ESQUISSE D’UNE APPROCHE TRANSVERSALE DU CONCEPT DE STRATEGIE DE VALORISATION
Le fait d’avoir privilégié le terme de stratégies de valorisation au sein de l’intitulé de ce travail n’est pas un choix anodin. Il aurait été possible de choisir d’autres expressions pouvant s’y rapprocher (sources de compétitivité, …) mais aucune n’aurait pu transcrire aussi bien la direction que ce travail souhaitait emprunter. Il convient donc avant toute chose de définir à quoi se rapporte ce concept et ce qui fait sa singularité. Par stratégie de valorisation nous comprenons les décisions et mesures prises par un ensemble d’acteurs d’un secteur afin de permettre une croissance des ressources générées par leur activité. La pertinence de ces mesures est liée au contexte national et international. Il ne s’agit donc pas seulement de s’attarder sur les décisions prises par les acteurs productifs ou effectivement intégrés à l’activité économique, mais aussi de comprendre comment le contexte national et international influe sur leurs actions. Ce n’est donc qu’à travers une approche transversale que nous serons le plus à même de comprendre et porter un jugement sur les actions et décisions des acteurs d’un secteur économique spécifique. Ce constat est d’autant plus vrai dans le cas d’une étude filière. En effet, mener une analyse sectorielle en économie, en particulier lorsqu’il s’agit d’une activité agricole d’exportation comme dans le cas du café, n’est jamais une tâche aisée et implique de définir l’angle d’étude privilégié. L’économie peut-être divisée en trois grands champs d’analyse: la macroéconomie (qui étudie les équilibres à une échelle nationale parfois internationale), la microéconomie (s’intéressant aux actions et décisions des agents individuels) et enfin la mésoéconomie (qui réalise des analyses intermédiaires entre la macroéconomie et la microéconomie). Dans le cas d’une étude sur une filière agricole, les trois champs d’étude économiques s’avèrent pertinents dans la mesure où chacun génère des considérations singulières que les autres ne peuvent aborder. Les paradigmes et axiomes à l’origine des modèles macroéconomiques et des stratégies de développement adoptés par les Etats jouent un rôle central dans l’apparition d’un cadre favorable ou contraire au développement de certaines activités économiques. Le café étant une commodity agricole, il est également nécessaire de s’intéresser au lien susceptible d’exister entre croissance économique durable et exploitation de matières premières. L’angle mésoéconomique est quant à lui le seul permettant de saisir à la fois les enjeux locaux, nationaux et internationaux d’une activité économique. Deux outils d’analyse se révèlent particulièrement intéressants : l’analyse filière et l’analyse par la chaîne globale des produits de bases (ou chaîne de valeur globale). Ces deux outils se complètent et permettent d’apporter des réponses à des questions centrales traitant des opportunités de valorisation et de développement au sein d’une filière (ou une chaîne de valeur) particulière ou encore le mode de répartition des pouvoirs entre les différents acteurs.
De plus, l’évolution du concept de qualité implique de considérer cette notion sous un angle mésoéconomique, puisque ne relevant plus d’une simple stratégie individuelle. Enfin, l’angle microéconomique s’intéresse aux déterminants de la compétitivité des acteurs individuels. Dans notre cas nous avons privilégié les instruments d’analyse du monde de la gestion (relatif aux stratégies) ou offrant une perspective originale sur la compréhension du concept de compétitivité nationale (l’analyse de Porter sur les avantages concurrentiels nationaux et son célèbre losange ou diamant). Ce n’est qu’en associant ces différents champs économiques qu’il sera possible d’apporter une réponse, à défaut d’être exhaustive, au moins concrète aux problématiques nous intéressant. L’adoption d’un modèle macroéconomique et d’une stratégie de développement a des conséquences tangibles sur le développement de l’ensemble des activités économiques nationales. On s’imagine aisément que les principales variables macroéconomiques (taux de change, inflation, chômage,…) et l’orientation du modèle économique (extraverti ou autocentré) créent un espace favorable ou contraire pour chacune des activités économiques. Par exemple, les activités d’exportation se développeront plus facilement au sein d’une économie extravertie et où le taux de change est artificiellement maintenu à un niveau faible alors que celles destinées à satisfaire la demande intérieure se développeront probablement plus aisément au sein d’un modèle de croissance autocentrée. Les modèles macroéconomiques et les stratégies de développement reposent sur l’acceptation d’axiomes, qui ont finalement pour effet d’orienter les ressources nationales (principalement le capital et le travail) vers les activités jugées les plus stratégiques pour l’économie nationale. Deux types d’axiomes nous intéressent particulièrement : l’une concernant la relation agriculture- industrie et développement et l’autre l’impact de l’exploitation et l’exportation de matières premières ou commodities sur le développement national. La vision des dirigeants politiques sur ces deux thèmes a joué et continuera à jouer un rôle fondamental pour l’essor des activités agricoles.