EMISSION X DE PLASMAS CHAUDS HORS
EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE LOCAL CREES
PAR LASER
Introduction
La spectroscopie des plasmas constitue un domaine de recherche particulièrement important dans le contexte plus général des recherches autour des plasmas créés par laser, car elle est étroitement liée d’une part à l’étude de la physique atomique des plasmas, et d’autre part à l’interprétation des spectres d’émission et d’absorption. Elle est particulièrement importante pour la description des situations où le transfert de la radiation à travers le plasma joue un rôle crucial dans la détermination des propriétés hydrodynamiques et de l’évolution du milieu. Deux domaines dans lesquels ces phénomènes sont dominants attirent une grande attention de la part de la communauté à l’heure actuelle : l’astrophysique et la production d’énergie par fusion nucléaire, quelque soit le schéma expérimental envisagé. Dans la physique stellaire, la structure et l’évolution des étoiles sont largement conditionnées par les phénomènes radiatifs. Un exemple est le cas du Soleil, dans lequel le transport de l’énergie du centre de l’étoile jusqu’à l’interface des zones radiative et convective est dominé par les propriétés radiatives des éléments lourds, pourtant présents seulement en traces dans sa composition. La précision des modèles décrivant le Soleil dépend donc de la précision avec laquelle ces propriétés radiatives sont connues (TurckChièze, 2013 et réf. incluses). Un autre exemple est constitué par la pulsation des Cépheïdes, dont l’oscillation est régie par l’opacité de leurs constituants, en particulier le fer (Salmon, 2012 ; DaszynskaDaszkiewicz, 2013). Le principe de la fusion par confinement inertiel consiste à placer le combustible (un mélange deutériumtritium) dans une coquille qui est ensuite implosée de manière à atteindre des conditions de densité et température suffisantes au déclenchement des réactions de fusion. Cette implosion est réalisée par chauffage de la coquille au moyen d’un rayonnement intense : la coquille (constituée en général d’éléments légers et éventuellement dopée d’éléments de Z intermédiaire) est ablatée et, par effet fusée, le combustible est comprimé. Dans le schéma d’ « attaque directe » le chauffage de la coquille est réalisé par irradiation directe avec un grand nombre de faisceaux laser de puissance ; dans le schéma d’ « attaque indirecte » la coquille est chauffée par le rayonnement X produit par la conversion de l’énergie laser focalisée sur les parois internes d’une cavité composée généralement par des matériaux de numéro atomique élevé (typiquement de l’or). Ces deux géométries sont schématisées sur la I2 Introduction figure I.1. Dans un cas comme dans l’autre, une bonne connaissance de la physique atomique des différents matériaux est indispensable. Concernant la coquille, dont le rôle est de maximiser le rendement de conversion de l’énergie laser en énergie cinétique utile à la compression du combustible, une connaissance précise de ses propriétés de photoabsorption est essentielle. De la même manière, une description exacte de la physique atomique de la paroi de la cavité est nécessaire pour pouvoir prévoir le rayonnement X qu’elle émet, en termes d’intensité et de spectre. Les études liées à la fusion par confinement magnétique, dans laquelle le plasma est chauffé et confiné à l’intérieur d’une chambre magnétique torique (tokamak), nécessitent aussi d’un certain nombre d’informations relatives aux propriétés radiatives de la matière. Au delà des propriétés du combustible, un exemple est donné par le choix du matériau constituant les parois du tokamak faisant face au plasma. Ce choix doit être le fruit d’un compromis entre des valeurs élevées de conductivité thermique et de seuil de fusion, et un faible taux d’érosion au contact du plasma. D’autre part, se retrouvant dans le plasma en tant qu’impureté, il ne doit pas provoquer des pertes radiatives trop importantes. Le choix du matériau dépend donc de ses propriétés radiatives. Ceci a motivé, par exemple, des études récentes sur le tungstène (envisagé comme constituant des parois d’ITER), élément dont les propriétés radiatives ont très peu été étudiées jusqu’ici (Fontes, 2009 ; Madeira, 2013). Un autre aspect qui rend incontournable une bonne connaissance de la physique atomique est l’utilisation de l’émission X comme diagnostic des paramètres hydrodynamiques du plasma. Cette utilisation est apparue dés les premiers travaux en physique des plasmas et très rapidement des nombreux travaux ont été consacrés à l’étude des signatures spectrales qui peuvent être utilisées comme diagnostic de la température électronique et de la densité électronique, notamment (Cooper, 1966 ; Mihalas, 1978 ; De Michelis, 1981 ; BelyDubau, 1984 ; Peyrusse, 1993 ; Griem, 1964, 1974 et 1997). Bien évidemment, cela suppose que la modélisation de l’émission soit fiable et précise. D’une façon générale, l’émission dite « de couche K », constituée des transitions qui désexcitent un électron vers le niveau fondamental de la couche de numéro quantique principal n = 1, est souvent assez bien modélisée et peut donc être utilisée raisonnablement en tant que diagnostic du plasma émetteur, surtout dans les situations où différents codes restituent les spectres en utilisant les mêmes paramètres hydrodynamiques. Mais les calculs détaillés utilisés pour modéliser l’émission de couche K, qui met en jeu un nombre limité de niveaux d’énergies et de transitions électroniques, atteignent leur limite pour des situations impliquant un grand nombre de niveau d’énergies et de transitions électroniques. De ce fait, des traitements statistiques ont vu le jour lorsque l’on s’est intéressé à l’émission d’ions multichargés provenant d’élément de numéro atomique intermédiaire à élevé (BaucheArnoult, 1979 et 1985 ; Bauche, 1982). L’émission « de couche M » (transitions aboutissant à un niveau de la couche n = 3) se prête bien à ce type de traitement, étant donné le très grand nombre de transitions mis en jeu. L’émission « de couche L » (transitions aboutissant à un niveau de la couche n = 2), quant à elle, est une situation intermédiaire qui est plus problématique à modéliser, les niveaux étant à la fois trop nombreux pour un traitement détaillé complet, et pas assez pour que le traitement statistique soit vraiment adapté. La modélisation doit alors trouver le bon compromis entre calcul détaillé et traitement statistique (Hansen, 2007 ; Porcherot, 20), ce qui rend ce type de calculs plus délicat à effectuer. De plus, si dans certaines conditions d’équilibre du plasma émetteur il existe des simplifications possibles pour les calculs de cinétique atomique, dans les conditions hors équilibre les paramètres hydrodynamiques à un instant donné et les gradients spatiaux et temporels influencent l’émission de rayonnement, ajoutant ainsi une difficulté supplémentaire à la modélisation. L’utilisation de l’émission de rayonnement en tant que diagnostic repose donc sur l’existence de codes de calculs de cinétique atomique vérifiés et validés par des expériences, dites de benchmark en anglais, visant à mesurer à la fois le spectre et les conditions hydrodynamiques dans lesquelles il est produit (Lee, 1997 ; Bowen, 2003 et 2006 ; Rubiano, 2007 ; Fontes, 2009). Ce travail de thèse s’insère dans ce contexte. On peut identifier deux stratégies pour réaliser une expérience de validation dans ce domaine. Dans la première, on s’efforce de produire un plasma le plus homogène possible, de façon à minimiser l’effet des gradients spatiaux. Cette approche a été utilisée dans des expériences menées au LLNL (Laurence Livermore National Laboratory, USA) au début des années 2000 (Glenzer, 2000) sur des gas bags, c’est à dire des sphères creuses remplies de gaz à la pression atmosphérique. Plusieurs études ont montré que ce type de cible permet d’obtenir des plasmas assez homogènes (Kalantar, 1995 ; Glenzer, 1997). La deuxième approche, qui est celle choisie pour le travail présenté ici, consiste à étudier un plasma en détente monodimensionnelle. Si la première approche (gas bag) permet de s’affranchir des la complexité liée à la modélisation hydrodynamique du plasma, elle ne permet que l’étude d’éléments gazeux et à des densités relativement faibles (≤ 21 cm3 ). L’approche « plasma en détente », par contre, laisse une grande souplesse quant au choix du matériau à étudier et si la détente se fait seulement dans la direction longitudinale l’effet des gradients latéraux peut être négligé.
Ion multichargé et structure atomique
Un ion multichargé 𝑋 𝑧 , de degré de charge 𝑧, est un atome 𝑋 de numéro atomique 𝑍𝑁 (et de masse atomique 𝐴) qui a perdu 𝑧 électrons. Un degré de charge 𝑧 = 0 correspond ainsi à un ion neutre et 𝑧 = 𝑍𝑁 à un ion complètement ionisé. Le nombre d’électrons liés restant est ℕ = 𝑍𝑁 − 𝑧. Sa structure atomique peut être caractérisée par un ensemble de nombres quantiques. Le nombre quantique principal (𝑛) représente une couche. A chaque couche 𝑛 sont associées n souscouches représentées par un nombre quantique azimuthal 𝑙, avec 0 ≤ 𝑙 ≤ 𝑛 − 1. Si le nombre d’électrons sur la couche 𝑛 est maximal, et égal à 2𝑛 2 , on parle de couche complète (ou fermée), dans le cas contraire de couche ouverte. Une souscouche 𝑛𝑙 peut contenir au maximum 2(2𝑙 + 1) électrons. On appelle les couches 𝑛 = 1, 2, 3 … couches K, L, M, … La répartition des ℕ électrons liés sur un jeu de souscouches définit une configuration ℂ = (𝑛1𝑙1) 𝑝1(𝑛2𝑙2) 𝑝2(𝑛3𝑙3) 𝑝3 … où ∑𝑖 𝑝𝑖 = ℕ. La couche de nombre quantique principal maximal est appelée couche externe, par opposition aux autres couches, dites internes. L’état fondamental d’un ion correspond à une configuration électronique dans laquelle les électrons occupent les souscouches d’énergie la plus basse, selon la règle de Klechkowski. Toute autre configuration est dite excitée. Figure 1.1 : Diagramme dit « de Klechkowski » : pour chaque valeur de n+l, les flèches illustrent l’ordre de remplissage des souscouches dans chaque couche atomique. Quelques éléments échappent cependant à cette règle. Chaque souscouche se décompose en niveaux notés, en couplage LSJ (le plus couramment utilisé), 𝐿𝐽 2𝑆+1 où J est le moment cinétique total des électrons, L le moment cinétique orbital total et S le moment cinétique de spin total. Les ions dont le niveau fondamental (noté 𝑓 dans la suite) correspond à une couche complète appartiennent aux séquences isoélectroniques de l’hélium (couche K : 1𝑠 2 ), du 14 Généralités néon (couche L : 1𝑠 22𝑠 22𝑝 6 ), du nickel (couche M : 1𝑠 22𝑠 22𝑝 63𝑠 23𝑝 63𝑑 ), … On parle d’ions héliumoïdes, néonoïdes, nickeloïdes, … Ce sont les ions les plus stables et donc les plus abondants. Figure 1.2 : Potentiels d’ionisation du germanium (Z=32) (Kelly, 1971) : les discontinuités correspondent à la fermeture des couches complètes.
Interaction lasermatière
L’interaction laser matière dépend fortement de la durée de l’impulsion laser ; nous nous limiterons dans cette section aux impulsions de durée nanoseconde qui correspondent à celles que nous avons utilisées. Un plasma produit par laser est un milieu intrinsèquement inhomogène en raison de la nature des mécanismes qui l’ont créé et qui contrôlent son hydrodynamique. La structure obtenue après les premiers instants de l’interaction se caractérise par plusieurs zones schématisées sur la figure 1.3 : 1. la couronne – qui porte ce nom par analogie avec la couronne solaire en raison de sa température élevée et de sa faible densité se détend dans le vide en étant directement chauffée par le laser jusqu’à la densité critique 𝑛𝑐 (cm3 ) = 1,1 21 𝜆 2 ⁄ (𝜆 étant la longueur d’onde laser exprimée en µm) ; 2. la zone de conversion est chauffée par conduction électronique par les électrons libres créés dans la couronne et se refroidit en rayonnant soit vers l’avant, au travers de la couronne (constituant ainsi une partie du rayonnement observé), soit vers l’arrière, vers le solide ; 3. pour les plasmas de numéro atomique élevé, ce rayonnement est le précurseur d’une onde de conduction radiative qui chauffe la zone de réémission ; 4. la détente de la couronne induit, par effet fusée, une onde de compression vers l’intérieur de la cible ; la zone sous choc, délimitée vers l’avant par le front d’ablation 15 Généralités (limite solideplasma), présente alors une densité supérieure à celle du solide et une température de seulement quelques eV ; 5. audelà subsiste, lorsque la cible est suffisamment épaisse, le solide. Figure 1.3 : Schéma de la structure d’un plasma créé par irradiation d’une cible solide avec un laser nanoseconde. Quelle que soit la zone concernée, on peut supposer – et ceci est généralement vérifié dans les plasmas chauds créés par interaction lasermatière en régime nanoseconde tels que ceux que nous avons étudiés que les électrons libres du plasma sont thermalisés et décrits par une fonction de distribution Maxwellienne caractérisée par une densité électronique 𝑛𝑒 et une température électronique 𝑇𝑒 . De même, les ions peuvent être définis par une température ionique 𝑇𝑖 et une densité ionique 𝑛𝑖 . Hydrodynamique Un plasma est ainsi considéré comme un fluide à deux températures. Son évolution, son hydrodynamique, est régie par des équations de conservation, de masse, de moment et d’énergie. En supposant une géométrie monodimensionnelle plane (ici pour des raisons de simplification des écritures), ces équations s’écrivent : 𝜕𝜌 𝜕𝑡 + 𝜌 𝜕𝑢 𝜕𝑥 = 0; 𝜌 ( 𝜕𝑢 𝜕𝑡 + 𝑢 𝜕𝑢 𝜕𝑥) + 1 𝜌 𝜕𝑃 𝜕𝑥 = 0; 𝜌 𝜕ℰ𝑒 𝜕𝑡 + 𝑃𝑒 𝜕𝑢 𝜕𝑥 + 𝜕𝑞𝑒 𝜕𝑥 = 𝒬𝑒𝑖 + 𝑆𝑙𝑎𝑠 − 𝑃𝑟𝑎𝑑 𝜌 𝜕ℰ𝑖 𝜕𝑡 + 𝑃𝑖 𝜕𝑢 𝜕𝑥 + 𝜕𝑞𝑖 𝜕𝑥 = −𝒬𝑒𝑖. où 𝜌 est la densité de masse, 𝑃 la pression totale (𝑃 = 𝑃𝑒 + 𝑃𝑖 ), 𝑢 la vitesse, ℰ𝑒/𝑖 les densités d’énergie électronique et ionique (ℰ𝑒/𝑖 = 𝐶𝑣 𝑒/𝑖𝑇𝑒/𝑖 , 𝐶𝑣 étant une chaleur spécifique), 𝑞𝑒/𝑖 les laser front de choc front d’ablation 16 Généralités flux de chaleur électronique et ionique, 𝑆𝑙𝑎𝑠 une source d’énergie (laser) et 𝑃𝑟𝑎𝑑 une perte d’énergie (rayonnement). 𝒬𝑒𝑖 est un terme d’échange d’énergie entre électrons et ions : 𝒬𝑒𝑖 = 3 2 𝑚𝑒 𝑚𝑖 𝑛𝑒 (𝑇𝑖 − 𝑇𝑒 )/𝜏𝑒𝑖 avec 𝜏𝑒𝑖 ∝ 𝑍 ∗𝑛𝑒𝑇𝑒 −3/2 et 𝑍 ∗ le degré d’ionisation moyen du plasma (le plasma étant neutre, 𝑍 ∗ = 𝑛𝑒/𝑛𝑖 ) (Spitzer, 1962). Pour fermer le système, il faut une équation d’état, exprimant 𝑃𝑒/𝑖 et ℰ𝑒/𝑖 en fonction de 𝜌 et de 𝑇𝑒/𝑖 . Absorption Dans un plasma laser en régime nanoseconde, l’absorption laser se fait principalement sous forme d’absorption collisionnelle (ou Bremsstrahlung inverse : B.I.). Dans ce cas, le dépôt d’énergie laser se fait depuis la couronne jusqu’à la densité critique (trajet aller) selon la loi : 𝑆𝑙𝑎𝑠 = 𝜕𝜙𝑙𝑎𝑠 𝜕𝑥 = 𝐾𝐵𝐼𝜙𝑙𝑎𝑠 où 𝐾𝐵𝐼 ∝ 𝑍 ∗ (𝑛𝑒⁄𝑛𝑐 ) 2𝑇𝑒 − 3 2 /√1 − 𝑛𝑒⁄𝑛𝑐 (Johnston, 1973). Cette expression n’est en fait strictement valable que dans la couronne (faible densité, forte température). Des expressions plus générales basées sur un calcul détaillé de permittivité complexe peuvent être utilisées (Lee, 1984 ; S. Jacquemot et A. Decoster communication privée). D’autres formes d’absorption existent, notamment l’absorption résonante. Le dépôt d’énergie correspondant se fait exclusivement à la densité critique et est souvent pris égal à une fraction (de l’ordre de %) du dépôt par B.I. à cet endroit. A noter que l’énergie laser non déposée à la densité critique par B.I. ou par absorption résonante est réfléchie et peut être absorbée par B.I. sur le trajet retour. Transport Plusieurs modèles ont été élaborés pour décrire le transport thermique électronique. Le plus classique est celui de L. Spitzer et J.R. Härm (Spitzer, 1953) qui permet d’écrire 𝑞𝑒 = −𝐾𝑒𝜕𝑇𝑒/𝜕𝑥 . Cette expression n’étant valable que pour des gradients de température relativement faibles, elle est usuellement corrigée en introduisant un flux limite 𝑞𝑙𝑖𝑚 (celui d’électrons en écoulement libre) et un facteur empirique 𝑓𝑙𝑖𝑚 selon : 𝑞𝑒 = min(−𝐾𝑒 𝜕𝑇𝑒 𝜕𝑥 , 𝑓𝑙𝑖𝑚𝑞𝑙𝑖𝑚) avec 𝑞𝑙𝑖𝑚 = 𝑛𝑒𝑇𝑒√𝑘𝑇𝑒⁄𝑚𝑒 et 𝐾𝑒 ∝ 𝑇𝑒 5/2 (le coefficient de proportionnalité étant fonction de 𝑍 ∗ ). Lorsque cette limitation ne suffit pas (en présence de gradients très raides), des théories 17 Généralités de flux délocalisé ont été développées par exemple par J.F. Luciani, P. Mora et J. Virmont (Mora, 1983), E.M. Epperlein et R.W. Short (Epperlein, 1994) ou G. Schurtz, Ph. Nicolaï et M. Busquet (Schurtz, 2000). Un traitement FokkerPlanck du transport peut également être envisagé (Kingham, 20). Le transport ionique est en général traité de manière classique : qi = − Ki ∂Ti ∂x (Ki ∝ Ti 5 2). Transfert radiatif L’expression des pertes radiatives résulte de la résolution d’une équation de transfert de rayonnement et du calcul de deux grandeurs caractéristiques du plasma, son émissivité 𝑗𝜈 et son opacité 𝑘𝜈 (voir section 1.3). Il s’agit d’un problème complexe faisant souvent l’objet d’approximations (faible anisotropie du rayonnement – approximation P1 – par exemple) et de traitements approchés (approche multigroupe, moyennes « grises », etc). Dans le cadre de l’approximation P1, 𝑃𝑟𝑎𝑑 s’exprime en fonction de 𝑗𝜈, de 𝑘𝜈 et de l’intensité du rayonnement 𝐼𝜈 selon : 4𝜋𝑈𝜈 = ∫ 𝐼𝜈 𝑑 2Ω; 𝑃𝑟𝑎𝑑 = 4𝜋 ∫(𝑗𝜈 − 𝑘𝜈𝑈𝜈 )𝑑𝜈 où ∫ 𝑑 2Ω représente une intégration sur toutes les directions Ω⃗ de propagation possible des photons. Il faut de plus rajouter aux équations de conservation de l’hydrodynamique une équation de transfert de rayonnement .. Si le terme 𝜕Φ𝜈 ⃗⃗⃗⃗⃗⃗ 𝜕𝑡 est négligé, on obtient une équation de diffusion : 𝜕𝑈𝜈 𝜕𝑡 − 𝜕 𝜕𝑥 ( 𝑐 3𝑘𝜈 𝜕𝑈𝜈 𝜕𝑥 ) = 𝑐(𝑗𝜈−𝑘𝜈𝑈𝜈 ) [cas 1D plan]. Ce système d’équations pour décrire l’hydrodynamique d’un plasma laser est résolu numériquement. La notion de transfert radiatif est également nécessaire pour comprendre les spectres observés. En effet, le rayonnement doit, avant d’être détecté, traverser une épaisseur, même infinitésimale, de plasma. En supposant que seul est observé le rayonnement se propageant vers le détecteur perpendiculairement au plasma (selon l’axe Ox du schéma en figure 1.4), l’équation du transfert radiatif se simplifie selon : [ 1 𝑐 𝜕 𝜕𝑡 + 𝜕 𝜕𝑥]𝐼𝜈 = 𝑗𝜈 − 𝑘𝜈𝐼𝜈. 18 Généralités En régime stationnaire et pour un plasma homogène, cela donne : 𝐼𝜈 = (𝑗𝜈⁄𝑘𝜈 )[1 − 𝑒 −𝑘𝜈Δ𝑥 ] pour une épaisseur Δ𝑥 et aucun rayonnement incident [𝐼𝜈 (𝑥 = 0) = 0]. Le rapport 𝑗𝜈⁄𝑘𝜈 est la fonction source du rayonnement. Figure 1.4 : Observation du rayonnement émis par le plasma. On parle de plasma optiquement mince si l’opacité est faible dans tout le plasma ; dans ce cas, 𝑒 −𝑘𝜈Δ𝑥~1 − 𝑘𝜈Δ𝑥 et 𝐼𝜈~𝑗𝜈 Δ𝑥 . Dans le cas contraire (plasma optiquement épais), 𝑒 −𝑘𝜈Δ𝑥~0, il y a peu d’émission de rayonnement (réabsorption presque complète) : 𝐼𝜈 → 𝑗𝜈⁄𝑘𝜈. Les plasmas étudiés lors de cette thèse peuvent être en fait considérés comme une succession de tranches de plasma homogènes ; le rayonnement émis en sortie de la tranche n s’écrit alors : 𝐼𝜈𝑛 = 𝑆𝜈𝑛 (1 − 𝑒 −𝑘𝜈𝑛 Δ𝑥𝑛) + 𝑒 −𝑘𝜈𝑛 Δ𝑥𝑛 [𝑆𝜈𝑛−1 (1 − 𝑒 −𝑘𝜈𝑛−1 Δ𝑥𝑛−1) + 𝑒 −𝑘𝜈𝑛−1 Δ𝑥𝑛−1[… ]] créant ainsi des couplages non locaux entre des régions de densité et températures différentes par un jeu d’absorption et de réémission successives. Le rayonnement observé dépend ainsi des dimensions du plasma et des gradients spatiaux des paramètres hydrodynamiques.
Introduction |