Déformation au contact de la faille normale

Déformation au contact de la faille normale

Introduction La zone d’endommagement au voisinage des failles peut être plus ou moins étendue (du cm à la dizaine de m), avec une déstructuration de l’encaissant progressive ou localisée. Le régime tectonique, l’intensité du rejet ainsi que la nature de l’encaissant sont autant de paramètres contrôlant l’ampleur de l’endommagement d’une zone de faille. La présence de fluides a également une grande importance sur l’évolution tectonique du système. La surpression de fluides est connue pour entraîner la fracturation, même pour un faible régime de contrainte. Dans ces zones faillées, des indices de l’évolution tectonique et géochimique s’enregistrent dans les minéralisations carbonatées (Boles et Grivetti, 2000; Labaume et al., 2004; Matsuda et al., 2004). Ces informations peuvent permettre de répondre à une question fondamentale qui est de savoir si ces failles fonctionnent comme des barrières ou comme des drains pour la circulation des fluides. Les failles non cimentées sont des zones perméables qui peuvent entrainer des connexions entre des réservoirs. Par ailleurs, d’un point de vue économique, ces zones sont également importantes car elles sont souvent associées à des minéralisations hydrothermales économiquement exploitables. Dans ce chapitre, une étude structurale, géochimique et pétrographique d’une zone de déformation située à la terminaison Sud-Est du fossé d’effondrement de Gondrecourt (Est du bassin de Paris) est présentée. Elle correspond à la zone d’endommagement du mur de la faille normale bordière Est du fossé de Gondrecourt. Des travaux d’excavation ont permis de réaliser une tranchée perpendiculaire à la faille de 10 m de longueur et 2 m environ de largeur sans atteindre la faille elle-même. La qualité et la fraicheur de l’affleurement permettent d’observer deux zones de brèchification associées à des remplissages calcitiques filoniens et une troisième zone uniquement filonienne. Ces cimentations calcitiques ont été étudiées pétrographiquement et géochimiquement. Chaque phase de remplissage a pu être identifiée et replacée dans une succession paragénétique afin d’élaborer un modèle pétrogénétique de la zone de déformation étudiée.

Description des zones de déformation A, B, C 

Dans cette tranchée, trois zones de minéralisation carbonatée ont été observées. La zone la plus à l’est est appelée zone A et correspond à une brèche recoupée par un filon. La zone intermédiaire, la zone B a sensiblement la même structure alors que la zone C la plus proche de la zone de faille à l’Ouest correspond à un système filonien. Entre ces zones de minéralisation, les litages du calcaire micritique sont inclinés dans différentes directions. Dans la zone A, la roche encaissante est intensément fracturée. Une brèche d’effondrement caractérisée par une distribution en mosaïque des clastes déplacés les uns par rapport aux autres avec une composante rotative est observée (Figure II.5). Plus à l’ouest, la brèche est recoupée par un filon décimétrique de calcite grisâtre. Puis, une bréchification hydraulique est observable et se caractérise par un éclatement de la roche encaissante avec peu de déplacement entre les fragments. Pour finir entre le filon de calcite et la brèche hydraulique ainsi qu’à l’ouest de celle-ci se trouve une zone constituée d’amas de cristaux millimétriques à centimétriques associés à des dépôts d’argile rouges.La zone de déformation B est similaire à la zone de déformation A. Dans cette zone, les brèches présentent clairement plusieurs épisodes successifs d’ouvertures formant des brèches d’effondrement associées aux brèches hydrauliques. Par endroit, à l’interface de ces zones d’ouverture se trouvent des géodes et des zones plus oxydées (Figure II.6). Il est également observable des filons de calcite ainsi que des amas de cristaux de calcite associés à des argile rouges. Très localement, un claste oolithique a été retrouvé dans les amas de cristaux de calcite.Dans la zone C se trouvent trois filons décimétriques de calcite grisâtre (Figure II.7). Les filons C1 et C2 sont contigus alors que le filon C3 est situé à 1m vers l’ouest des deux premiers. Ces trois filons sont discontinus et sont associés à des amas de cristaux de calcite millimétriques à centimétriques dans la partie supérieure. Cette zone présente une roche encaissante très déstructurée où il est difficile de retrouver la stratigraphie originelle. 

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Successions paragénétiques 

48 lames polies ont été analysées par microscopique optique et cathodoluminescence et par microscopie électronique à balayage (MEB). Ces observations ont permis d’identifier les phases majeures de remplissage et de procéder à un échantillonnage de ces phases afin de réaliser des analyses géochimiques.

  1. Microfracturation (C0) – Le calcaire micritique beige est recoupé par des joints stylolithiques et des microfractures. Cette roche encaissante est fortement luminescente en cathodoluminescence. L’espacement des joints stylolithiques est de quelques centimètres. Ils peuvent être localement connectés entre eux par des petites veines perpendiculaires aux joints et parallèles aux pics stylolithiques. L’organisation spatiale des joints stylolithiques et des microfractures suggère une contemporanéité de formation. Les joints stylolithiques parallèles à la stratification et les microfractures perpendiculaires sont formés par compaction due à la charge sédimentaire sus-jacente. (Figure II.8)
  2. Calcite 1 (C1) – Cette calcite présente des cristaux de taille de plusieurs centaines de micromètres. Deux stades de cimentation sont décelés (C1a et C1b). C1a est caractérisé par une teinte cathodoluminescente orange assez sombre de type sector zoning. C1b se caractérise par une teinte sombre surlignée par des stades de croissance. C1 recoupe les stylolithes et les microfractures (C0) (Figure II.8).
  3. Calcite 2 et 3 (C2 et C3) – Cette deuxième phase de calcite est visible dans un faciès bréchique (Figure II.9) comprenant des clastes anguleux ou sub-anguleux, de taille variant de millimétrique à pluricentimétrique. Ces clastes sont essentiellement monogéniques, de calcaire micritique cohésif à dissous. Le faciès bréchique est composé de deux types de cristaux (Figure II.9) : (1) Une série de cristaux calcitiques grisâtres granulaires millimétriques (C2), bordant les clastes et très riches en inclusions de micrite très luminescente, semblable aux teintes de la roche encaissante micritique et (2) une seconde génération de cristaux de calcite blanchâtres millimétriques à terminaison par endroit géodiques (C3). Les inclusions micritiques dans les cristaux de C2 peuvent former des bandes parallèles aux lignes de croissance. En cathodolomuniscence, les linéations de micrite présentent une luminescence vive, contrastant avec les zones sombres dépourvues d’inclusion. En microscopie il est observable que C2 enregistre une multitude de stades de cimentation/fracturation, à l’origine de multiples générations de remplissage pour C2 (Figure II.9). Ces multiples générations de fracturations/remplissages isolent des clastes en texture « mosaïque ». Les générations les plus tardives de C2 et la génération C3 sont moins luminescentes que les premières générations de C2.

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