Dye residues in aquaculture products
Contexte
Ces résultats sont issus d’un projet intitulé Multicolor, mis en œuvre en partie à l’aide d’un travail réalisé par un étudiant de Master. Ce travail avait pour objectif d’initier une stratégie de surveillance élargie des colorants à usage thérapeutique par le développement d’approches analytiques ciblées et non ciblées. Le projet s’inscrivait dans un objectif méthodologique plus large que porte notre laboratoire en matière d’approches non ciblées pour la détection de marqueurs de traitement. Identifier un marqueur pertinent présente un intérêt dans plusieurs cas. Il permet par exemple d’identifier la signature biologique d’un traitement par un médicament aujourd’hui interdit dont le composé parental disparait rapidement après son administration à l’animal, ou encore de mettre en évidence cette signature imputable à un ensemble de molécules pharmacologiquement similaires. Pour cela, nous avons fait appel au savoir-faire de l’ONIRIS-Laberca qui a réalisé le traitement de données et les analyses statistiques multivariées. Ces données ont été reprises et complétées au laboratoire. Le projet Multicolor comportait ainsi 3 volets : le développement de l’approche analytique ciblée, une étude d’occurrence sur produits d’aquaculture du commerce en appliquant la méthode ciblée, et enfin l’approche de métabolomique non ciblée. Les deux approches, qui visaient soit à élargir le nombre de colorants ciblés dans le premier cas, soit à suivre des biomarqueurs appropriés dans le second cas, ont été étudiées de manière concomitante avec le même objectif d’améliorer la stratégie de surveillance des nouvelles pratiques illégales de traitements chimiques en aquaculture.
Méthodologie et principaux résultats
Méthodologie de l’approche ciblée : Une méthode LC-MS/MS comprenant une étape d’oxydation appliquée à la plupart des colorants sélectionnés a été développée et validée pour cibler l’analyse de 14 résidus chimiques appartenant à différentes familles de colorants. La méthode est appropriée pour la confirmation quantitative de 13 colorants dans la chair de poisson à des concentrations résiduelles de l’ordre de 1 µg/kg. Une étape d’oxydation a été intégrée à l’analyse afin de retransformer les substances métabolisées et réduites en leuco-formes par les poissons, en leurs formes parentes, et de quantifier ensuite uniquement ces formes parentes. Tandis que chez certains TAMs les leucoformes étaient déjà connues (la leucobase du vert de malachite par exemple), d’autres composés étaient probablement non connues, ou bien avaient fait l’objet d’une première identification récente et ne comportaient ainsi toujours pas le standard permettant de quantifier la forme réduite, comme c’est le cas pour le LBG. Les composés ciblés par la méthode comprenaient les principaux TAMs (MG, CV, BG, EV, PRRA), quelques autres dérivés des triarylméthanes (VBB, VBR, VPBO), des xanthènes (RHG), des phénothiazines (MB, AZB, NMB) et des phénoxazines (NBA). Ces colorants ont ensuite été recherchés sur des produits d’aquaculture collectés dans des commerces locaux.
Méthodologie de l’approche ciblée : Le deuxième objectif de ce projet était de rechercher tout marqueur de traitement des colorants au moyen d’une approche non ciblée basée sur la LC-HRMS en utilisant des échantillons biologiques de truites récoltés lors d’une expérimentation in vivo. Le principe de cette approche était de comparer les empreintes métaboliques obtenues avec des truites traitées à MG et celles obtenues avec des truites traitées à VPBO, avec pour objectif de détecter des marqueurs endogènes communs aux deux traitements ou encore de déterminer tout autre biomarqueur pertinent significatif d’un traitement par des colorants de type TAMs. Les informations extraites de l’analyse par LC-HRMS des ions caractéristiques provenant d’échantillons de muscles, de foie et de plasma ont été exploitées à l’aide de modèles statistiques multivariés. Elles ont révélé des modifications du métabolome de la truite générant certains métabolites directement liés aux 2 colorants mais également des substances endogènes perturbées suite au traitement.
Conclusion
Les deux pistes explorées en vue d’étendre le contrôle des résidus de colorants interdits chez les produits d’aquaculture, pourraient se rejoindre et se compléter comme il est explicité en conclusion de l’article. La première piste consistait à déterminer si une méthode ciblée, incluant une oxydation pour pallier le manque d’informations et de standards analytiques pour tous les métabolites de tous les colorants concernés, pouvait être développée et validée avec une sensibilité suffisante pour tenir le challenge règlementaire autour du µg/kg. Les résultats ont montré que le protocole est applicable pour 11 colorants subissant l’étape d’oxydation et pour 3 colorants sans cette étape, car l’oxydation engendre probablement une dégradation de ces 3 composés. Les performances de la méthode sont satisfaisantes puisque les CC sont inférieurs à 0.5 µg/kg. Les avantages de cette méthode sont le taux de recouvrement des colorants incluant les leuco-bases, connues et non connues, sa sensibilité, et sa facilité d’application. Les inconvénients sont d’une part, qu’elle inclut des colorants déjà suspectés mais pas de potentiels nouveaux colorants, et que d’autre part, l’étape d’oxydation correspond à une seule réaction de métabolisme, donc le champ des métabolites traceurs de traitement n’est pas entièrement -Méthode capable de détecter 14 colorants dont 13 en confirmation -Premier point de calibration à 0.1 µg/kg ou à 0.5 µg/kg suivant l’analyte. -Protocole réalisé en deux partie : extraction avec oxydation pour 11 colorants, et sans oxydation pour 3 colorants. -Justesse et fidélité respectent les critères de la Décision 2002/657/CE. -CC estimés entre 0.02 et 0.42 µg/kg -Applicabilité sur 28 lots de poissons et crevettes, détection de MG (bar) et VPBO (tilapia) < 0.1 µg/kg mais non confirmée. -Modèles PLS-DA validés pour muscle et foie : – 17 ions caractéristiques pour foie : dont pour MG : 8 ions up-régulés 5 ions proposés issus du métabolisme du MG et 3 non-identifiés, et pour VPBO : 8 ions sur-exprimés et un sousexprimé 5 ions proposés issus du métabolisme du VPBO, 1 ion endogène identifié (acide glycodéoxycholique) -11 ions caractéristiques pour muscle : dont pour MG : 7 ions up ou down-régulés 2 ions proposés issus du métabolisme du MG, 1 ion endogène identifié (acide taurodeoxycholique) et 4 ions non-identifiés, et pour VPBO : 4 ions sur- ou sous-exprimés 2 ions proposés issus du métabolisme du VPBO, et 2 non-identifiés Approche ciblée : méthode multirésidus avec oxydation Approche non ciblée : recherche de biomarqueurs de traitement Objectif : explorer deux approches possibles pour renforcer la surveillance des colorants en lien avec la future évolution réglementaire Partie III : Résultats 125 couvert. La deuxième piste consistait en l’investigation de métabolites endogènes marqueurs d’un traitement aux colorants, plus spécifiquement les TAMs et dérivés, en apportant des informations sur l’endo-métabolome des poissons. Deux acides biliaires ont été subi une perturbation de leur voie d’expression chez la truite, mais aucun d’entre eux n’a pu être confirmé comme étant commun aux deux traitements issus des deux TAMs. Ceci laisse néanmoins présager d’un effet de ces colorants sur la voie de synthèse des acides biliaires. Cette étude a également mis en évidence des métabolites exogènes provenant directement d’une dégradation des colorants appliqués, dont les métabolites du VPBO, inconnus jusqu’ici. L’approche menant aux biomarqueurs d’effet d’un traitement (métabolites endogènes) mériterait d’être approfondie, et renforcée, afin de détecter d’autres biomarqueurs pouvant dans leur ensemble constituer un modèle prédictif de dépistage d’un traitement aux colorants. Enfin, ces deux pistes pourraient être combinées dans une même étude, afin d’obtenir une approche la plus exhaustive possible et générer des données d’occurrence par la méthode ciblée tout en étudiant l’impact de ces données d’occurrence sur des biomarqueurs comme les acides biliaires