Détection préliminaire des résidus d’antibiotique dans les œufs de consommation
INTRODUCTION
Le sous-secteur de l’élevage reste une composante essentielle de l’agriculture ouest-africaine, avec une large contribution au PIB agricole pouvant aller de 5% dans les pays côtiers, à 44% dans les pays sahéliens. Il occupe en outre une place importante dans la vie sociale, la diversification des revenus et la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations (CEDEAO, 2010). Avec 70 millions de tonnes produites par an, la volaille, dont près de 85 % de poulet, est la seconde viande consommée au monde juste derrière le porc (ALAIN HUART et C., 2004).En Côte d’Ivoire, les productions avicoles contribuent pour 88% à la production de viande de volaille et couvrent la demande d’œufs de consommation à hauteur de 100% selon les statistiques de 2000 (FAO, 2008a). Elles constituent un maillon essentiel du système de production animale. Cette filière a connu un essor spectaculaire au cours des quinze dernières années (IPRAVI, 2012). Elle réalise un chiffre d’affaire d’au moins 80 milliards FCFA et génère 130 000 emplois directs et indirects. Les différentes composantes nécessaires au développement de l’aviculture moderne, à savoir l’élevage de reproducteurs, les accouveurs, les fabricants d’aliments et les éleveurs sont présentes. La filière avicole contribue pour près de 2% à la formation du PIB global et pour près de 5% à la formation du PIB agricole (BOKA, 2009). Les contraintes d’ordre zootechnique, vétérinaire, et pathologique poussent les éleveurs à une utilisation incontrôlée des antibiotiques et additifs alimentaires. En plus, l’intensification de la production animale au cours des dernières décennies a été favorisée par l’emploi des médicaments vétérinaires, en particulier les médicaments anti-infectieux en élevage moderne (MORETAIN J.P., 2005 ; TATSADJIEU et al., 2009). 2 Malgré leur nécessité dans l’arsenal thérapeutique et leur utilité économique, ces antibiotiques sont parfois utilisés de façon abusive, il convient donc de s’interroger sur les risques qu’encourent les consommateurs lorsqu’ils sont utilisés chez les animaux producteurs de denrées alimentaires (STOLTZ, 2008). Les antibiotiques peuvent, si leur délai d’attente n’est pas respecté, laisser dans les aliments d’origine animale des résidus dangereux pour le consommateur et capables d’entraîner des accidents d’hypersensibilité ou des intoxications en favorisant la sélection de bactéries résistantes à des traitements ultérieurs (BADA-ALAMBEDJI et al., 2008). L’objectif général de notre étude est la recherche des résidus d’antibiotique dans les œufs de consommation en Côte d’Ivoire. Au plan spécifique, il s’agit de connaître le niveau de contamination en résidus d’antibiotiques des œufs produit dans le district d’Abidjan et le département d’Agnibilékrou. Le travail comporte deux parties: la première partie consacrée à la synthèse bibliographique, aborde successivement, l’aviculture, les résidus d’antibiotiques, et les méthodes d’analyses des résidus, la deuxième partie qui porte sur notre travail personnel, traite de la méthodologie utilisée, les résultats obtenus qui sont ensuite discutés et des recommandations.
AVICULTURE ET PRODUCTION DES ŒUFS DE CONSOMMATION EN COTE D’IVOIRE
On peut définir quatre systèmes principaux de production avicole : Le système d’élevage avicole villageois ou secteur 4 ; Le système d’élevage semi-intensif ou secteur 3 ; Le système d’élevage intensif de poulets commerciaux ou secteur 2 ; Le système d’élevage industriel intégré ou secteur 1. Les secteurs 2 et 3 correspondent à la catégorie dite de « l’aviculture moderne» (FAO, 2008a). Mais en tenant compte d’un passé récent (année 1970), la typologie de l’aviculture, telle que décrite dans la littérature en Côte d’Ivoire, considère la taille des exploitations et la technologie utilisée : 1. Aviculture familiale L’aviculture familiale se caractérise par l’élevage de volailles en divagation et en plein air, sans soins particuliers, avec un niveau de biosécurité très faible ou inexistant. L’aviculture familiale se rencontre en milieu rural et urbain (FAO, 2008a).
Aviculture industrielle
L’aviculture industrielle, avec un nombre peu élevé d’exploitations, est assimilée à l’aviculture semi-industrielle pour constituer la catégorie de « l’aviculture moderne » par opposition à « l’aviculture familiale » (FAO, 2008a).
Aviculture semi-industrielle
L’aviculture semi-industrielle ou moderne, utilise certaines techniques industrielles comme l’utilisation de matériel génétique de haute productivité (souche sélectionnée), mais aussi des techniques adaptées à l’environnement tropical pour limiter notamment les effets de la chaleur. Elle est caractérisée par l’utilisation des techniques élaborées et des investissements importants avec un fort recourt aux intrants sanitaires et alimentaires (FAO, 2008a).
Production des œufs en Côte d’Ivoire
La production des œufs de consommation ainsi que le prix d’achat de 2000 à 2013 est résumé dans le tableau ci-dessous.
Contraintes de la production avicole
Malgré des acquis importants et la réactivité des professionnels en termes d’investissements et d’application de la biosécurité, la production de la filière avicole moderne reste insuffisante. Ceci est dû à des contraintes exogènes et endogènes. Il s’agit principalement des contraintes liées au cadre réglementaire, aux aspects zootechniques, sanitaires, économiques, organisationnels ainsi qu’au volet formation et encadrement (MIRAH, 2012).
Contraintes zootechniques
Les contraintes zootechniques se traduisent par les problèmes d’approvisionnement en intrants, les faibles performances des élevages et les problèmes liés à la qualité et à la normalisation des produits avicoles (MIRAH, 2012).
Contraintes sanitaires
Malgré l’existence de mesures de biosécurité dans les exploitations du secteur avicole ivoirien, des contraintes sanitaires subsistent, notamment en matière de : Ressources humaines qualifiées pour l’encadrement sanitaire ; Hygiène de l’habitat de la volaille ; Veille sanitaire et épidémiologique ; Normalisation de la biosécurité dans les élevages et sur les marchés. Concernant la filière moderne, l’environnement dans lequel les éleveurs opèrent est pour la majorité mal adapté. L’environnement physique est d’abord peu propice car les bâtiments sont inadaptés et construits avec du matériel précaire. Le climat trop humide concourt à favoriser les épizooties. Les maladies telles que la maladie de Gumboro, la maladie de Newcastle et les coccidioses sont les pathologies dominantes. Le système de veille sanitaire est pratiquement absent à cause du faible niveau d’opérationnalité de la surveillance épidémiologique sur toute l’étendue du territoire national. Les normes de biosécurité ne sont pas toujours optimales dans les élevages modernes et la survenue de l’IAHP en Côte d’Ivoire en 2006, a montré les limites et/ou l’inexistence du système de veille sanitaire ivoirien (MIRAH, 2012). Ceci pousse les acteurs de la filière à une utilisation de plus en plus intensive des antibiotiques et additifs alimentaires pour augmenter la croissance. Mais le bénéfice d’une production animale améliorée par l’utilisation de médicaments vétérinaires n’est pas obtenu sans risque : ce risque est celui de la présence de résidus médicamenteux dans les tissus des animaux traités juste avant l’abattage.
RESIDUS D’ANTIBIOTIQUES
Définition de « résidu » Plusieurs définitions ont été proposées. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est considérée comme résidu ou contaminant “toute substance chimique quelconque qui persiste dans un milieu donné, en quantité généralement très faible (de l’ordre du ppb : partie par billion, soit par exemple 1μg/kg), après qu’elle-même ou d’autres composés lui donnant naissance aient été introduits, volontairement ou non, dans le dit milieu, et dont la présence est de ce fait qualitativement anormale (CIV, 2013). Selon le Codex alimentarius (FAO/OMS, 2000), les résidus de médicaments vétérinaires comprennent les substances mères et /ou leurs métabolites présents dans toute portion comestible de produit d’origine animale, ainsi que les résidus des impuretés associées au médicament vétérinaire considéré.
Origine des résidus d’antibiotiques dans les denrées alimentaires d’origine animale(DAOA)
Les antibiotiques sont utilisés de quatre façons différentes chez les animaux de production, et avec des objectifs différents (SCHWARZ, KEHRENBERG, 2001).
Utilisation à titre thérapeutique curatif
Les antibiotiques peuvent être utilisés à titre thérapeutique curatif. L’objectif est d’obtenir la guérison des animaux cliniquement malades et d’éviter la mortalité (ZANDITENAS, 1999). Le traitement a aussi pour effet de réduire la souffrance et de restaurer la production (lait, viande). Il réduit l’excrétion bactérienne, permettant dans certains cas d’obtenir une guérison bactériologique et, lors d’infection zoonotique, il peut éviter la contamination humaine (STOLTZ, 2008).
Utilisation en métaphylaxie
Lorsqu’une infection collective et très contagieuse se déclare dans un élevage avec de grands effectifs et évolue sur un mode aigu, avec suffisamment d’éléments concordants pour incriminer une (des) bactérie(s), l’ensemble des animaux est traité. Les sujets qui sont exposés mais ne présentent pas encore de signes cliniques (sains ou en incubation) font donc l’objet d’un traitement en même temps que ceux qui sont déjà malades. Cette pratique est qualifiée de métaphylaxie. Elle permet de traiter les animaux soumis à la pression infectieuse alors qu’ils sont encore en incubation ou lorsque les manifestations cliniques sont très discrètes (MAILLARD, 2002).
Utilisation en antibio-prévention
Les antibiotiques peuvent être administrés à des périodes critiques de la vie, sur des animaux soumis à une pression de contamination régulière et bien connue. Dans ces conditions, on parle d’antibio-prévention car le traitement permet d’éviter totalement l’expression clinique. Cette modalité d’utilisation des antibiotiques est adaptée à une situation sanitaire donnée et doit être provisoire et ponctuelle .
Utilisation en tant qu’additifs dans l’alimentation animale
L’usage des antibiotiques dans l’aliment à titre d’additifs est très limité actuellement. Ces antibiotiques régulateurs de flore (ARF) ou antibiotiques promoteurs de croissance (AGP : antibiotic growth promotor) sont utilisés à des doses très faibles, non curatives en vue d’améliorer la croissance des animaux par un effet régulateur au niveau de la flore intestinale. Ces antibiotiques sont tous des agents chimio-thérapeutiques non utilisés en médecine humaine pour limiter les risques de sélection de résistance vis-à-vis de molécules d’intérêt médical majeur pour la médecine humaine .
INTRODUCTION |