DROIT DES RELATIONS INTERNATIONALES
Un mécanisme du droit des relations internationales
Le phénomène de conditionnalité apparaît au départ dans le cadre d’un acte concerté international appelé « accord de confirmation ». Si le phénomène y est bien présent, le terme lui-même n’est guerre employé. Le terme naît ensuite pour appréhender le fait. Il est alors généralement employé au pluriel ; on parlera alors des « conditionnalités » du F.M.I ou de la Banque mondiale, car il vise toujours non pas une, mais un ensemble de mesures à prendre par l’Etat bénéficiaire de l’assistance financière de l’une ou l’autre institution. La question qui se pose est celle de savoir quelle est sa nature et sa portée juridiques. Les conditions de formation des rapports conditionnés peuvent-elles déterminer celles-ci ?
Formation
La conditionnalité est une composante de l’« accord de confirmation » établi entre un Etat demandeur d’un prêt auprès du FMI ou de la Banque Mondiale et l’un ou l’autre de ces institutions, ou des clauses conditionnelles insérées d’une convention de prêt international signée entre un Etat demandeur et une institution internationale ou un Etat ou un groupe d’Etats prêteur(s) dans le cadre des relations multilatérales ou bilatérales. Le schéma classique de formation des engagements de conditionnalité est le suivant : la relation est enclenchée par une « lettre d’intention » de l’Etat demandeur auprès de l’institution de Bretton Woods. Cette lettre est adressée par les autorités de l’Etat en question au FM.I pour indiquer l’action qu’elles entendent mener au cours de la période d’application du PAS pour lequel le soutien du FMI est sollicité, les réformes à entreprendre avant l’approbation de l’accord, les critères et le calendrier de réalisation à observer pour que les tirages puissent être opérés et les examens périodiques permettant au Conseil d’administration du FMI de vérifier la conformité des politiques suivies par rapport aux objectifs du programme. A titre d’exemple, dans le cadre de son Programme de relance économique, le Gouvernement camerounais a adressé au FMI une lettre d’intention par laquelle il indiquait les actions qu’il entendait entreprendre afin de bénéficier de l’assistance du Fonds. Pour restaurer la compétitivité de l’économie, le Gouvernement camerounais avait décidé d’inverser son déclin et la paupérisation de ses populations des 8 dernières années, de rétablir les équilibres macro-économiques, intrasectoriels et financiers, et de sortir de la crise économique que connaît le pays. A la suite de la lettre d’intention, le FMI analyse en détail la situation économique du pays en cause ainsi que le P.A.S présenté par les autorités. Des négociations s’engagent entre ce dernier et le Fonds en vue d’adapter le contenu du programme et les conditions du crédit aux perspectives de redressement de l’économie et de la balance de paiement.
Nature et portée de la conditionnalité
La conditionnalité serait-elle une règle de droit ? Certains auteurs parlent plus vaguement à cet égard des « principes de conditionnalité qui subordonnent l’octroi de l’assistance financière du Fonds à l’adoption de programme d’ajustement économique »9. Une terminologie sans rigueur de l’Assemblée générale du FMI tendrait à faire croire que la conditionnalité est une règle juridique. En effet, parlant de la mise en œuvre des P.A.S, l’Assemblée Générale du Fonds déclarait dans sa résolution 41/202 du 8 décembre 1986 que « l’application de la règle de la conditionnalité » devrait tenir compte des exigences propres à chaque pays. Mais si la conditionnalité est une règle juridique, comment une telle règle s’énoncerait-elle ? Si on la formule comme suit : « l’institution A s’engage à mettre tels droits de tirage ou tel montant de financement à la disposition de l’Etat X si celui-ci met en oeuvre telles 8 D. Carreau, P. Juillard, Droit international économique, Paris, LGDJ, 4e éd., 1998, p.612. 9 Jean Touscoz, « Les Nations Unies et le droit international économique. Rapport introductif », Colloque SFDI de Nice, Paris, Pedone, 1986, p.44. mesures auxquelles il a souscrit »…, alors la règle de la conditionnalité se confondrait avec le contenu substantiel de l’accord d’ajustement structurel. Son non respect correspondrait par conséquent à une violation d’un engagement contractuel ou conventionnel. Une telle conception est parfaitement envisageable d’un point de vue juridique. Toutefois, on voit bien que la conditionnalité internationale est bien plus qu’une norme juridique gouvernant des rapports de type contractuel. Elle est ou est devenue un instrument de politique internationale utilisé, soit de façon autonome par les institutions financières internationales, soit indirectement par les principaux contributeurs à ces institutions.