DISTRIBUTION ET TRANSPORT DES VARIABLES DE MODELES POLYCRISTALLINS
Couplage des modèles polycristallins à la méthode EF
L’idée du couplage entre le modèle EF et les modèles polycristallins [DAW 2003] est d’utiliser la théorie de plasticité cristalline comme loi de comportement à chaque point d’intégration du maillage EF comme illustré Figure II.6. Le polycristal est représenté par un ensemble de monocristaux (typiquement de l’ordre de 1000). A chaque fois que le code EF a besoin d’information sur le comportement mécanique aux points d’intégration de chaque EF, le modèle micromécanique (modèle polycristallin) est appelé. L’actualisation de la texture cristallographique dans ce type de couplage est donc automatiquement prise en compte. L’avantage de ce type d’approche est le couplage direct entre la texture et le procédé de mise en forme. Lorsque le modèle EF est couplé à un modèle de Taylor ou encore un modèle auto-cohérent, les deux écrouissages « matériau » ou « latent » et « textural » ou « géométrique» sont pris en compte. L’hétérogénéité de déformation parmi les cristaux, la forme des grains et l’interaction entre les grains sont ainsi décrites au niveau microscopique. Ce couplage permet de prédire correctement l’anisotropie mais aussi l’évolution de la texture cristallographique et de l’anisotropie induite au cours de la déformation. Cependant le temps de calcul de ce type de couplage est très important. En effet, le temps CPU du modèle polycristallin est généralement proportionnel au nombre de cristaux représentatifs Modèles polycristallins 25 (cela dépend de loi de comportement retenue pour le glissement cristallographique), et ce modèle est appelé à chaque point d’intégration du maillage EF. Comparé au temps de calcul relatif à l’utilisation d’un modèle avec surface d’écoulement non réactualisée (cf. section II.2.2), le temps de calcul du couplage avec les modèles polycristallins est donc très important. Lorsqu’un modèle EF « microstructural » (cf. II.3.3.3.3) est lui-même couplé au modèle EF à l’échelle d’une pièce macroscopique (couplage connu sous le nom de méthode 2 FE ), l’évolution de texture, la forme des grains et les effets de topologie, l’interaction entre les grains, les distributions de contrainte et de déformation hétérogènes sont prises en compte. La méthode 2 FE [SMI 1998], [MIE 1999] résout un problème EF, dont les conditions aux limites évoluent de manière non linéaire ce qui augmente encore davantage le temps de calcul comparé à l’utilisation des modèles polycristallins tels que les modèles de Taylor ou auto-cohérents. Figure II.6 Couplage Modèles polycristallins / Méthode EF [KOC 1998]. II.4 Microstructure Sensitive Design Une nouvelle méthode, la méthode MSD, a été récemment développée par Kalidindi et al. et est utilisée de diverses manières [KAL 2004], [KAL 2005]. Elle a été initialement mise en place pour faciliter la résolution de problèmes inverses dans le design de la microstructure des matériaux, c’est-àdire pour répondre à la question suivante : « quelle doit être au départ la microstructure du matériau si l’on veut qu’il possède une certaine propriété ? ». Nous allons préciser l’application de la méthode dans le cadre des polycristaux. Pour la prédiction de l’anisotropie due à la texture cristallographique, la méthode MSD considère la représentation de la fonction de distribution des orientations f(g), non pas sous la forme discrète comme dans le cas des modèles polycristallins mais sous la forme d’un développement en série dans l’espace de Fourier. Cette représentation a été mise en place par Bunge [BUN 1993]. Elle permet de représenter la texture de l’échantillon comme un point dans l’espace de Fourier de dimension infinie, défini par les coefficients du développement de la FDO en série de Fourier. Les procédures pour obtenir les coefficients de Fourier pour une fonction f(g) utilisent en général une transformée de Fourier inverse. Elles sont détaillées dans [BUN 1993].
PRISE EN COMPTE DE L’ANISOTROPIE
L’espace d’Euler complet, représentant toutes les orientations possibles pour un monocristal, est discrétisé en un certain nombre d’orientations, ici environ 1000 mono-cristaux répartis uniformément. Les coefficients de Fourier pour chacun de ces mono-cristaux sont calculés. Pour calculer la contrainte résultante de l’application d’une déformation macroscopique donnée sur le polycristal, les auteurs procèdent de la manière suivante : – La dépendance fonctionnelle de chaque composante de contrainte monocristalline par rapport à l’orientation du réseau cristallin est exprimée dans l’espace de Fourier par des techniques de régression linéaire, pour différents tenseurs de gradient de vitesse imposés. – La contrainte sur le polycristal entier est ensuite déduite de l’expression (hypothèse de Taylor) : ij f (g) ij (g)dg ∫∫ σ = σ ( II.26). Ensuite, pour déterminer l’évolution de la texture, Kalindidi et al. [KAL 2005] utilisent la loi de transformation linéaire définie par Bunge et Esling [BUN 1984] qui donne l’évolution des coefficients de Fourier d’une texture pour un incrément de déformation donné en fonction des coefficients de la texture initiale et de constantes liées aux sollicitations mécaniques. Ces derniers paramètres peuvent être calibrés à l’aide du modèle de Taylor ou de mesures expérimentales, ou encore être aussi interpolés pour d’autres modes de déformation, après avoir été calculés une première fois pour certains modes. Une fois ces paramètres déterminés, cette représentation de l’évolution des coefficients de texture peut être utilisée récursivement pour prédire des textures pour de grandes déformations. Cette méthode est en plein développement. Actuellement, seulement certains tests ont été réalisés dans un cadre très simplifié afin de discuter de l’interpolation des variables et du nombre de termes nécessaire dans le développement en séries de Fourier [KAL 2005]. Nous pouvons imaginer le gain en temps de calcul offert par cette méthode une fois le matériau calibré (états de contrainte calculés en fonction de la déformation et des différents coefficients de Fourier possibles). Conclusion La revue des différents modèles permettant de décrire l’anisotropie lors de la mise en forme de procédés simulés par la méthode des Eléments Finis nous amène à choisir pour notre travail les modèles polycristallins. En effet, comparés aux modèles d’anisotropie décrits à l’aide d’une surface d’écoulement analytique, ils permettent de mieux tenir compte de l’effet de texture et de connaître, au cours de la déformation, l’évolution de la texture cristallographique et de l’anisotropie. S’il fallait réactualiser la surface d’écoulement périodiquement, le temps de calcul serait sans doute du même ordre. La méthode FE² permet de mieux tenir compte de la physique que le couplage des autres modèles polycristallins (Taylor, Auto-Cohérent) à la méthode EF. Cependant, l’utilisation de cette méthode génère des temps de calcul prohibitifs. Le choix du modèle polycristallin dépend, comme nous l’avons vu, entre autres de la structure cristalline du matériau. Les matériaux que nous étudions ont tous une structure cubique CFC. Nous avons donc choisi d’utiliser un modèle polycristallin dérivé de l’hypothèse de Taylor et notre choix s’est porté sur un modèle élasto-viscoplastique [DEL 2005], [DEL 2006].
Table des matières
II Prise en compte de l’anisotropie mécanique dans la modélisation des procédés de mise en forme
II.1 Modèles basés sur des descriptions d’anisotropie macroscopiques
II.1.1 Généralités
II.1.2 Exemples
II.1.3 Couplage à la méthode EF
II.2 Modèles macroscopiques basés sur la théorie de la plasticité cristalline
II.2.1 Lois de comportement dérivées de la plasticité cristalline 9
II.2.2 Modèles avec surfaces d’écoulement analytiques
II.2.2.1 Prise en compte de l’effet de la texture
II.2.2.2 Prise en compte de l’effet de l’écrouissage
II.2.3 Couplage à la méthode EF
II.3 Modèles polycristallins
II.3.1 Principes de l’homogénéisation
II.3.2 Vers la modélisation du comportement mécanique des polycristaux
II.3.2.1 Généralités
II.3.2.2 Lois constitutives du grain
II.3.3 Changement d’échelle
II.3.3.1 Modèles de type Taylor
II.3.3.2 Modèles auto-cohérents
II.3.3.3 Méthode des Eléments Finis appliquée à un polycristal
II.3.3.4 Transformée de Fourier Rapide
II.3.4 Couplage des modèles polycristallins à la méthode EF
II.4 Microstructure Sensitive Design
Conclusion
Références bibliographiques
III La méthode des particules Lagrangiennes appliquée au suivi des données microstructurales
III.1 La méthode des particules Lagrangiennes : présentation bibliographique et historique
III.1.1 La méthode P.I.C. (Particle In Cell)
III.1.2 Les modèles particulaires : applications multiples .
III.2 Nouvelle application de la méthode des particules Lagrangiennes : suivi de l’évolution de données microstructurales
III.2.1 Problématique et stratégie proposée
III.2.2 Principe général de la méthode basée sur le concept des particules Lagrangiennes
III.2.2.1 Les particules Lagrangiennes dans le maillage EF
III.2.2.2 Notion de cellule de particule
III.2.2.3 Distribution des données microstructurales : notion de microstructures partielles
III.2.2.4 Suivi de l’évolution des données microstructurales
III.2.3 Discussion concernant la distribution de la microstructure représentative
III.2.3.1 Distribution dans les cellules
III.2.3.2 Distribution sur les points d’intégration
III.2.4 Intérêt de la méthode des particles Lagrangiennes
III.2.4.1 Réduction du temps de calcul des simulations
III.2.4.2 Compatibilité avec le remaillage
III.2.4.3 Possibilité d’intégrer des microstructures représentatives différentes
III.3 Vers l’application de la méthode aux cas des modèles polycristallins : plan de l’étude
Références bibliographiques
IV Implémentation du couplage Forge3® / rhéologie anisotrope pour la simulation des procédés de mise en forme sans remaillage
IV.1 Implémentation du couplage Forge3® / Modèle polycristallin
IV.1.1 Présentation du code EF Forge3®
IV.1.1.1 Formulation faible et discrétisation EF
IV.1.1.2 Formulation grande déformation
IV.1.2 Le modèle d’évolution microstructurale utilisé
IV.1.2.1 Formalisme mathématique pour la description de la déformation élasto-viscoplastique d’un cristal
IV.1.2.2. Paramètres à identifier dans le modèle
IV.1.3 Les différentes stratégies de couplage méthode EF/ modèle polycristallin
IV.1.3.1 Principe général du couplage
IV.1.3.2 Stratégies de couplage
IV.1.4 Les équations de l’interface méthode EF / Modèle polycristallin élastoviscoplastique
IV.1.4.1 Stratégie de couplage fort
IV.1.4.2 Stratégie de couplage faible
IV.2 Validation du couplage Forge3® / Modèle polycristallin élasto-viscoplastique dans le cas où une particule Lagrangienne est positionnée au centre de gravité de chaque EF
IV.2.1 Validation de la stratégie de couplage fort
IV.2.1.1 Présentation des simulations
IV.2.1.2 Résultats en terme de prédiction d’anisotropie mécanique et d’évolution de texture
IV.2.1.3 Conclusion
IV.2.1.4 Etude complémentaire : Temps de calcul des simulations en fonction du nombre d’EFs dans le maillage et du nombre d’orientations cristallographiques
IV.2.2 Validation de la stratégie de couplage faible
IV.2.2.1 Présentation des simulations
IV.2.2.2 Résultats des simulations
IV.2.2.2.1 Temps de calcul des simulations
IV.2.2.2.2 Prédiction d’anisotropie et évolution de texture
IV.2.2.3. Conclusion
Conclusion
V Méthode de réduction du temps de calcul à l’aide du concept des particules Lagrangiennes
V.1 Les méthodes de réduction du temps de calcul existantes
V.1.1 Réduction du nombre d’appels au modèle polycristallin
V.1.2 Réduction du nombre d’orientations cristallographiques nécessaires pour présenter la texture du matériau
V.1.2.1 Les méthodes de discrétisation de texture à partir de la FDO
V.1.2.2 Application originale de la méthode de la composante de texture
V.2 Une nouvelle méthode de réduction du temps de calcul : la distribution spatiale des orientations dans le maillage EF
V.2.1 Principe général
V.2.2 La méthode de distribution constante
V.2.3 La méthode de distribution selon le volume
V.3 Etude des deux méthodes de distribution des orientations sur les EFs et choix d’une méthode
V.3.1 Présentation des simulations
V.3.2 Résultats des simulations
V.3.2.1 Validation de l’implémentation des deux méthodes de distribution
V.3.2.2 Evolution de texture et prédiction d’anisotropie selon les différents nombres de textures distribuées et la méthode de distribution utilisée
V.3.2.3 Temps de calcul des simulations
V.3.3 Discussion préliminaire
V.3.4 Influence du maillage EF
V.3.5 Discussion
V.4 Application de la méthode de distribution selon le volume dans un cas de déformation hétérogène avec une seule particule
V.4.1 Compression de cylindre avec frottement
V.4.1.1 Présentation des simulations
V.4.1.2 Résultats des simulations
V.4.1.2.1 Prédiction de l’anisotropie mécanique
V.4.1.2.2 Prédiction de l’évolution de texture cristallographique
V.4.1.3 Temps de calcul des simulations
V.4.1.4 Conclusion
V.4.2 Application de la méthode de distribution selon le volume à un procédé de mise en forme : l’emboutissage de coupes cylindriques. Etude menée par L. Delannay
V.4.2.1 Simulation préliminaire : test de traction uniaxiale
V.4.2.2 Simulation EF de l’emboutissage
V.4.2.3 Résultats des simulations d’emboutissage
V.4.2.4 Discussion
V.5 Application de la méthode de distribution dans un cas de déformation hétérogène avec plusieurs particules Lagrangiennes
V.5.1 Méthode de distribution des orientations avec plusieurs particules
V.5.1.1 Principe général des deux méthodes de distribution des orientations sur les particules
V.5.1.1.1 La méthode de distribution selon le volume
V.5.1.1.2 La méthode de distribution semi-constante
V.5.1.2 Comparaison des deux méthodes de distribution des orientations sur les particules
V.5.2 Comparaison d’un cas avec une seule particule et plusieurs particules pour le couplage fort et le couplage faible
V.5.2.1 Présentation des simulations
V.5.2.2 Résultats
V.5.2.2.1 Prédiction d’anisotropie mécanique
V.5.2.2.2 Temps de calcul des simulations
V.5.2.3 Discussion
Conclusion
Références bibliographiques
VI Les particules Lagrangiennes et le transport des variables de modèles polycristallins
lors du remaillage
VI.1 Remaillage et transport des variables dans Forge3®
VI.1.1 Le transport P1
VI.1.2 Le transport P0
VI.2 Le transport des variables de modèles polycristallins lors du remaillage
VI.2.1 Position du problème
VI.2.2 Les différentes stratégies de transport des variables de modèles polycristallins
VI.2.2.1 Première stratégie : calcul polycristallin uniquement sur les particules
VI.2.2.1.1 Principe général
VI.2.2.1.2 Présentation des simulations
VI.2.2.1.3 Résultats
VI.2.2.1.4 Discussion concernant la première stratégie
VI.2.2.2 Deuxième stratégie : calcul polycristallin sur les EFs
VI.2.2.2.1 Principe général des deux méthodes
VI.2.2.2.2 Intérêt des deux méthodes
VI.3 Comparaison des méthodes 2A et 2B
IV.3.1 Présentation des simulations
VI.3.2 Résultats en terme de prédiction d’anisotropie et d’évolution de texture
VI.3.2.1 Influence du nombre de particules dans le maillage EF
VI.3.2.1.1 Une seule particule positionnée dans le maillage EF
VI.3.2.1.2 Différents nombres de particules dans le maillage EF
VI.3.2.2 Influence du nombre de remaillages
VI.3.3 Temps de calcul des simulations
VI.3.4 Discussion et choix de la méthode de transport des variables de modèles polycristallins lors du remaillage
VI.4 Compléments concernant l’étude de la méthode 2B
VI.4.1 Sensibilité à la taille de maille
VI.4.2 Sensibilité au couplage rhéologique utilisé
Conclusion
Références bibliographiques
VII Etude expérimentale
VII.1 Caractérisation de la microstructure des matériaux d’étude
VII.1.1 Les techniques expérimentales
VII.1.1.1 La microscopie optique et l’analyse d’images
VII.1.1.2 La technique EBSD
VII.1.1.3 La technique EDS
VII.1.1.4 La microdureté Vickers
VII.1.2 Caractérisation microstructurales des différents matériaux
VII.1.2.1 L’URB66 corroyé
VII.1.2.2 L’URB66 brut de solidification
VII.1.2.3 L’AA75 filé
VII.2 Essais mécaniques
VII.2.1 Présentation des essais
VII.2.1.1 L’URB66 corroyé
VII.2.1.2 L’URB66 brut de solidification
VII.2.1.3 L’AA75 filé
VII.2.2 Analyse de l’anisotropie mécanique et de l’évolution de texture après déformation
VII.2.2.1 L’URB66 corroyé
VII.2.2.2 L’URB66 brut de solidification
VII.2.2.3 L’AA75 filé
Conclusion
Références bibliographiques
VIII Validation des implémentations numériques par comparaison avec l’expérience
VIII.1 Calibrage des paramètres des paramètres du modèle polycristallin et de la loi de frottement
VIII.1.1 Paramètres du modèle polycristallin
VIII.1.2 Coefficients de la loi de frottement
VIII.2 Validation du couplage Forge3® / Modèle polycristallin et méthode de distribution des orientations : cas de compression uniaxiale de l’URB brut de solidificatio
VIII.2.1 Présentation des simulations
VIII.2.1.1 Paramètres du modèle polycristallin
VIII.2.1.2 Coefficients de la loi de frottement
VIII.2.1.3 Conditions opératoires des simulations
VIII.2.1.4 Géométrie et maillage des lopins
VIII.2.1.5 Mise en place de la méthode de distribution des orientations
VIII.2.2 Résultats des simultations
VIII.2.2.1 Détermination des coefficients de frottement
VIII.2.2.2 Prédiction de l’anisotropie mécanique
VIII.2.3 Temps de calcul des simulations
VIII.2.4 Discussion
VIII.3 Validation du transport des variables polycristallines lors du remaillage écrasement sur génératrice de l’AA75 filé
VIII.3.1 Présentation des simulations
VIII.3.2 Résultats des simulations en terme de prédiction d’anisotropie mécanique et d’évolution de texture cristallographique
VIII.3.2.1 Eprouvette lubrifiée
VIII.3.2.2 Eprouvette non lubrifiée
VIII.3.3 Temps de calcul des simulations
VIII.3.4 Conclusion
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