Des automobiles et des hommes : les débuts de
l’Automobile Club Dauphinois
Chronologie des évolutions automobiles
Et des courses, en France et en Isère, Entre 1890 et 19091 1890 : – Création du Touring Club de France (TCF), club plus populaire que bourgeois, sous l’impulsion de quatre amis cyclistes. Le TCF porte son action aussi bien sur le cycle que sur l’automobile. Il est présidé par Abel Ballif. 1893 : – 14 août : Ordonnance du Préfet de Police de Paris, Louis Lépine, réglementant le fonctionnement et la circulation sur la voie publique de Paris des « véhicules à moteur mécanique autres que ceux qui servent à l’exploitation des voies ferrées concédées » et qui stipule que « nul ne pourra conduire un véhicule à moteur mécanique s’il n’est porteur d’un certificat de capacité délivré par Monsieur le Préfet de police ». A noter que pour passer ce certificat, il faut être majeur (avoir plus 21 ans) et être un homme… Cette ordonnance ouvre ainsi la voie à la création d’un Certificat de capacité pour la conduite des automobiles (ancêtre du permis de conduire) correspondant à une autorisation administrative de conduire délivrée par le service des Mines de chaque département. De plus, cette ordonnance stipule que « Tout véhicule à moteur doit apposer une plaque métallique sur laquelle est inscrite de manière lisible le nom et l’adresse du propriétaire ainsi qu’un numéro d’autorisation. Cette plaque devra être fixée sur le coté gauche du véhicule et ne devra pas être cachée ». C’est le début des plaques d’immatriculation. 1894 : – 22 juillet : Première grande épreuve de « voitures mécaniques » organisée par le journal Le Vélo, entre Versailles et Rouen (126 km), 120 concurrents sont inscrits. Cette épreuve voit la victoire du Comte Albert De Dion dans la catégorie « vitesse ». 1895 : – 12 novembre : Création de l’Automobile Club de France (ACF) sous l’impulsion du Comte de Dion, du Baron de Zuylen de Nyevelt et de Paul Meyan (journaliste au Figaro) : club privé, exclusivement réservé aux élites, l’adhésion se fait avec le parrainage de 3 membres et la cotisation est fixée à 132 francs. 1 Informations relatives au monde automobile en France. Informations concernant l’automobile en Isère. Annexe 7 10 – Course Paris – Bordeaux (aller / retour, soit 1200 km à effectuer en moins de 100 heures) organisée par le Comte de Dion. C’est Emile Levassor qui s’impose dans la catégorie « vitesse ». – Le Comte de Dion et Georges Bouton (ingénieur) fabriquent et commercialisent un moteur à explosion : le moteur de Dion – Bouton. – Le TCF compte 20 000 membres. – Nice impose une autorisation de circulation sur son territoire. 1896 : – L’ACF organise sa première grande course : Paris – Marseille. 1897 : – L’ACF compte 100 adhérents. – Les femmes ont le droit de passer le Certificat de capacité à la conduite automobile. – 1 mai : création de l’Automobile Club Bordelais (ACB). – 22 et 23 août : le magazine La Vie Française organise une course « ouverte à tous les automobilistes » (dont les motocycles et tricycles) entre Lyon et Uriage – les – Bains, dont le retour se fait par Chambéry 1898 : – Création de la Chambre Syndicale de l’Automobile (CSA) sous l’impulsion du Comte de Dion. Elle regroupe 10 constructeurs automobiles français. Son but est de fixer des règles face à des entrepreneurs peu sérieux et des pilotes imprudents. – 15 juin au 3 juillet : Première Exposition Internationale d’Automobiles à Paris organisée par l’ACF qui attire 140 000 visiteurs (cette exposition devient le Salon de l’Auto en 1919). – Automne : La première automobile Renault est réalisée. Elle pèse 250 kg, propulsée par un moteur De Dion Bouton d’une puissance de 1,75 CV et est capable de transporter 2 personnes à une vitesse de 50 km/h. 1899 : – 10 mars : (circulaire) Réforme de l’attribution du Certificat de capacité pour la conduite des automobiles (document rose, art 11 : « nul ne pourra conduire une automobile s’il n’est porteur d’un certificat de capacité délivré par le préfet du département de sa résidence, sur l’avis favorable du service des mines ») : des questions sont posées par un examinateur (un ingénieur des Mines) : comment démarrer, ralentir, freiner et entretenir son véhicule. Dès lors, l’attribution du Certificat de Capacité est étendue à toute la France. Annexe 7 11 L’administration peut le retirer après 2 infractions constatées dans la même année (art 22). – 10 avril : (circulaire) Instauration du Certificat d’immatriculation (document de couleur grise) qui rassemble les caractéristiques et l’identité du véhicule. Le numéro d’inscription doit être affiché sur la voiture (cela est à l’origine des plaques d’immatriculation, les premières sont blanches sur fond noir). – 1 mai : La Jamais Contente, automobile électrique, pilotée par le Belge Camille Jenatzy, est le premier véhicule à passer la barre des 100 km/h. – Création de l’Automobile Club de Provence (ACP), à Marseille. – 1 juillet : Emile Duchemin crée avec 6 autres membres (A. Pégoud, P-C Viallet, L. Billaud, G. Faure, B, Clerc et J. Delamarche) au café des Mille Colonnes à Grenoble, une amicale ayant pour but « l’automobilisme dans la région » qui prend le nom de Automobile Club Dauphinois (ACD). Ils sont rapidement rejoints par 22 autres membres. – 6 octobre : L’ACD compte 50 sociétaires : 42 membres actifs et 8 membres honoraires. 1900 : – Le premier guide Michelin (livret rouge) est « offert gracieusement aux chauffeurs », véritable invitation au voyage automobile comprenant plusieurs plans de villes, adresses indispensables (dépôt d’essence, garagistes, auberges, églises…). – Lyon décide de la numérotation des automobiles de son agglomération. – La France produit 4 800 voitures, alors que l’Allemagne n’en produit que 800 et les Britanniques 175. – Le CSA regroupe 106 constructeurs automobiles. – 8 février : L’ACD est enregistré auprès des services préfectoraux en tant qu’association ; il regroupe 80 membres.
Biographies de certains membres
De l’ACD Ballif, Abel (1845 – 1934) Un des fondateurs du Touring Club de France (TCF) en 1890 à Neuilly sur Seine, il en devient son premier président. Le TCF, d’abord axé autour du cyclisme, oriente progressivement son action vers l’automobile et le tourisme. Abel Ballif pousse le TCF à participer activement à la création de la route de la Corniche d’Or à St Raphaël. En remerciement, la municipalité de Théoule-sur-Mer fait ériger un monument en l’honneur du président du TCF. Bergès, Maurice Fils d’Aristide Bergès (fondateur des papeteries à Lancey), il reprend la succession de son père à la tête de l’entreprise. Il crée la Société Hydraulique de l’Eau d’Olle pour vendre l’énergie hydraulique qu’il produit. Homme politique, radical indépendant, il est maire de Villard-Bonnot et conseiller général. Il intègre l’ACD en 1904 en tant que membre honoraire. Bouchayer, Aimé (1867 – 1928) Industriel, il reprend, en 1898, la direction des usines Bouchayer – Viallet (fondées en 1870) à la mort de son père Joseph Bouchayer. Il spécialise l’entreprise dans la construction de conduites forcées et en fait le leader national dans ce domaine ; l’entreprise est soumise à rude épreuve pendant la première guerre mondiale, mais elle fait face et sort son épingle du jeu. Bouchayer, Hippolyte Frère de Aimé Bouchayer (directeur des entreprises Bouchayer – Viallet), Hippolyte s’allie avec Georges Bergès et crée l’usine Chedde en Haute Savoie qui se spécialise dans la production de produits de blanchiment pour la pâte à papier et les fibres. Il prend par la suite la tête de l’entreprise Péchiney. Chaix, Edmond Premier président de l’Association Générale de l’Automobile, Edmond Chaix est un passionné de sport automobile. Il prend la succession de Abel Ballif à la tête Annexe 14 49 du TCF. Son action à la tête de ces deux associations lui permet de lancer de grandes opérations en matière de développement automobile, notamment par le financement du goudronnage de certaines routes. Clément, Adolphe (1855 – 1928) D’origine modeste, Adolphe Clément s’oriente vers l’industrie du cycle, puis de l’automobile et des pneumatiques. Parti d’un simple garage de réparations de vélo, il fonde sa propre maison de fabrication automobile : les automobiles Clément. Pour se financer, il s’allie avec Alexandre Darracq (lui aussi constructeur automobile) et acquiert la concession pour la France des pneumatiques Dunlop (dont les actions s’envolent rapidement, résolvant ainsi les problèmes financiers de Clément). Il se spécialise dans la construction automobile dans les années 1900. Il conclut de nombreuses alliances financières pour certaines heureuses, pour d’autres moins, afin de pouvoir financer son entreprise. En 1903, il se tourne même vers l’outre Manche, en s’alliant avec le Comte de Shrewsbury and Talbot (président du British Automobile Commercial Syndicate), créant ainsi les automobiles Clément – Talbot et s’ouvrant le marché de l’automobile anglais. Dès lors, une usine de production automobile Clément – Talbot s’ouvre à l’ouest de Londres. Il meurt d’une crise cardiaque dans sa voiture en 1928. Colas des Francs, Lionel (1853 – 1934) Aristocrate issu d’une vieille famille française anoblie au Moyen Age, Lionel Colas des Francs entre à 20 ans dans l’armée. Il devient Chevalier de la Légion d’honneur en 1897. Très tôt, il s’intéresse à l’automobile et à la photographie et devenant rapidement propriétaire d’une automobile. A la fin du XIXe siècle, Lionel Colas des Francs sillonne la France avec son automobile et son appareil photos et fait la promotion des paysages alpins. Son amitié avec Emile Duchemin, le Dr Gröll et Joseph Magnat lui ouvre rapidement les portes de l’ACD. Collin – Dufresne, Marcel Mégissier grenoblois, Marcel Collin – Dufresne est également un touche à tout très inventif. Il se spécialise notamment dans la construction de roulottes automobiles qu’il vend sous son propre nom. Annexe 14 50 Cotte, Paul (1871 – ????) Comptable de la Manufacture Française de Bicyclettes L. Debon, Paul Cotte est un redoutable coureur cycliste qui se distingue par son palmarès impressionnant dans les courses de Isère, notamment au guidon de vélos Magnat, puis Magnat & Debon. En 1903, il devient pilote motocycliste de la marque grenobloise avant de devenir directeur du magasin à la manufacture Magnat & Debon, en 1906. Debon, Louis (1862 – ????) Après avoir passé son certificat de mécanicien à l’école Vaucanson (avant 1890), Louis Debon devient contremaître chez Jay, Jallifier & Cie (constructeurs mécaniques qui créent dans leurs locaux « L’Auto Garage », 20 rue Génissieu, dépositaire des marques Darracq et De Dietrich). Très proche de Louis Renault (qui lui propose d’intégrer son bureau d’étude à Billancourt), Louis Debon se fait remarquer par ses réelles qualités d’ingénieur. En 1892, Louis Debon fait construire une usine (financée par ses fonds) sur un terrain appartenant à Joseph Magnat au 69 et 71 cours Saint André. Cette usine bâtie sur 2 étages plus des combles est marquée par la modernité et une organisation nouvelle où atelier et magasin sont dans les mêmes locaux (les ateliers à l’étage et le magasin au rez-de-chaussée). En 1893, l’association avec Joseph Magnat devient effective mais ne prend pas encore le nom de Magnat & Debon. En effet, au 71 cours St André se trouvent les Cycles Magnat, et au 69, le garage Magnat & Debon. Deux ans après, la manufacture de Louis Debon devient la Manufacture Française de Bicyclettes, produisant et vendant des cycles et auto Magnat. Au début du siècle, Louis Debon développe le garage automobile en louant des voitures et des cars alpins et en proposant des excursions touristiques dans les massifs alpins. Presque tous les véhicules qu’il prépare se font remarquer dans les courses et compétitions automobiles (course de côte de Laffrey) y compris les poids lourds et les cars alpins (Coupe du Président de la République).
Extrait de l’original des statuts de l’ACD (1900) |