EFFETS DU BIOCHAR SUR LES ACTIVITES
MICROBIOLOGIQUES DU SOL SOUS FORTS
INTRANTS AZOTES
Le maraîchage au Sénégal
La pratique des cultures maraîchères au Sénégal constitue une activité très ancienne, les premiers jardins potagers ayant été créés dans la presqu’île du Cap Vert dès le début du XIXe siècle (De Bon et al, 1993). C’est une agriculture urbaine et périurbaine qui s’est développée à la suite des contre-performances de l’agriculture rurale et du déficit alimentaire (Touré-Fall et al, 2001). Son développement s’est considérablement accéléré au Sénégal ces dernières années. En 2003, la superficie couverte par la culture maraichère était de 23008 ha pour une production de 314537 tonnes (Direction de l’analyse et de la prévision des Statistiques, 2009). Située sur la Côte Ouest du Sénégal, la région des Niayes jouit de conditions climatiques favorables au développement d’une horticulture de type méditerranéenne. Le maraichage dans cette zone constitue une source de revenus très importante et assure l’essentiel de l’approvisionnement de Dakar en légumes (Touré-Fall et al, 2001). L’amendement organique est pratiqué par les maraichers de la région pour faire face à la pauvreté des sols en matière organique et le manque de fertilité associé (Touré et Seck, 2005). 1.2 Les sols Le sol est la partie superficielle de l’écorce terrestre. Il est issu de la transformation de la roche sous l’action de facteurs biologiques et physico-chimiques. Le résultat de cette transformation est une liaison intime entre une fraction inerte, issue des constituants de la roche mère et des apports organiques, et une composante vivante. Le sol est le siège d’activités biologiques liées à la dégradation de la matière organique qui jouent un rôle essentiel dans les cycles biogéochimiques du carbone et de l’azote entre autres. Le sol, réserve de nutriments, est le support de la production végétale ; il peut aussi influencer la composition de l’atmosphère en émettant des gaz à effet de serre. 1.2.1Matière organique (MO) et minéralisation du carbone. La matière organique du sol est constituée par l’ensemble des composés carbonés d’origine animale ou végétale. Elle comprend une fraction inerte (résidus végétaux et animaux) et une fraction vivante constituée par les organismes vivants du sol. Sa décomposition fournit au sol les éléments nutritifs nécessaires à l’activité microbienne et à la croissance des plantes. Les taux de décomposition de la matière organique sont régulés par les interactions entre la qualité de celle-ci, les organismes vivants et le microclimat (Swift et al, 1979). Lundgardh (1927) a émis l’idée d’une corrélation entre la décomposition de la MO et l’évolution du CO2 et la température du sol. Cette décomposition serait plus rapide en zone humide ou sous un climat tempéré qu’en zone aride (Stark, 1973). Le processus microbien d’acquisition d’énergie est accompagné de libération d’éléments nutritifs (figure 1). Ces éléments nutritifs peuvent soit intégrer la biomasse microbienne et végétale, soit rester dans le sol ou être perdus à travers le lessivage. La matière organique, lors de sa minéralisation, passe par différentes phases dont chacune est sous le contrôle de différents organismes. Cependant la dernière étape de cette décomposition est assurée par les microorganismes hétérotrophes aérobies à travers la respiration. Cela leur permet de maintenir leur potentiel réducteur pour l’énergie et d’acquérir le carbone nécessaire à la production de biomasse (Waldrop, 2000). Cette dernière étape est donc marquée par la libération de CO2. D’ailleurs l’évolution du CO2 est le reflet de la dégradation catabolique de la matière organique (Nannipieri, 2003). Le CO2 est le plus important des gaz à effet de serre et contribue à 60% du réchauffement climatique (Rastogi et al, 2002). Figure 1 : Processus biologiques de dégradation de la matière organique du sol.
Emissions de N2O par les sols
Le N2O est un puissant gaz à effet de serre. Son pouvoir de réchauffement global sur 100 ans est 320 fois plus important que celui du CO2 avec un temps de vie de 120 ans environs (GIEC, 1996). Le N2O issu de l’activité humaine contribue à hauteur de 3 GT CO2e (équivalent dioxyde de carbone) soit environ 8% des émissions totales de gaz à effet de serre en 2004, et l’agriculture est le secteur d’activité à l’origine de 42% du N2O émis mondialement (Denman et al, 2007).
Mécanismes de production
Le N2O est essentiellement produit à partir des activités biologiques du sol (Knowles, 1982). Les principales voies biologiques de production de N2O par les sols sont la nitrification et la dénitrification (Klein et al, 2001) (figure 2). 5 Figure 2 : Principales transformations biologiques de l’azote minéral dans le sol émettrices de N2O (d’après Wrage et al, 2001). Durant la nitrification, l’ammoniac (NH3) ou l’ammonium (NH4 + ) sont oxydés en nitrates (NO3 – ). La première étape de la réaction appelée nitritation produit d’abord de l’hydroxylamine (NH2OH) par oxydation de l’ammonium puis des nitrites. L’étape suivante, la nitratation, transforment les nitrites en nitrates. Ces étapes sont principalement réalisées par les bactéries du genre Nitrosomonas et Nitrobacter qui sont aérobies et autotrophes ; c’est-à-dire qu’elles retirent leur énergie de l’oxydation respectivement de l’hydroxylamine (NH2OH) et des nitrites NO2 – et utilisent le CO2 comme source de carbone (Colliver et Stephenson, 2000). La nitrification autotrophe est la voie de nitrification la plus répandue. Cependant, certains organismes hétérotrophes, notamment des champignons, qui utilisent les composés organiques au lieu du CO2 comme source d’énergie, peuvent aussi participer au processus de nitrification (Bremner et Blackmer, 1981). La nitrification peut être une source de protoxyde d’azote comme produit secondaire de la réaction. En effet lors de l’oxydation de l’ammoniac, la décomposition chimique des intermédiaires de la réaction entraine la formation de N2O (Wrage et al, 2001). La nitrification dénitrifiante (ou dénitrification par les micro-organismes nitrifiants) est une voie particulière de nitrification (figure 2). Il s’agit de l’oxydation de l’azote ammoniacal en nitrite, suivie de la réduction des NO2 – en N2O et en N2. Cette voix ressemble dans sa première partie à la nitrification sensu stricto (oxydation du NH3 en NO2 – ), cependant elle est effectuée par un unique groupe de microorganismes, les bactéries autotrophes nitritantes qui réalise l’ensemble de la chaine de réaction. Dans cette voie de production de N2O, les nitrates ne sont pas un produit de la chaine de réaction et les enzymes impliquées sont différentes de celles d’une nitrification classique (Wrage et al, 2001). 6 La dénitrification est un processus de réduction par étapes des formes oxydés de l’azote (NO3 – et NO2 – ) en diazote (N2). Le N2O est un produit intermédiaire de la réaction (figure 2) ; il est produit naturellement et non accidentellement comme c’est le cas pour la nitrification (Wrage et al, 2001). La production de N2O via la dénitrification est un équilibre entre le mécanisme de production de N2O, conduit successivement par les enzymes nitrate réductase (Nar), nitrite réductase (Nir), oxyde nitrique réductase (Nor) et le mécanisme de réduction du N2O via l’enzyme oxyde nitreux réductase (Nos) (Knowles, 1982) : NO3 – Nar NO2 – Nir NO Nor N2O Nos N2 La dénitrification est assurée par des microorganismes dénitrifiants qui sont largement distribués dans plusieurs familles de bactéries (Pseudomonas, Bacillus, Thiobacillus…) (Firestone, 1982). Ces bactéries sont essentiellement hétérotrophes et anaérobies facultatifs. Les microorganismes dénitrifiants sont capables de substituer le NO3 – à l’oxygène comme accepteur final d’électrons dans des conditions de faible teneur en oxygène ou d’anaérobiose (Wrage et al, 2001).
INTRODUCTION |