Eléments de la théorie spectrale
Dans ce qui suit E et F disignent des espaces de Banach et H un espace de Hilbert muni du produit scalaire (., .) et de la norme correspondante k.k.
Opérateurs linéaires
Définition 1.1.1 Un opérateur linéaire A : D(A) ⊂ E → F est une application linéaire A définie d’un sous-espace vectoriel D(A) ⊂ E et `a valeurs dans F, D(A) est appelé le domaine de A. On dit que A est `a domaine dense ou (densément défini) si D(A) = E. • On appelle noyau de A le sous-espace de E, défini par N(A) = {x ∈ D(A) : Ax = 0}. • On appelle image de A le sous-espace de F, défini par R(A) = A(D(A)). • On appelle graphe de A le sous-espace de E × F, défini par G(A) = {(x, Ax) ∈ E × F : x ∈ D(A)}. Définition 1.1.2 Soient A : D(A) ⊂ E → F et B : D(B) ⊂ E → F, deux opérateurs linéaires. On dit que B est une extension de A et on note A ⊂ B si D(A) ⊂ D(B) et ∀x ∈ D(A), Ax = Bx. Définition 1.1.3 Soit A un opérateur linéaire de domaine D(A) dense dans H, et soit D(A∗ ) l’ensemble des vecteurs v ∈ H pour lesquels il existe h ∈ H tel que (Au, v) = (u, h), ∀u ∈ D(A). 1.1 Eléments de la théorie spectrale 6 Pour tout v ∈ D(A∗ ), on pose A ∗ v = h. On appelle A∗ l’opérateur adjoint de A. Définition 1.1.4 L’opérateur A : D(A) ⊂ H → H est dit • symétrique lorsque (Au, v) = (u, Av), ∀u, v ∈ D(A), • aut-adjoint si A = A∗ , i.e D(A) = D(A∗ ) et (u, Av) = (Au, v), ∀u, v ∈ D(A). 1.1.2 Opérateurs linéaires bornés Définition 1.1.5 On dit qu’un opérateur linéaire A : E → F est borné s’il est continu, autrement dit : ∃c > 0, ∀x ∈ E, kAxk ≤ ckxk. On note L(E, F) l’espace vectoriel des opérateurs linéaires bornés de E dans F, muni de la norme kAkL(E,F) = sup x∈E, x6=0 kAxk kxk = sup kxk=1 kAxk. Si E = F, on note L(E, F) = L(E). Théor`eme 1.1.1 (Théor`eme de l’isomorphisme) Si A ∈ L(E, F) est bijectif alors A−1 ∈ L(F, E). Proposition 1.1.1 Soit A ∈ L(E). Si kAkL(E) < 1, alors I − A est inversible dans L(E) et (I − A) −1 = X n≥0 A n . Proposition 1.1.2 Soit A ∈ L(H). Il existe un unique opérateur A∗ ∈ L(H) tel que ∀u, v ∈ H,(Au, v) = (u, A∗v). De plus, 1. kA∗kL(H) = kAkL(H) , 2. Si A est inversible dans L(H), alors A∗ est aussi inversible dans L(H) et (A∗ ) −1 = (A−1 ) ∗ . Définition 1.1.6 Un opérateur P ∈ L(H) est appelé un projecteur lorsque P 2 = P. Si de plus P ∗ = P, on dit que P est un projecteur orthogonal. Proposition 1.1.3 Soit A ∈ L(H) un opérateur auto-adjoint. Alors pour tout u ∈ H, 1. (Au, u) ∈ R, 2. kAkL(H) = sup{(Au, u) : kuk = 1}. 1.1 Eléments de la théorie spectrale
Opérateurs linéaires fermés
Définition 1.1.7 Un opérateur A : D(A) ⊂ E → F est dit fermé si son graphe est fermé dans E × F, i.e, pour toute suite (xn) ⊂ D(A) telle que xn → x ∈ E et Axn → y ∈ F. Alors x ∈ D(A) et y = Ax. Un opérateur linéaire est dit fermable s’il admet une extension fermée. Théor`eme 1.1.2 (Théor`eme du graphe fermé) Soit A un opérateur linéaire défini de E dans F, alors A est continu si et seulement s’il est fermé. Théor`eme 1.1.3 Soient H1 et H2 deux espaces de Hilbert et soit A : D(A) ⊂ H1 → H2 un opérateur fermé, avec D(A) = H1. Alors les propriétés suivantes sont équivalentes : (i) R(A) est fermé. (ii) R(A∗ ) est fermé. (iii) R(A) = N(A∗ ) ⊥. (iv) R(A∗ ) = N(A) ⊥. 1.1.4 Spectre et résolvante d’un opérateur non-borné Définition 1.1.8 Soit A : D(A) ⊂ H → H un opérateur fermé `a domaine dense. • On appelle spectre de A la partie de C défini par σ(A) = {λ ∈ C : λI − A n’est pas inversible dans L(H)}. Les éléments de σ(A) sont appelés valeurs spectrales de A. • L’ensemble C − σ(A) est appelé ensemble résolvant de A et est noté ρ(A), qui est un ouvert de C. Si λ ∈ ρ(A), on définit la résolvante de A au point λ par Rλ(A) = (λI − A) −1 Pour tout λ, µ ∈ ρ(A), on a la formule de l’identité de la résolvante ; Rλ(A)Rµ(A) = (µ − λ)(Rλ(A) − Rµ(A). • L’application λ → Rλ(A) (λ ∈ ρ(A)) est analytique sur ρ(A). • L’opérateur (λI − A) peut ne pas ˆetre injectif et dans ce cas λ est une valeur propre. L’ensemble des valeurs propres de A est appelé spectre ponctuel de A et est noté σp(A). Un vecteur x non nul tel que Ax = λx est appelé vecteur propre de A associé `a la valeur propre λ. La multiplicité de la valeur propre λ est la dimension de N(λI − A). • Si λ ∈ σ(A) − σp(A), alors R(λI − A) est injectif mais non surjectif. Deux cas se présentent : . Si R(λI − A) n’est pas dense, on dit que λ ∈ σr(A) le spectre résiduel de A. . Si R(λI − A) est dense, on dit que λ ∈ σc(A) le spectre continu de A.