Les pathologies Hématologiques
Les pathologies hématologiques sont des maladies peu fréquentes mais qui, grâce aux avancées thérapeutiques récentes tendent à se chroniciser. Ainsi, certaines d’entre elles ont vu leur épidémiologie se modifier au cours des dernières décennies.
Le chapitre suivant a pour objectif de décrire de manière succincte les différentes pathologies présentées par les patients inclus dans cette étude.
Le Lymphome de Hodgkin (LH)
C’est une affection dont le diagnostic repose sur l’anatomo-pathologie et correspond à des proliférations monoclonales de cellules B composées, en proportions variables, de cellules mononuclées de Hodgkin et de cellules plurinucléées de Reed-Sternberg au sein d’un infiltrat réactionnel composite. Le LH atteint classiquement les ganglions superficiels ou profonds dont la biopsie permet l’histologie. Il existe deux types de LH : Le classique représentant 95% des cas et lui-même divisé en plusieurs sous-types et le nodulaire à prédominance lymphocytaire. Les LH représentent environ 10 % des lymphomes .
La classification Ann Arbor permet de connaitre le stade (de I à IV par sévérité croissante) de la maladie en fonction de sa localisation, des signes cliniques et de la masse tumorale. Il existe plusieurs scores pronostics :
Celui s’appliquant pour les stades I et II établissant un groupe favorable (pas de facteurs de risque) et un groupe défavorable (un ou plusieurs facteurs de risque).
Le score pronostic international (IPS) s’appliquant aux stades III et IV
En 2011, environ 1 840 nouveaux cas de lymphome de Hodgkin ont été diagnostiqués en France. Cette pathologie touche de manière équivalente les deux sexes avec un rapport hommes/femmes de 1,1 en 2012. On note deux pics d’incidence selon l’âge : le premier (et le plus important) survient à l’âge de 25 ans et le second entre 75 et 80 ans.
Concernant l’épidémiologie récente : chez l’homme, on observe une augmentation lente mais constante avec un taux annuel moyen d’évolution de 1,5 % par an entre 2005 et 2012. Chez la femme l’incidence augmente de 1,2 % par an en moyenne entre 1980 et 2012.
Le lymphome de hodgkin est un cancer de bon pronostic. En France, la survie globale à 5 ans est de 81 % pour la période 2001-2004.
La leucémie lymphoïde chronique (LLC)
Son diagnostic repose sur l’hémogramme et l’immunophénotypage des lymphocytes retrouvant une accumulation monoclonale maligne de lymphocytes matures de phénotype B (> 5 G/L). L’immunophénotypage permet le calcul du score de MATUTES dont un résultat de 4 ou 5 affirme le diagnostic. Au frottis sanguin on retrouve des cellules à chromatine mûre et dense. C’est une maladie peu symptomatique, sa découverte est le plus souvent fortuite et effectuée sur un hémogramme retrouvant une lymphocytose isolée. Un syndrome tumoral est parfois retrouvé avec des adénopathies multiples bilatérales et superficielles ou une splénomégalie. Il existe différents types morphologiques de LLC.
La classification de BINET reposant sur des critères clinico-biologiques définit le pronostic de de la maladie selon 3 groupes (bon, intermédiaire et mauvais).
On estime à 4 464 le nombre de nouveaux cas en France en 2012. L’incidence standardisée de cette pathologie augmente avec l’âge (Age médian au diagnostic = 72 ans) et touche plus les hommes avec un rapport homme/femme de 2 en 2012. L’incidence varie peu entre 1980 et 2012, l’évolution de son taux annuel est de 0,9 % chez l’homme et de 1,1 % chez la femme sur l’ensemble de la période.
En France, la survie à 5 ans de la LLC est de 78 % pour la période 2001-2004, elle diminue progressivement au cours du temps.(
La chronicisation des pathologies
Ainsi, en reprenant les exemples sus cités, on note que pour un certain nombre de pathologies les nouveautés pharmacologiques, les développements techniques et humains ont permis un allongement de l’espérance de vie de nos patients.
Cette nouvelle perspective permet, à l’heure actuelle, de qualifier certaines d’entre elles de maladies chroniques.
Ainsi, de nouveaux enjeux entrent en compte dans la prise en charge de ces pathologies. En effet, dans les maladies qui mettent en jeu le pronostic vital à court terme, l’objectif de curabilité est essentiel ; la qualité de vie liée à la santé n’a pas la meilleure place. En revanche, dans les maladies chroniques engendrant des incapacités et des difficultés personnelles, familiales et socioprofessionnelles importantes, la prise en compte de cette qualité de vie est majeure.
La place croissante des maladies chroniques dans les sociétés industrialisées en fait un élément d’intérêt grandissant et notamment en ce qui concerne les aspects non strictement médicaux des soins. Si l’on peut se réjouir que de nombreuses maladies, de fatales, soient devenues chroniques, il ne faut pas perdre de vue que la chronicité engendre des difficultés spécifiques nécessitant une adaptation des soins dispensés.
Définition et Finalités de l’ETP : des capacités et des compétences
La première définition de l’ETP est donnée en 1996 par l’Organisation Mondiale de la Santé «L’éducation thérapeutique du patient devrait permettre aux patients d’acquérir et de conserver les capacités et compétences qui les aide à vivre de manière optimale leur vie avec leur maladie. Il s’agit, par conséquent, d’un processus permanent, intégré dans les soins, et centré sur le patient. L’éducation implique des activités organisées de sensibilisation, d’information, d’apprentissage de l’autogestion et de soutien psychologique concernant la maladie, le traitement prescrit, les soins, le cadre hospitalier et de soins, les informations organisationnelles, et les comportements de santé et de maladie. Elle vise à aider les patients et leurs familles à comprendre la maladie et le traitement, coopérer avec les soignants, vivre plus sainement et maintenir ou améliorer leur qualité de vie.» La HAS va donner en 2007 une nouvelle définition Française à l’ETP considérée comme synonyme de la précédente. « Elle vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique.
Elle fait partie intégrante et de façon permanente de la prise en charge du patient. Elle comprend des activités organisées, y compris un soutien psychosocial, conçues pour rendre les patients conscients et informés de leur maladie, des soins, de l’organisation et des procédures hospitalières, et des comportements liés à la santé et à la maladie. Ceci a pour but de les aider (ainsi que leurs familles) à comprendre leur maladie et leur traitement, collaborer ensemble et assumer leurs responsabilités dans leur propre prise en charge, dans le but de les aider à maintenir et améliorer leur qualité de vie.»
Ces définitions posent les bases de l’ETP qui doit en premier lieu rendre le patient conscient et informé de la finalité de chaque étape de son parcours de soin afin de l’inclure en tant que décisionnaire dans sa prise en charge. Nous retrouvons ainsi le « Patient Expert » tel qu’imaginé par LORIG . Cette ETP peut et doit lui être proposé à tout moment de son parcours de soin et s’adapter au patient lui-même en tant qu’individu (avec son vécu intime, ses croyances…) mais également à l’évolution de la prise en charge de sa pathologie. Sa finalité est de permettre au patient et ses proches d’adapter leur cadre de vie en y incluant la maladie, permettant de ce fait une plus grande sérénité et donc un maintien voire une amélioration de la qualité de vie.
Une dernière définition parait une année plus tard dans le rapport adressé à la Ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative en 2008 :
« L’éducation thérapeutique s’entend comme un processus de renforcement des capacités du malade et/ou de son entourage à prendre en charge l’affection qui le touche, sur la base d’actions intégrées au projet de soins. Elle vise à rendre le malade plus autonome par l’appropriation de savoirs et de compétences afin qu’il devienne l’acteur de son changement de comportement, à l’occasion d’évènements majeurs de la prise en charge (initiation du traitement, modification du traitement, événement intercurrents …) mais aussi plus généralement tout au long du projet de soins, avec l’objectif de disposer d’une qualité de vie acceptable par lui ».
Par rapport aux deux autres, cette définition met l’accent sur le rôle prépondérant détenu par le patient. Il est maintenant non seulement co-thérapeute, participant à la prise en charge mais également et surtout décisionnaire principal : c’est lui-même qui fixe ses objectifs prioritaires. Ainsi l’aboutissement de l’ETP n’est plus une amélioration de la qualité de vie selon des critères standardisés mais bien selon des objectifs de vies fixés par l’individu lui-même avec les priorités qui lui sont propre.
Afin de lui permettre d’être effectivement acteur de sa prise en charge, l’ETP doit apporter au patient deux types de compétentes :
Des compétences d’auto-soins : elles représentent les décisions que le patient prend avec l’intention de modifier l’effet de la maladie sur sa santé.
Ses compétences regroupent les capacités d’autosurveillance, d’automédication appropriée en vue de soulager les symptômes secondaires à la pathologie, l’adaptation du mode de vie, la capacité à inclure l’entourage dans les soins mais également la surveillance et la prévention de la survenue de complications. Il peut aussi s’agir d’apprendre certains gestes techniques au patient. Pour finir au sommet de ces compétences siègent les compétences dites de sécurités qui visent à sauvegarder la vie du patient.
Des compétences d’adaptation : elles reposent sur le développement de l’autodétermination et de la capacité d’agir du patient. Elles permettent de soutenir l’acquisition des compétences d’auto-soins en permettant au patient de gagner confiance en soi, de gérer ses émotions, d’améliorer ses capacités de communication tant avec les acteurs médicaux qu’avec ses proches et de développer un esprit critique lui permettant de se fixer ses propres objectifs et d’effectuer ses propres choix en matière de santé.
Les modalités de mise en place de l’ETP
Les programmes d’ETP répondent maintenant à une démarche organisée, avec un contenu vérifié issu de l’Evidence Base Médecine. Tout programme d’ETP doit être conforme à un cahier des charges national précis garantissant ainsi sa pertinence et la qualité de sa mise en œuvre. Il est ensuite vérifié par l’ARS qui autorise ou non son initiation.
Les conditions d’élaboration : Tout programme d’ETP doit être rédigé par un groupe multidisciplinaire comprenant des usagers et répondre à une méthode explicite et transparente. Il doit être scientifiquement fondé à partir des données disponibles et être enrichi des retours d’expérience des patients et de leurs proches.
Définir un programme d’ETP : Tout programme d’ETP doit comporter les objectifs de ce dernier, la population concernée, les compétences à acquérir par le patient (compétences d’auto-soins et d’adaptation), le contenu des séances, les professionnels de santé concernés, les modalités de coordination des professionnels impliqués, la planification et l’organisation des offres et des séances d’ETP et enfin les modalités d’évaluation des acquisitions.
À qui proposer une éducation thérapeutique : A partir du moment où un programme d’ETP reconnu a été établi et que celui-ci s’inscrit dans la prise en charge de la maladie, il doit être proposé à toute personne atteinte de cette affection (enfant, adolescent, adulte) quel que soit le type, le stade et l’évolution de la pathologie. Elle doit également être proposée à l’entourage du patient si celui-ci souhaite impliquer ses proches dans la gestion de sa maladie.
Autant que possible on proposera ce programme le plus tôt possible après l’annonce du diagnostic. Toutefois, il peut être initié à tout moment de la prise en charge et être de nouveau présenté à un patient l’ayant initialement décliné.
On note par ailleurs que les difficultés d’apprentissage (lecture, compréhension de la langue, handicap sensoriel, mental, troubles cognitifs, dyslexie, etc.), le statut socio-économique, le niveau culturel et le lieu de vie ne doivent pas priver a priori les patients de la participation à un programme d’ETP. Ces particularités doivent être prises en compte pour adapter le programme d’ETP en terme d’accessibilités géographique, culturelle, de souplesse dans les réponses aux besoins et aux attentes, de choix des techniques et outils pédagogiques les plus adaptées aux publics concernés.
Table des matières
INTRODUCTION
I – Les pathologies Hématologiques
1. Définitions et épidémiologie
A – Le Lymphome de Hodgkin (LH)
B – La leucémie lymphoïde chronique (LLC)
C – Le lymphome folliculaire (LF)
D – Les lymphomes diffus à grandes cellules B (LDGCB)
E – Le lymphome du manteau (LM)
F – Lymphome de la zone marginale (LZM)
G – Le myélome multiple (MM)
H – La leucémie aiguë lymphoblastique (LAL)
I – Les leucémies aiguës myéloïdes (LAM)
J – La leucémie myéloïde chronique (LMC)
2. Evolution récentes
3. Retentissement
A- La chronicisation des pathologies
B- Le virage ambulatoire
C- Une autonomisation des patients
II – L’Education thérapeutique
1- Contexte historique
2- Définition et Finalités de l’ETP : des capacités et des compétences
3- Les modalités de mise en place de l’ETP
A- Les conditions d’élaboration
B- Définir un programme d’ETP
C- À qui proposer une éducation thérapeutique
D- Qui propose et réalise l’ETP
E- Confidentialité et déontologie
4- Démarche pédagogique d’un programme d’ETP
A- Le diagnostic éducatif ou Bilan Educatif Partagé (BEP)
B- Le programme personnalisé d’ETP
C- La mise en œuvre des séances d’ETP
D- L’évaluation des compétences acquises
5- Evaluation
A- L’auto-évaluation annuelle
B- L’évaluation quadriennale
6- Intérêt de l’ETP en hématologie
III – Le programme HOPE (Hématologie Oncologie Patient Education)
1- Justification
2- Objectifs
3- Les critères d’inclusion
4- Effectifs
5- Les intervenants
6- Déroulement du programme
7- Description des ateliers
8- Les outils et supports utilisés
9- Coordination
10- Ethique et confidentialité
IV – Justification de l’étude
V – Objectifs de l’étude
MATERIEL ET METHODE
I – Type d’étude
II – Population de l’étude
III – Matériel
IV – Recueil de données
RESULTATS
I – Caractéristiques de la population
1. Population générale
2. Comparaison de la population adhérente avec celle des refus
II – Diagnostic Educatif ou Bilan Educatif Partagé
1. Nombre de diagnostics effectués
2. Modalités
3. Données collectées
4. Plan personnalisé éducatif
5. Conditions de participation
III – Les ateliers
1. Nombres effectués
2. Nombre de plans personnalisés éducatifs complétés
IV – Les aidants
V – Les perdus de vue
VI – Motifs de refus
VII – Satisfaction du programme
DISCUSSION
I – Les forces et limites de l’étude
II – Description de la population
1. Population générale
2. Populations adhérente et refus
III – Déroulement du programme HOPE
1. Les bilans éducatifs partagés
A. Motivation des patients
B. Analyse des demandes par atelier
C. Des limites imposées
3. Les ateliers
A. Taux de participation
B. Modalités de réalisation
C. Respect du PPE et séances de renforcement
D. Évaluation des compétences
E. Participation des aidants
4. Les perdus de vues
5. Les motifs de refus
IV – Satisfaction du programme
V – L’impact positif du programme HOPE
VI – Les obstacles à l’éducation thérapeutique
VII – Des pistes d’améliorations
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
I – Annexe 1 : Questionnaire de satisfaction participants
II – Annexe 2 : Courrier explicatif accompagnant le questionnaire