Déterminants sociaux et économiques de la
mortalité des enfants
Situation Sanitaire et politiques de santé au Sénégal
Situation sanitaire en général La politique sanitaire de l’État vise à améliorer l’état de santé des populations. Le Plan National de Développement Sanitaire (PNDS 2009-2018) repose, à cet effet, sur une vision d’un Sénégal où tous les individus, tous les ménages et toutes les collectivités bénéficient d’un accès universel à des services de santé promotionnels, préventifs et curatifs de qualité, sans aucune forme d’exclusion. Nous analyserons la situation sanitaire du Sénégal à travers le système de santé défini, la problématique des ressources, ainsi que la politique de santé menée, les ressources disponibles.
Organisation et infrastructures de santé
Le système de santé du Sénégal présente une structuration pyramidale à trois niveaux inter reliés complémentaires pour répondre à la demande en soins des populations de manière générale : – La base de la structure est constituée par le district sanitaire dans lequel se retrouvent les postes de santé et les centres de santé qui sont implantés dans les communes, les chefs-lieux de communautés rurales ou les villages relativement peuplés. À ce niveau sont pris en charge les soins de santé primaires (SSP). – Au milieu de la pyramide, il y a la région médicale et les centres hospitaliers régionaux, ce sont les hôpitaux de niveau 2. Dans l’échelon régional s’opère la transformation des politiques et stratégies et plans d’action du niveau central en activités opérationnelles à mettre en œuvre au niveau des districts. – Au sommet de la pyramide se trouvent les services ministériels du niveau central et les centres hospitaliers universitaires qui sont des établissements de niveau 3 L’organisation du système de santé de type pyramidal est également structurée en 4 niveaux sur le plan de l’offre de services : Etablissements Publics de Santé hospitaliers et non hospitaliers (38), Centres de santé (101), Postes de santé (1458), Niveau communautaire (cases: 2666, sites: 2605). Ce dispositif est complété par l’offre du secteur privé et la médecine traditionnelle qui se sont développés ces dernières années. 27 FIGURE 6: VUE D’ENSEMBLE DE LA PYRAMIDE SANITAIRE DU SENEGAL Source : Interviews d’experts et de parties prenantes; PSE 2013-volet Santé La santé communautaire fait partie intégrante du système de santé en se focalisant sur la promotion de la santé. Sa spécificité est d’être promotionnelle et non curative, de promouvoir et d’avoir une vision globale et de proximité de la santé, s’appuyant sur le fait que les changements individuels peuvent être produits par le biais de la participation à une action collective. . Ainsi le groupe entier transforme ses normes et une dynamique de changement se met en place. Au Sénégal la santé communautaire est une réalité depuis des décennies et le MSAS a mis en place une cellule de santé communautaire rattachée à la direction générale de la santé. Cette cellule est chargée de : • Élaborer une politique de santé communautaire • Définir les paquets d’activités communautaires intégrés aux différents échelons du système de santé. Cette santé communautaire s’appuie sur les cases de santé au nombre de 1 703 et la formation des relais communautaires qui mènent des activités telles que l’orientation des tousseurs 28 chroniques, la prise en charge à domicile (PECADOM), la prise en charge des infections respiratoires aigües (IRA), la prise en charge intégrée des maladies de l’enfant (PECIME), l’accompagnement soutien mais aussi et surtout la sensibilisation. Par ailleurs, une fourniture adéquate des soins de qualité pourrait être assurée grâce à une bonne fonctionnalité et une efficacité dans l’articulation de ces trois niveaux. Les soins dits de santé primaire constituent en principe le soubassement des systèmes de santé, dont les PNDS prévoient que les structures qui en sont chargées doivent couvrir n milliers d’habitants dans une zone géographique déterminée. Classiquement tournés vers la santé maternelle (en particulier le suivi prénatal) et infantile et les pathologies courantes de la zone, les centres de santé de premier niveau prennent aussi en compte des questions que l’éloignement de l’hôpital interdit d’ignorer ; on pratique donc des mises en observation et de la petite chirurgie qui peuvent parfois, sous le caractère de l’urgence, prendre en compte une césarienne ou une hernie étranglée. De plus en plus, les centres de santé pratiquent l’intégration de services, c’est-à-dire doivent offrir des soins de proximité pour un registre élargi à des pathologies relevant jusqu’alors de structures spécifiques telle la tuberculose. Bien que les planifications prévoient la présence de médecins, la majorité des centres de santé, tout particulièrement en milieu rural, sont tenus par des infirmiers et/ou des sages-femmes. En milieu urbain, le maillage de la carte sanitaire est plus serré, en particulier grâce à une offre de soins privée de qualité très inégale, mais surtout d’une accessibilité économique moindre qui permet d’améliorer le taux de couverture. Concernant les infrastructures, on peut noter l’achèvement des travaux de construction d’un 01 hôpital (Dallal Jamm), quatre (04) Centres de dialyse (Thiès, Diourbel, Pikine et Guédiawaye) et trois (03) Centres de Santé (Yeumbeul, Niakhar Samine) et la réalisation à 98% du CS de Goudomp (Rapport de performance, 2018). Douze structures sanitaires ont été réhabilitées en 2017. Dans le domaine des équipements, soixante (60) structures sanitaires ont bénéficié de dotation d’équipements. Malgré la réalisation d’infrastructures nouvelles, on observe une baisse de la couverture en infrastructure sanitaire accentuée par le déficit en personnel. Ainsi, il en résulte une accessibilité inégale des populations aux soins, particulièrement des plus pauvres qui sont les plus vulnérables aux maladies infectieuses et parasitaires. Le Sénégal comptait en 2016 • 100 Centres de Santé; • 35 Hôpitaux dont 10 EPS de niveau 1, 14 EPS de niveau 2 et 11 EPS de niveau 3 ; 29 • 1 458 postes de santé. • 2 464 cases de santé Ainsi, les ratios de couverture sont de : • 1 Hôpital pour 422 853 habitants (normes OMS : 1 / 150 000 habitants), • 1 Centre de santé pour 147 999 habitants (normes OMS 1 / 50 000 habitants), • 1 Poste de santé pour 10 151 habitants (normes OMS 1 / 10 000 habitants). Le secteur public sanitaire est constitué par l’ensemble des services administratifs et structures de santé dépendants de l’autorité publique. La Pharmacie Nationale d’Approvisionnement (PNA), devenue un établissement public de santé en application de la réforme hospitalière, est chargée de l’achat des médicaments et produits sur le marché international, de la gestion et de la distribution au niveau périphérique par l’intermédiaire des Pharmacies Régionales d’Approvisionnement(PRA). Le secteur privé joue un rôle important dans le dispositif sanitaire qui intègre ses structures à tous les niveaux du système. On distingue le secteur privé à but lucratif, le secteur privé à but non lucratif et la médecine traditionnelle. Le secteur privé lucratif comprend les infirmeries, les cabinets médicaux et dentaires, les cliniques. Le secteur privé non lucratif est constitué des postes de santé privés catholiques, le secteur confessionnel et médecine d’entreprise. La médecine traditionnelle quant à elle, est un système informel et non reconnu par le code de déontologie médicale. Il joue un rôle important dans la santé des populations et des efforts sont consentis pour son intégration dans le système de santé. Au Sénégal, les prestataires privés sont une source majeure dans la fourniture de services de santé, offrant près de 22% des services de contraception (EDS, 2005). Les prestataires privés sont souvent d’importants pourvoyeurs de produits et services de santé. Bref le secteur privé de la santé apporte une contribution substantielle dans la densification de l’offre de services et a également largement contribué au relèvement du plateau technique. Toutefois, le potentiel offert par le dynamisme du secteur privé de la sante au Sénégal n’est pas suffisamment valorisé par le système public. D’une part, l’offre de services de santé du secteur privé est insuffisamment capitalisée au profit de la densification de la couverture sanitaire. D’autre part, les données et contributions du secteur privé à l’offre de services sont faiblement capturées et valorisées. Le potentiel offert par le dynamisme du secteur privé de la sante au Sénégal n’est pas suffisamment valorisé par le système public. D’une part, l’offre de services de santé du secteur 30 privé est insuffisamment capitalisée au profit de la densification de la couverture sanitaire. D’autre part les données et contributions du secteur privé à l’offre de services sont faiblement capturées et valorisées. Enfin les conditions d’accès aux crédits d’investissements et aux incitations fiscales limitent les capacités du secteur privé de la santé à offrir des coûts de prestations accessibles. Par ailleurs, l’offre des services du sous-secteur « action sociale » comprend des actions de réadaptation et de réinsertion au sein des Centres de Promotion et de Réinsertion sociale (CPRS) et une offre de proximité assurée par des intervenants de première ligne au sein des services de santé, des structures scolaires et des CPRS. Enfin, les conditions d’accès aux crédits d’investissements et aux incitations fiscales limitent les capacités du secteur privé de la santé à offrir des coûts de prestations accessibles. De solides partenariats entre les secteurs public et privé augmentent la couverture, l’utilisation et la qualité des services et se traduisent par une meilleure satisfaction pour les usagers. Les prestataires de soins de santé privés offrent aux populations toute une gamme de services préventifs et curatifs. Les programmes en milieu de travail où les entreprises privées investissent dans l’offre de services de santé pour leurs employés sont un autre mécanisme de l’engagement du secteur privé dans les efforts nationaux en faveur de la promotion de l’accès des populations aux services de Santé. 4.2. La problématique des ressources humaines, financières et matérielles Les forts taux de mortalité néonatale et infantile ainsi que les insuffisances dans la qualité des soins permettent de poser les questions du nombre de personnels qualifié, de la compétence des personnels et donc de leur formation, de la répartition et de la gestion de cette ressource et de l’éthique professionnelle. Au Sénégal, la question des ressources humaines compétentes et en nombre suffisant selon les spécialités s’est toujours posée dans le secteur de la santé et cela à tous les niveaux de la pyramide sanitaire et cela malgré les nombreux efforts consentis par l’État. Le personnel de santé en activité ne couvre pas encore la demande de couverture des besoins de santé des populations27 . Le PNDS (2009-2018) décèle trois facteurs liés à (i) l’insuffisance des effectifs admis au niveau des structures de formation notamment dans les Universités ; (ii) la non maîtrise du processus de recrutement dans la fonction publique qui est 27 PNDS (2009-2019) : « PLAN NATIONAL DE DEVELOPPEMENT SANITAIRE PNDS 2009-2018 », Ministère de la santé et de l’action sociale, Janvier 2009. 31 de la compétence du ministère en charge qui, en définitive, décide du calendrier et de la nature du personnel à recruter ; (iii) l’insuffisance des mesures incitatives pour fidéliser le personnel et réussir une meilleure répartition géographique. Le déficit en personnel soignant par rapport aux normes du PNDS intéresse les sages-femmes. En effet, en 2008, les ratios personnel/population sont passés de sage-femme pour 3946 FAR (Femme en Age de Reproduction). Pour les médecins, par contre, on note un progrès avec un ratio qui passe de 1 médecin pour 18615 habitants dans le secteur public (PNDS, 2009-2018). La problématique des ressources humaines se pose principalement à deux niveaux. D’abord dans la formation, on note un faible nombre d’admis dans les diverses structures et surtout au niveau universitaire. Ensuite, il y a l’absence d’une politique de recrutement axée sur les besoins réels en personnel et la nécessité d’une répartition géographique. Les zones enclavées souffrent d’un déficit chronique malgré quelques initiatives prises pour motiver le personnel dans les zones difficiles (PNDS, 2009). La proportion d’acteurs locaux formés en gouvernance sanitaire est restée en deçà des attentes selon le rapport de performance (2018). En effet, sur 420 acteurs ciblés (prestataires privés, acteurs de la décentralisation, ONG), seuls 210 (50%) ont été formés à cause notamment : – du retard du programme de renforcement des capacités des acteurs locaux de la décentralisation lié à la révision du guide sur la gouvernance sanitaire intégrant le leadership dans un contexte de mise en œuvre de l’acte III de la décentralisation ; – de l’introduction du projet de décret portant statut type des comités de développement sanitaire dans le circuit des visas. Toutefois, l’État est engagé dans une politique de contractualisation pour parer à ce déficit et surtout pour pourvoir certaines zones difficiles. Il a été procédé à un relèvement du niveau de recrutement des sages-femmes d’état et infirmiers d’état, avec la décentralisation de la formation ainsi que la création des centres régionaux de formation en santé. S’agissant des efforts consentis en faveur de l’application des normes en ressources humaines, le rapport 28de performance du Ministère de la santé (2018) renseigne que 1033 postes de santé ont bénéficié du couplé gagnant infirmier/Sage-femme. Il a aussi permis à 60 postes de santé nouvellement crées de démarrer les prestations grâce à ce recrutement. Le doublement des postes est une étape majeure dans l’objectif du MSAS de garantir la continuité du service dans 28 Rapport de Performance du Ministère de la santé et de l’action sociale publiée en Mars 2018. 32 les zones périphériques mais aussi de mieux combiner les compétences des ICP et des sagesfemmes pour apporter des solutions intégrées aux demandes de services surtout dans le domaine de la SRMNIA. Concernant les ressources financières, la part du budget de l’État allouée au secteur de la santé a été en hausse régulière ces dernières années29. Cependant, les structures hospitalières du Sénégal ne cessent de se plaindre de la faiblesse de leurs financements encore nettement en deçà de leurs engagements. En effet, tous les problèmes des hôpitaux trouvent leurs fondements dans des questions de financement. Ces mêmes problèmes se traduisent par des mouvements d’humeur qui bloquent assez souvent le fonctionnement des structures hospitalières, laissant ainsi en rade les patients. Tous ces phénomènes ainsi soulevés limitent l’accessibilité aux soins hospitaliers des populations. Quant aux ressources matérielles, l’insuffisance de matériel de diagnostic et de traitement gêne considérablement l’activité des structures de santé. À cela s’ajoute le problème d’instruments obsolètes au sein de ces structures sanitaires parce que non renouvelés depuis longtemps. Il en est de même pour les équipements inadaptés aux soins du service, les ruptures de médicaments, de produits et de consommables, en général consécutif au non-règlement des dettes contractées auprès des fournisseurs qui dès lors bloquent les livraisons. Pourtant des études ont montré que l’adhésion totale aux normes et protocoles de soins, des soins postnatals en particulier a souvent eu lieu si les ressources nécessaires (équipement, outils, fournitures) étaient disponibles (Linda et al.2019). Concernant l’équipement des structures sanitaires au Sénégal, selon le rapport de performances du CDSMT de 2011, l’analyse des résultats de l’inventaire des équipements réalisés en 2010 a servi de base à l’élaboration d’un plan de maintenance et d’un plan de renouvellement des équipements en 2011. Un autre phénomène en rapport avec le problème du matériel réside dans la non-qualification du personnel de maintenance pour la réparation des pannes survenues avec le matériel (PNDS, 2009). Le rapport souligne également l’insuffisance des mesures incitatives pour fidéliser le personnel et réussir une meilleure répartition géographique. Ces différents facteurs ainsi soulevés sont autant d’éléments qui entravent l’accès des populations à des soins hospitaliers de qualité. Enfin, il faut noter qu’en ce qui concerne globalement les infrastructures, des engagements très forts ont été consentis par le gouvernement sénégalais. La remise à niveau des équipements est 29 Enquête Démographique et de Sénégal, 2014. 33 au cœur des préoccupations de l’État. Ainsi, il a été noté une amélioration du plateau technique et des conditions d’évacuation des malades ; de gros efforts ont également été faits en direction des hôpitaux avec l’installation de scanners. Toutefois, ces avantages ne semblent pas cibler les structures hospitalières de l’intérieur. Par ailleurs, il semble que les matériels sont souvent insuffisants et qu’il n’y a pas une planification dans le renouvellement des équipements, qui de ce fait deviennent obsolètes.
Accessibilité géographique et financière des populations limitée
L’accessibilité hospitalière peut être définie comme la possibilité offerte aux populations de bénéficier des soins de qualité à chaque fois que de besoin du fait de la proximité des structures, des coûts abordables des prestations, des facilités de communications et de l’existence de manière globale de repères socioculturels pour les patients dans l’espace hospitalier. Il ressort de la seconde Enquête Sénégalaise Auprès des Ménages (ESAM2; DSP 2004) que l’accès aux services de santé est encore difficile au Sénégal, surtout pour les soins d’urgence. Concernant l’accessibilité financière, le contexte socio-économique actuel du pays nous permet de l’apprécier. L’Enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS) réalisée en 2005 révèle que 46,7 % des Sénégalais vivent encore au-dessous du seuil de la pauvreté avec des disparités géographiques et spatiales, mais également sexos spécifiques importantes. En 2017, d’énormes progrès ont été réalisés vers la réalisation de ces objectifs, ce qui témoigne de la valeur d’un programme unificateur étayé par des objectifs et des cibles. Cependant, malgré ces progrès, la pauvreté accable encore trop de personnes. (PNUD, 2017). Dès lors, l’accessibilité financière pose problème, car les individus et les ménages se retrouvent dans un cercle infernal de pauvreté chronique. Alors que le premier problème qui a été cité comme obstacle à l’accès aux soins de santé des femmes est le manque d’argent. La permission d’aller consulter et le fait de ne pas vouloir aller seule constituent aussi des problèmes liés à l’accessibilité des femmes aux soins qui constitue le deuxième obstacle à l’accès aux soins de santé.
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