DEVELOPPEMENT URBAIN ET PROBLEME DE LOGEMENT
Des pratiques foncières formelles
Concernant les pratiques foncières formelles dans la ville de Lakota, nous montrerons l’ensemble des actes fonciers conforme à la législations et réglementation en matière de gestion foncière urbaine, dont les autorités locales sont garants, mieux promoteurs. Il s’agira d’indiquer les caractéristiques du marché officiel de terrain constructible, puis l’appréciation de l’évolution du prix du sol dans cette ville moyenne, qui est Lakota.
Le marché officiel de vente de terrain
Il est géré par les services techniques de la Mairie. Les parcelles vendues sont des surfaces limitées par des bornes, mesurées avec précision. Elles sont cédées sur la base d’un prix au mètre carré. L’acquisition des terrains sur le marché officiel est subordonnée à des formalités réglementaires et comptables (demande d’attribution ; constitution d’un dossier, paiement des droits et taxes). Les prix varient de 250 Frs CFA à 500 Frs CFA le m2 selon que la zone soit résidentielle ou située dans un autre espace. Le coût du terrain comprend le prix de la parcelle fixée au m2 et les droits et taxes municipales, cahier des charges, timbres. Ainsi l’Etat vend aux particuliers qui en font la demande. La taille des terrains vendus varie entre 450 et 600 m2 . Ce type de marché, dit marché officiel de terrain est le plus crédible des différents types de marché existant cités plus haut en matière de spéculation foncière urbaine à Lakota.
L’évolution du prix du sol
Notre enquête nous a permis de collecter des données sur les prix des terrains échelonnés dans le temps. Cependant, un certain nombre de données sont inexplicables en raison des réponses imprécises (oubli de note, réponses évasives). L’analyse des informations collectées (jugées acceptables) permet de constater que les prix des terrains à Lakota évoluent dans le temps et dans l’espace selon les différents types de marché fonciers décrit ci-dessus. 232 Sur le marché officiel, la valeur vénale du mètre carré a évolué. Le taux de croissance est de 14,72% pour la période 1985-2010 passant ainsi de 125 Frs CFA en 1985 à 250 F CFA le m2 en 2010 pour les quartiers populaires et noyaux villageois, puis de 150 Frs CFA en 1985 à 500 Frs CFA le m² en 2010 pour les quartiers de types résidentiels viabilisés (figure 37) . Il s’agit par exemple des terrains de l’ex TF de SPROA41 où le coût des terrains varie de 225 000 à 300 000 Frs CFA, sans les frais de dossier et autres documents administratifs. Ce marché ne possède pas de caractère spécifique car il est transparent. La valeur d’une parcelle ou d’un terrain selon la surface (en m2 ) est publiée par les services techniques par rapport au centre –ville ou du niveau de viabilisation de l’espace loti. Mais dans l’ensemble, l’on tient également compte de la hiérarchie des éléments de l’environnement (écoles, espace de jeux, centre de santé, commerce etc.…) et des paramètres de la situation dans l’espace urbain d’après leur incidence sur la valeur vénale. Figure 37 : Courbe évolutive du prix de terrain constructible de 1985 à 2010 à Lakota (source : Enquête, 2011) Le règlement des ordres de paiements et le retrait des lettres d’attribution se font respectivement auprès de la direction locale des Impôts et des services techniques de la Mairie de Lakota, dont le personnel est pour l’occasion chargé de la gestion et des ventes de terrains. Lafigure 37 ci-dessus nous donne l’évolution du prix au mètre carré (m²) selon L’année depuis 1985. 41Opération de lotissement réalisé en 2000. Ce site non –habité est situé dans la zone Nord, près du grand carrefour et Akabréboua. 0 100 200 300 400 500 600 1985 1990 1995 2000 2005 2010 Prix au m² /Quartiers Populaires Prix au m² /Quartiers Residentiels.
De 1985 à 1999
A l’analyse de la figure 41, de 1985 à 1999 inclus, les courbes évoluent lentement à la fois pour les quartiers populaires et les quartiers de type résidentiels. On constate que le prix des lots sur l’espace de Lakota a connu une croissance nettement élevée par rapport aux années précédentes. Les prix sont restés constants. Ce fut de l’ordre de 100 tous les cinq (5) ans. Les lots sont restés à 250 F/m2 de 2000 à 2010 pour les quartiers populaires, mais ils sont passés de 300 F/m2 en 2 000 à 500 F/m² avant 2010 pour les quartiers populaires.
De 2000 à 2010
Toujours à l’analyse de la figure 37 de 2 000 à 2 010, la courbe est stable pour les quartiers populaires, par contre celle des quartiers résidentiels évolue rapidement. On constate que le prix des lots des quartiers résidentiels sur l’espace de Lakota a connu une faible croissance de l’ordre de 25 à 50 F/m² tous les cinq (5) ans. Les coûts des lots sont passés de 125 F/m² en 1985 à 200 F/m² pour les quartiers populaires, puis de 150 F/m2 en 1985 à 250 F/m² avant 2000 pour les quartiers résidentiels. Si nous considérons l’année 1995, l’on constate que le prix du m² est passé du simple au double. Force est de constater que ces coûts sont bien élevés pour la bourse des populations de Lakota. En somme de 1985 à 2010, La croissance rapide de la population a entraîné un accroissement des besoins de terrain à bâtir. Ce qui a pour conséquence directe la spéculation. Cela freine aussi la volonté de certains ménages de construire. Ainsi, le constat que l’on peut faire est qu’une onde de hausse de prix de terrains viabilisés est de plus en plus formelle aux limites actuelles de la ville de Lakota. Les prix sont croissants du type de quartiers populaires vers les quartiers de type résidentiel de la ville, mais toujours nettement élevés année après année. La hausse du prix du sol a un effet d’entraînement sur le coût des loyers décents avec un minimum de commodité dans un sous quartier équipé dans la ville de Lakota. Ce qui permet de maintenir à un niveau toujours plus élevé la demande de terrain, vu qu’il n’y a plus de terrains disponibles au centre-ville et les quartiers proches.
Le dysfonctionnement du marché privé de logements
La spéculation foncière, la turbulence du marché de l’emploi, le bas niveau de vie des ménages, la production des logements par l’auto-construction, la non-application des règles, etc., sont à la base du dysfonctionnement du marché privé du logement. 234 Ce dysfonctionnement se manifeste à travers la dégradation des logements, la location libre, l’accroissement de la distance logement/lieu de travail et la forte mobilité résidentielle.
L’Etat du logement à Lakota
Le logement est vieillissant et exigu dans les anciens quartiers du centre-ville. En effet dans ces quartiers, beaucoup de logements datent de plusieurs décennies. Malgré les multiples réparations au fil du temps, ces maisons apparaissent toujours vieillissantes. Il s’agit généralement de maisons familiales. Le manque de moyens financiers fait que les propriétaires les moins nantis sont incapables de reconstruire. Ce qui a pour conséquence le départ des locataires et l’aggravation de la promiscuité dans les ménages des propriétaires le plus souvent. En dehors de ce cas, il y a celui des maisons en chantier depuis 5 voire 10 ans et des parcelles entourées seulement d’un mur mais laissées vides pendant des années en vue d’une spéculation future. Les maisons en chantier depuis plusieurs années appartiennent le plus souvent à des ménages locataires et à des cadres ou fils des localités résidents soit Abidjan ou à l’étranger, qui ont trouvé des terrains pour y construire leurs logements. Ils sont le plus souvent animés par une forte ambition de réussir leur trajectoire résidentielle ascendante qui leur permettra de fuir les affres d’une location non réglementée. Malgré les efforts d’économie, des ménages locataires, leurs temps de location se prolonge du fait des difficultés financières et aussi la cherté des matériaux de construction face à une envie ardente de construire coûte que coûte.
La location libre
La location libre du logement se caractérise par son aspect informel car non régie par aucun texte. Le prix du loyer est très variable en fonction de la situation géographique, du type de quartier, de la nature et du degré d’équipement du logement. Le loyer est généralement proposé par le propriétaire qui décide aussi d’une caution à payer avant de s’installer. Cette caution varie selon les exigences du bailleur et peut aller de deux (2) à trois (3) mois. La pression du loyer sur le budget des ménages dépend du statut socio-financier ou professionnel du locataire. Ainsi pour la majorité des locataires, les problèmes financiers conduisent au règlement difficile des loyers. Cette situation est parfois à la base de relations conflictuelles entre bailleurs et locataires. Cela pousse chacun de ces deux (2) acteurs à adopter des stratégies efficaces pour s’en sortir le mieux possible. 235 Certains propriétaires pour éviter de se faire arnaquer par un locataire exigent au moins trois (3) mois d’avance de loyer avant que celui-ci ne s’installe. Cette stratégie qui vise à sécuriser le propriétaire à l’inconvénient de limiter les demandeurs de logements les plus démunis. Ainsi, acquérir une habitation dans la ville de Lakota est devenu une compétition où ceux qui peuvent proposer une forte avance sur le loyer sont toujours gagnants. Malgré tout, l’offre est loin en deçà de la demande de logement. Cela se remarque dans le fait que le temps moyen de recherche d’un logement semble se prolonger si bien que les ménages qui déménagent sans histoire avec le bailleur réservent le logement à un parent, un ami ou une connaissance, informé à l’avance. Les réservations de logement concernent aussi les maisons en chantier. En effet, il n’est pas rare à Lakota qu’un propriétaire enregistre des réservations dès le stade de fondation de la construction. La pression est telle que certains candidats envisagent de donner une avance pour bénéficier du logement. Cette avance est une sorte de garantie. 6.2.3.3. L’accroissement de la distance logement/ lieu de travail Le parc immobilier de la ville de Lakota est fortement constitué d’habitat de cour de deux bâtiments « horizontaux » (l’un face à l’autre). Car les bailleurs particuliers n’ont pas suffisamment de moyens pour construire des immeubles à plusieurs niveaux pouvant accueillir plus de ménages. C’est ce qui explique l’extension spatiale spectaculaire de la ville et l’éloignement de plusieurs ménages de leur lieu de travail, particulièrement au centre-ville. En effet, l’absence d’un réseau dense de transport collectif urbain, le coût élevé du carburant et le bas niveau de vie des ménages posent avec acuité le problème du transport des citadins de leur domicile vers les marchés, les services, les lieux ludiques situés dans le centre-ville ou pour visiter leurs parents et amis. Les taxis communaux font la course à 200 FCFA. Lorsque la distance est grande, il faut débourser 300 à 400 FCFA, l’équivalant de deux places pour un passager. Ce qui paraît énorme pour des ménages à revenu modeste en grande partie. Vu le statut de ville moyenne de Lakota, il n’existe pas de transport en commun formel dont le monopole se trouve entre les mains de la Société de Transport Urbain comme à la SOTRA à Abidjan et la SOTUB dans la ville de Bouaké. Le problème de transport est d’autant plus délicat que peu de citadins possèdent une voiture personnelle ou une moto, la dégradation très avancée des rues inter-quartiers qui parfois sont impraticables en période de pluie. 236 Alors la majorité des habitants de Lakota marchent quand les frais de taxi manquent. D’où le grand nombre de piétons dans la ville à tout moment. Le ressenti du problème de transport dépend du revenu du ménage, de la situation géographique du lieu d’habitation ainsi que de l’âge ou du sexe de l’habitant. Aussi, ne serait-il pas illogique de parler de problème de transport pour les ménages des quartiers Dida, Dioulabougou et commerce car ces quartiers centraux regroupement à elles seules l’ensemble des services publics et commerces de la ville. Ces habitants du centre jouissent largement, de la proximité des grands services et marchés de la ville. Ils sont de ce fait moins touchés par rapport à ceux de la périphérie. Dans les quartiers centraux, les mouvements pendulaires ne concernent pas tous les chefs de ménages. La concentration de locataires au centre-ville provient d’une stratégie qui vise à minimiser les coûts des déplacements au détriment de la qualité du logement est critique.
La mutation foncière du centre-ville
On a vu que le centre-ville est soumis à une forte concentration de l’habitat et une forte densification humaine, le tout accompagné d’une dégradation du cadre de vie deshabitants. Depuis quelques années, ce centre est soumis à des mutations foncières sans précédent de la part d’opérateurs économiques qui construisent çà et là des villas et des studios avec toutes les commodités. En effet, la DDCAU de Lakota révèle que la plupart de ces habitats modernes qui n’ont pas de permis de construire rebâtissent sur le site de logements coloniaux en ruine, si bien que même les conditions de sécurité n’y sont pas assurées.. En dehors du permis de construire, ces nouvelles constructions en dur seront une gêne dans la réalisation du projet de réhabilitation du centre-ville initialement prévu par le PUD de 1983 (révisé en 1994) dont l’objectif principal est de pouvoir maintenir un grand nombre de ménages dans leurs quartiers d’habitation et éventuellement de décongestionner la zone en question. Ce projet mérite d’être réalisé quand on sait que la mutation foncière en cours dans le centre ville revêt aussi deux inconvénients majeurs pour l’habitat. Dans un premier temps, elle diminue drastiquement la fonction résidentielle des quartiers centraux en faveur des activités de commerce et de services et dans un deuxième temps, elle enfonce à moyen ou long terme les ménages soumis aux mouvements qui en émanent dans un état de pauvreté déjà aggravé. En effet, dans le centre-ville, la majorité des ménages sont pauvres car leurs chefs sont soit des retraités, des veuves, des héritiers à faible revenu, des personnes logées gratuitement ou encore des locataires moins exigeants de par le fait de leurs revenus.
Introduction générale |