Un accident d’exposition au sang (AES) se définit comme tout contact percutané (piqûre, coupure) ou muqueux (oeil, bouche) ou sur peau lésée (eczéma, plaie) avec du sang ou un autre produit biologique contaminé par du sang [1,2]. Ces expositions peuvent survenir dans un cadre professionnel chez un soignant, cas le plus fréquent, ou dans un cadre non professionnel (blessure avec un matériel souillé abandonné) [2]. En effet, les AES représentent aujourd’hui la première cause d’accident du travail dans les établissements de soins [1]. Ce sont des événements à la fois angoissant, traumatisant et potentiellement grave pour le soignant. Le sang et les autres liquides biologiques peuvent véhiculer des agents infectieux très divers tels les bactéries, les virus, les parasites et les champignons [3]. Parmi ces agents, les virus des hépatites (virus de l’hépatite B ou VHB, virus de l’hépatite C ou VHC) et le virus de l’immunodéficience humaine ou VIH représentent un risque particulier du fait de la gravité des infections engendrées et du risque majeur de transmission [1,4]. D’autres agents infectieux comme le plasmodium, les mycobactéries ou autres bactéries ou virus peuvent être responsables de maladies telles le paludisme, la tuberculose, la diphtérie, la syphilis, l’herpès, les infections à EpsteinBarr virus et bien d’autres [3,5]. Cependant, leur transmission demeure exceptionnelle. De ce fait, cette étude sera axée principalement sur les trois pathologies virales prédominantes sus mentionnées.
Le personnel de santé est un groupe à risque vis-à-vis de ces trois types de virus. En 2000, dans le monde, on estime à près de 16000 les nouvelles infections à VHC, 66000 celles à VHB, et 1000 celle à VIH chez les professionnelles de santé à la suite d’accident d’AES par voie percutanée [6]. La gravité de ces AES réside sur le fait que les professionnels de santé sont quotidiennement appelés à effectuer des gestes à risque. Pour le VIH, l’infection est à la fois difficile à porter du fait de la stigmatisation mais aussi des contraintes liées à la prise médicamenteuse en cas d’évolution vers le SIDA. Pour l’hépatite B, les coûts du traitement sont très élevés, et les effets secondaires graves, avec risque d’induction de VHB mutants.
GENERALITES
Epidémiologie des agents infectieux
VIH
En 2005, Le nombre total de personnes vivant avec le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) a atteint son plus haut niveau. On estime que 40,3 millions [36,7 45,3 millions] de personnes vivent aujourd’hui avec le VIH. Près de 5 millions [4,3-6,6 millions] de personnes ont contracté une infection par le virus [11]. La prévalence du VIH à Madagascar est estimée à 0,95% dans la population générale et 1,10% chez les femmes enceintes en 2003 .
Hépatite B
L’hépatite virale B (HVB) toucherait chaque année, plus de 4 millions de cas aigus dans le monde. On estime que 350 millions de sujets sont porteurs chroniques de l’antigène du HVB ou AgHBs et que l’HVB est responsable de 1 million de décès par an [13,14]. Le risque de l’HVB est, en effet, l’évolution vers la chronicité avec un potentiel évolutif vers l’hépatite chronique active, la cirrhose et enfin le carcinome hépato-cellulaire (CHC) [13]. Les modes de contamination du VHB sont la contamination parentérale ou percutanée (transfusions sanguines, usage de drogues intraveineuses), sexuelle, materno-fœtale, et intra-familiale à partir de lésions cutanées et par le partage d’objets contaminés par le sang. L’Afrique et l’Asie sont des régions de très forte endémicité avec 8 à 15% des sujets porteurs chroniques de l’AgHBs [14,15]. Madagascar fait partie des pays à haute prévalence (> 8%). La prévalence de l’AgHBs est estimée à environ 16% .
Hépatite C
L’hépatite virale C (HVC) est une maladie fréquente. On estime que 3% de la population mondiale est touchée avec 170 millions de porteurs chroniques du virus. Le virus de l’hépatite C (VHC) est un adversaire dangereux qui échappe à la surveillance immunitaire. De ce fait, il est peu probable qu’un vaccin efficace sera disponible dans un avenir prévisible. Les anticorps neutralisants et les cellules T CD4 et CD8 sont faiblement induits en cas d’infection naturelle par le VHC .
Précautions universelles
Les précautions universelles (PU) se définissent comme les mesures protectrices prises pour assurer qu’aucun agent pathogène ne soit transmis par les liquides biologiques d’un malade à un autre, du malade au prestataire de soins, ou du prestataire de soins au malade.
Elles comportent six éléments :
• port de gants,
• port de lunettes de protection,
• Port de calots et de masques,
• Port de vêtements de protection,
• Transport sécurisé de liquides biologiques,
• Prise en charge des AES.
Ses objectifs sont multiples mais ceux relatifs à la protection du prestataire des AES sont de:
•Prévenir les piqûres accidentelles avec une aiguille souillée, les coupures avec un objet coupant souillé.
•Prévenir le contact avec du sang ou des liquides biologiques sur une plaie, une peau lésée ou une muqueuse.
•Prévenir le risque de contamination lors de la manipulation des tubes de prélèvements biologiques, linges, matériels souillés par du sang ou du liquide biologique.
•Prévenir le risque de contamination lors de l’entretien des surfaces souillées par du sang ou tout autre produit d’origine humaine.
•Sensibiliser le personnel de santé aux différentes manipulations adéquates des matériels ou dispositifs médicaux.
•Recommander les gestes à effectuer après un AES ou aux liquides biologiques.
Prise en charge des expositions au sang
Initiation du traitement
Entre l’accident et la consultation, le délai idéal est inférieur à 4 heures. Il doit toujours être inférieur à 48 heures. En effet, si le traitement prophylactique est indiqué, il est à prescrire :
– dans les 48 heures après l’accident pour le VIH,
– dans les 72 heures après l’accident pour le VHB.
Les antirétroviraux associés contre le VIH seraient d’autant plus efficaces que le traitement est très rapide. Il est possible, en cas de risque de contamination par le VHB, de faire une injection intramusculaire d’immunoglobulines spécifiques dans les 72 heures. Il est nécessaire de vérifier si la personne est vaccinée selon le protocole de 3 injections et rappels.
La vaccination anti-VHB demeure obligatoire pour tous les professionnels de santé dans les pays développés. Elle est recommandée pour les autres professionnels exposés. Pour le VHC, il n’existe pas de traitement préventif. Seul un suivi rapproché permet de détecter une primo-infection pour laquelle un traitement par Interféron a un taux d’efficacité notable. Celle-ci pourrait être augmentée par une association thérapeutique nouvelle. Ce dispositif d’initiation de traitement pourra être étendu à d’autres agents infectieux .
Soins locaux immédiats en cas d’accidents d’exposition
a. En cas de piqûre ou coupure :
– ne pas faire saigner,
– laver à l’eau et au savon puis rincer,
– tremper ou imbiber au moins 10 minutes la lésion dans ou avec un antiseptique : Dakin, eau de Javel 12°cl diluée à 10 %, alcool à 70 %, polyvidone iodée en solution dermique.
b. En cas de projection sur peau lésée ou sur muqueuse :
– pour la peau, agir comme ci-dessus,
– pour une muqueuse, laver doucement et abondamment à l’eau puis désinfecter (Dakin, Polyvidone).
– pour les yeux, laver doucement, au moins 10 minutes au sérum physiologique et instiller un collyre antiseptique.
c. Dans tous les cas aller immédiatement vers le médecin référent ou le service d’urgence le plus proche.
Pour évaluer le risque de contamination, ne pas oublier de :
– préciser les circonstances exactes de l’accident.
– connaître si possible les statuts sérologiques et l’état clinique de la personne source.
1. INTRODUCTION |