EFFETS DE L’INSULARITE ET DES REGIMES DES FEUX SUR LA VARIABILITE ET LA STRUCTURE GENETIQUES DE POPULATIONS DE PIN GRIS
L’une des questions majeures actuellement en génécologie concerne la distribution de la variabilité génétique à l’intérieur ainsi qu’entre les populations d’une espèce. Les études tentent de déterminer comment la variabilité est répartie et structurée au sein des populations et entre les populations (Knowles 1984). Plusieurs études ont révélé que les populations de conifères ont un polymorphisme alloenzymatique élevé comparativement à d’autres groupes d’espèces végétales (Hamrick et al. 1979, 1981; Mitton 1983; Hamrick et Godt 1989). Le potentiel pour la dispersion du pollen par le vent sur de longues distances et le manque de discontinuité dans les grandes populations chez les conifères, sont souvent invoqués pour expliquer le faible degré de différenciation entre les sous populations (Hamrick et al. 1979, 1981; Mitton 1983; Loveless et Hamrick 1984; Hamrick et Godt 1989). Les résultats de plusieurs études indiquent toutefois que, chez les plantes, de grandes populations sont structurées en sous-populations et ce, à différents degrés (Jain et Bradshaw 1966; Schaal et Smith 1980; Linhart et al. 1981; Knowles 1984; Plessas et Strauss 1986). Cette sous structuration peut résulter d’un flux génique restreint si un certain degré d’isolation existe, de différences dans les pressions sélectives, engendrées par l’hétérogénéité de l’environnement, ou encore d’événements purement aléatoires telle la dérive génétique. Au sein même des populations, une mosaïque dans la distribution des génotypes peut être observée (Linhart et al. 1981; Knowles 1984;
structure peut être imposé par les différences de pressions sélectives dues aux variations de conditions dans les microsites. De plus, les individus peuvent avoir tendance à se croiser avec les quelques arbres de leur voisinage, formant alors de petites unités de croisement, et à disperser la majorité de leurs graines dans une zone relativement restreinte ce qui peut résulter en une sous structure familiale en semi-fratrie (Bradshaw 1972; Levin et Kerster 1974; Endler 1977; Linhart et al. 1981). Dans la présente étude, la structure et la variabilité génétiques de populations de pin gris (Pinus banksiana) sont analysées à l’aide de marqueurs isoenzymatiques. Le pin gris est une espèce sérotineuse de la forêt boréale qui a une vaste aire de répartition sur le continent nord-américain. Récemment, quelques études portant sur la structure génétique des populations de l’espèce ont montré que seulement 2-6% de la variabilité observée avec ce type de marqueurs était attribuable à des différences entre les populations (Dancik et Yeh 1983; Danzmann et Buchert 1983; Knowles 1985; Ross et Hawkins 1986; Misenti et DeHayes 1988). De plus, Govindaraju (1988) a calculé que chez cette espèce, le flux
A priori, on s’attend à ce que des populations insulaires montrent un degré de différenciation entre populations plus élevé et moins de variabilité génétique intra-population que des populations terrestres tel que suggéré par le modèle insulaire de Wright (1932). Les prédictions de ce modèle, lorsque testées pour des îles océaniques se sont avérées exactes (Inoue et Kawahara 1990; Husband et Barrett 1991). Un flux génique restreint, inférieur à 1 migrant par génération (Nm < 1; Slatkin 1985) entre des populations isolées, en augmentant les possibilités de croisements apparentés, tout en intensifiant les effets stochastiques de la dérive généti que, par les effets fondateurs ou le faible effectif des populations sur plusieurs générations, peut conduire à une réduction de la variabilité intra-population et à leur différenciation. Ces effets sont particulièrement susceptibles d’être marqués lorsque les populations sont suffisamment éloignées pour engendrer une isolation reproductive comme dans le cas d’îles océaniques. A une échelle régionale, toutefois, le flux génique est probablement suffisant pour empêcher la fixation allélique due à la dérive génétique. Cependant, comme Wright (1978a) le mentionne, même avec un flux génique de Nm > 1, ce qui apparaît être le cas pour la majorité des conifères (Govindaraju 1988), des variations dans les fréquences alléliques d’un endroit à un autre, due à la dérive, peuvent subsister bien que cet effet stochastique ne conduise pas à la quasi fixation des allèles.