Essai d’adaptabilité de l’apprentissage de la natation dans un milieu naturel
Approche historique de l’apprentissage de la natation
La natation a son propre évolution comme tous les autres sports, jusqu’au début des années 1920, la méthode utilisée est la méthode d’enseignement analytique à sec. Mais en 1947, Emile SCHOEBEL a trouvé que l’apprentissage ne peut se faire que dans l’eau et par l’eau. En effet, l’apprentissage de la natation peut se faire avec des différentes méthodes.
Evolution enseignement de la natation
Voici son évolution. En un peu plus d’un siècle, l’enseignement de la natation à l’école s’est profondément transformé. Cette évolution est à la fois le fruit d’une connaissance de plus en plus grande de l’activité mais épouse aussi les changements de la société et de nos conceptions éducatives. 9 « Les élèves ne seront conduits au bain que lorsqu’ils sauront parfaitement exécuter les exercices préparatoires. » Figure 1 : Apprentissage des mouvements en classe Source : Archives municipales de Tourcoing, collection iconographique, droit réservé. L’intérêt de la natation est régulièrement affirmé dans la plupart des programmes d’éducation dès la fin du XVIIIème siècle en particulier en raison de ses vertus pour l’hygiène et la santé. Cependant, son enseignement reste longtemps un vœu pieux en raison du manque de personnel qualifié, de l’absence de formation des maîtres et du manque d’établissement. Les manuels de gymnastique de la fin du XIXème siècle préconisent un enseignement de la natation calqué sur celui en vigueur au sein de l’armée. Il s’effectue en deux parties : la première doit permettre l’apprentissage des mouvements de la brasse à l’extérieur de l’eau puis lorsque ceux-ci sont parfaitement maîtrisés vient une deuxième phase d’application dans l’eau. Les conditions matérielles font que cette deuxième phase est quasiment toujours supprimée et les cours de natation, lorsqu’ils existent, se déroulent donc souvent en salle de classe ou en cour de récréation. La natation est alors considérée comme une activité de gymnastique élémentaire. 10 1. 3. 2 Le maître de nage Paul BEULQUE et son appareil à suspension Paul BEULQUE fonde en 1904 le club de natation et de water-polo des Enfants de Neptune de Tourcoing, l’année même où la piscine de la ville est construite. Champion de Water-polo, il entraîne avec succès l’équipe de France de cette discipline qui est championne olympique en 1924 (l’équipe compte alors 5 joueurs tourquennois sur sept). Figure 2 : Extrait du livre précis de natation scolaire par Emile SCHOEBEL Dès 1911, l’enseignement de la natation est devenu obligatoire et Paul BEULQUE qui enseigne les élèves des écoles municipales. La méthode de Paul BEULQUE répond parfaitement aux contraintes et aux objectifs de l’époque. Avec l’aide d’un industriel roubaisien nommé WROMAN, Paul BEULQUE fabrique un appareil de suspension collective formé de câbles et de poulies grâce auquel les élèves sont maintenus à la surface de l’eau par une sangle. La deuxième phase, celle de l’expérimentation dans l’eau devient alors possible pour un grand nombre d’élèves et le maître, même s’il ne dispose pas de connaissances techniques peut facilement superviser la séance. Cet enseignement technique permet une continuité parfaite avec l’enseignement très magistral et discipliné proposé en classe, les séances s’effectuent d’ailleurs dans un silence total. L’usage d’un matériel de suspension aussi perfectionné mais dans lequel l’élève est parfois prisonnier est assez marquant. Mais plus généralement, il faut noter qu’à cette époque l’enseignement de la natation est exclusivement technique : apprendre à nager c’est apprendre des mouvements. C’est ce point que vont venir compléter ou contredire les successeurs de Paul BEULQUE. 11 Selon, Emile SCHOEBEL, à partir des années 1930, la place accordée à l’éducation physique à l’école grandit. Le sport et les loisirs sont considérés comme source de santé pour l’écolier comme pour l’ouvrier. Le sport se voit aussi conférer une vocation éducative avec la transmission de valeurs morales comme le courage, le sang-froid ou la solidarité. Signe de cette place grandissante, en 1933 est créée l’école normale d’éducation physique qui forme les futurs professeurs dans cette discipline. Emile SCHOEBEL y est responsable de l’enseignement de la natation et il va mettre en place une nouvelle méthode d’enseignement qui est en décalage profond avec les conceptions que nous avons vues dans le premier article. Il expose cette méthode dans un livre, le précis de natation scolaire, publié en 1947. Malgré son caractère méconnu, nous allons voir que cet ouvrage constitue probablement l’origine de l’enseignement dispensé aujourd’hui à l’école. La méthode présentée s’articule autour de 3 phases qui vont de la familiarisation au milieu aquatique jusqu’au sauvetage. Phase 1 : la familiarisation à l’eau Figure 3 : Extrait du livre précis de natation scolaire par Emile SCHOEBEL L’enseignement proposé par Emile SCHOEBEL débute par une première phase de familiarisation à l’eau qui constitue une véritable révolution par rapport aux méthodes traditionnelles d’enseignement. Pour lui, l’élève se trouve dans l’eau dès la première séance. Il y apprend à s’immerger, à se laisser flotter sur le ventre et sur le dos et, enfin, à réaliser des cou- 12 lées ventrales et dorsales. Ces coulées sont vues comme une compétence de base qui doit précéder un quelconque apprentissage technique. L’idée directrice de ce travail est de donner confiance à l’élève : confiance en luimême, en l’élément et dans le maître. Pour Emile SCHOEBEL, la place de celui-ci est d’ailleurs dans l’eau, là où il peut le mieux rassurer l’élève. Une pédagogie moins directive est mise en œuvre. Il y a une volonté de rendre l’enseignement attrayant pour l’élève, de faire naître le goût pour l’apprentissage et le goût pour l’eau. Des jeux peuvent être utilisés comme outils d’apprentissage. Les angoisses ou le plaisir de l’élève sont donc pris en compte tout comme les particularités du milieu aquatique dans lequel il faut être à l’aise pour pouvoir être en sécurité. Autant d’aspects qui étaient auparavant méconnus ou passés sous silence. Phase 2 : l’apprentissage de la brasse Figure 4 : Extrait du livre précis de natation scolaire par Emile SCHOEBEL Contrairement à la première phase, la deuxième s’aligne en grande partie sur la méthode traditionnelle. Il s’agit d’apprendre la brasse tête hors de l’eau qui est toujours considérée comme la nage de base, la plus simple à acquérir puisque les voies respiratoires peuvent rester hors de l’eau. 13 Il n’y a par contre pas ou peu d’usage de matériel de flottaison ou de suspension. Ceci correspond à une volonté pédagogique mais permet aussi de réduire le coût de l’enseignement et de pouvoir le proposer facilement en milieu naturel. Les séances ne sont cependant pas consacrées exclusivement à l’apprentissage de la brasse, l’élève apprend à plonger et réalise ses premières initiations au sauvetage ce qui va préparer la 3ème phase. Phase 3 : Perfectionnement et sauvetage L’élève perfectionne sa technique en brasse et essaie de la transposer au grand bassin. Le but est de réussir le brevet de natation scolaire constitué d’un parcours de 25 mètres avec départ plongé. Parallèlement à ce perfectionnement en brasse, les différentes nages sont abordées dans une logique sportive et non plus uniquement sécuritaire. Mais surtout, cette 3ème phase doit permettre d’aborder de façon assez poussée les techniques de sauvetage. Les prises de dégagement, le remorquage d’un noyé et le secourisme peuvent ainsi être enseignés. Il faut savoir qu’à cette époque, on comptait environ 3000 noyades par an. Emile SCHOEBEL lui-même avait connu une expérience très marquante dans ce domaine puisqu’à 15 ans, il avait sauvé un de ses frères de la noyade. Dans sa méthode, le sauvetage est donc considéré comme le « couronnement » de la natation.
Les fondations d’un nouvel enseignement de la natation
Les apports d’Emile SCHOEBEL sont donc particulièrement importants et révolutionnaires pour l’époque. Il dépasse la vision purement technique qui prévalait alors et fonde de nombreux principes de l’enseignement de la natation qui restent valables aujourd’hui. – Sa méthode prend en compte les particularités du milieu aquatique et affirme la nécessité d’y être en confiance avant d’apprendre une technique – Elle prend en compte les aspects psychologiques de l’apprentissage de la natation et remet l’élève au centre de l’activité – La natation n’est plus forcément une fin en soi mais aussi un moyen de s’ouvrir vers de nouvelles activités. Elle participe à l’éducation de l’enfant.
INTRODUCTION |