En République Démocratique du Congo, le droit d’accès à la justice est un droit fondamental prévu par la Constitution de la République Démocratique du Congo et les instruments juridiques internationaux. En effet, l’article 19 de la Constitution dispose que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable par le juge compétent » . De son côté, l’article 7point1 de la Charte africaine des droits de l’homme et des Peuples dispose : « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend : le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements et coutumes en vigueur ; le droit à la présomption d’innocence, jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie par une juridiction compétente ; le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix… » .
Aussi, la Déclaration universelle des droits de l’homme prévoit à son article 8 que :« toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi» . Plus loin, son article 10 souligne que : « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle… » .
Il s’agit là d’une prérogative reconnue à toute personne physique ou morale, d’accéder à la justice pour y faire valoir ses droits . Il s’agit aussi d’un principe fondamental dans le sens où il comporte une valeur qui est celle de toujours pouvoir s’adresser à un tribunal pour trancher une contestation juridique et empêcher ainsi le recours à la vengeance. Ce droit est essentiel au fonctionnement de l’Etat de droit dans lequel toute personne est soumise à l’autorité de la loi . Cependant, à travers les articles 107 de la Constitution, 9 de la Loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant Principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces, et 120 de la Loi n°08/016 du 7 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les Provinces, le législateur consacre des immunités pénales au bénéfice des élus nationaux, provinciaux et locaux .
L’immunité s’entend comme une garantie judicaire que la Constitution ou la loi attribue à une personne, en raison de ses fonctions, aux fins de ne pas être arrêtée, détenue, jugée et condamnée pendant qu’elle est encore en fonction et, parfois, même après la cessation de celle-ci, pour une infraction dont elle se serait rendue coupable dans le cadre ou en dehors de son service . L’immunité pénale est de ce fait, pour les élus, une protection fonctionnelle et personnelle tendant à assurer le libre exercice du mandat parlementaire .
Si les immunités ont pour missions essentielles de permettre aux personnes qui en sont bénéficiaires, de mieux exercer leurs fonctions , elles soulèvent certaines questions par rapport au droit d’accès à la justice pénale par les victimes. D’une part, les immunités constituent une exception au principe fondamental de l’égalité de tous les citoyens devant la loi, consacrée par la Constitution, en limitant les pouvoirs d’instruction et de poursuite du Ministère public. En effet, les immunités ont pour effet de subordonner les poursuites ou l’arrestation de leurs bénéficiaires à l’autorisation des institutions politiques . D’autre part, les immunités constituent une limite partielle au droit d’accès au juge pénal, car la citation directe est inopérante pour les personnes jouissant des immunités . A l’exception de la flagrance, les institutions politiques n’autorisent quasiment pas la levée des immunités de leurs membres, préalables à toutes poursuites et à tout jugement.
Dès lors, le droit pour un citoyen d’accéder à la justice pénale lorsqu’il est en instance avec les élus politiques, ne peut ainsi être mis en œuvre qu’avec l’assentiment des institutions politiques, quel que soit la gravité des faits, voire la nature du préjudice. Le droit d’accès à la justice apparait ainsi comme une institution à la limite du droit et de l’opportunité politique . Ainsi, aucun parlementaire ne peut, en cours de sessions, être poursuivi ou arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée nationale ou du Sénat, selon le cas. En dehors de sessions, aucun parlementaire ne peut être arrêté qu’avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale ou du Bureau du Sénat, sauf en cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un parlementaire est suspendue si la Chambre dont il est membre le requiert. La suspension ne peut excéder la durée de la session en cours .
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