L’intérêt de l’imagerie multimodale en médecine est d’obtenir des renseignements complémentaires sur une même structure ou un même organe à partir d’images issues de modalités différentes, afin d’en obtenir une caractérisation la plus complète possible. L’imagerie multimodale est un outil indispensable aujourd’hui en oncologie, pour guider toutes les étapes de la prise en charge de patients atteints de cancer : le diagnostic précis, la mise en œuvre d’un traitement adapté, et le suivi post-traitement afin d’évaluer l’efficacité du traitement et l’adapter si nécessaire.
Les techniques d’imagerie peuvent être identifiées selon l’information qu’elles apportent. Par exemple, les modalités fonctionnelles, à l’instar de la tomographie par émission de positons (TEP) renseignent sur le métabolisme. En oncologie, une imagerie fonctionnelle et métabolique est souvent associée à une imagerie anatomique, reflétant la composition de la tumeur, comme c’est le cas de la tomodensitométrie (TDM) et de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Ces techniques d’imagerie se distinguent par les quantitées mesurées, renseignant sur la composition biologique ou le fonctionnement des structures d’intérêt : l’absorption des rayons X pour la TDM, l’évolution de l’aimantation subie par un tissu pour l’IRM, ou encore la distribution d’un radiotraceur pour la TEP. Elles diffèrent aussi par la dimension des voxels des images produites, de l’ordre de 1×1×1×mm³ pour les images IRM ou TDM, contre 3×3×3×mm³Deux stratégies ont été mises en place afin de tirer parti de la complémentarité des informations anatomiques et fonctionnelles fournies par deux modalités différentes. D’une part, les images peuvent être acquises sur des machines distinctes, ce qui nécessite d’effectuer un recalage de l’image fonctionnelle sur l’image anatomique afin d’étudier les deux modalités dans un même repère spatial. La non simultanéité de l’acquisition peut aussi être un verrou dans le cas d’une tumeur très évolutive. La deuxième stratégie est de combiner plusieurs modalités en un seul appareil, ce qui a l’avantage de réduire les erreurs de recalage spatial et temporel. Cette approche prometteuse s’est accompagnée de l’émergence de machines hybrides TEP-TDM, puis récemment TEP-IRM. Cependant, si l’imagerie hybride TEP-TDM s’est imposée en imagerie clinique (81 appareils couplés installés sur le parc français en 2010 ), la combinaison de la TEP à l’IRM soulève de nouveaux défis (Besson et al., 2016). En effet, si l’IRM offre un meilleur contraste que la TDM dans les tissus mous, les applications oncologiques de la TEP-IRM restent à définir. De plus, le signal IRM souffre d’une grande variabilité, et ne s’exprime pas dans une échelle normalisée comme l’unité de Hounsfield utilisée en TDM. pour les images TEP.
Le projet IDEX Physique et Ingénierie pour la médecine (PIM) de l’Université Paris-Saclay s’est attaqué à ces défis en exploitant l’imageur hybride TEP-IRM installé au CEA-SHFJ d’Orsay depuis octobre 2015, l’un des trois systèmes hybrides TEP-IRM composant le parc français. Le but du projet PIM est de créer une synergie multidisciplinaire appliquée au domaine médical et orientée vers la médecine personnalisée. Trois objectifs sont principalement recherchés : identifier les applications cliniques, concevoir de nouveaux protocoles, et développer de nouvelles méthodes d’analyse conjointe des informations fournies par la TEP et l’IRM.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est une technique d’imagerie médicale produisant des images anatomiques ou fonctionnelles à partir d’un champ magnétique et d’ondes radiofréquences (RF). Le principe de l’IRM est de mesurer des paramètres relatifs au noyau d’un atome. L’hydrogène, naturellement présent dans le corps humain, est étudié pour plusieurs raisons. Il est tout d’abord le constituant majoritaire du corps humain en nombre d’atomes (Lukaski, 1987), ce qui le rend facilement détectable. Il compose aussi les molécules d’eau et de graisse, permettant d’obtenir des images précises des tissus mous. Enfin, l’hydrogène est sujet au phénomène de résonance magnétique nucléaire (Hornak, 1996), expliqué ci-dessous.
Chaque atome est composé d’un noyau, contenant au moins un proton, et contenant ou non des neutrons. Le proton est une particule chargée positivement, animée d’un mouvement de rotation autour de son axe qui est caractérisé par une grandeur appelée spin. Les particules possédant un spin, ce qui est aussi le cas des neutrons, portent un moment magnétique les rendant comparables à de petits aimants. Les noyaux pour lesquels les spins des protons et des neutrons ne s’apparient pas tous deux à deux possèdent un spin. Or le noyau d’hydrogène sous sa forme la plus courante est composé uniquement d’un proton : le noyau d’hydrogène possède ainsi un spin nucléaire. Grâce à cette propriété, chaque proton d’hydrogène présent dans le corps humain est affecté par la présence d’un champ magnétique B0 : son axe de rotation s’aligne alors dans le même sens que B0. L’influence du champ magnétique sur l’ensemble des protons est représentée par un vecteur d’aimantation orienté dans la même direction que B0. En tournant autour de son axe à une fréquence de rotation spécifique, appelée fréquence de résonance νf , toujours en présence de B0, chaque proton peut être sujet au phénomène de résonance magnétique : le proton peut alors passer d’un état énergétique à un autre par absorption d’un photon de fréquence νf . Il en résulte un changement d’orientation du vecteur d’aimantation.
Au cours d’un examen IRM, le sujet est soumis à un champ magnétique intense B0. Les protons d’hydrogène présents dans son corps engendrent un vecteur d’aimantation orienté dans la même direction que B0. La résonance des protons d’hydrogène est obtenue en pratique par l’application d’une impulsion de radiofréquence (RF) de fréquence égale à la fréquence de résonance de l’hydrogène. Le vecteur d’aimantation change alors d’orientation. Après arrêt de l’impulsion RF, le vecteur d’aimantation retourne progressivement à son orientation de départ, dans la direction de B0 (Pooley, 2005). Le signal IRM est obtenu en mesurant deux paramètres relatifs à la relaxation de la composante longitudinale (paramètre T1) et transverse (paramètre T2) du vecteur d’aimantation après arrêt de l’impulsion RF. Chaque tissu a des valeurs de T1 et T2 différentes. En modulant spatialement l’intensité du champ magnétique, on peut obtenir une image dite pondérée en T1, en T2, ou en densité de protons selon les paramètres des séquences d’acquisition .
Introduction |