) de la structure. Par conséquent, le tenseur de déformations linéarisées .
Table des matières
Introduction
1 Contexte du problème
1.1 Optimisation de structures
1.2 Types de discrétisation d’une structure
1.2.1 Structures treillis
1.2.2 Structures continues
1.3 Types d’optimisation de structures
1.3.1 Optimisation dimensionnelle
1.3.2 Optimisation de forme
1.3.3 Optimisation topologique
1.4 Contraintes d’intégrité du matériau et de flambage
1.5 Contributions
2 Elasticité linéaire et éléments finis
2.1 Notation et Définitions
2.2 Problème d’élasticité linéaire et formulation variationnelle
2.3 Méthodes des éléments finis
2.4 Souplesse et contrainte de Von Mises
2.5 Flambage linéaire
2.6 Résolution de l’équation d’équilibre
2.6.1 Méthode directe
2.6.2 Méthodes itératives
2.7 Résolution du problème lié au flambage
2.8 Conclusion
3 Etat de l’art des méthodes d’optimisation topologique
3.1 Optimisation topologique de structures treillis
3.2 Optimisation topologique de structures continues
3.2.1 Solid Isotropic Material with Penalization – SIMP
3.2.2 Evolutionary Structural Optimization – ESO
3.2.3 Gradient topologique
3.2.4 Lignes de niveaux
3.2.5 Instabilités numériques
3.3 Optimisation sous des contraintes d’intégrité du matériau
3.4 Optimisation sous contraintes de flambage
3.5 Conclusion
4 Optimisation de structures poutres
4.1 Précision sur la méthode éléments finis
4.2 Problème d’optimisation
4.3 Algorithme de résolution
4.4 Résultats numériques
4.4.1 Les avantages de la fonction coût proposée
4.4.2 Influence du coefficient de pénalité μ
4.4.3 Impact du nombre de degrés de liberté décrivant les sections transversales
4.4.4 Applications à divers exemples de référence
4.5 Conclusion
5 Optimisation de structures continues
5.1 Problème d’optimisation
5.2 Résolution des équations d’état
5.2.1 Equation d’équilibre
5.2.2 Problème aux valeurs propres généralisé lié au flambage
5.3 Méthode du gradient topologique
5.3.1 Définition du gradient topologique et principe de l’algorithme
5.3.2 Gradient topologique des données étudiées
5.3.3 Algorithme de résolution
5.4 Résultats numériques
5.4.1 Performance du calcul des valeurs propres
5.4.2 Influence du nombre de modes propres de flambage dans l’optimisation
5.4.3 Application aéronautique
5.5 Conclusion
Conclusion