EFFETS SYNERGIQUES DE DEUX BIOPESTICIDES SUR LES LARVES DE MOUSTIQUE
LE NEEM ET SES PRINCIPALES CARACTERISTIQUES
Aujourd’hui connu sous le nom botanique d’Azadirachta indica A. Juss,1830, le neem est un arbre qui appartient à la famille des méliacées. Il a fait l’objet d’intenses activités de recherches depuis l’isolement en passant par la caractérisation de l’azadirachtine comme insecticide naturel à partir des graines (Butterworth et Morgan, 1968). Cet arbre est originaire du sous-continent indien où ses propriétés médicinales sont connues depuis des millénaires. Au début du XXème siècle, l’arbre est introduit dans plusieurs pays en voie de développement particulièrement en Afrique tropicale. Il a fait l’objet d’intenses campagnes de plantations au cours des dernières années, particulièrement au Sénégal où on le trouve aussi bien en campagne qu’en ville.
Classification et Nomenclature
Classification botanique
Le neem peut être classé comme suit (Schmutterer, 1995 ; PURI, 1999): Embranchement : Angiospermes (plantes à fleurs) Sous-embranchement : Magnoliophyta Classe : Magnoliopsida Sous classe : Rosidae Super ordre : Rosanae Ordre : sapindales Sous ordre : Rutineae Famille : Meliaceae Sous famille : Melioideae Genre : Azadirachta Espèce : indica Nom binomial : A. indica A. Juss, 1830
Nomenclature
Azadirachta indica, appelé « neem » en wolof (langue nationale sénégalaise), possède plusieurs noms vernaculaires selon les régions géographiques. Autres noms vernaculaires : Français : Acacia d’Egypte, margousier, arbre à chapelets, Lilas des Indes (à ne pas confondre avec le Lagestroemia). Anglais: neem tree, Indian lilac, Margosa tree, Persian lilac, China berry.
Origine du neem
Plusieurs sources bibliographiques évoquent l’origine géographique du neem, mais la majorité des auteurs s’accorde à dire que l’arbre est originaire de l’Inde. Ainsi selon plusieurs auteurs (Oo, 1989 ; Gamble, 1902 ; Troup, 1921 ; Vartak et Ghate, 1990), le neem est originaire soit de la forêt de Karnaba au sud de l’Inde, soit de l’intérieur de la forêt de Buma Myanmar. Mais pour d’autres, cet arbre proviendrait de la forêt de Chivalik (Puri, 1999). Cependant, d’autres situent son origine dans les forêts sud et sud-est de l’Asie, y compris le Pakistan, le Sri Lanka, la Thaïlande, la Malaisie et l’Indonésie (National Research Council, 1992).
Propriétés insecticides du neem
Ce sont les propriétés insecticides des extraits de neem qui ont été les plus étudiées. Et bien que cette activité soit mentionnée dans les récits médicaux sanskrits il y a de cela des milliers d’années, les énormes potentialités du neem pour le contrôle et la lutte contre les insectes ravageurs ne sont devenues claires que récemment, en particulier en réponse au problème posé par la bioaccumulation et la toxicité des pesticides de synthèse utilisés pour l’agriculture depuis plus de 60 ans. La capacité du neem à repousser les insectes a été signalée pour la première fois dans la littérature scientifique en 1928 et 1929 par deux chercheurs indiens (Chopra, R.N. et Husain, M.A.), qui ont utilisé 0,001% d’une suspension aqueuse de graines de neem pour repousser du sol des criquets pèlerins (Schmutterer, 1995). En 1962, à New Delhi, Pradhan constate que les criquets refusent de manger les cultures traitées par pulvérisation d’un extrait aqueux de graines de neem, et ce jusqu’à trois semaines après le traitement (Schmutterer, 1995). Dix ans plus tard, des essais réalisés à la station de recherche sur le café en Haute Kiambu (Kenya) ont montré que les extraits méthanoliques de feuilles de 10 neem contrôlaient la croissance du bogue du café (Antestiopus orbitalis bechuana) (Schmutterer, 1995). La plupart des groupes d’insectes traités avec cet extrait perdait la vie au cours des mues et les rares survivants présentaient des malformations au niveau des ailes et du thorax à l’âge adulte. De même les extraits méthanoliques d’amande de neem se sont avérés efficaces pour la réduction de la fécondité de coléoptères du haricot mexicain (Epilachna varivestis) et de la patate du Colorado (Leptinotarsa decemlineata). Certaines femelles avaient presque cessé de pondre et d’autres étaient devenues stériles (Schmutterer, 1995). Ces activités insecticides des extraits de neem sont attribuées à la présence dans différentes parties de la plante de plusieurs composés de la famille des terpénoïdes. Parmi les nombreux dérivés de la sous famille des limonoïdes qui ont été identifiés et dont l’activité biologique a été étudiée, c’est l’azadirachtine et ses dérivés qui ont fait l’objet du plus grand nombre.
L’azadirachtine : principe actif du neem
Structure et caractérisation de l’azadirachtine
Butterworth et Morgan (1968) ont isolé pour la première fois l’azadirachtine sous sa forme cristalline à partir d’extraits méthanoliques de graines de neem. Bien que sa présence ait aussi été signalée dans un autre arbre Melia Azedarach. L. (Morgan et Thornton, 1973) qui pousse dans les mêmes régions, cette molécule apparait spécifique au neem. En réalité, depuis la première proposition de structure (Butterworth et al., 1972), modifiée par Kraus et al., (1985 a,b ; 1986 ; 1987 c) et Pöhnl (1985) plusieurs molécules de structure analogue ont aussi été isolées à partir du neem et peuvent être classées en trois groupes : les azadirachtoles, les azadirachtines et les méliacarpines (Schmutterer, 1995). Par mesure de simplification, ces dérivés qui présentent le même squelette carboné mais diffèrent par la position ou la nature des substituants, ont été désignés sous le nom générique d’azadirachtine, affecté d’une lettre A, B, C etc. (Figure I-3, Remboldt et al., 1987 a,b ; Remboldt, 1989 a ; Yamasaki et Klock, 1987). C’est l’azadirachtine A qui est considérée comme le motif structural de référence.
Le champignon entomopathogène Metarhizium anisopliae
Généralités sur les champignons
Les champignons (fungi ou mycètes) constituent un groupe d’organismes hétérotrophes ubiquistes, riche de quelques 120000 espèces, présentant des structures et des caractéristiques biologiques extrêmement diversifiées, adaptées au mode de vie saprophyte, parasitaire ou symbiotique (Senal et al., 1993 ; Anonyme a, 2000 ; Anonyme b, 2000 ; Kirk et al., 2001). Les champignons sont des microorganismes eucaryotes filamenteux, aérobies strictes et rarement anaérobies (Mathew, 1995 ; Tortora et al., 2003), ayant un métabolisme hétérotrophe car ils tirent leur énergie de la respiration et de la fermentation des matières organiques solubles disponibles dans leur environnement (Leveau et Bouix, 1993 ; Nicklin et al., 1999). Sur le plan morphologique, le champignon est constitué d’un thalle qui forme son appareil végétatif (Hawksworth et al., 1994). L’appareil végétatif se compose d’élément de base appelé hyphe qui forme un réseau de filaments ramifiés ; le mycélium (Mathew, 1995). Chez la plupart des champignons les hyphes sont divisés par des cloisons, ou septa (septum au singulier) formant des unités qui ressemblent à des cellules distinctes avec un seul noyau, on les appelle alors hyphes segmentés ou septés. Dans quelques classes de mycètes, les hyphes ne contiennent pas des cloisons et ont l’aspect de longues cellules continues à noyau multiples ils sont appelés cénocytes (Tortora et al., 2003). Les hyphes, segmentés ou non, sont en fait de petits tubules transparents s’entourent d’une paroi cellulaire rigide formée de polymère de chitine et des polymères de la cellulose, éléments chimiques qui lui confèrent une grande rigidité, une longévité et une grande capacité de résistance à la chaleur et à des pressions osmotiques élevées. De ces faits, les champignons sont donc capables de vivre dans un environnement rude (Tortora et al.,2003). En effet, les Champignons se développent à pH légèrement acide (3 et 7) et à une température optimale comprise entre 20°C et 30°C, cependant certaines espèces sont psychrophiles, se développant à des températures très basses <15°C ou même parfois à <0°C (Botton et al., 1990 ; Guiraud, 1998 ; Tortora et al., 2003). I.2.2. Les champignons entomopathogènes Les agents pathogènes sont des organismes vivants pouvant engendrer une maladie à leur hôte. Les pathogènes des insectes appelés entomopathogènes comprennent : les bactéries (ex : Bacillus thuringiensis, B. sphaericus), les protozoaires (ex : Amoebidea), les virus (ex : Entomopox virus) et les champignons qui font l’objet de notre étude. Parmi les micro- 25 organismes utilisés en lutte biologique, plus de 700 espèces de micro-champignons sont entomopathogènes (Starnes et al., 1993) et jouent un rôle important dans la régulation naturelle des populations d’insectes (Ferron, 1978 ; Wraight et Roberts, 1987). Ils appartiennent au sous-taxon des Mastigiomycotina, Zygomycotina, Ascomycotina et Deuteuromycotina. Le plus grand nombre de pathogènes se trouvent dans la classe des Zygomycètes, mais les plus utilisées en lutte biologique proviennent des Deuteromycètes (Fungi imperfecti). Ces derniers appartiennent aux champignons à hyphes septés, se multipliant de façon non sexuée. Les espèces des genres Beauveria, Metharizium, sont les plus utilisées en lutte biologique (Wraight et Roberts, 1987 ; Goettel, 1992) et ont un intérêt agronomique considérable dans la lutte biologique contre les ravageurs de cultures et sont donc l’objet d’études de plus en plus poussées.
Metarhizium anisopliae
Metarhizium anisopliae était le premier pathogène utilisé délibérément pour le contrôle des insectes ravageurs par le Russe Eli Metchinnicoff (le père de la lutte microbiologique) dans les années 80. Il a été isolé et identifié sur la paille de céréale prés d’Odessa en Ukraine sous le nom Anisopliae austria ou il l’a nommé Entomophtora anisopliae. En 1883 Sorokin assigna ce champignon à la muscardine verte au genre Metarhizium. Depuis il est connu sous le nom de Metarhizium anisopliae.
Taxonomie et Classification
La classification de Metarhizium anisopliae a été sujette à plusieurs révisions au cours des dernières années. Par le passé, l’espèce a été classée principalement sous la division des Deutéromycètes, dans la classe des Hyphomycètes. Les membres de cette sous-division ayant comme spécificité le fait de ne jamais produire, ou très rarement, des spores sexuées. Cette classe est en fait caractérisée par la présence de formes mycéliennes portant des spores asexuées, appelées conidies, engendrées sur des cellules conidiogènes spécialisées. Par contre, à l’heure actuelle, la plupart des mycologistes n’acceptent plus les Deuteromycota et ses sousclasses comme formant un assemblage taxonomique. Plusieurs espèces de champignons ont été associées avec des membres de la division des Ascomycota sur une base d’homologie d’ADN, dont l’espèce M. anisopliae (Inglis et al., 2001). Cette espèce fait dès lors partie du règne des Mycota, de la division des Ascomycota et de l’ordre des Hypocreales. La classification de ce genre à été basée sur des caractères morphologiques des cellules et des 26 conidies, et comme ces caractéristiques sont assez limitées elles ont compliqué la taxonomie. (Bidochka et Small, 2005).
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