Les milieux poreux fissurés sont devenus un objet d’études important et d’intérêt croissant ces dernières années en raison de leur rôle dans la modélisation exigée par diverses applications industrielles telles que le stockage géologique du CO2 , le stockage des déchets radioactifs , l’ingénierie des réservoirs d’hydrocarbures ou la géothermie . Un défi scientifique auquel sont confrontés les géomécaniciens dans ce domaine est de modéliser l’écoulement dans de tels matériaux ainsi que de déterminer leur perméabilité effective. Des travaux importants ont été consacrés récemment par différents organismes à ces questions tant sur le plan théorique que sur les plans de la modélisation numérique et expérimental. L’intérêt de cette question touche également d’autres domaines tels que l’hydrogéologie (gestion des ressources en eau), l’environnement (transport des polluants dans les sols fissurés) ou le génie civil (étanchéité des bétons).
Des études antérieures axées sur les techniques de mesures sur le terrain (e.g. essai de pompage [81]) ont été mises en place afin de déterminer les propriétés hydrauliques d’aquifères fissurés. Cependant, cette approche coûteuse prend beaucoup de temps et nécessite de bien contrôler les matériels. Les méthodes numériques et analytiques sont largement utilisées pour estimer la perméabilité effective des massifs rocheux fracturés en raison de leur flexibilité dans le traitement des variations des géométries du réseau de fissures et des propriétés de matériaux. Les approches purement théoriques pour la détermination de la perméabilité équivalente des milieux à double porosité (pores/fissures) telles que le schéma de Mori-Tanaka [161] se heurtent vite à leurs limites dès que l’on quitte les cas de matériaux à faible densité de fissures. Le schéma d’homogénéisation auto-cohérent permet de tenir compte implicitement, et de manière simplifiée, de l’interaction entre les fissures [48, 12]. En vue de modéliser l’écoulement dans une formation géologique avec une fracturation complexe, le recours à l’outil numérique s’impose naturellement. L’utilisation des méthodes telles que les éléments finis ou les volumes finis nécessite la constitution d’un maillage volumique adapté pour le domaine fissuré. La création de ce maillage par une méthode automatique et pour un domaine comprenant un grand nombre de fissures de géométrie aléatoire constitue une difficulté numérique majeure qui n’a pu être résolue que dans le cas 2D [137] et partiellement en 3D pour des fissures polygonales [16]. La méthode des équations intégrales singulières présente l’intérêt de diminuer la dimension du problème et de réduire le problème 3D à un problème 2D. Le maillage se fait alors uniquement sur les surfaces des fissures qui sont modélisées souvent par des formes simples. La mise en place de cette méthode a nécessité certaines avancées théoriques, en particulier, l’établissement de certaines solutions fondamentales.
Les aspects mécanique, hydraulique et thermique ont été largement étudiés pour le cas d’inclusions ellipsoïdales, ou d’une surface elliptique de fissure (en 2D) noyée dans un domaine infini soumis à un champ lointain. Deux grandes méthodes ont été utilisées dans la littérature afin d’établir des solutions théoriques pour ce problème: les harmoniques ellipsoïdales et la méthode des équations intégrales duales [164, 158]. La solution de l’écoulement stationnaire dans et autour d’une seule fissure de Poiseuille pourrait être probablement obtenue en utilisant ces deux méthodes. Cependant, l’équation (48) fournit une solution générale qui est valable pour le cas général d’un domaine poreux contenant des surfaces courbes et intersectées par des fissures. Ce résultat n’est pas accessible par la méthode de l’harmonique ellipsoïdale ni par la méthode des équations intégrales duales. Lorsque cette expression est disponible, elle est un point de départ permettant de dériver la solution analytique pour le cas d’une fissure elliptique. Elle constitue alors une méthode plus courte et facile par rapport aux autres méthodes. Dans cette section, une solution analytique d’infiltration dans une fissure de Poiseuille est présentée. Cette solution permet une comparaison entre le modèle d’écoulement de Poiseuille dans une fissure d’épaisseur nulle et le modèle d’inclusion ellipsoïdale aplatie soumise à l’écoulement de Darcy.
Un système complet d’équations gouvernant l’écoulement transitoire dans un milieu poreux fissuré a été rappelé dans ce chapitre, dans lequel la conservation de la masse en un point régulier sur une fissure ou à l’intersection entre plusieurs fissures a été formulée explicitement. Le résultat important est le fait que l’échange de masse en un point sur l’intersection est indépendant des échanges entre les fissures et la matrice et se formule par la même expression que pour un réseau de fissures dans un milieu imperméable. En assimilant les fissures à une répartition de points sources, une solution générale du potentielle a été proposée pour le cas 2D et 3D sous la forme d’une équation intégrale singulière pour l’écoulement stationnaire dans un milieu poreux fissuré infini soumis à un champ lointain (gradient constant). Dans cette solution, le champ de pression dans la matrice est une fonction de l’infiltration dans les fissures qui permet la réduction de la dimension du problème numérique. Il est intéressant de noter que la solution générale inclut la conservation de la masse à l’intersection entre les fissures. Il n’y a pas alors de condition supplémentaire à introduire dans la modélisation numérique.
INTRODUCTION GENERALE |