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Mécanisme de la réaction catalysée par les disulfonimides
Dans le cadre de cette réaction d’aza-Michael catalysée par un acide de Brønsted fort, nous supposons que la réaction est initiée par une protonation (ou une liaison hydrogène marquée) de la partie triazine. Néanmoins, les motifs 1,2,4-triazines possèdent plusieurs sites de protonation potentiels en N1, N2 et N4 (Figure 11). Il ressort des données de la littérature que la protonation de ces hétérocycles est thermodynamiquement favorisée en positions N1 et N2.153 En effet, la protonation d’un de ces deux atomes d’azote voisins conduit à réduire la répulsion de leurs paires d’électrons. En outre, ces deux positions de protonation offrent a priori la possibilité au triazinium de développer une liaison hydrogène intramoléculaire stabilisante avec l’atome voisin.139 Des calculs ab initio ont finalement pu montrer que le triazinium N2–H était le plus stable d’un point de vue thermodynamique.154 De plus, la protonation en position 1 n’est pas favorable à une addition conjuguée sur le pendant vinylique en position 3. En effet, la délocalisation de la charge négative développée pendant l’addition conjuguée ne se révèle que sur les atomes N2 et N4. Nous prendrons donc en compte ces critères thermodynamiques pour notre proposition mécanistique, en supposant qu’ils correspondent aussi aux espèces les plus réactives d’un point de vue cinétique.
Protonation en N1Protonation en N2Protonation en N4
Par analogie avec les travaux décrits par Watson dans la littérature sur les additions sur les vinylpyridines,88 nous proposons le cycle catalytique suivant (Schéma 109). La protonation de la 3-vinyl-1,2,4-triazine par le disulfonimide formerait le triazinium A, activé pour des additions nucléophiles par abaissement de l’énergie de sa LUMO. L’addition de la N-méthoxyamine, accompagnée d’une déaromatisation de la triazine, aurait lieu et conduirait à la formation de l’intermédiaire B. Cette étape d’addition, sous l’influence d’un anion chiral, pourrait s’effectuer de manière énantiosélective lorsque le groupement R2 est différent d’un hydrogène. Cependant, aucune induction de chiralité n’est observée lorsque le disulfonimide chiral XII est utilisé pour catalyser l’addition de la N-méthoxybenzylamine 50f sur la 3-vinyltriazine 18d (R1 = H, R2 = Me, Tableau 14, p. 109). Nous pouvons dans ce cas supposer que des contraintes stériques, liées à la taille importante du contre-ion sulfonimidate, pourraient induire une conformation s-trans de la vinyltriazine dans laquelle le site d’addition vinylique est trop éloigné de la source de chiralité (conformère A’). À partir de l’intermédiaire B, une étape de protonation intramoléculaire à partir de l’ammonium peut finalement avoir lieu, avec réaromatisation de la triazine, qui forme le produit d’addition et régénère le catalyseur. Lorsque la 3-vinyltriazine 18h (R1 = Me, R2 = H) a été engagée avec le catalyseur chiral, le produit d’addition a été obtenu avec un très faible excès énantiomérique (Tableau 15, p. 111). Nous ne pouvons pas non plus exclure que dans ces conditions que le faible caractère
aromatique de la triazine ainsi que la forte acidité de l’alkoxyammonium induisent une protonation de l’anion sulfonimidate plus rapide que la protonation de la double liaison. L’étape finale de protonation réaromatisante serait alors une simple réaction de tautomérie non-asymétrique (B’).
L’élaboration de nouveaux catalyseurs avec des caractéristiques stériques et électroniques différentes serait alors nécessaire pour réaliser une version énantiosélective. De plus, des calculs théoriques de DFT pourraient être envisagés pour tenter de mieux appréhender cette réactivité.
Exemplification
Avec nos conditions optimales en main, développées pour l’addition de la N-méthoxybenzylamine 50f sur la 5-phényl-3-propényl-1,2,4-triazine 18d, utilisant 20 mol% de ditriflimide XI dans le toluène à température ambiante, nous avons entrepris d’explorer l’étendue des substrats qu’il était possible de synthétiser en utilisant cette nouvelle méthode en version racémique (Schéma 110). Nous avons concentré nos efforts d’exemplification sur la substitution de la double liaison conjuguée à l’hétérocycle, qui représentait le principal frein à la réactivité des vinyltriazines en tant qu’accepteurs de Michael.
Les conditions catalytiques de la réaction tolèrent la présence d’un pendant alcool en position β de la double liaison, avec la formation du produit d’addition 56a avec un rendement quantitatif en spectroscopie de RMN et isolé avec un rendement de 85%. Les vinyltriazines portant un groupement méthyle ou phényle en position α sont également de bons partenaires réactionnels dans ces conditions. Les adduits de Michael 48b et 57a ont Vers une réaction d’addition conjuguée asymétrique ainsi pu être synthétisés avec des rendements respectifs de 77 et 48%. Ce dernier rendement plus faible s’explique principalement par la très faible stabilité de la triazine de départ, qui a dû être engagée dans la réaction d’addition immédiatement après purification par chromatographie. Il est a noté ici que la triazine 18h avait nécessité jusqu’ici l’utilisation d’un large excès d’acide de Lewis (BF3.Et2O) au reflux du THF pour permettre la réaction d’aza-Michael (avec un rendement de 62%, Chapitre III, § 3.3, p. 85), ce qui représente une nette amélioration fournie par cette nouvelle méthode catalytique.
Des groupements plus encombrants sont également tolérés en position β de la double liaison, mais nécessitent des temps réactionnels prolongés, de 72 à 96 heures, pour atteindre une conversion totale. L’addition de la méthoxyamine 50f a ainsi pu être réalisée sur les accepteurs de Michael substitués par une chaîne pentyle (58a, 79%), un cyclopropyle (59a, 46%) et un groupement benzyle (60a, 39%). Dans ce dernier cas, le rendement moyen obtenu résulte de l’instabilité du produit sur gel de silice, le rendement donné par l’analyse de RMN quantitative étant en effet de 80%. Ces résultats mettent une nouvelle fois en évidence l’influence de l’encombrement stérique au niveau du site d’addition sur la réactivité des 3-vinyl-1,2,4-triazines comme accepteurs de Michael. Il est à noter ici que l’addition d’aza-Michael sur la vinyltriazine 18a, substituée par une chaîne pentyle, n’avait jamais pu être réalisée dans d’autres conditions.
La limite de cette réactivité est cependant atteinte dès lors que des groupements plus encombrants, e.g. cyclohexyle ou phényle, sont présents en position β. Aucune conversion n’est observée dans ces cas en 120 heures. Il en est de même lorsque l’alcène est substitué à la fois en positions α et β, même par des groupes méthyles, ou inclus dans un cycle (Schéma 110, « Exemples infructueux »).
L’addition conjuguée a également pu être réalisée, dans les conditions développées, sur des vinyltriazines substituées par différents groupements non aromatiques sur l’hétérocycle. La triazine 18p, substituée en position 5 par un groupement méthyle, et la 5,6-diméthyltriazine 18q ont pu être transformées très efficacement en adduits de Michael 61a et 63a avec des rendements respectifs de 73 et 87%. De manière surprenante, la triazine 18o, substituée par un groupement électroattracteur trifluorométhyle, a nécessité un temps réactionnel plus long (96 heures) que son analogue 5-méthyltriazine 18p (30 heures) pour atteindre une conversion complète. La 3-propényl-1,2,4-triazine 18n s’est révélée quant à elle bien moins réactive dans ces conditions. Un maximum de conversion est atteint en 72 heures, ne permettant d’isoler l’adduit de Michael 64a qu’avec un faible rendement de 39%.
Table des matières
Abréviations
Introduction
Chapitre I : Étude bibliographique
1 Synthèses des 5,6,7,8-tétrahydro-[1,6]-naphthyridines
2 Réactions de Diels-Alder sur les 1,2,4-triazines
3 Additions conjuguées sur les vinylhétérocycles
4 État de l’art au sein de l’équipe et sujet de thèse
Chapitre II : Synthèse des 3-vinyl-1,2,4-triazines
1 Préparation des précurseurs 3-méthylthio-1,2,4-triazines
2 Synthèse des 3-vinyl-1,2,4-triazines par substitution nucléophile aromatique
3 Introduction du groupement vinyle par couplage croisé catalysé au palladium
4 Étude de la réaction de métathèse croisée
Chapitre III : Réactions en cascade pour la synthèse de tétrahydro-[1,6]-naphthyridines
1 Validation de l’addition de la propargylamine sur la 5-phényl-3-vinyl-1,2,4-triazine
2 Cycloadditions DAdei/rDA intramoléculaire vers la synthèse de tétrahydro-[1,6]-naphthyridines
3 Séquence domino aza-Michael/DAdei/rDA
4 Synthèse de 7,8-dihydro-5H-thiopyrano[4,3-b]pyridines
5 Conclusion
Chapitre IV : Vers une addition conjuguée asymétrique
1 Résultats préliminaires
2 Nouvelle méthodologie organocatalytique d’addition d’aza-Michael sur les 3-vinyl-1,2,4-triazines
substituées
3 Catalyse par les acides de Lewis
4 Mécanisme de la réaction catalysée par les disulfonimides
5 Exemplification
6 Conclusion
Chapitre V : Synthèse de nouvelles tétrahydro-[1,6]-naphthyridines
1 Nouveaux partenaires propargylamines pour l’addition d’aza-Michael
2 Synthèse de nouvelles tétrahydro-[1,6]-naphthyridines
3 Exemplification
4 Clivage du groupement alkoxyle
5 Conclusion
Conclusion générale
Perspectives
Annexes
1 Résultats complémentaires
2 Bilan des molécules synthétisées
3 Publications
Experimental procedures
1 General Information
2 Quantitative NMR spectroscopy
3 Preparation of 3-vinyl-1,2,4-triazines
4 Aza-Michael additions
5 Tetrahydro-[1,6]-naphthyridines syntheses
6 Methoxyl group cleavage from 6-methoxytetrahydro-[1,6]-naphthyridines
7 Other compounds syntheses
8 Organocatalysts syntheses
Références
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