Les tumeurs vésicales représentent actuellement 3,3% de l’ensemble des cancers [1]. C’est le deuxième cancer urogénital chez l’homme après celui de la prostate [2]. Elles sont classées selon leur degré d’infiltration du muscle vésical et la présence de métastases ganglionnaires et à distance ; ainsi on distingue les tumeurs infiltrant le muscle et celles ne l’infiltrant pas. Cette dichotomie a permis de codifier l’arsenal thérapeutique concernant cette pathologie [3,4]. L’exérèse chirurgicale – pelvectomie antérieure chez la femme et cystoprostatectomie radicale chez l’homme – constitue dès lors le traitement de référence pour les tumeurs qui infiltrent le muscle vésical et les non infiltrantes de haut grade qui résistent aux thérapeutiques locales [5]. Plusieurs types de dérivations urinaires peuvent être proposés. La dérivation urinaire externe semble céder progressivement la place à la dérivation interne usant d’un néo réservoir confectionné à partir d’un fragment intestinal. Plusieurs techniques d’entérocystoplasties ont vu le jour. Elles ont été développées progressivement pour répondre aux objectifs suivants à savoir la création d’une poche à basse pression mais de capacité satisfaisante, la protection du haut appareil urinaire et la restauration de mictions volontaires à travers les voies naturelles [6]. L’absence de stomies visibles et d’appareillage externe permet de préserver l’image corporelle du patient porteur d’une néovessie. Ces différentes techniques se distinguent essentiellement par le siège du segment réséqué et sa longueur, le caractère tubulé ou détubulé du greffon et le mode d’anastomose urétéro-néo vésical. En 1986, Richard E. Hautmann, a conçu une nouvelle technique de dérivation interne orthotopique continente détubulée à basse pression, utilisant un néo réservoir iléal disposé en W ou en M.
Malgré tous ces avantages, pour beaucoup d’équipes, la reconstruction vésicale post cystectomie reste une chirurgie lourde et jugée complexe, accompagnée d’un taux de morbimortalité variable selon les séries [7]. Un taux qui semble diminuer progressivement vu la sélection rigoureuse des patients sujets au remplacement, l’amélioration des techniques anesthésiques, chirurgicales et des conditions de prises en charge post opératoires et de surveillance.
De nombreuses études rétrospectives publiées ont rapporté les résultats concernant la morbi-mortalité liée au remplacement et le fonctionnement de la néovessie, très peu ont été réalisées de façon prospective permettant un suivi plus rigoureux des patients porteur d’une entérocystoplastie.
Le déroulement de l’étude
la phase préopératoire :
L’objectif de cette étape est de poser avec certitude le diagnostique de tumeur vésicale et discuter les modalités thérapeutiques plausibles tout en recherchant d’éventuelles contre indications au remplacement vésical. Tous nos patients ont bénéficié, lors de la phase diagnostique d’une échographie rénale et vésico prostatique, d’un bilan biologique complet comportant une numération formule sanguine, un ionogramme complet, un bilan hépatique, une fonction rénale et une résection endoscopique transurétrale de la tumeur vésicale (RTUV) avec examen anatomopathologique. Un examen cytobactériologique des urines (ECBU) a été également demandé avant la réalisation des RTUV avec des biopsies de l’urètre latéro-montanal. Le bilan préopératoire a aussi compris un bilan d’hémostase, un groupage sanguin et un dosage de la glycémie à jeun. Le bilan d’extension a comporté un scanner thoraco-abdomino-pelvien. La satisfaction des patients est étroitement liée à leurs attentes préopératoires. La totalité des patients a été informée en préopératoire sur la pathologie tumorale vésicale et le risque métastatique encouru, sur les différentes modalités chirurgicales possibles, les avantages et inconvénients du remplacement, l’éventuelle limite peropératoire et changement intempestive d’acte, le retentissement fonctionnel, la qualité des mictions mais aussi l’altération hypothétique de la fonction érectile. Un consentement éclairé a été élaboré de façon écrite avec tous nos patients. La possibilité de recourir en postopératoire à des séances de rééducation périnéale a été aussi un sujet de discussion avec ces patients. Les éléments qui ont été analysés en préopératoire sont :
– les critères épidémiologiques : l’âge et le sexe.
– les critères cliniques : l’état général du patient, la présence ou non de comorbidités en fonction de l’ASA score et les résultats de l’examen clinique effectué.
– les résultats des bilans biologiques et radiologiques effectués en préopératoire.
– les critères anatomopathologiques : l’indication de la cystectomie et les résultats de la RTUV à savoir le type histologique de la tumeur, son Grading et son Staging.
la phase opératoire :
En premier temps, l’instauration d’un régime sans résidu était nécessaire chez la totalité de nos patients pour faciliter le temps iléal de la chirurgie, 48 heures avant le passage au bloc opératoire. Aucun lavement évacuateur n’a été réalisé chez nos patients. Nous avons administré par voie orale un soluté de lavage composé d’électrolytes. La veille de la chirurgie, la diète était strictement hydrique avec une période de jeun préopératoire de 12 heures. Nous avons opté dans notre série pour le remplacement vésical de type Hautmann avec certaines modifications que nous allons détailler par la suite. Nous avons étudié en per opératoire certains éléments, à savoir la durée de l’intervention, les pertes sanguines occasionnées, les complications et incidents per opératoires auxquels l’équipe chirurgicale a été confrontée.
les suites postopératoires immédiates:
Tous les patients ont bénéficié d’une analgésie par voie intraveineuse combinant des antalgiques non morphiniques et des antispasmodiques, débutée en postopératoire immédiat et poursuivie en moyenne pendant une semaine. Nous avons administré quotidiennement pendant une semaine 20 mg d’inhibiteurs de la pompe à protons chez l’ensemble de nos patients. La chirurgie carcinologique pelvienne est considérée comme une chirurgie à haut risque thromboembolique. Tous nos patients ont été mis sous héparinothérapie à raison de 0,4 UI/SC/jour de Fraxiparine, et ce jusqu’à déambulation complète. La durée moyenne de l’héparinothérapie reçue était de 6 semaines.
L’irrigation du néo réservoir était assurée par du sérum salé 9/1000, en effectuant chaque 6 heures des aspirations de mucus à travers la sonde de Foley. Les données qui ont été étudiées durant le séjour hospitalier sont les suivantes : Le lever des patients, les soins conférés en hospitalier, le retrait de la tuyauterie (sonde naso-gastrique et système de drainage) et l’état des sondes urétérales et urétrale, la reprise du transit et les modalités d’alimentation, la durée globale de l’hospitalisation et l’hygiène quotidienne de la néovessie en hospitalier.
INTRODUCTION |