Elaboration et étude du comportement de micro / nanoparticules antiferromagnétiques synthétiques pour applications biotechnologiques
Les nanoparticules magnétiques pour la biologie
Les particules magnétiques pour la biologie Depuis l’antiquité, les matériaux magnétiques ont été une source d’inspiration pour l’exploitation de leurs propriétés. Ainsi, les Chinois ont constaté qu’un petit aimant s’oriente dans le champ magnétique terrestre et ont réalisé les premières boussoles. Par la suite Avicenne, médecin et philosophe persan, a recommandé des grains de magnétite pris avec du lait pour éliminer les effets de l’ingestion accidentelle de rouille. Les aimants ont été également utilisés pour extraire des éclats de fer des yeux.
Intérêt des particules magnétiques pour la biologie
De nos jours où les technologies évoluent vers une miniaturisation toujours plus poussée, des micro ou nanoparticules magnétiques sont de plus en plus utilisées pour des applications dans le domaine des biotechnologies ou du biomédical. Les particules magnétiques conventionnelles les plus couramment utilisées sont en général préparées par voie chimique conduisant à la formation de solutions colloïdales (approche bottom-up). Elles peuvent être fonctionnalisées en fonction de l’application visée. Les particules magnétiques sont en particulier destinées aux applications médicales et biologiques, offrant des possibilités attrayantes pour la biomédecine. Mais elles peuvent être utilisées aussi dans d’autres domaines concernant la nanomécanique, la microfluidique, les ferrofluides… En premier lieu, l’intérêt principal de ce type d’objet magnétique réside dans la possibilité d’exercer à distance une force ou une action sur les particules par l’intermédiaire d’un champ magnétique. La perméabilité magnétique des ces particules (souvent en oxyde de 8 fer (magnétite) est en général bien supérieure à celle des tissus humains ce qui permet d’exercer des forces sur les particules par l’application de gradient de champ magnétique. Du point de vue de leurs tailles, les particules magnétiques ont pu être obtenues avec des dimensions proches de celles d’entités biologiques micro ou nanométriques. Leurs dimensions typiques (notamment celles des particules conventionnelles, dont la forme est en général quasisphérique), peuvent se réduire à des diamètres variant de quelques micromètres à quelques nanomètres. Ainsi, les tailles peuvent être inférieures ou comparables à celles d’une cellule (10-100µm), d’un virus (20-450 nm), d’une protéine (5-50 nm) ou d’un gène (2 nm de large et de 10-100 nm de long), ce qui signifie que les particules peuvent «se rapprocher» d’une entité biologique d’intérêt.
Fonctionnalisation des particules
Par une fonctionnalisation biologique de leurs surfaces, les particules magnétiques peuvent être recouvertes d’espèces biologiques ou chimiques greffées à leurs surfaces, ce qui leur permet d’interagir et se lier avec une entité biologique ciblée, offrant ainsi la possibilité d’un « marquage » d’espèces biologiques. Greffées ou non, les particules peuvent ainsi être déplacées par un gradient de champ magnétique externe, quasistatique. Cette action à distance ouvre de nombreuses applications impliquant le transport de particules magnétiques, ou d’entités biologiques magnétiquement marquées. De cette façon il est possible de réaliser une délivrance ciblée de médicaments, par exemple anticancéreux, ou le guidage d’atomes de radionucléides vers une région ciblée du corps, comme une tumeur.
Action à distance d’un champ magnétique
Les particules magnétiques peuvent également être destinées à répondre à l’effet d’un champ magnétique appliqué alternatif, permettant un transfert local d’énergie. En particulier, l’alternance du champ magnétique peut être utilisée pour chauffer les particules, ce qui conduit à leur utilisation comme agents d’hyperthermie. Par leur échauffement, elles délivrent 9 des quantités toxiques d’énergie thermique aux organismes ciblés. Leur utilisation est envisagée en particulier pour provoquer ainsi la mort de cellules cancéreuses. De manière comparable, les particules peuvent servir d’agents de mise en valeur en chimiothérapie et radiothérapie, où à un degré modéré, l’échauffement des tissus améliore l’efficacité de la destruction de cellules malignes par les agents chimiques ou radiologiques.
Les nanoparticules magnétiques en biomédecine
Grâce aux propriétés physiques particulières des nanoparticules magnétiques, la biomédecine dispose d’applications particulières comme celles citées ci-dessus, mais également de nombreuses autres applications potentielles [1]. Les particules magnétiques présentent beaucoup d’intérêt en tant qu’outil thérapeutique, dans l’administration ciblée de produits pharmaceutiques par ciblage magnétique [2,3], et par ciblage actif grâce à la fixation de ligands de haute affinité [4,5,6]. Ces particules possèdent le potentiel de surmonter les limitations associées à la distribution systémique des chimiothérapies conventionnelles. Grâce à l’action du champ magnétique à distance et la possibilité d’un ciblage spécifique par les biomarqueurs de maladies, les particules magnétiques offrent un moyen attrayant de diriger des agents thérapeutiques spécifiquement vers un site malade, ce qui permet la réduction des posologies et des effets secondaires associés à l’absorption non-spécifique de médicaments cytotoxiques par les tissus sains. En particulier, les particules d’oxyde de fer colloïdal utilisées comme vecteurs de déplacement magnétiques ont démontré dans de premiers essais cliniques un certain degré de succès pour cette technique et montré une tolérance satisfaisante par les patients [7,8]. Bien que les niveaux de sécurité et d’efficacité requis pour une approbation réglementaire ne soient pas encore atteints, les études précliniques ont indiqué que certaines des insuffisances de cette méthode peuvent être surmontées par des améliorations dans la conception des particules magnétiques [9,10]. En outre, les particules magnétiques qui servent de transporteurs de médicaments peuvent permettre la surveillance en temps réel de la livraison des médicaments, ce qui représente un vaste domaine d’intérêt [11,12]. 10 Un défi important lié à l’application de ces systèmes est leur comportement in vivo. L’efficacité de plusieurs de ces systèmes est souvent compromise en raison de la reconnaissance et de l’élimination des particules par le système réticulo-endothélial (RES) avant qu’elles ne puissent atteindre le tissu cible, ainsi que par l’incapacité de surmonter les barrières biologiques, comme l’endothélium vasculaire ou la barrière hémato-encéphalique. Le sort de ces particules magnétiques lors de leur administration par voie intraveineuse est fortement dépendant de leurs tailles, morphologies, charges et chimies de surfaces. Ces propriétés physico-chimiques des particules affectent directement leur pharmacocinétique et la biodistribution ultérieures [13]. Pour augmenter l’efficacité des particules magnétiques, plusieurs techniques, notamment la réduction de la taille et le greffage de polymères ont été employées, dans le but d’améliorer leur « furtivité » et pour augmenter leur temps de passage dans la circulation sanguine afin de maximiser les chances d’atteindre les tissus ciblés [14,15]. Parmi les nanoparticules magnétiques conventionnelles, une nouvelle génération d’agents de contraste pour l’imagerie et de vecteurs de déplacement pour l’administration ciblée de médicaments intègre de nouveaux noyaux nanocristallins magnétiques, matériaux de revêtement, et ligands fonctionnels pour améliorer la détection et le rôle spécifique de ces particules. Par exemple, des nanocristaux d’oxyde de fer dopés, des alliages métalliques et nanocomposites, sont utilisés, offrant de plus forts moments magnétiques, permettant ainsi d’augmenter le rapport signal/bruit en imagerie IRM. Parallèlement, l’utilisation de nouveaux revêtements couvrant les surfaces des particules, par exemple d’or ou de silice, permettent d’améliorer la biocompatibilité des particules magnétiques qui autrement seraient toxiques. Par ailleurs, de récentes études et revues indiquent un rôle croissant de la mécanique cellulaire dans les maladies comme le paludisme [16,17] ou les métastases du cancer [18,19,20]. En tant que tel, il existe un potentiel pour les nouvelles générations plates-formes à incorporer des qualités de surface qui permettrait de sondage et /ou la surveillance des changements physiques mécanistes locaux à une échelle de longueur qui contribuerait grandement à l’amélioration de la détection des maladies, la surveillance et le traitement. La pénétration des champs magnétiques dans les tissus humains et la capacité de détecter à distance ou manipuler des matériaux magnétiques ont été étudiées pour être utilisées en médecine depuis des siècles [21]. Une des applications les plus récentes et importantes de ces propriétés est constituée par l’IRM en tant que modalité d’imagerie non invasive permettant de fournir des images anatomiques de haute résolution. Les potentiels de 11 l’imagerie clinique médicale actuelle peuvent être encore considérablement élargis grâce à l’utilisation de particules magnétiques qui permettent d’améliorer la différenciation des tissus malades et sains. De plus, selon l’emplacement de la tumeur maligne ou de la lésion, les champs magnétiques externes peuvent contrôler et orienter l’accumulation de particules pour offrir des voies thérapeutiques.
Propriétés magnétiques des particules
Notions fondamentales
Afin de mieux comprendre les avantages des particules magnétiques nous passons en revue brièvement quelques-unes des notions fondamentales du magnétisme ainsi que les propriétés des micro et nanoparticules magnétiques. Lorsqu’un matériau est plongé dans un champ magnétique appliqué H, chaque moment atomique contribue à la réponse globale du matériau à ce champ. Cette réponse est caractérisée par l’induction magnétique B, mesurée en Tesla (T), également connue comme la densité de flux magnétique. La relation entre le champ magnétique H et la réponse du matériau B est connue sous le nom de perméabilité du matériau magnétique µ, propriété caractéristique du matériau. Définie par la relation : B=µH (1.1) Dans le vide : µ0=B/H (1.2) La perméabilité du vide µ0 = 4π x 10-7 WbA-1m -1 . Dans tout autre environnement, toutefois, la perméabilité µ peut ne pas être constante, et dépendre du champ magnétique appliqué, en particulier dans les matériaux ferromagnétiques. Afin de relier les propriétés magnétiques d’un matériau à l’induction magnétique, engendrée par un champ appliqué, nous introduisons l’aimantation M déjà définie comme le moment magnétique par unité de volume : M=m/V (1.3) où m est le moment magnétique et V est le volume du matériau. L’aimantation est reliée au champ magnétique H et à l’induction magnétique B par la relation : B = µ0(H +M) (1.4) Enfin, la susceptibilité d’un matériau peut être définie comme : χ= H M (1.5) Elle caractérise la réponse d’un système à l’excitation magnétique H. Le classement des propriétés magnétiques des matériaux est basé sur leur susceptibilité magnétique (χ) : – Les matériaux diamagnétiques sont caractérisés par une aimantation M antiparallèle au champ magnétique appliqué H, avec des susceptibilités négatives et très faibles (-10-6 à – 10-3). – Les matériaux paramagnétiques présentent des moments magnétiques qui s’alignent parallèlement au champ appliqué H, avec des susceptibilités positives et faibles également, de l’ordre de 10-6 à 10-1 . Ces matériaux ne conservent pas leur aimantation lorsque le champ extérieur est nul. – Les matériaux ferromagnétiques sont bien connus pour leur aimantation spontanée, qui peut être non nulle en l’absence de champ magnétique appliqué. Celle-ci résulte de l’existence d’interaction d’échange couplant entre eux les spins des électrons. Ces interactions conduisent à des états magnétiques ordonnés. Les moments magnétiques tendent à s’aligner parallèlement au champ magnétique H appliqué mais les effets de champ démagnétisant peuvent conduire à la formation de domaines magnétiques destinés à réduire l’énergie magnétostatique du système. Les matériaux ferromagnétiques possèdent souvent une anisotropie magnétique uniaxiale c’est-à-dire une direction privilégiée d’orientation de l’aimantation caractérisée par une énergie d’anisotropie par unité de volume K. L’aimantation tend à s’orienter dans un sens ou le sens opposé suivant cette direction facile d’orientation. Cette anisotropie peut venir de la nature cristalline du matériau utilisé, de sa forme, de contrainte mécanique.
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