Effet de la cavitation sur le jet
Des résultats de calcul sur des géométries réalistes d’injecteurs Diesel sont présentés dans ce chapitre. En premier lieu, deux simulations bidimensionnelles, l’une d’un cas cavitant et l’autre non cavitant, mettent en évidence l’influence de la cavitation sur l’écoulement en aval de l’injecteur. Ensuite, l’influence de certains paramètres géométriques (L0/D0, facteur K) ou physiques (nombre de cavitation CN) est étudiée. Enfin, des calculs tridimensionnels sont présentés sur des géométries réelles d’injecteurs (mono et multi-trou), afin d’étudier les effets tridimensionnels liés à l’écoulement.
On se propose ici de mettre en évidence l’effet de la cavitation sur la perturbation du coeur liquide du jet se développant immédiatement en aval de la sortie deBl’orifice d’injection. A ce titre, deux simulations seront comparées, sur une géométrie réaliste d’injecteur mono-trou : l’une comporte une arête vive susceptible de donner naissance à des poches de cavitation, alors que, pour la seconde, on empêche l’apparition de cavitation en ne prenant pas en compte l’écoulement en amont du trou, et notamment les arêtes vives (la pression d’alimentation est imposée directement à
l’entrée de l’orifice d’injection) [119]. Les maillages cartésiens bidimensionnels utilisés pour ces tests sont représentés à la figure 5.1. Pour le cas avec cavitation, le maillage comporte 100 × 400 mailles, alors que le cas non cavitant n’en contient que 100 × 300 car il ne nécessite pas la prise en compte de la géométrie en amont du trou. Néanmoins, la partie inférieure de ces deux domaines de calcul est strictement identique. Comme pour le cas de l’injecteur mono-trou étudié précédemment (paragraphe 4.3), l’orifice d’injection a un diamètre D0 de 200 μm et une longueur L0 de 1 mm (L0/D0 = 5). La résolution spatiale à l’intérieur de celui-ci est de 20×50 mailles (Δx = 5 μm et Δz = 20 μm). La chambre de combustion est prise en compte partiellement sous la forme d’un cylindre de diamètre 10D0 et de longueur 5L0, fermé à son extrémité (pas de sortie). Enfin, une condition de symétrie permet de ne calculer que la moitié de la géométrie complète 2D.
la pression dans le reste du domaine est initialisée à 5 MPa. En début de simulation, la chambre de combustion est constituée de gaz au repos (dont les propriétés physiques sont celles de l’air) et l’injecteur est déjà rempli de carburant liquide qui va progressivement monter en pression sous l’effet de la pression d’alimentation. On a ainsi Pinj = 100 MPa et Pch = 5 MPa (soit CN = 19). Les figures 5.2 et 5.3 montrent l’évolution du champ de masse volumique du mélange m, en présence et en l’absence de cavitation. Le temps t = 0 est pris à l’instant où le liquide commence à pénétrer à l’intérieur de la chambre. La simulation concerne le tout début d’injection, correspondant à l’ouverture de l’aiguille (à l’instant où les effets instationnaires sont les plus importants). Le début d’injection est très similaire et la figure 5.3 montre que, sans cavitation, les forces de cohésion interne du liquide, ainsi que le faible rapport de densités ρg ρl stabilisent le jet. Les effets aérodynamiques apparaissent alors comme secondaires dans le processus d’atomisation. En revanche, dès l’apparition de cavitation (t = 4, 2 μs) sur la figure 5.2, au niveau de l’arête vive d’entrée du trou, les premières différences sont observées dans le développement du jet. Une vena contracta se forme à l’intérieur de l’orifice, entraînant une accélération de l’écoulement en aval, comme l’explique Dumont [54] (cf. schéma de la figure 1.7). La tête du jet liquide est immédiatement perturbée, avec l’accentuation de la formation du champignon caractéristique, ce qui se traduit par une augmentation de l’angle de spray, conformément aux observations de Eifler [57]. Entre t = 4, 2 μs et t = 7, 1 μs, la cavitation croît à l’intérieur du trou jusqu’à atteindre la section de sortie. Lorsque les poches de cavitation sont advectées à l’extérieur du trou, celles-ci subissent un collapse presque immédiat (cf. paragraphe 1.1.3).
Influence de la pression
La figure 5.8 présente les champs de ρm et Σf obtenus en fin de simulation des différents cas. Le temps de simulation du cas PINJ est beaucoup plus long puisque la pression d’injection est plus faible que pour les autres cas. De même, pour le cas K < 0, la modification de la conicité du trou d’injection réduit la section de passage de carburant : on a donc poursuivi la simulation un peu plus longtemps. Le cas de référence REF présente un champignon classique en tête de jet, ainsi qu’un second tourbillon, plus en amont, issu du collapse d’une poche de cavitation, à la manière de ce qui est détaillé au paragraphe 5.1.Lorsque la pression d’injection est réduite (cas PINJ), la vitesse du jet est plus faible et les poches cavitantes, apparaissant à l’intérieur du trou, ont une structure et une fréquence très différente (CN = 5), qui rend toute comparaison difficile. On constate simplement un effet très net de la pression d’injection sur la forme du jet. La diminution de la pression initiale à l’intérieur de la chambre (cas PCH) n’influe pas (ou très peu) sur la formation du jet.