Dynamique de Langevin
Équation de Langevin
La dynamique microscopique du système soluté/solvant est décrite par les équations du mouvement de Newton. Lorsque le soluté évolue lentement par rapport aux molécules de sol-vant, et que l’on ne s’intéresse qu’à la dynamique du soluté, on introduit généralement l’effet du solvant par l’effet conjoint d’une force de friction F = −mγv, avec m la masse du soluté, v sa vi-tesse, et γ le coefficient de friction (ou la friction, en s−1) et d’une force aléatoire (stochastique) F s(t).
L’équation de Langevin peut être établie à partir de l’équation de Liouville en utilisant la méthode des projecteurs de Mori [203, 204]. Elle peut également être généralisée pour prendre en compte des effets de mémoire dans la force stochastique Fs [205].
Séparation des échelles de temps
D’après le théorème de fluctuation-dissipation [119], la force de friction qui dissipe l’énergie cinétique du soluté et la force aléatoire qui introduit des fluctuations de sa vitesse sont indisso-ciables. Cette dernière est supposée avoir une moyenne nulle. et varier très vite à l’échelle de temps considérée. Ce dernier point se traduit mathématiquement par sa variance
Résolution numérique
Il existe des algorithmes permettant de résoudre numériquement l’équation de Langevin, en l’intégrant explicitement en fonction du temps par l’introduction d’une force aléatoire [206, 207]. Plusieurs méthodes ont également été développées pour la résolution de l’équation de Langevin généralisée (avec mémoire) [208, 209].
Équation de Fokker-Planck
Densité de probabilité
La dynamique de Langevin permet de calculer les trajectoires de particules de soluté inter-agissant entre elles et/ou avec un champ extérieur, et effectuant un mouvement brownien sous l’effet de la friction et des fluctuations du solvant. L’étude statistique des trajectoires permet comme avec la dynamique moléculaire de remonter aux propriétés observables du système : la densité locale, le flux de soluté, son coefficient de diffusion, ou des propriétés impliquant les corrélations entre particules, comme les facteurs de structure. Certaines de ces observables peuvent être obtenues à partir d’un niveau de description intermédiaire, ou l’on a déjà procédé à une prise de moyenne, et la définition de la densité de probabilité f (x, v, t) de trouver une particule de soluté à la position x avec une vitesse v à l’instant t.
Pour parvenir à ces résultats, on a utilisé le fait que la densité de probabilité décroît en général beaucoup plus vite que n’importe quelle fonction polynomiale de la vitesse (nous préciserons ce point plus loin), et procédé à des intégrations par parties. Pour l’évolution du flux, on a introduit la vitesse limite uαE = aαE /γ atteinte sous les effets concurrents de la force extérieure et de la friction du solvant. Les équations (4.11) sont les deux premières d’une hiérarchie d’équations reliant les moments d’ordres successifs de la distribution de probabilité f (x, v; t). Cet ensemble ouvert de relations n’est pas soluble en général, car nous ne disposons pas d’une expression pour le second moment Pαβ. L’objectif consiste donc à obtenir une solution de l’équation de Fokker-Planck (4.6) permettant de reproduire les équations d’évolution des observables (4.11).
Résolution numérique
La résolution numérique de l’équation de Fokker-Planck (4.6) n’est pas aisée, dès que l’on considère des systèmes à 2 ou 3 dimensions. La résolution de cette équation aux dérivées par-tielles n’est en général pas envisageable par une approche par éléments finis, qui convient pour le cas à une dimension [202]. En effet, la discrétisation sur une grille à 2 × D dimensions pour le calcul des dérivées rend les calculs prohibitifs. Par exemple, à trois dimensions, si l’on utilise 100 points pour chaque coordonnée spatiale et de vitesse, il faut stocker 1006 = 1012 nombres réels pour représenter la densité de probabilité f (x, v; t) à chaque instant, ce qui pose des pro-blèmes de mémoire avant même de devoir considérer les dérivées par rapport à chacune des variables ou les intégrales multiples pour le calcul des moments (4.10).
Dans le cas bidimensionnel, des méthodes approchées, notamment spectrales, sont encore utilisables : on étudie les valeurs propres de l’opérateur (linéaire) de Fokker-Planck pour en déduire les propriétés d’évolution. On peut également citer la Matrix Continued Fraction Me-thod [202], utilisée notamment par Caratti pour la diffusion de particules dans un potentiel « en boîte à œufs » [211, 212]. Le cas d’une particule dans un potentiel à 3D est plus délicat.
La méthode de Fokker-Planck sur réseau (Lattice Fokker-Planck, ou LFP) permet de simuler la dynamique d’un système vérifiant l’équation de Fokker-Planck, en reproduisant les équations d’évolution (4.11). Il s’agit d’une méthode sur réseau, analogue à la méthode Lattice Boltzmann utilisée couramment pour les simulations hydrodynamiques. L’utilisation d’un petit nombre de vitesses bien choisies pour décrire tout l’espace des vitesses permet d’effectuer les calculs y compris à deux et trois dimensions. Nous présentons dans la partie suivante les aspects communs aux méthodes sur réseau, puis nous établirons l’algorithme de Fokker-Planck sur réseau à partir de l’équation continue (4.6).
Modèles sur Réseau
Historique
Lattice Gas Automata
L’idée d’utiliser des automates cellulaires (modèles sur réseau) pour simuler l’hydrodyna-mique a été introduite par Frisch, Hasslacher et Pomeau en 1986 [213], avec le Lattice Gas Automata. L’espace est discrétisé sur un réseau périodique dont les nœuds peuvent être vides ou occupés par un atome de gaz. Chaque nœud est connecté à ses voisins par des liens que les atomes peuvent suivre, selon leur vitesse, entre deux pas de temps. A chaque instant, l’état du système est décrit par l’occupation, pour chaque nœud du réseau, des états correspondant à une vitesse donnée : ni(x, t) = 1 si on a un atome à la position x avec une vitesse discrète vi telle que le vecteur viΔt relie deux nœuds voisins, ni(x, t) = 0 sinon. L’évolution du système au cours d’un pas de temps se décompose alors en deux étapes :
– translation des atomes le long du lien correspondant à leur vitesse vi,
– collision entre les atomes arrivant sur un même nœud, qui redistribue leurs vitesses.
Ce principe est illustré sur la figure 4.1. Si le réseau et les règles de collisions vérifient un certain nombre de propriétés, comme la conservation de la masse et de la quantité de mouvement totale, alors les densités et vitesses locales (nous reviendrons sur leur définition pour les modèles sur réseau) évoluent selon l’équation de Navier-Stokes pour un fluide incompressible :
Les conditions aux limites sont introduites dans les modèles sur réseau par des règles de col-lision particulières, qui dépendent du type de conditions (glissement ou non) et de la position de l’interface par rapport aux nœuds du réseau. Nous ne rentrerons pas ici dans une discussion complète des conditions aux limites, que l’on peut trouver par exemple dans [214], et présentons seulement deux types de conditions aux limites dans le cas du réseau ci-dessus.
D’une manière générale, les conditions aux limites sont facilement implémentées en intro-duisant une couche de nœuds supplémentaires aux bords du système, symbolisés par des points blancs sur la figure 4.2. Ces nœuds sont utilisés pour stocker les populations correspondant à des vitesses discrètes vi qui feraient sortir les particules du système au cours de l’étape de trans-port. Dans le cas des conditions aux limites périodiques, celles-ci sont simplement copiées à l’autre extrémité du système avant l’étape de transport, et y seront donc réinjectées lors de cette dernière.
Pour une interface entre fluide et solide, les conditions de non-glissement peuvent être im-plémentées par des règles de réflexion sans glissement (no-slip bounce-back). Cependant celles-ci peuvent varier selon la position de l’interface par rapport aux nœuds du réseau, comme indi-qué sur la figure 4.3.
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