Développement de la végétation spontanée après travail du sol ou désherbage chimique
Effet de facteurs agro-pédologiques sur la distribution spatiale des espèces
Des travaux antérieurs ont permis de caractériser la ore des vignes (e.g. Beuret, 1981 en Suisse ; Espirito-Santo et al., 1990 au Portugal ; Maillet, 1992 dans le Languedoc-Roussillon) mais les espèces d’adventices dièrent entre zones géographiques. Il est donc dicile de s’appuyer sur ces résultats pour estimer la composition oristique de la zone étudiée. De plus, d’autres travaux ont montré que l’entretien du sol et les modalités de gestion des adventices inuaient sur les communautés oristiques (e.g. pour les cultures pérennes en rangées, Mas et al, 2007 ; Gago et al., 2007 ; Baumgartner et al., 2008). Les propriétés des sols conditionnent également la composition oristique des parcelles cultivées (e.g. Andreasen et al., 1991). Finalement, Fried et al. (2008) indiquent que les facteurs déterminants des communautés d’adventices sont très dépendants des échelles d’étude (groupe de parcelles, région, pays). Par conséquent, une étude des communautés oristiques de la zone d’étude s’est avérée nécessaire. Les facteurs environnementaux et agronomiques couramment identiés comme inuents sur les communautés ont été investigés pour évaluer leurs eets. Ainsi, on a eectué des relevés oristiques sur un bassin versant de taille moyenne (75 km²), ce qui permettait d’étudier une diversité de sols conséquente et qui correspond à la diversité de sols que peut avoir à gérer un viticulteur au sein de son exploitation.
Matériel et méthodes
Méthode d’échantillonnage
La zone d’étude est le bassin versant de la Peyne. Pour étudier la variabilité des communautés oristiques à l’échelle de la zone d’étude, 86 relevés oristiques ont été réalisés en novembre-décembre 2008 dans 82 parcelles gérées par au moins 25 viticulteurs diérents et 95 relevés ont été réalisés en juin 2009 dans 75 parcelles gérées par au moins 28 viticulteurs diérents (les viticulteurs concernés sont majoritairement les mêmes pour les deux séries de relevés). Ils ont été étalés en 4 passages pour chacune des deux saisons. L’échantillonnage des parcelles a été déni pour analyser la variabilité oristique selon deux facteurs principaux : le mode d’entretien du sol et le type de sol. Il a été réalisé indépendamment pour chacune des saisons, les parcelles observées n’étant pas forcément les mêmes d’une saison à l’autre. Les trois modalités d’entretien du sol suivies ont été : le travail du sol seul : il est réalisé 2 à 5 fois par an, ceux qui en réalisent 5 associent un travail du sol à l’automne, un à la n de l’hiver et trois entre le début du printemps et le début de l’été, ceux qui n’en réalisent que deux, les positionnent généralement en n d’hiver et au printemps. La majorité des travaux du sol sont réalisés avec un outil à dent. le désherbage chimique seul : il est aussi appelé non-culture, est généralement réalisé entre n février et n avril. La plupart des viticulteurs utilisent une association d’herbicide de pré-levée et de post-levée. Une minorité des surfaces entretenues de cette façon peut recevoir un second désherbage global ou localisé sur les repousses avec un herbicide de post-levée entre début mai et n juillet. l’association travail du sol et désherbage chimique : elle se compose d’un désherbage chimique réalisé entre n février et n avril généralement avec un herbicide de postlevée seul et d’un travail du sol réalisé entre début mai et n juillet. Un second travail du sol peut être réalisé à l’automne. Les parcelles sélectionnées pour les relevés se caractérisaient par une modalité d’entretien du sol stabilisée depuis au moins 2 ans et les plus jeunes avaient été plantées en 2005. Comme les parcelles appartenaient à des viticulteurs diérents, les caractéristiques des vignes (largeur d’inter-rang, palissage, cépage, porte-gree) étaient variables. De même, les modalités précises d’entretien du sol (outil, intrants, calendrier) étaient variables au sein d’un type. Les types de sol étudiés ont été sélectionnés selon leur représentativité dans la zone d’étude et sur les caractéristiques qui pouvaient inuencer a priori la composition oristique : le pH du sol directement relié à la présence de calcaire actif et l’hydromorphie. Les cinq types de sol retenus ont été : les sols développés directement sur les dépôts calcaires du Miocène et sur les glacis colluviaux associés (codé MOL pour les gures) : ces sols sont moyennement profonds à très profonds, à texture équilibrée, peu caillouteux et calcaires dès la surface. Les mesures réalisées sur 4 prols indiquent des pH supérieurs à 8. Ces sols n’ont pas de tendance hydromorphe dans les horizons de surface. Les sols développés dans les dépressions mal drainées (codé HYD pour les gures) : ces sols sont très profonds, à texture limono-argileuse, à pH neutre à basique et comportant une hydromorphie marquée. les sols de la transition Mio-Pliocène développés sur les calcaires lacustres, avec une inuence colluviale et/ou uviatile (codé HET pour les gures) : ces sols sont très variables tant en profondeur qu’en texture. Leur pH est irrégulièrement neutre à basique et le taux de calcaire actif est variable en fonction de la profondeur d’apparition du calcaire lacustre. les sols sur alluvions quaternaires anciennes et argile pliocène (codé NTR pour les gures) : ces sols sont argileux et souvent caillouteux. Les mesures réalisées sur deux prols montrent des pH variant de 7,5 à 8,5 et des taux de calcaire actif faibles en surface (horizon 0-70 cm). les sols sur alluvions villafranchiennes très évoluées (codé AC pour les gures) : ces sols sont profonds, de texture sablo-argileuse et acides, les mesures sur un prol indiquent un pH de 6,5 environ. Le taux de calcaire actif mesuré est nul. 164 Chapitre 5 : Structure des communautés d’espèces adventices Toutes les parcelles retenues pour les relevés sont choisies pour être représentatives de ces groupes pédologiques. Elles ont été sélectionnées grâce à une carte pédologique au 1/25 000 (Coulouma, 2008 ; Coulouma et al., 2008).
Méthode d’échantillonnage pour les relevés oristiques
Les relevés oristiques dans les parcelles de vigne ont été réalisés selon la méthode du transect en point contact (gure 5.1) en listant les espèces présentes tous les 10 cm le long d’un transect de 5m. On a donc listé les espèces présentes le long du transect en 51 points. Certaines plantes n’ont pu être identiées qu’au niveau de leur genre car leur développement était incomplet ou parce qu’elles avaient été endommagées par les traitements d’entretien du sol appliqués. Figure 5.1 Illustration représentant la méthode des points contacts d’échantillonnage de la végétation herbacée en transect linéaire, d’après Hubert (1978). Tous les relevés ont été réalisés dans les inter-rangs, c’est à dire dans les allées entre les rangs de vignes. Un seul relevé a été réalisé par parcelle et par type d’entretien du sol, une parcelle ne pouvant relever que d’un type de sol. Cependant une parcelle pouvant réunir une à deux modalités d’entretien du sol pour les parties inter-rangs, il a pu être réalisé jusqu’à deux relevés dans une parcelle. L’emplacement du relevé dans la parcelle a été choisi avec l’objectif d’être représentatif de la ore présente sur la surface de la parcelle entretenue selon la modalité étudiée. Les zones en frontière des parcelles ont été évitées.
Traitement des données et analyses statistiques pour l’étude des communautés
Une communauté est un assemblage de populations coexistantes dans l’espace et dans le temps. Trois facteurs de variations de ces communautés oristiques ont été étudiés : la saison ; la modalité d’entretien du sol ; le type de sol. Pour caractériser les communautés et leur variabilité, l’étude s’est basée sur la richesse spéci- que, les types biologiques des plantes, la fréquence et l’abondance relative des espèces. Toutes les analyses ont été réalisées avec le logiciel R (Ihaka and Gentleman, 1996). Nous détaillons ci-après la signication des diérentes variables observées des communautés et les analyses statistiques basées sur ces variables. La richesse spécique La richesse spécique (diversité alpha), c’est à dire le nombre d’espèces présentes, permet d’évaluer la diversité oristique. La richesse spécique a été calculée pour chaque relevé. Ensuite, pour chaque facteur étudié, on a réalisé une analyse de variance. Si l’hypothèse nulle était rejetée et si le facteur avait plus de 2 modalités, un test de Tukey a été eectué. Ce test de comparaisons multiples sur les moyennes qui est une généralisation du test de Student permet d’identier quelles sont les modalités dont les moyennes pour la variable étudiée dièrent signicativement. Les types biologiques des plantes Toutes les plantes observées ont été classées selon leur type biologique en utilisant la classication de Raunkiaer (1934). La classication des types biologiques selon Raunkiaer (1934) Cette classication basée sur la situation par rapport au sol du point de croissance de la plante (bourgeon) regroupe cinq classes majeures : Phanérophytes : plantes pérennes herbacées ou ligneuses avec des bourgeons persistants à plus de 25 cm au-dessus du sol (arbres et arbustes) ; Chamaephytes : plantes vivaces avec des bourgeons ou des apex de feuilles persistants situés très près du sol (moins de 25 cm au-dessus) ; Hemicryptophytes : plantes avec des bourgeons persistants situés au niveau du sol ou juste au-dessus (adventices pérennes ou bisannuelles) ; Géophytes : plantes avec des bourgeons persistants sur la surface du sol ou en-dessous (bulbe, rhizome, tubercule) ; Therophytes : plantes annuelles qui survivent en conditions défavorables sous forme de graines. Certaines plantes peuvent être rattachées à plusieurs types biologiques, par conséquent on a utilisé les cinq classes majeures et une sixième classe pour les plantes Therophytes/Hemicryptophytes qui peuvent aussi bien avoir un fonctionnement annuel ou bisannuel. Pour chaque facteur étudié, un test du chi2 a été réalisé sur la table de contingence croisant les 6 classes de types biologiques et les modalités du facteur étudié. Ce test permet d’établir la liaison éventuelle entre les diérentes modalités du facteur étudié. Il compare la distribution observée des eectifs entre types biologiques pour chaque modalité du facteur à la distribution théorique correspondant à une distribution équilibrée entre chaque modalité du facteur : chaque type biologique est dans une proportion égale quelque soit la modalité du facteur étudié.