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La symptomatologie
L’endométriose est une affection très polymorphe avec une symptomatologie très variée. Le caractère cyclique des symptômes est évocateur d’endométriose mais aucun symptôme n’est pathognomonique (1).
L’endométriose peut être aussi totalement asymptomatique (15).
Les dysménorrhées
Les dysménorrhées sont définies comme des douleurs abdomino-pelviennes cycliques, rythmées par les cycles menstruels. Elles ne sont pas spécifiques et sont très présentes dans la population générale. Cependant, elles représentent le premier motif de consultation des femmes souffrant d’endométriose. Il s’agit du symptôme le plus évocateur d’endométriose. On les retrouve dans 60% des cas d’endométriose (23).
Classiquement elles sont d’allure cycliques, secondaires, tardives au deuxième ou troisième jour du cycle, caractérisées par des spasmes intermittents. Cependant, une dysménorrhée primaire ne permet pas d’exclure une endométriose. En effet, on retrouve la maladie en cœlioscopie chez au moins 12 % des adolescentes présentant des dysménorrhées sévères (24).
Ces dysménorrhées s’aggravent dans le temps et peuvent être à l’origine d’absentéisme au travail ou à l’école (25)(26).
L’association entre les dysménorrhées et l’endométriose ne semble spécifique d’aucun type particulier d’endométriose ni d’aucune localisation particulière. Cependant, il est admis une relation entre la présence de dysménorrhées intenses et l’endométriose (27). La nature causale de l’association entre l’endométriose et les dysménorrhées est suggérée par la mise en évidence d’une relation croissante linéaire entre l’intensité de celles-ci et la probabilité de diagnostiquer d’une endométriose (24).
Les dyspareunies profondes
Les dyspareunies profondes sont caractérisées par des douleurs ressenties au niveau du bas ventre, dues au contact entre la verge du partenaire et le fond vaginal. Elles sont le plus souvent liées aux atteintes des ligaments utérosacrés, du fornix vaginal ou du cul-de sac de Douglas (25). Une étude observationnelle multicentrique portant sur 931 patientes retrouve une prévalence des dyspareunies profondes de 56 % chez des patientes ayant eu un diagnostic d’endométriose (28).
Les douleurs pelviennes chroniques
Les douleurs pelviennes chroniques sont un motif fréquent de consultation. En effet, elles représentent environ 10% des consultations en gynécologie (23). Une endométriose est retrouvée dans un tiers des cas et, chez les femmes atteintes d’endométriose, 75 à 85% présentent des algies pelviennes dont 30 à 60 % de manière chronique (29). Les douleurs sont pelviennes mais aussi abdominales, cycliques ou non. Localisées, diffuses ou à type de crampes, elles peuvent être confondues avec un syndrome du côlon irritable. Une irradiation lombaire peut indiquer une atteinte des ligaments utérosacrés ou lombo ovariens. Trois mécanismes sont impliqués dans l’apparition des douleurs : l’inflammation, l’infiltration nerveuse et les adhérences (25).
Les signes digestifs et urinaires
Les signes digestifs sont presque aussi fréquents que les symptômes purement gynécologiques chez les femmes endométriosiques et ne reflètent pas forcément une atteinte digestive. Une des explications proposée est le fait que les lésions d’endométriose sont souvent situées dans le compartiment postérieur à proximité du recto-sigmoïde de telle façon que la sécrétion locale de prostaglandines associée à l’inflammation des lésions explique les troubles fonctionnels (27). Les adhérences entre le rectum et la cloison recto-vaginal peuvent aussi expliquer les troubles digestifs.
On retrouve la présence de douleurs lors de la défécation, dyschésies, ténesmes, diarrhées, constipation, ballonnements, nausées et vomissements (30). Parmi eux, le signe digestif le plus évocateur d’endométriose profonde est la douleur à la défécation avec recrudescence menstruelle (24).
Les symptômes urinaires peuvent être présents chez les femmes endométriosiques même en l’absence d’atteinte vésicale. Ces symptômes sont semblables à ceux rencontrés dans la cystite interstitielle. En effet, on retrouve la présence de pollakiurie cyclique cataméniale, d’urgenturie et de dysurie (27).
L’infertilité
L’incidence de l’endométriose est de plus de 40% chez les femmes présentant une stérilité et près de 60% des patientes endométriosiques sont infertiles (31). Il est donc admis que l’endométriose et l’infertilité sont fréquemment associées.
La physiopathologie de la stérilité par endométriose reste incertaine. Différents mécanismes peuvent éventuellement expliquer cette corrélation dont des facteurs mécaniques comme les adhérences péri-tubo-ovariennes, des altérations anatomiques tubaires et ovariennes ou l’inflammation du pelvis avec la production de substances actives comme les prostaglandines. Des troubles de la folliculogénèse et de la maturation ovocytaire en fin de phase folliculaire ou un effet anti-spermatozoïdes peuvent aussi être en cause (32)(33).
Les retentissements psychologiques et sociaux
L’endométriose étant une maladie globale, elle affecte les patientes dans leur vie sociale et professionnelle. En effet, l’anxiété, la vulnérabilité au stress, la dépression et les troubles de l’humeur sont fréquemment rencontrés (34). Ces douleurs chroniques parfois insupportables sont à l’origine d’une altération de la qualité de vie. La maladie peut avoir des répercussions au niveau socioprofessionnel entraînant un manque de productivité avec des absences durant la scolarité ou le travail (35). Les douleurs et/ou l’infertilité peuvent avoir des répercussions au niveau du couple et de la vie sexuelle (36).
Notons que ces symptômes variés peuvent être évocateurs d’autres pathologies éloignées de l’endométriose. Dans tous les cas, il s’agit du caractère cyclique ou à renforcement cataménial qui doit attirer l’attention.
Par ailleurs, l’intensité de la douleur ne semble pas proportionnelle à la taille des lésions mais à l’importance de la réaction inflammatoire, à leur localisation et à l’altération de l’innervation. Ainsi des lésions jeunes peu volumineuses et visibles sont pourtant à l’origine de réactions inflammatoires importantes et d’une majoration de la douleur.
Chez certaines femmes, les lésions d’endométriose retrouvées ne sont pas toujours la seule étiologie des douleurs. Certaines femmes peuvent présenter une hypersensibilisation à la douleur caractérisée par une expression de la douleur ou des dysfonctions (pollakiurie, dyschésie, dyspareunie, etc…) apparaissant souvent disproportionnée en intensité et durée par rapport aux lésions effectivement retrouvées (25)(37).
Le diagnostic
Le diagnostic de l’endométriose se base sur une triade : l’interrogatoire, l’examen clinique et les examens complémentaires.
L’interrogatoire
Devant une plainte pour symptômes douloureux pelviens chroniques, l’interrogatoire de la patiente avec la description des symptômes et la recherche d’autres symptômes associés est primordial. Il permet de caractériser la douleur : date d’apparition, son retentissement et son intensité. Il évalue cette dernière à l’aide d’échelles de mesure de la sévérité telles l’échelle visuelle analogique (EVA) ou l’échelle numérique simple (ENS).
L’interrogatoire est minutieux à la recherche des symptômes principaux d’endométriose : les dysménorrhées, les douleurs pelviennes chroniques, les dyspareunies, l’infertilité et les signes secondaires telles que la douleur à la défécation, les troubles du transit et les symptômes urinaires.
Cependant ces symptômes sont extrêmement fréquents dans la population générale. C’est pourquoi certains aspects recherchés à l’interrogatoire permettent d’orienter le diagnostic :
▪ Les symptômes cycliques ou exacerbés par la période cataméniale sont très évocateurs d’endométriose (30).
▪ L’association de dysménorrhées avec au moins un autre symptôme d’endométriose : dans une étude rétrospective menée par Fauconnier et al., 60% à 90% des femmes ayant eu un diagnostic d’endométriose présentaient plus d’un symptôme (38).
▪ L’existence de dysménorrhées intenses caractérisées par un score supérieur à 7 à l’EVA associées à une résistante aux traitements antalgiques de niveau 1 et pouvant entraîner un absentéisme scolaire sont des éléments évocateurs (6).
Pour les patientes endométriosiques symptomatiques un interrogatoire minutieux peut permettre une orientation diagnostique. En effet, certaines douleurs peuvent être spécifiques de l’atteinte d’une localisation anatomique précise ou d’un organe précis par les implants profonds d’endométriose. On peut ainsi les qualifier de douleurs localisatrices. Pour la majorité, il s’agit de douleurs provoquées par la mobilisation des organes affectés par les lésions d’endométriose profonde (38).
Notons que les antécédents gynécologiques sont saisis de façon détaillée afin d’explorer et d’écarter d’autres causes de douleur. Une prise d’antécédents bien ciblée compte également des questions sur les caractéristiques des cycles (régularité, durée, abondance). L’interrogatoire évalue le contexte psycho-social, le retentissement de la douleur sur la vie professionnelle et les loisirs. Il recherche le retentissement de la douleur sur la vie de couple, la qualité des rapports sexuels et l’existence d’un désir de grossesse.
L’examen clinique
L’interrogatoire est poursuivi si possible par un examen clinique gynécologique dont la sensibilité est meilleure lorsqu’il est réalisé en période menstruelle (1).
L’examen clinique débute par une inspection au spéculum attentive du col et du cul-de-sac vaginal postérieur à la recherche de lésions bleutées caractéristiques. Ce type de lésions étant retrouvé dans 5 à 17% des cas suivant les séries (27).
Il se poursuit par une palpation orientée par les données recueillies de l’interrogatoire qui comprend un toucher vaginal à la recherche de lésions nodulaires ou d’une induration rétro-cervicale intéressant les ligaments utérosacrés, la face postérieure de l’isthme utérin ou la cloison recto-vaginale, la palpation de ces lésions étant douloureuse (39). Le toucher vaginal recherche aussi la présence d’un utérus rétroversé, d’annexes fixées au toucher ou la présence d’une masse annexielle. Il recherche des signes évocateurs d’adénomyose associée tels que la douleur à la mobilisation utérine et/ou la douleur à la pression utérine (40).
Il peut être nécessaire de réaliser un toucher rectal et une palpation bi-digitale afin d’étudier la cloison recto-vaginale (nodule ou infiltration), les ligaments utérosacrés et les paramètres (41).
Cependant l’examen clinique gynécologique peut être normal et ne permet pas d’éliminer le diagnostic de la maladie.
Les examens complémentaires
L’échographie pelvienne par voie endovaginale est l’examen complémentaire de première intention devant une suspicion d’endométriose (42). De préférence elle est à réaliser en première phase du cycle.
Elle est jugée fiable et le plus souvent suffisante pour affirmer ou exclure le diagnostic de kyste endométriosique selon la Haute Autorité de Santé (HAS). Le diagnostic positif d’endométriome peut être réalisé par un échographiste non expert.
L’échographie endovaginale peut permettre de diagnostiquer ou d’éliminer une atteinte profonde à condition que cet examen soit réalisé par un opérateur expérimenté (43).
L’Imagerie par Résonnance Magnétique (IRM) abodmino-pelvienne est préconisée en seconde intention. Elle permet de réaliser une cartographie des lésions d’endométriose sous-péritonéale profonde (1). En effet, les performances de l’IRM pelvienne pour le diagnostic d’endométriome ou d’endométriose profonde sont bonnes, même si des différences existent entre les différentes localisations (valeur diagnostique inferieure pour les localisations vaginales et de la cloison recto-vaginale) (24).
D’autres examens complémentaires peuvent être prescrits selon la localisation de la maladie comme l’écho-endoscopie, l’uroscanner ou le coloscanner.
Cependant, le diagnostic définitif de l’endométriose reste histologique (29). Il repose sur la cœlioscopie avec la réalisation de biopsies. Les biopsies doivent retrouver la présence de glandes et de stroma endométrial. La cœlioscopie est considérée comme l’examen clé permettant de visualiser différentes lésions d’endométriose après un bilan adéquat (1).
Les traitements
Les formes asymptomatiques de l’endométriose ne relèvent pas d’une thérapeutique médicamenteuse (15). Chez les patientes non traitées l’évolution peut être spontanément favorable.
A ce jour il n’existe pas de traitement médical curatif ou préventif concernant l’endométriose. Cependant il existe trois types de prise en charge pour en traiter les symptômes : le traitement médical, le traitement chirurgical et les médecines alternatives. On sait de plus que l’association d’une psychothérapie améliore les résultats du traitement sur les douleurs chroniques (1).
Le traitement médical
Chez les femmes présentant une dysménorrhée sévère ou des douleurs pelviennes chroniques nuisant à leur qualité de vie, la prise en charge de la douleur s’avère nécessaire, que la douleur en question soit attribuable ou non à l’endométriose (39). Le traitement médical a donc pour objectif de soulager les patientes des douleurs invalidantes et d’améliorer leur qualité de vie.
Les Anti-inflammatoires Non Stéroïdiens (AINS) peuvent être utilisés pour traiter les dysménorrhées. Les AINS ayant l’autorisation de mise sur le marché (AMM) « dysménorrhée » sont très souvent utilisés en automédication en cas de règles douloureuses, cependant en cas de maladie endométriosique associée, ils se révèlent rapidement insuffisants (44).
Lorsqu’il n’y a pas de désir de grossesse, un traitement hormonal peut être proposé visant à obtenir une aménorrhée par blocage de l’activité ovarienne, afin de suspendre les manifestations douloureuses de la maladie.
Une contraception oestroprogestative peut être proposée. Dans une étude prospective randomisée versus agonistes de la GnRH, on retrouve chez les patientes endométriosiques traitées par une contraception oestroprogestative une amélioration significative des dysménorrhées, dyspareunies et douleurs pelviennes au bout de 6 mois (45). Chez des patientes ne notant pas d’amélioration suite à la prise d’un contraceptif oestroprogestatif avec une période d’arrêt la prise en continu peut être bénéfique (39). Il est à noter qu’aucune contraception œstroprogestative n’a l’AMM dans le traitement de l’endométriose.
Les progestatifs à dose antigonadaotrope sont les plus souvent utilisés en première intention. Il existe de très nombreux progestatifs commercialisés, mais seuls certains d’entre eux possèdent l’AMM en France dans l’indication « endométriose » dont l’acétate de chlormadinone (Lutéran ®), la médrogestone (Colprone ®) (40). Leurs effets secondaires sont liés à l’hypoestrogénie : rétention hydro sodée, spottings, diminution de la libido, etc. A noter que les macroprogestatifs ne possèdent pas l’AMM en tant que contraceptifs.
Table des matières
INTRODUCTION
I. GENERALITES SUR L’ENDOMÉTRIOSE ET ENJEUX
1. Rappels et généralités
1.1 Définitions
1.2 Epidémiologie et prévalence
1.3 Facteurs de risques
1.4 Physiopathologies
1.5 Les formes anatomocliniques de l’endométriose
1.6 Classification
2. La symptomatologie
2.1 Les dysménorrhées
2.2 Les dyspareunies profondes
2.3 Les douleurs pelviennes chroniques
2.4 Les signes digestifs et urinaires
2.5 L’infertilité
2.6 Les retentissements psychologiques et sociaux
3. Le diagnostic
3.1 L’interrogatoire
3.2 L’examen clinique
3.3 Les examens complémentaires
4. Les traitements
4.1 Le traitement médical
4.2 Le traitement chirurgical
4.3 Les traitements alternatifs
5. Enjeux d’une meilleure prise en charge et rôle de la sage-femme
II. MATERIELS ET METHODES
1. Objectifs et hypothèses
2. Type d’étude
3. Population d’étude
4. Méthodologie et outils d’étude
5. Principaux éléments recherchés dans le questionnaire
6. Exploitation des données
III. RESULTATS
1. Profil de la population
2. Etats des lieux des pratiques
IV. DISCUSSION
1. Les forces de l’étude
2. Les limites
3. Représentativité de la population testée
4. Formation des sages-femmes en gynécologie
5. Connaissances et pratiques des sages-femmes
6. Les nouvelles recommandations de la HAS
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
LISTE DES TABLEAUX
ANNEXES
GLOSSAIRE