Description de quelques verbes d’après la méthode du lexique-grammaire
Nous avons déjà eu l’occasion de constater que la catégorie lexicale aux occurrences les plus nombreuses en terminologie est celle des noms. Pourquoi alors s’attacher à la description des verbes, qui sont souvent faiblement techniques ? Quel peut être l’intérêt d’une telle opération ? Du moment que nous menons notre étude dans une optique lexico-grammaticale, selon laquelle la phrase simple est l’unité minimale de sens, l’étude des verbes s’avère une étape fondamentale. Bien que Maurice GROSS (1975) – comme nous l’avons vu dans II.3. – préconise une description en extension des données linguistiques, notre description sera limitée à une sélection de verbes dans les deux corpus d’étude. Cela parce que le but de notre travail est plus de fournir un exemple de méthode de description qu’une description tout court. Par conséquent, nous insisterons davantage sur l’intérêt que cette opération – assez inusuelle en terminologie – peut avoir dans des travaux de terminologie. Dans ce chapitre nous montrons les caractéristiques de cette étape descriptive. Le point de départ de cette dernière consiste dans l’individuation d’une phrase simple qui puisse servir à illustrer la construction de base du verbe, c’est-à-dire quels sont les actants syntaxiques qu’il régit. Pour ce faire, nous avons sélectionné des extraits du corpus dans lesquels le verbe apparaît. Nous avons ensuite rétabli la phrase simple, privilégiant une phrase à la forme active même dans le cas de verbes généralement161 utilisés à la forme passive. Outre la phrase simple, nous donnons aussi des variations paradigmatiques pour chaque argument, qui servent d’exemple pour d’autres phrases simples acceptables. Pour chaque verbe, nous vérifions aussi les éventuelles correspondances de sa description dans les tables de lexique-grammaire.
Nous commencerons par les verbes du corpus français, pour passer ensuite aux verbes du corpus italien. Ces derniers ne sont pas tous des équivalents des verbes français, mais des verbes typiques de la structure discursive du corpus d’étude italien, tout comme les verbes français le sont du corpus d’étude français. Les verbes polysémiques ont été privilégiés, se révélant plus problématiques dans une optique contrastive. L’idée est de dénicher les pièges de la traduction à l’appui de critères distributionnels et transformationnels, sans recourir à des a priori sémantiques. Les seules étiquettes sémantiques que nous utiliserons pour la description des arguments sont celles habituellement utilisées en lexique-grammaire : Nhum (nom de type humain), N-hum (nom de type non humain), Nabs (nom abstrait), Nconc (nom concret), Nmal (nom de maladie), Comme nous l’avons vu dans III.1., un des grands avantages du logiciel Unitex est la possibilité de traiter même des textes de toute petite taille, ce qui permet de mener des recherches, non seulement sur le corpus en fichier unique, mais aussi sur chaque texte constituant le corpus. Cela permet des analyses plus approfondies, faisant ressortir des phénomènes qui passeraient inaperçus si l’on se basait uniquement sur le critère de la fréquence.
Dans un premier moment, nous avons recherché toutes les occurrences dans le corpus étiquetées <V> par Unitex. En raison du nombre toujours élevé d’occurrences, nous avons ensuite raffiné la recherche appliquant des critères morphosyntaxiques favorisant la désambigüisation, élaborant des grammaires locales très simples basées sur des contextes négatifs du verbe (par exemple, la recherche ne devait pas reconnaître les suites dans lesquelles un adjectif ou une négation suivait le verbe, comme cure thermale ou la cure ne peut, en raison du double étiquetage de cure, qui peut tant être un substantif que la troisième personne du singulier du verbe curer). La sélection finale a abouti à l’ensemble des 12 verbes suivants : accuser, administrer, agir, appliquer, atteindre, contre-indiquer, délivrer, indiquer, pratiquer, préconiser, prescrire, traiter. Parmi ces verbes, certains sont techniques (comme contre- indiquer et prescrire), mais d’une façon générale ils sont pour la plupart des verbes assez courants, employés dans d’autres discours spécialisés (par exemple : accuser dans le discours juridique, administrer dans le discours économique et juridique) mais qui peuvent véhiculer aussi un sens spécialisé en médecine. Les différences d’emploi d’un même verbe à l’intérieur du corpus ont été un autre critère de sélection, en raison de l’intérêt de les analyser à la lumière des méthodes lexico-grammaticales.