DOMAINE VITAL ET HABITAT DE MYZOPODA AURITA
Les chauves-souris comptent actuellement environs de 1300 espèces dans le monde, soit près du quart des espèces de mammifères du monde (Fenton et Simmons, 2015). Les chauves-souris étaient auparavant subdivisées en deux sous-ordres, les Mégachiroptères regroupant les chauves-souris frugivores et les Microchiroptères unissant celles qui sont insectivores (Koopman, 1994 ; Hutson et al., 2001). Depuis 2006, l’analyse phylogénétique du groupe a révélé l’existence des deux grandes clades dans l’ordre des Chiroptères : la clade des Yinpterochiroptères et celle de Yangochiroptères (Jones et Teeling, 2006). La première regroupe la famille des Pteropodidae, qui n’utilise pas l’écholocation à part un genre qui utilise le cliquement de la langue, et la super-famille des Rhinolophoidea qui l’utilise. La seconde englobe alors les autres familles (Annexe 1). Les chauves-souris jouent d’importants rôles au sein des écosystèmes. Elles interviennent dans la pollinisation de fleurs et dans la dispersion de graines (Fujita et al., 1991). Elles sont également bien connues dans la lutte contre les insectes nuisibles (Hutson et al., 2001), alors que les connaissances disponibles ne permettent pas de concevoir une stratégie appropriée pour leur conservation (Hutson et al., 2001b). Malgré les nombreuses recherches qui sont déjà faites sur les chauves-souris à Madagascar, il reste encore des lacunes, notamment sur les informations concernant leur biologie et leur écologie (Racey et al., 2010).
Dorst (1947a) a élaboré une clé de détermination des chauves-souris malgaches et a sorti un publication sur les chauves-souris de la faune malgache (Dorst 1947b). Peterson et ses collaborateurs (1995) ont publié une monographie sur les chauves- souris à Madagascar. A partir de l’année 2000, les chauves-souris font l’objet d’études grandissantes comme la description de leur aspects générale (Eger et Mitchell, 2003 ; Goodman, 2011) et la découverte de nouvelles espèces (Goodman et Cardiff, 2004 ; Bates et al., 2006 ; Ranivo et Goodman 2006 ; Goodman et al., 2007, 2008 ; Goodman et Maminirina 2007 ; Goodman et al., 2008 ; Ratrimomanarivo et al., 2009 a, b). D’autres études se sont focalisées sur le régime alimentaire (Razakarivony et al., 2005 ; Ramasindrazana et al., 2009) et sur tant d’autres sujets. Par ailleurs, une multitude mémoire de DEA a été aussi faite. Il y a entre autres celui de Raheriarisena (2005) sur l’étude du régime alimentaire de Pteropus rufus ; Kofoky (2001) sur l’inventaire des chiroptères de la Péninsule de Masoala ; Ranivo (2001) sur l’étude de la biologie et l’effet de la prédation humaine sur Eidolon dupreanum ;
Ratrimomanarivo (2003) sur l’étude du régime alimentaire de cette espèce ; Razakarivony (2003) sur l’étude d’impact de la prédation humaine sur Pteropus rufus ; Andriafidison (2004) sur l’étude des rôles des Pteropodidae sur la pollinisation des baobabs ; Andrianaivoarivelo (2004) sur les rôles des Pteropodidae sur la pollinisation de Ceiba petandra ; Ralisata (2005) sur le comportement alimentaire de Macronycteris commersoni ; Razafimanahaka (2006) sur l’utilisation de l’espace par Macronycteris commersoni ; Rakotoarivelo (2007) sur la sélection des proies et des habitats exploités par cinq espèces des espèces insectivores. D’une manière générale, les recherches sur les chauves-souris malgaches sont plutôt focalisées sur la diversité et la biogéographie (e.g., Dorst, 1947b ; Eger et Mitchell, 2003), la taxonomie (e.g., Peterson et al., 1995) et la distribution géographique (e.g., Goodman et al., 2005). Les nouvelles informations recueillies au cours de ces investigations ont permis de mieux comprendre la distribution géographique des espèces recensées (Ratrimomanarivo et Goodman, 2005), d’effectuer une révision taxonomique et d’en découvrir de nouvelles formes pour la science (e.g., Goodman et Cardiff, 2004 ; Goodman et Ranivo, 2004 ; Goodman, 2011).
La faune chiroptérologique malgache est relativement riche. Elle compte actuellement 49 espèces appartenant à huit (08) familles (annexe 2) (Goodman, 2011 ; Goodman et Ramasindrazana, 2013). Les espèces de chauve-souris à Madagascar représentent 30% de celles connues dans les autres îles tropicales telles que la Nouvelle Guinée et Bornéo. Par ailleurs, son niveau d’endémisme est exceptionnellement élevé avec un taux de 83% (Goodman et Ramasindrazana, 2013). Une seule famille est endémique de Madagascar, la famille Myzopodidae. Jusqu’à présent, cette famille est endémique en dépit de la découverte en Egypte d’un fossile du genre Myzopoda (Gunnell et al., 2014). Cette famille semble être une lignée ancienne du continent gondwanien, dans la super-famille des Noctilionidea (Teeling et al., 2005). Cette famille comporte deux espèces, Myzopoda aurita (Annexe 3), qui est endémique de la partie Est de l’île (Annexe 4) (Hutson et al., 2001a ; Goodman, 2011) et M. schliemanni, se rencontre uniquement dans la partie Ouest (Goodman et al., 2007). La présente étude concerne l’écologie de Myzopoda aurita. Elle s’intéresse au domaine vital et à l’utilisation des habitats à l’intérieur de celui-ci, à l’estimation de la taille de la population au niveau de la zone d’étude, à l’écholocation et aux cris sociaux et enfin à la relation de cette Myzopoda aurita utilise les jeunes feuilles centrales et partiellement enroulées de cette plante comme gîte diurne (Schliemann et Maas, 1978 ; Schliemann et Goodman, 2003 ; Goodman, 2011 ; Ralisata et al., 2010 ; 2015). Elle se rencontre le long de la partie orientale de Madagascar, dans les zones de basse altitude en particulier, depuis Maroantsetra au Nord (E4944’, S1526’) jusqu’à Taolagnaro au Sud (E4659’, E2510’) (Jenkins et al., 2008 ; Goodman, 2011). Elle fréquente les habitats dégradés dominés par le Ravenala madagascariensis (Ralisata et al., 2010 ; Goodman, 2011 ; Ralisata et al., 2015). L’espèce utilise l’écholocation pour le déplacement, la chasse et la recherche de gîte potentiel. La fréquence de l’écholocation émise par Myzopoda aurita est de 42 kHz, c’est une fréquence modulée (FM).