Qu’est‐ce qu’un trouble bipolaire ?
Les troubles bipolaires, anciennement appelés psychoses maniaco‐dépressives, figurent parmi les plus anciens troubles psychiatriques décrits.
Cette pathologie est caractérisée par la récurrence de périodes symptomatiques souvent sévères (épisode dépressif majeur, manie, hypomanie, état mixte) entrecoupées de périodes inter‐critiques plus ou moins longues appelées « euthymie » ou « normothymie ». Il s’agit d’une maladie mentale grave, courante, complexe et récurrente avec des troubles progressifs des fonctions sociales et cognitives associés à des comorbidités.
En effet, les sujets atteints présentent au cours des phases de stabilité de l’humeur des altérations persistantes, notamment : du sommeil ; des rythmes circadiens ; des systèmes immuno‐inflammatoires, métaboliques, neuro‐développementales et neurophysiologiques.
Ces dysfonctionnements semblent augmenter proportionnellement à la durée de la maladie. Actuellement, le DSM‐5 distingue trois types de troubles bipolaires. Le trouble bipolaire de type I caractérisé par la survenue d’au moins un épisode maniaque associé ou non à des épisodes dépressifs caractérisés (American Psychiatric Association, 2013).
Il existe également le trouble bipolaire de type II qui est défini par la survenue d’au moins un épisode hypomaniaque et d’au moins un épisode dépressif caractérisé, le distinguant ainsi du trouble dépressif majeur (ou anciennement trouble unipolaire).
Le trouble bipolaire non spécifié (Trouble bipolaire NOS) renvoie quant à lui aux situations dans lesquelles des symptômes associés aux troubles bipolaires sont bien présents mais en nombre insuffisant pour parler de trouble bipolaire à part entière.
En termes de définition propre, la caractéristique essentielle pour poser le diagnostic de trouble bipolaire est la présence d’une phase maniaque. Il est important de retenir qu’il s’agit d’une rupture totale avec un état antérieur.
Les facteurs étiologiques des troubles bipolaires
Nous allons dans un premier temps explorer les facteurs génétiques impliqués. Selon Song et al. (2015), l’héritabilité́ des troubles bipolaires serait de 58%7.
Ces auteurs ont montré́ que plus les liens familiaux étaient éloignés, et plus le risque se réduisait. Pour Bienvenu et al. (2011), l’héritabilité serait en moyenne de 85% .
A travers une étude réalisée sur les jumeaux, Smoller et Finn (2003) ont quant à eux montré qu’un individu qui a un jumeau monozygote présentant un diagnostic de troubles bipolaires a 40 à 60% de risque d’être lui‐même atteint, contre seulement 4 à 9% des cas chez les jumeaux dizygotes . Certaines études se sont quant à elles attachées à évaluer la présence de troubles bipolaires chez des jumeaux ayant été adoptés, et cela dans le but d’isoler la part génétique de la part environnementale. Sur les quatre études identifiées par Goodwin et Jamison (2007) sur le sujet, trois confirment l’hypothèse d’une vulnérabilité génétique . Enfin, une étude d’association pangénomique a comparé les variants d’individus vivant avec des troubles psychiques à ceux d’individus témoins et a démontré que la part d’héritabilité dans les troubles bipolaires était importante. Toutefois, l’héritabilité des troubles bipolaires serait plus faible qu’annoncée par les études conduites auprès des familles/jumeaux.
Ainsi, en l’état actuel des connaissances, les troubles bipolaires semblent influencés par des facteurs génétiques mais ces derniers ne permettent pas d’expliquer, à eux‐seuls, l’émergence de ces troubles. Par la suite des facteurs environnementaux peuvent également expliquer l’étiologie des troubles bipolaires. Bortolato et al. (2017) ont analysé six méta‐analyses ayant étudié le rôle des facteurs environnementaux dans les troubles bipolaires. Il apparait que la présence d’un syndrome du côlon irritable est le facteur de risque des troubles bipolaires le plus convaincant, suivi des difficultés vécues dans l’enfance, l’asthme et l’obésité.
L’exposition à des lésions cérébrales ainsi qu’à l’infection du Toxomoplasma Gondii en période périnatale semblent également constituer des facteurs de risque dans le développement des troubles bipolaires mais avec un niveau de preuve faible.
Enfin, et contrairement à ce qui est proposé par Vieta et al. (2018), l’exposition aux complications obstétriques n’est pas identifiée comme un facteur de risque.
Enfin, des facteurs épigénétiques apparaissent aussi impliqués dans les troubles bipolaires . Ces derniers renvoient à des modifications de l’expression d’un gène durant le développement, sans altération de la séquence nucléotide .
En d’autres termes, cela signifie que l’on peut retrouver chez des jumeaux monozygotes des variabilités de phénotypes pour un même trouble psychique qui ne sont complètement explicables ni par les facteurs génétiques, ni par les facteurs environnementaux.
Dans le contexte de l’émergence des troubles bipolaires, ce seraient plus spécifiquement les processus de maturation et de myélinisation qui seraient en jeu.
Avec nos données actuelles, nous pouvons conclure que les troubles bipolaires ont une étiologie complexe et multifactorielle, à la jonction de facteurs génétiques et environnementaux.
De plus, les connaissances sur le sujet sont en constante évolution. Des études récentes mettent en évidence que le système immunitaire et inflammatoire des individus pourrait également participer à l’émergence des troubles bipolaires. Cette relative incertitude peut venir entraver la compréhension et l’acceptation des troubles.
L’observance thérapeutique dans le trouble bipolaire
Les premières études visant à évaluer la qualité de l’observance thérapeutique à l’origine des rechutes, ont commencé à apparaitre au cours des années 1970 et 1980.
Rappelons que l’observance médicamenteuse est un enjeu thérapeutique majeur qui va influencer l’évolution de la maladie et conditionner de façon logique l’efficacité réelle du traitement. Il est important que le patient remarque l’efficacité perçue d’une médication lors de son instauration et le maintien de celle‐ci sur le long terme, tout en ayant le minimum d’effets secondaires et une tolérance correcte.
Il existe plusieurs définitions de l’observance thérapeutique. Si l’on se réfère à la définition qu’en donne le Larousse, l’observance est la « façon dont un patient suit, ou ne suit pas, les prescriptions médicales et coopère à son traitement. L’inobservance des traitements prescrits peut être la cause de leur inefficacité ou d’une rechute de la pathologie ».
Pour l’épidémiologiste Haynes (1979), il s’agit du « degré de respect ou d’écart entre les prescriptions et les pratiques du patient en termes de santé ». L’observance est ici envisagée comme un continuum de comportements dont les deux extrémités sont, d’un côté, le respect intégral des prescriptions médicales et, de l’autre, l’absence totale de coopération en passant par une multitude de comportements intermédiaires tels que des oublis ponctuels ou des ruptures thérapeutiques temporaires.
L’observance médicamenteuse est théoriquement à distinguer du concept d’adhésion thérapeutique qui renvoie quant à lui aux attitudes en termes d’inquiétude et de nécessité, aux représentations et croyances des individus qui vont conditionner l’acceptation plus ou moins explicite de la prise en charge proposée en fonction de ses facteurs psychosociaux, environnementaux et motivationnels.
Ainsi, l’observance serait la part mesurable et comportementale du processus tandis que l’adhésion ferait référence aux attitudes du patient (degré d’acceptation).
Facteurs de non observance dans le trouble bipolaire
Plusieurs facteurs semblent associés aux difficultés d’observance chez les patients bipolaires. En fonction des revues de la littérature, la classification des facteurs de risques diffère. Certains auteurs font la distinction entre les facteurs modifiables et non modifiables .
D’autres se placent du point de vue du patient en différenciant les facteurs pouvant être à l’origine d’une non‐observance non intentionnelle ou intentionnelle . Certains distinguent les freins à l’observance selon qu’ils soient internes ou externes aux patients c’est‐à‐dire propres au patient ou bien à son environnement.
Enfin, d’autres auteurs adoptent une classification se rapprochant de celle proposée par l’OMS en 2003 en séparant les facteurs liés aux patients, de ceux liés aux traitements, aux relations sociales et aux services de soins et professionnels de santé . Les facteurs de non observances sont ici regroupés en 4 catégories : les facteurs sociodémographiques, les facteurs liés aux traitements, les facteurs cliniques et ceux liées aux croyances.
Table des matières
INTRODUCTION
I. Qu’est‐ce qu’un trouble bipolaire ?
1. Définition
2. Données épidémiologiques
3. Les facteurs étiologiques des troubles bipolaires
4. Comorbidités et pronostics
5. Prise en charge thérapeutique
II. L’observance thérapeutique dans le trouble bipolaire
1. Définition
2. Compliance, adhésion et alliance thérapeutique
3. Facteurs de non observance dans le trouble bipolaire
III. Objectifs
MATERIELS ET METHODES
Concept de l’étude
Population
Variables étudiées
Analyse statistique
RESULTATS
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE