Disponibilité du phosphore

Disponibilité du phosphore

L’agriculture, qui constitue une des principales ressources pour assurer l’alimentation de l’ensemble de la population, doit poursuivre l’augmentation de la productivité des écosystèmes exploités, mais le faire de façon durable sur un plan environnemental et économique (Tilman et al., 2002). En effet, le développement durable a pour objectif de préserver les ressources naturelles et de promouvoir des voies de développement qui répondent à la satisfaction des besoins présents sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs (Harlem et Khalid, 1987). La population mondiale atteindra 9 milliards vers 2050 (UNPP, 2008). Selon l’estimation de la FAO (FAO, 2009), la production agricole mondiale devra augmenter de 70% d’ici à 2050 pour subvenir aux besoins de cette population grandissante. En Afrique Sub-saharienne, le besoin d’augmenter la production agricole est particulièrement important en raison d’une croissance de la production relativement faible comparée à la croissance démographique (Collomb, 1999). A Madagascar, la malnutrition touche encore 76% de la population avec une grande prévalence dans les milieux ruraux (INSTAT, 2013 ; Sourisseau et al., 2016) alors que les terres arables ne représentent qu’environ 20% de la superficie du pays (Rakotondravelo, 2003). L’agriculture est caractérisée par des systèmes de culture à faibles niveaux d’intrant de type familiaux (Filho et Yamada, 2002 ; Rasoamampionona et al., 2008). Le riz constitue l’alimentation de base pour la population. Les systèmes agricoles actuels sont marqués par la dominance de la riziculture inondée sur des bas-fonds. Au regard de l’accroissement démographique, la production rizicole actuelle n’arrive à couvrir qu’une partie des besoins locaux.

La recherche actuelle s’oriente progressivement vers une extension de l’exploitation des terrains en pente sur les colines ou « tanety ». Les sols de ces tanety, sont dominés par divers types de sols tropicaux très altérés. Ils sont classés, selon les diverses classifications pédologiques, comme Oxisols et Ultisols (Grinand et al., 2009) ou Ferralsols (Obaid-ur- Rheman, 2006 ; Andriamananjara, 2011), ou, plus communément, sols ferrallitiques, selon l’ancienne classification française des sols (CPCS, 1967; Delenne et Pelletier, 1981). Ils couvrent 46,5% de la superficie totale des sols malgaches. Ils sont caractérisés en particulier par un fort pouvoir de sorption du phosphore. Les formes minérales du phosphore sont associées aux minéraux argileux, comme la kaolinite, et plus particulièrement aux oxydes et hydroxydes de fer (goethite et hématite) et d’aluminium (gibbsite), ce qui réduit fortement leur disponibilité, limitant fortement la production agricole. Or, pour pouvoir augmenter la production agricole sur les tanety, il est impératif d’augmenter la disponibilité du phosphore.

Depuis plus de 60 ans, de nombreux travaux de cartographie pédologique ont été menés à Madagascar et, plus particulièrement, sur les Hautes Terres de Madagascar. L’absence de synthèse des données, souvent disponibles dans des documents issus de la littérature « grise », les difficultés d’utilisation de ces données, du fait des évolutions successives des connaissances pédologiques et des modes de classification, limitent l’utilisation des documents cartographiques pour une évaluation correcte des propriétés des sols à usage agricole. Or l’exploitation des sols nécessite une meilleure connaissance de leur fertilité. Cette connaissance demande des indicateurs de qualité des sols, notamment des analyses physico- chimiques. Toutefois, les déterminations des propriétés de ces sols demandent du temps et coûtent chères. Les paysans ou les services agricoles de l’Etat n’ont pas les moyens de financer des analyses à grande échelle. La spectrométrie infrarouge, une méthode rapide et non destructive pour évaluer certaines propriétés des sols, est considérée comme une alternative possible pour remplacer les méthodes classiques de laboratoire (Janik et al., 1998). Par conséquent, l’association des données cartographiques en pédologie avec des caractérisations des sols par spectrométrie infrarouge pourrait fournir des outils simples de comparaison des sols et des systèmes de culture associés en vue d’un diagnostic agronomique.

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Depuis quelques années, la spectrométrie infrarouge a été largement utilisée pour la prédiction des teneurs en carbone (C) organique du sol, en relation notamment avec des mesures de la séquestration du C (Viscarra Rossel et al., 2006; Cécillon et al., 2009). De nombreuses études ont permis de montrer que cette technique permettait de faire des prédictions précises des teneurs totales de C et azote (N) des sols. Beaucoup d’autres propriétés chimiques des sols ont été prédites correctement dans diverses conditions. Ceci est en partie lié au fait que ces propriétés sont corrélées avec les teneurs en matière organique des sols (Malley et al., 2004). Des travaux récents ont également montré des résultats prometteurs pour caractériser la texture, notamment les teneurs en argile, ou la minéralogie des sols (Vendrame et al., 2012). Hors les teneurs en matière organique, la texture et la minéralogie des sols conditionnent pour une grande part, les propriétés chimiques des sols, notamment la rétention des nutriments. En particulier, dans le cas du phosphore, sa rétention est largement conditionnée par la minéralogie des sols. Des recherches visant à déterminer les constituants des sols et leur influence sur la sorption de P dans les sols ferrallitiques de Madagascar pourrait ainsi apporter des informations utiles pour une meilleure gestion du P par les agriculteurs.

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