Dignité de l’homme, dignité humaine et droits de l’homme

DIGNITE DE L’HOMME, DIGNITE HUMAINE ET DROITS DE L’HOMME

Il apparaît intéressant de voir le lien qui existe entre dignité humaine et droits de l’homme. On peut en effet se poser la question de savoir si le droit à la dignité fait partie des droits de l’homme ou si les droits de l’homme sont un développement de la dignité. Plusieurs théories s’opposent : celle de l’existence d’une relation déductive entre eux et celle qui réfute cette théorie.

LA DIGNITE SELON LES TEXTES

Egalité réelle ou superficielle des humains ?

Art 1 : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. » 

La formule semble claire. Tous les êtres humains sont titulaires des mêmes droits et de la même dignité et ces attributs leur sont accordés dès la naissance. Cette phrase ne conditionne la faculté d’être titulaire de la dignité à rien sinon au fait d’être humain.

D’abord, « les Hommes ne sont pas seulement égaux en droits ; ils le sont d’abord en dignité. Pour flétrir et exorciser l’ignominie du mépris, de l’avilissement, de la torture, du crime contre l’humanité, les mots ordinaires ne sonnent pas assez hauts. Dignité est synonyme de noblesse. » .

Ensuite, en creusant, on peut relever deux (2) concepts qui peuvent soulever quelques questions : « être humain » et le verbe « naître ».

Pour l’heure nous allons parler du lien préexistant entre dignité et humanité. La formule « dignité humaine » se retrouve dans plusieurs livres et cet article rattache encore la dignité à l’humanité. On peut alors se poser la question de savoir s’il peut y avoir une dignité non liée à l’humanité. Cet article 1er commence par « Tous les êtres humains ». Cela est normal quand on connaît le contexte dans lequel ce texte a été élaboré. La DUDH est un document porteur d’un message d’espoir et de renouveau. Le fait qu’il s’agisse du premier document qui retrace bien visiblement les droits et libertés individuelles signifie qu’un souffle nouveau vient sur le monde. Ce texte devra faire sentir que chaque personne dans le monde, quelle que soit sa condition, sa race, sa religion, tout le monde jouira des mêmes droits, aura les mêmes libertés. Après les atrocités de la deuxième guerre, ce sont des trésors inestimables que l’on offre à l’humanité. Et donc que le sentiment prédominant lors de la rédaction dudit texte était la protection de l’humanité. L’être humain est le pivot dans chaque article. Par ailleurs la DUDH, comme son nom l’indique est articulée autour de la protection de l’être humain. Il n’est donc pas envisageable d’y trouver mention de quelque chose qui ne soit pas rattachée à l’être humain. La dignité ici invoquée est donc celle non détachable de la personne humaine. Mais si on se détache de la DUDH, peut-on imaginer l’existence d’une dignité qui ne soit pas humaine ? La réponse à cette question se trouve dans le chapitre préliminaire. En quelques mots succincts, nous rappelons que la dignité est inhérente à la supériorité incontestable de l’homme doué de raison, créé à l’image de Dieu. Ainsi on peut parler de traitement « décent » à l’égard des animaux mais rien ne saurait mettre des bêtes sur le même socle que l’humain.

Puis il y a la formule « les êtres humains naissent ». Un être humain n’est-il donc titulaire de droit et de dignité qu’à sa naissance ? On sait que l’enfant n’obtient d’état civil, donc, n’existe juridiquement, que s’il naît vivant et viable. La naissance apparaît alors comme indispensable à la reconnaissance de son existence juridique. Mais il faut préciser que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a fixé un seuil à partir duquel le fœtus peut être considéré comme une personne humaine. Ce seuil est de 22 semaines d’aménorrhée pour un poids supérieur ou égal à 500 grammes et une taille de 24cm. Pourtant il y a un développement important de la notion de périnatalité. En fait on parle surtout de mort périnatale, c’est-à-dire la mort prématuré d’un fœtus en gestation. Le débat s’articule autour de la manière de traiter ces petits cadavres. L’avancée est remarquable car on consent à traiter les corps de ces fœtus avec la même déférence que les corps humains arrivés à terme (pardonnez l’expression). On respecte la dignité de ces êtres morts trop tôt. Alors pourquoi ces êtres humains en formation ne bénéficieraient-ils pas de la dignité tout au long de leur vie dans l’utérus ? En effet grâce aux nouvelles techniques d’imagerie médicale le fœtus n’est plus un être invisible que l’on ne peut que deviner dans le ventre de sa mère mais s’incruste dans le monde des vivants. Il est visible, soignable, sexué, on parle même aujourd’hui de « psychiatrie fœtale »… Ainsi le fœtus présente déjà les caractéristiques de la « vie » d’un humain déjà né mais il est plus fragile. Or la logique juridique veut que les plus faibles bénéficient d’une protection plus importante que les autres. Le fœtus devrait bénéficier d’une protection plus rapprochée. Or nous avons vu que la dignité est la charpente des droits de l’Homme, donc il fait accorder le droit à la dignité au fœtus afin de lui faire bénéficier des droits fondamentaux.

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Atteinte ancienne pourtant moderne à la dignité : l’esclavage

Art 4 : « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude, l’esclavage et la traite d’esclaves sont interdits sous toutes leurs formes. » .

Quand on remonte dans l’histoire on se rend compte que l’esclavage a toujours existé. Les Egyptiens, les Grecs et les Romains gardaient leurs prisonniers de guerre vivants et en faisaient des esclaves. Selon le dictionnaire Larousse 2010, est esclave celui « qui est sous la puissance absolue d’un maître qui l’a rendu captif ou qui l’a acheté ; qui se soumet servilement à un autre. » Un esclave est donc privé de toute capacité de décision, d’action, de volonté. Il est en quelque sorte réduit à devenir une émanation de son maître car il devient le bras qui fait les corvées que son maître souhaite voir accomplies, les pieds qui se rendent là où son maître le souhaite, il n’a généralement pas droit à la parole et on ne le laisse pas penser ; bref il est démis de toutes ses facultés d’être humain. Asservir une personne à l’esclavage c’est donc lui retirer son humanité. Les justifications à ce comportement ont été les victoires aux guerres dans les premiers temps, parfois il s’agissait d’une punition car on asservissait ceux qui ne pouvaient pas payer leurs dettes. Puis il y a eu le développement du racisme et du mythe de la supériorité de la race blanche. Certaines catégories de personnes se permettaient de réduire d’autres catégories en esclavage car les premières se croyaient supérieures par la couleur de leur peau. Ces « sauvages » qui vivent dans la jungle, qui ne sont même pas vêtus, qui ne parlent pas la langue connue de tous sont forcément inférieurs et donc assimilables à des animaux. Il y a aussi le rejet automatique de « l’autre ». Dans la traite des esclaves, « ceux que l’on déporte sont, en effet, dans tous les cas, considérés comme totalement différents au regard des valeurs dominantes et/ou officielles au sein des sociétés jouant un rôle majeur dans leur déportation. Le caractère irréductible de cette différence permet d’ailleurs de distinguer l’Autre « relatif », qui peut partager certains attributs culturels (comme la langue ou la religion) avec les membres de la société dans laquelle il est marginalisé, et l’Autre « absolu » qui ne sera jamais admis comme membre à part entière au sein d’une société donnée. » .

Il apparaît clair que tout ceci est parfaitement désuet. L’importance de cet article est également démontrée de par soi.

Le risque de la discrimination c’est qu’on ignore le fondement. Ce qui fait que le phénomène peut se répéter sans qu’on y fasse attention. « En d’autres lieux, et à d’autre époque, les critères discriminants peuvent être de nature politique, ethnique, religieuse ou encore raciale. Souvent ils combinent en fait plusieurs éléments (…) Ces distinctions ne sont jamais données par avance. Elles sont élaborées, construites à partir de matériaux divers. Certains renvoient à des données culturelles profondes, d’autres ne sont que des alibis permettant de légitimer une situation effective ou des intérêts particuliers. » Ainsi, l’esclavage connaît un renouveau, et ce tant dans les sociétés anciennement colonisées qu’au cœur des puissances économiques. La misère, les nécessités de la vie, l’espoir d’une vie meilleure, le recul de l’Etat de droit, l’aggravation des conditions sociales sont autant de raisons qui favorisent le développement de l’esclavage moderne.

Table des matières

Introduction
Chapitre préliminaire : Dignité de l’homme, dignité humaine et droits de l’homme
Titre I : Cadre juridique de la dignité
Chapitre 1 : La dignité selon les textes
Chapitre 2 : La dignité vue dans la pratique
Titre II : Manifestations de la dignité
Chapitre 1 : Dignité, élément délicat dans le monde médico-scientifique
Chapitre 2 : Les catégories les plus vulnérables
Conclusion

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