Les connexions corticocorticales
Les axones sont les prolongements uniques des neurones qui transmettent les influx nerveux vers une cible. En 1979, les chercheurs Kathleen Rockland et Deepak Pandya ont démontré que les connexions corticocorticales, c’est-à-dire d’un cortex vers un autre cortex, auraient des caractéristiques différentes selon leur direction. Les connexions rostro-caudales, désignées comme les connexions «feedforward », sont dirigées de l’avant vers l’arrière du cortex. Les connexions caudo-rostrales, désignées comme les connexions «feedback », sont dirigées de l’arrière vers l’avant du cortex. Ces directions pourraient correspondre aux voies ascendantes et descendantes. La réciprocité est aussi un important principe des connexions corticocorticales. Ils ont démontré que les voies ont tendance à être bidirectionnelles, de sorte que si l’aire A projette vers l’aire B, l’aire B risque de projeter aussi vers l’aire A. En 1991, ces notions ont été utilisées par les chercheurs Daniel F elleman et David Van Essen pour former la base de leur modèle de la hiérarchie corticale du cortex visuel chez le primate. Dans leur analyse des connexions corticocorticales, ils ont présenté un modèle dans lequel 32 aires corticales sont réparties sur 10 niveaux hiérarchiques. Dans ce modèle, les connexions feedforward projettent vers une aire de plus haut niveau et les connexions feedback vers une aire de plus bas niveau. Un troisième type, les connexions latérales, lie des aires corticales de niveau similaire (Bullier, 2001). Les motifs de connectivité asymétrique entre des aires réciproquement connectés permettent de déterminer la position des aires corticales dans la hiérarchie.
Comparaison entre humain et rongeur La proportion que représentent les différentes parties du corps au niveau cortical est illustrée par l’homoncule pour l’humain et par le souricule pour la souris (voir Figure 5) (Blumenfeld, 2010; Zembrzycki, Chou, Ashery-Padan, Stoykova, & O’Leary, 2013). Chez la souris, les vibrisses du museau, utilisées pour l’ exploration de l’environnement sont surreprésentées dans le cortex somatosensoriel. Chez l’humain, c’ est la représentation des mains qui est aussi surreprésentée que les vibrisses du museau. Figure 5. Parallèles entre humains et rongeurs. Homoncule et souricule (Bear et al., 2007; Zembrzycki et al., 2013). Chez la souris, on retrouve une région du cortex somatosensoriel primaire dédiée à . la représentation corticale des différentes parties du corps, le champ de tonneaux, qui est composé de plusieurs sous-régions associées à ces différentes parties. La partie postéromédiale du champ de tonneaux contient les corrélats corticaux des vibrisses du museau. Chez ces animaux, les vibrisses du museau sont utilisées pour l’exploration de l’environnement et leur représentation corticale est très développée. On retrouve en effet au niveau du cortex somatosensoriel primaire une représentation exacte de la disposition des vibrisses sur le museau de l’animal (Woolsey & Van der Loos, 1970). La souris est un rongeur nocturne et elle dépend grandement de ses vibrisses pour la localisation des objets et pour la discrimination des textures (Kleinfeld, Ahissar, & Diamond, 2006). Chez cet animal, la voie trigéminale est donc très importante. Chez l’humain, la représentation des mains occupe une grande surface du cortex somatosensoriel et est aussi surreprésentée que les vibrisses du museau dans le cortex (Blumenfeld, 2010; Zembrzycki et al., 2013). En plus de recevoir des informations des sources mentionnées précédemment, les cortex sensoriels primaires chez les rongeurs reçoivent également des informations des autres cortex sensoriels primaires par des connexions corticocorticales directes
Objectif 1 : Projections afférentes corticales et sous-corticales du cortex somatosensoriel primaire de la souris 13 Pour comprendre comment les cortex sensoriels primaires contribuent au traitement de l’information sensorielle, associative et motrice, il est important de connaitre l’ensemble des afférences vers ces aires, tant corticales que sous-corticales. L’ évaluation quantitative de la distribution laminaire des neurones permet la classification des projections en tant que feedforward, feedback ou latérale. Notre premier objectif était donc de faire l’évaluation quantitative des afférences du cortex somatosensoriel primaire chez la souris. Pour cartographier l’ensemble des afférences, corticales et souscorticales, vers le cortex somatosensoriel primaire, des injections d’un traceur rétrograde ont été faites dans la partie rostrale et caudale du champ de tonneaux ainsi que dans SI , à l’ extérieur du champ de tonneaux. La partie caudale du champ de tonneaux devrait être la seule à posséder des connexions avec le cortex visuel. Les résultats de notre étude démontrent que le cortex somatosensoriel primaire de la souris possède des connexions avec les cortex moteurs, les aires corticales associatives multisensorielles et des noyaux thalamiques propices aux interactions multisensorielles, ce qui soutient clairement l’hypothèse selon laquelle les cortex sensoriels primaires ne sont pas limités au traitement unisensoriel.
Un résultat important est la démonstration que les trois parties du cortex somatosensoriel primaire ont des projections différentes. La partie caudale du champ de tonneaux du cortex somatosensoriel primaire possède plus de connexions qui ciblent des aires corticales et sous-corticales sensorielles telles que des aires visuelles, auditives, somatosensorielles, olfactives et associatives en plus des connexions qui ciblent des aires motrices comparativement à la partie rostrale du champ de tonneaux et à la partie de SI , à l’extérieur du champ de tonneaux dont les connexions ciblent davantage des aires somatosensorielles et motrices. La partie caudale du champ de tonneaux est la seule partie de SI à recevoir des projections de VI. L’évaluation quantitative de la distribution laminaire des neurones nous a permis de classifier les projections en tant que feedforward, feedback ou latérale. Les connexions feedforward servent au transfert de l’ information à traiter vers une aire de plus haut niveau, les connexions feedback ont comme fonction le transfert de l’information vers une aire de plus bas niveau, et les connexions latérales permettent de lier des neurones d’ aires corticales de niveau similaire (Bullier, 2001; Felleman & Van Essen, 1991). Les projections vers le cortex somatosensoriel primaire seraient en majorité de nature feedback. Dans le cas des cortex sensoriels primaires, les projections auditives seraient de naturefeedback alors que les projections visuelles vers la partie caudale du champ de tonneaux seraient de nature latérale, ce qui démontre que les différents cortex sensoriels primaires n’occupent pas la même position dans la hiérarchie corticale.
Les réponses postsynaptiques de Classe 1
Les différences dans les propriétés synaptiques des deux types de réponses postsynaptiques ont été examinées principalement in vitro, où l’activation de diverses voies glutamatergiques a produit des effets postsynaptiques radicalement différents. Par exemple, une stimulation électrique de plus de 10Hz des voies glutamatergiques de Classe 1 a produit des potentiels postsynaptiques excitateurs initiaux de plus forte amplitude (PPSE), une dépression lors d’un test paired-pulse et une activation liée exclusivement aux récepteurs glutamatergiques ionotropiques (iGluR). Des exemples typiques de réponses postsynaptiques de Classe 1 sont trouvés dans les voies qui véhiculent l’information sensorielle des organes sensoriels de la périphérie vers le thalamus, voies désignées collectivement comme lemniscales, telles que la voie lemniscale médiale vers le noyau ventral postérieur médial et latéral (VPM et VPL) (Castro-Alamancos, 2002), la voie visuelle vers le corps géniculé latéral dorsal (CGLd) (Reichova & Sherman, 2004) et la voie auditive vers le corps géniculé médian ventral (CGMv) (Bartlett & Smith, 2002; Lee & Sherman, 2010). De manière similaire, les réponses postsynaptiques des voies corticothalarniques feedforward originaires de la couche 5 sont semblables à celle des réponses postsynaptiques de Classe 1 des voies lemniscales vers le thalamus (Li, Guido, & Bickford, 2003; Reichova & Sherman, 2004). Des réponses de Classe 1 ont également été identifiées à l’extérieur du thalamus, comme dans certaines voies thalamocorticales (Li, Guido et al., 2003; Reichova & Sherman, 2004; Viaene, Petrof, & Sherman, 2011a, 2011b), certaines voies corticorticales (Covic & Sherman, 2011; De Pasquale & Sherman, 2011), et quelques voies corticales locales (De Pasquale & Sherman, 2012).
Les réponses postsynaptiques de Classe 2 Les propriétés synaptiques des Classe 2 diffèrent substantiellement de celles des Classe 1. Par exemple, une stimulation électrique des projections locales de la couche 6 vers la couche 4 dans le cortex auditif et somatosensoriel primaire a produit des PP SE faibles et une facilitation lors d’un test paired-pulse (Lee & Sherman, 2008; Lee & Sherman, 2009a). Des effets similaires ont été mis en évidence dans des projections corticothalarniques originaires des cellules de la couche 6 (Bartlett & Smith, 2002; Li, Guido et al., 2003), des afférences thalamocorticales (Viaene, Petrof, & Sherman, 2011a, 2011c), et des voies corticocorticales (Covic & Sherman, 2011 ; De Pasquale & Sherman, 20 Il), ainsi que dans certaines voies corticales locales (De Pasquale & Sherman, 2012; Lee & Sherman, 2008; Lee & Sherman, 2009a). Ces réponses de Classe 2 sont capables d’ activer les récepteurs métabotropiques (mGluR) (Covic & Sherman, 2011 ; De Pasquale & Sherman, 2011 ; Lee & Sherman, 2008, 2009b; Reichova & Sherman, 2004; Viaene et al., 2011a, 2011c). Pour terminer, les voies contenant des réponses de Classe 2 sont constituées d’axones avec une plus grande tendance à converger sur des cellules individuelles par rapport à leurs homologues de la Classe 1 qui produisent des réponses postsynaptiques qui sont largement insensibles aux augmentations d’ intensité des stimulations indiquant peu ou pas de convergence des axones.
Sommaire |